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08/06/2023 | FRANCE | N°19/04368

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 08 juin 2023, 19/04368


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 08 JUIN 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 19/04368 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD6UF







Société GENERALI VIE





C/



S.A. MILLEIS BANQUE

[F] [R]













Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Agnès ERMENEUX



Me Delphine DURANCEAU



Me Christine DIOP

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 04 Mars 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/00955.





APPELANTE



SA GENERALI VIE

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX - CAUCHI ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 08 JUIN 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 19/04368 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD6UF

Société GENERALI VIE

C/

S.A. MILLEIS BANQUE

[F] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Agnès ERMENEUX

Me Delphine DURANCEAU

Me Christine DIOP

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 04 Mars 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 17/00955.

APPELANTE

SA GENERALI VIE

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX - CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Olivia RISPAL CHATELLE de la SCP LEMONNIER- DELION- GAYMARD - RISPAL, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

S.A. MILLEIS BANQUE,

anciennement dénommée BARCLAYS FRANCE,

venant aux droits de BARCLAYS BANK PLC,

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Delphine DURANCEAU de la SELARL DURANCEAU PARTENAIRES & ASSOCIÉS, avocat au barreau de GRASSE et ayant pour avocat plaidant Me Henri DE LANGLE de la SELARL HENRI DE LANGLE ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [F] [R]

né le 25 Août 1955 à [Localité 6] TUNISIE, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Christine DIOP, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Inès BONAFOS, Présidente, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023.

ARRÊT

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant offre de prêt en date du 5 juillet 2001 ayant fait l'objet d'un acte authentique le 3 août 2001 BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS ' BARFIMMO (aux droits de laquelle vient MILLEIS BANQUE) a consenti à Monsieur [F] [R] et Madame [H] [R] un prêt immobilier d'un montant de 82.322 Euros d'une durée de 240 mois, au taux de 6,20 % destiné à l'acquisition d'un appartement à usage de résidence principale sis [Adresse 3].

Préalablement, le 6 juillet 2001, la société GENERALI avait accepté l'adhésion de monsieur [F] [R] au contrat d'assurance « décès, invalidité et incapacité » souscrit par BARCLAYS BANK PLC « aux conditions normales sous réserve des exclusions générales de la Police ».

Suite à un arrêt de travail du mois de janvier 2010 à la fin du mois de janvier 2013 en raison d'une « myélite cervico dorsale aigüe », le 1er février 2013, monsieur [F] [R] était « classé dans la catégorie des invalides absolument incapables d'exercer quelque activité professionnelle que ce soit » par les Caisses Sociales de [Localité 5].

Le 23 décembre 2013, GENERALI a notifié à Monsieur [F] [R] un refus de prise en charge, son médecin-conseil ayant considéré que, lors de son adhésion au contrat d'assurance, monsieur [F] [R] n'avait pas déclaré son réel état de santé.

Le 3 décembre 2015, la banque mettait en demeure Monsieur et Madame [R] de payer la somme de 2.641,11 euros au titre de l'arriéré d'échéances impayées au mois de décembre 2015, leur précisant qu'à défaut de règlement dans un délai de 15 jours, la résiliation du prêt interviendrait de plein droit.

Le 18 décembre 2015 BARCLAYS BANK PLC a prononcé la déchéance du terme du prêt pour défaut de paiement.

Parallèlement le Juge de l'Exécution près le Tribunal de Grande Instance de NICE a, compte tenu de l'instance pendante devant le Tribunal de Grande Instance de NICE, ordonné un sursis sur les poursuites mises en 'uvre par l'organisme prêteur.

Par jugement du 4 mars 2019, le tribunal de grande instance de Nice a :

- Constaté que BARCLAYS BANK PLC vient aux droits de BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS,

- Mis hors de cause la compagnie GENERALI SA telle qu'assignée et a reçu en son intervention volontaire la SA GENERALI VIE en sa qualité d'assureur du contrat d'assurance CIM 7621,

- Débouté Monsieur [R] de sa demande tendant au constat de la prescription de l'action en nullité du contrat d'assurance,

- Débouté la SA GENERALI VIE de l'ensemble de ses demandes,

- Condamné la SA GENERALI VIE à rembourser à monsieur [R] les sommes qu'il a réglées à la BARCLAYS BANK PLC, anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, en lieu et place de GENERALI du 15 mai 2013 jusqu'au 15 mars 2015, soit la somme totale de 14.694,70 € (638,90 € X 23 mois), ainsi que la somme de 5.111,20 € qu'il a versée le 2 mars 2016 pour tenter d'apurer sa dette, soit au total la somme de 19.805,90 €,

- Condamné la SA GENERALI VIE à garantir le paiement de toutes sommes réclamées à monsieur [R] par la BARCLAYS BANK PLC, anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, au titre de l'exécution du crédit immobilier du 5 juillet 2001 et dit qu'elle devra acquitter ces sommes directement à l'établissement bancaire,

- Condamné la SA GENERALI VIE à payer à Monsieur [R] la somme de 6.000 € en réparation de son préjudice moral,

- Condamné la SA GENERALI VIE à payer à Monsieur [R] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Débouté la BARCLAYS BANK PLC de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- Condamné la SA GENERALI VIE aux dépens.

Par déclaration au greffe du 15 mars 2019, la S.A. GENERALI VIE a interjeté appel d'un jugement rendu le 4 mars 2019 par le Tribunal de Grande Instance de NICE dont elle sollicite la réformation en ce que la décision entreprise :

- déboute la S.A. GENERALI VIE de l'ensemble de ses demandes,

- condamne la S.A. GENERALI VIE à rembourser à Monsieur [R] les sommes qu'il a réglées à BARCLAYS BANK PLC, anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, en lieu et place de GENERALI du 15 mai 2013 jusqu'au 15 mars 2015, soit la somme totale de 14 694,70 euros (638,90 euros x 23 mois), ainsi que la somme de 5 111,20 euros qu'il a versée le 2 mars 2016 pour tenter d'apurer sa dette, soit au total la somme de 19 805,90 euros,

- condamne la S.A. GENERALI VIE à garantir le paiement de toutes sommes réclamées à Monsieur [R] par la BARCLAYS BANK PLC, anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, au titre de l'exécution du crédit immobilier du 5 juillet 2001 et dit qu'elle devra acquitter ces sommes directement à l'établissement bancaire,

- condamne la S.A. GENERALI VIE à payer à Monsieur [R] la somme de 6 000 euros en réparation de son préjudice moral,

- condamne la S.A. GENERALI VIE à payer à Monsieur [R] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du C.P.C.,

- ordonne l'exécution provisoire du jugement,

- condamne la S.A. GENERALIE VIE aux dépens.

Par conclusions notifiées par RPVA le 07 août 2019, monsieur [R] demande à la Cour :

Vu le jugement du TPI de Monaco en date du 15 décembre 2017,

Vu les articles L 113-8, L 113-9, L 114-1 al 1 et L 114-3 du code des assurances,

Vu les articles 1134, 1184 al. 2 et 1382 anciens du code civil,

Vu l'article 146 al 2 du code de procédure civile,

CONFIRMER le jugement entrepris en ce que le TGI de Nice a :

- Constaté que la BARCLAYS BANK PLC vient aux droits de la BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS

- Mis hors de cause la compagnie GENERALI SA telle qu'assignée et reçu en son intervention volontaire la SA GENERALI VIE en qualité d'assureur du contrat d'assurance CIM 7621

- Débouté la SA GENERALI VIE de l'ensemble de ses demandes

- Condamné la SA GENERALI VIE à rembourser à Monsieur [R] les sommes qu'il a réglées à la BARCLAYS BANK PLC anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, en lieu et place de GENERALI du 15 mai 2013 jusqu'au 15 mars 2015, soit la somme totale de 14.694,70 € (638,90 € x 23 mois), ainsi que la somme de 5.111,20 € qu'il a versée le 2 mars 2016 pour tenter d'apurer sa dette, soit au total la somme de 19.805,90 €

- Condamné la SA GENERALI VIE à garantir le paiement de toutes sommes réclamées à Monsieur [R] par la BARCLAYS BANK PLC, anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, au titre de l'exécution du crédit immobilier du 5 juillet 2001 et dit qu'elle devra acquitter ces sommes directement à l'établissement bancaire.

- Condamné la SA GENERALI VIE à payer à Monsieur [R] la somme de 6.000 € en réparation de son préjudice moral

- Condamné la SA GENERALI VIE à payer à Monsieur [R] la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du cpc

- Débouté la BARCLAYS BANK PLC de sa demande sur le fondement de l'article 700 du cpc

- Ordonné l'exécution provisoire du jugement

- Condamné la SA GENERALI VIE aux dépens.

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [R] de sa demande tendant au constat de la prescription de l'action en nullité du contrat d'assurance ;

Statuant à nouveau sur ce point :

DIRE ET JUGER que le délai de deux ans prescrit par l'article 114-1 du code des assurances est acquis et que la SA GENERALI VIE ne peut plus ni par voie d'action ni par voie d'exception solliciter la nullité du contrat d'assurance ;

DEBOUTER la SA GENERALI VIE de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

CONDAMNER la SA GENERALI VIE à payer à Monsieur [R] la somme de 3.500 € pour les frais irrépétibles d'appel prévus à l'article 700 du cpc ;

CONDAMNER la SA GENERALI VIE aux entiers dépens.

Il fait valoir que l'action en nullité du contrat d'assurance de la SA GENERALI VIE est prescrite en application de l'article L114-1 du code des assurances alors que l'assureur était de son propre aveu en possession du rapport du docteur [G] en date du 04 avril 2002 évoqué au soutien de son action en nullité, qu'un contrat ne peut être annulé par voie d'exception lorsqu'il a reçu un commencement d'exécution.

Il expose sur le fond que la SA GENERALI ne démontre pas que les conditions cumulatives requises par les textes de références pour prononcer la nullité du contrat sont réunies alors qu'il lui appartient de rapporter la preuve de la mauvaise foi de l'assuré, de fausses déclarations intentionnelles et que l'objet du risque a été changé ou que l'opinion pour l'assureur en a été modifié par l'effet de l'absence ou de l'inexactitude de la déclaration de risque.

S'agissant de la demande d'expertise, il sollicite la confirmation de la décision du premier juge ayant rejeté cette demande.

Monsieur [R] fait valoir à l'appui de sa demande de dommages intérêts que c'est lorsqu'il a été déclaré définitivement invalide que l'assureur a cessé d'exécuter le contrat arguant de sa nullité sans communiquer à l'intéressé le rapport médical non contradictoire de son médecin conseil en violation des dispositions de l'article 1134 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par RPVA le 29 octobre 2019, la SA GENERALI VIE demande à la Cour :

INFIRMER le jugement du 04/03/2019 du tribunal de grande instance de Nice en ce qu'il :

Déboute-la SA GENERALI VIE de l'ensemble de ses demandes

La condamne la S.A. GENERALI VIE à rembourser à Monsieur [R] les sommes qu'il a réglées à BARCLAYS BANK PLC, anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, en lieu et place de GENERALI du 15 mai 2013 jusqu'au 15 mars 2015, soit la somme totale de 14 694,70 euros (638,90 euros x 23 mois), ainsi que la somme de 5 111,20 euros qu'il a versée le 2 mars 2016 pour tenter d'apurer sa dette, soit au total la somme de 19 805,90 euros

La condamne à garantir le paiement de toutes sommes réclamées à Monsieur [R] par la BARCLAYS BANK PLC, anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS, au titre de l'exécution du crédit immobilier du 5 juillet 2001 et dit qu'elle devra acquitter ces sommes directement à l'établissement bancaire,

La condamne à payer à Monsieur [R] la somme de 6.000 € en réparation de son préjudice moral

La condamne à payer à monsieur [R] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du C.P.C.,

- ordonne l'exécution provisoire du jugement,

La condamne aux dépens.

STATUANT A NOUVEAU

A titre principal

Vu les articles L113-2 et L113-8 du code des assurances

Débouter monsieur [R] de l'intégralité de ses demandes en raison des réticences et fausses déclarations intentionnelles réalisées lors de l'adhésion à l'assurance,

A titre subsidiaire

Vu l'inopposabilité à l'assureur des décisions émanant des organismes sociaux,

Vu l'absence de fixation en l'état des possibles taux d'incapacité fonctionnelle et professionnelle

Ordonner une expertise.

En tout état de cause

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté monsieur [R] de sa demande tendant au constat de la prescription de l'action en nullité du contrat d'assurance

Débouter monsieur [R] de son appel incident

Débouter la BARCLAYS BANK PLC de sa demande de condamnation au paiement de la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il la condamne à payer à monsieur [R] la somme de 6 000 euros en réparation de son préjudice moral,

Condamner monsieur [R] au paiement d'une somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Le condamner aux dépens.

Sur la recevabilité de l'action en nullité du contrat d'assurance, la SA GENERALI conclut à la confirmation du jugement entrepris.

Sur le fond elle fait valoir que l'article L113-2 du code des assurances fait obligation au postulant de répondre exactement aux questions posées par l'assureur lors de la souscription de l'assurance , que l'article L113-8 du même code sanctionne la réticence ou fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré par la nullité du contrat d'assurance alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre, que lors de la demande d'adhésion le 30 juin 2001 monsieur [R] a commis à la fois des réticences et des fausses déclarations intentionnelles au sens des dispositions précitées.

Il n'a pas déclaré :

- un accident du travail en date du 31 mars 1995 ayant occasionné principalement une fracture du plateau tibial nécessitant une hospitalisation de 10 jours, une incapacité totale temporaire jusqu'au 31 mai 1995, une incapacité partielle permanente.

-un accident du travail en date du 1er janvier 1998 ayant occasionné principalement un traumatisme des deux genoux et un arrêt de travail de 6 semaines.

Alors que contractuellement est considéré comme grave l'accident ayant provoqué soit des arrêts de travail, soit des traitements, soit les deux d'une durée supérieure à 30 jours.

Ces défauts de déclaration ont eu pour conséquence la diminution de l'opinion du risque pour l'assureur qui en connaissance de cause aurait demandé un examen médical de l'intéressé, qu'un tel examen lui aurait permis d'apprécier différemment ou de refuser le risque alors qu'outre les accidents précités, monsieur [R] avait d'autres antécédents et spécialement un accident de deux roues en 1968 et une ménistectomie externe du genou droit.

A titre subsidiaire, la SA GENERALI VIE demande la mise en 'uvre d'une expertise, le handicap fonctionnel de monsieur [R] semblant en lien avec l'état antérieur.

Enfin , la condamnation de la SA GENERALI VIE à des dommages intérêts est mal fondée en l'absence de démonstration d'une faute de l'assureur de nature à révéler un refus abusif de garantie.

Par conclusions notifiées par RPVA le 23 avril 2020, la société MILLEIS BANQUE demande à la Cour de :

- Recevoir MILLEIS BANQUE en son intervention volontaire ;

- Constater sur sa déclaration que, en vertu du jugement déféré investi de l'exécution provisoire, MILLEIS BANQUE a reçu de GENERALI pour apurement partiel de sa créance contre Monsieur et Madame [R], la somme de 44.429,76 € ; qu'elle s'engage à rembourser cette somme à GENERALI dans l'hypothèse d'une infirmation du jugement prononcé le 4 mars 2019 ; qu'elle garantit BARCLAYS BANK PLC de toute réclamation qui serait fondée, dans ce cas, sur la restitution de ces sommes ;

- Dire que BARCLAYS BANK PLC est hors de la cause, l'ensemble des droits et obligations né du contrat de prêt objet du litige ayant été transféré à MILLEIS BANQUE qui le reconnaît.

CONDAMNER toute partie succombante à l'instance au paiement des sommes dues par monsieur et madame [R] à MILLEIS BANQUE.

CONDAMNER toute partie succombante à payer à MILLEIS BANQUE la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir que la problématique liée à la prise en charge du remboursement du prêt relève d'une obligation de la Compagnie d'assurance et non de l'établissement financier qui a consenti le prêt et qui, en conséquence, est créancier de l'emprunteur, que venant aux droits et obligations de BARCLAYS BANK PLC qui n'est partie ni à la demande d'adhésion ni au questionnaire de santé renseigné en son temps par Monsieur [F] [R], elle s'en rapporte sur le fond.

Par ordonnance du 04 juin 2020 le Conseiller de la mise en état a déclaré parfait le désistement de la société BARCLAYS BANK PLC de l'incident au visa de l'article 526 du code de procédure civile formé le 8 août 2019.

L'affaire a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 2 février 2023 et fixée à l'audience du 15 mars 2023.

MOTIVATION

A titre liminaire il y a lieu de dire recevable les conclusions d'intervention volontaire de la MILLEIS BANQUE.

Toutefois il n'entre pas dans la compétence de la juridiction de lui donner acte des engagements qu'elle entend prendre à l'égard d'une partie au litige.

Sur la recevabilité de l'exception de nullité du contrat d'assurances de la SA GENERALI VIE

Monsieur [R] conteste le jugement de première instance en ce qu'il ne fait pas application de la prescription de l'article L114-1 du code des assurances s'agissant de la nullité du contrat invoquée par l'assureur.

L'article L114-1 du code des assurances dans sa version applicable au contrat liant les parties dispose que toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.

Toutefois, ce délai ne court en cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, que du jour où l'assureur en a eu connaissance ;

Monsieur [R] indique que l'assureur a connaissance de son état de santé depuis le rapport du docteur [G] en date du 04 avril 2002.

Saisi de ce rapport par courrier du 02 mars 2015 dont elle a accusé réception le 06mars 2015, la SA GENERALI a eu connaissance à cette date des éléments médicaux dont elle estime qu'ils révèlent la réticence et la fausse déclaration qu'elle invoque à l'appui de son refus de garantie.

Préalablement l'assureur avait déjà eu la révélation de la fausse déclaration dont elle se prévaut lors de la communication du rapport du docteur [P] du 27 septembre 2013.

L'assureur avait un délai de deux ans pour agir en nullité du contrat d'assurance pour réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru à compter de la réception du rapport du docteur [P] dont elle ne justifie pas.

On peut relever que la cessation de la prise en charge ayant été notifiée à monsieur [R] le 23/12/2013, la prescription était acquise de manière certaine le 23 décembre 2015.

Par voie de conséquence l'action en nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration est prescrite contrairement à ce qui est indiqué dans le dispositif du jugement de première instance

Toutefois, la prescription biennale n'atteint que l'action dérivant du contrat d'assurance et ne peut être étendue au moyen de défense opposé à une telle action (Cour de cassation, 3e chambre civile, 2 Juin 2015 ' n° 13-17.513).

C'est en ce sens que le premier juge a estimé que l'assureur est recevable à se prévaloir de la nullité du contrat d'assurance.

Monsieur [R] fait valoir que le commencement d'exécution du contrat par l'assureur s'oppose à l'exception de nullité postérieurement à l'acquisition du délai de prescription de l'action.

Dans un arrêt du 19 Octobre 2006 - n° 05-17.599 - la cour de cassation a jugé que le juge du fond ne peut rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription avant de prononcer la nullité du contrat pour fausse déclaration du souscripteur et de le condamner à rembourser les sommes perçues alors que l'assureur a volontairement exécuté le contrat avant que l'assuré introduise une action en paiement d'indemnités prévues par le contrat.

En l'espèce, le commencement d'exécution étant antérieur à la connaissance par l'assureur des causes de nullité dont il entend faire état, ne peut valoir renonciation à se prévaloir de l'exception de nullité.

Par voie de conséquence, l'exception de nullité du contrat d'assurance soulevée par l'assureur n'est pas irrecevable.

Sur la nullité du contrat d'assurance

L'article 113-8 du code des assurances dispose qu'indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve des dispositions de l'article L. 132-26, le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre.

L'article 118-9 du code des assurances dispose que l'omission ou la déclaration inexacte de la part de l'assuré dont la mauvaise foi n'est pas établie n'entraîne pas la nullité de l'assurance.

Si elle est constatée avant tout sinistre, l'assureur a le droit soit de maintenir le contrat, moyennant une augmentation de prime acceptée par l'assuré, soit de résilier le contrat dix jours après notification adressée à l'assuré par lettre recommandée, en restituant la portion de la prime payée pour le temps où l'assurance ne court plus.

Dans le cas où la constatation n'a lieu qu'après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues, si les risques avaient été complètement et exactement déclarés.

En l'espèce, l'assureur produit un formulaire d'adhésion en date du 30/06/2001 auquel est joint un formulaire de déclaration de risque que monsieur [R] a renseigné le même jour.

La question n°4 est formulée ainsi :

Avez-vous été victime d'accidents graves

Une (*) renvoie à la mention suivante :

« La gravité d'une maladie ou d'un accident s'apprécie comme ayant provoqué soit des arrêts de travail soit des traitements soit les deux d'une durée supérieure à 30 jours ».

Monsieur [R] a répondu par la négative à cette question.

Le rapport du docteur [G] décrit de manière détaillée et circonstanciée l'historique des antécédents médicaux de monsieur [R] puisqu'il a pour objet une discussion sur le taux d'incapacité permanente dont est atteint monsieur [R] du fait d'un accident du travail le 31/03/1995 ayant occasionné une fracture du bord externe du plateau tibial, blessure ayant justifié une hospitalisation de 10 jours, une ITT jusqu'au 31/05/1995 et une IPP de 5% selon ce praticien.

Est également évoqué dans ce cadre un accident du travail le 01/01/1998 ayant occasionné un traumatisme des deux genoux et une ITT jusqu'au 12/02/1998, un accident de deux roues en 1968 en Tunisie, une méniscectomie externe du genou droit pratiquée en 1990.

Ce rapport mentionne que les troubles constatés le 06/11/2001 ne sont pas en lien avec les accidents du travail mais avec l'évolution d'une arthrosique du genou droit avec atteinte femoro-patellaire.

Ce rapport atteste que monsieur [R] a omis de déclarer un accident de la circulation en 1968, les accidents du travail du 31/03/1995 et du 01/01/1998 qui ont donné lieu à des arrêts de travail supérieur à 30 jours et qui ont été relevés par le médecin conseil de l'assureur dans son rapport du 27 septembre 2013.

C'est à juste titre que le premier juge retient le caractère non intentionnel de l'omission de déclaration de l'accident de deux roues survenu en 1968 en Tunisie soit plus de 30 ans avant la sosucription du contrat et alors qu'il était âgé de 13 ans et n'a pas fait obstacle à sa carrière professionnelle.

En ce qui concerne les accidents du travail ils sont intervenus le 31/03/1995 et le 01/01/1998.

Le premier juge a retenu que ces accidents traumatiques ne correspondant pas à des accidents graves au sens commun du terme, l'omission de leur déclaration ne traduit pas une volonté de dissimuler un évènement dans l'intention de tromper l'assureur.

S'il est juste, ce raisonnement ne prend pas en considération le fait que le formulaire de déclaration de risque indique expressément d'une part en introduction l'obligation de répondre exactement aux questions précises posées par l'assureur dans le formulaire de déclaration du risque prévue par l'article L113-2 du code des assurances et la sanction de la nullité du contrat d'assurance en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de l'assuré et d'autre part , juste au-dessus de l'emplacement dédié à la signature , que la gravité d'une maladie ou d'un accident s'apprécie comme ayant provoqué soit des arrêts de travail soit des traitements soit les deux d'une durée supérieure à 30 jours, critères précis et de compréhension aisée.

En omettant de déclarer à l'assureur les accidents du travail ayant entraîné des arrêts de travail supérieurs à 30 jours, dont il a été victime en 1995 et 1998 soit respectivement 6 ans et 3 ans avant la souscription du contrat et alors qu'il était informé des conséquences de cette omission monsieur [R] n'a pas répondu sincèrement à la question précise « Avez-vous été victime d'accidents graves sachant que la gravité d'une maladie ou d'un accident s'apprécie comme ayant provoqué soit des arrêts de travail soit des traitements soit les deux d'une durée supérieure à 30 jours » ;

Il a ainsi répondu sciemment de manière inexacte à la question précise posée par l'assureur .

Cette fausse déclaration a modifié l'opinion de l'assureur sur le risque dans la mesure où il n'a pu prendre en considération l'état de santé réel de monsieur [R] lors de la souscription du contrat d'assurance, y compris pour faire procéder à une visite médicale et un questionnement plus approfondis d'usage lorsque le questionnaire de santé mentionne des accidents de la vie de nature à révéler des informations utiles à la détermination du risque, comme en l'espèce les séquelles des accidents des membres inférieurs en rapport avec l'état antérieur si l'on se réfère au rapport du docteur [P] et du docteur [G].

Il en résulte que le jugement de première instance doit être infirmé dans toutes ses dispositions déférées à la Cour et que la demande d'expertise est sans objet.

Sur les autres demandes :

Partie perdante monsieur [R] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition au greffe :

Dit recevable l'intervention de la SA MILLEIS BANQUE anciennement dénommée BARCLAYS France SA venant aux droits de BARLAYS BANK PLC.

Infirme le jugement du tribunal de grande instance d'Aix en Provence du 04 mars 2019 en toutes ses dispositions déférées à la Cour ;

Statuant à nouveau :

Dit recevable l'exception de nullité du contrat d'assurance soulevée par la SA GENERALI VIE ;

Dit nul le contrat d'assurance décès, invalidité et incapacité souscrit par monsieur [F] [R] et accepté par la FEDERATION CONTINENTALE actuellement SA GENERALI VIE le 06 juillet 2001 pour garantir une offre de prêt immobilier en date du 05/07/2001 de la BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS actuellement SA MILLEIS BANQUE.

En conséquence,

Dit n'y avoir lieu à expertise.

Déboute monsieur [F] [R] de sa demande de condamnation de la SA GENERALI VIE à lui payer la somme de 19.805,90 euros en remboursement des sommes versées à la BARCLAYS BANK PLC successeur de la BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS et actuellement la SA MILLEIS BANQUE ;

Déboute monsieur [F] [R] de sa demande de condamnation de la SA GENERALI VIE à garantir le paiement de toutes sommes réclamées par la BARCLAYS BANK PLC anciennement BARCLAYS FINANCEMENTS IMMOBILIERS et actuellement la SA MILLEIS BANQUE au titre de l'exécution du crédit immobilier souscrit le 05 juillet 2001 ;

Déboute monsieur [F] [R] de sa demande de condamnation de la SA GENERALI VIE à lui payer la somme de 6000 euros à titre de dommages intérêts.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne monsieur [F] [R] aux dépens de première instance et d'appel.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 19/04368
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;19.04368 ?
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