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26/05/2023 | FRANCE | N°19/08040

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 26 mai 2023, 19/08040


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 26 MAI 2023



N°2023/ 94





RG 19/08040

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEJC4







[U] [M]





C/



[G] [K]

Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 6] LLE











Copie exécutoire délivrée

le 26 Mai 2023 à :



- Me Julien BERNARD, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE



V149







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 30 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F 18/02129.







APPELANTE



Madame [U] [M], demeurant Chez M...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 26 MAI 2023

N°2023/ 94

RG 19/08040

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEJC4

[U] [M]

C/

[G] [K]

Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 6] LLE

Copie exécutoire délivrée

le 26 Mai 2023 à :

- Me Julien BERNARD, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V149

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 30 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F 18/02129.

APPELANTE

Madame [U] [M], demeurant Chez Monsieur [J] [B], - [Adresse 3]

représentée par Me Julien BERNARD, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Maître [G] [K], Liquidateur judiciaire de la société LE JARDIN DES CIGALONS, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 6], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Selon contrat de travail à durée indéterminée à effet du 1er juillet 2016, la société «Le jardin des cigalons» dirigée par M. [L] [H], exploitant un hôtel restaurant [Adresse 2], a embauché Mme [U] [M], en qualité de chef de rang niveau 1 échelon 3 de la convention collective nationale HCR, au salaire de base mensuel de 1 474,23 euros pour 151,67 heures de travail.

La salariée a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Marseille en paiement de salaires, laquelle a rendu une ordonnance le 30 août 2018, condamnant la société à lui payer la somme provisionnelle de 41 488,92 euros pour la période du 01/07/2016 au 30/06/2018.

Par lettre recommandée du 12 octobre 2018, la salariée a pris acte de la rupture du contrat de travail, au motif notamment de l'absence de paiement de ses salaires.

Le 15 octobre 2018, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille au fond.

Par jugement du 17 octobre 2018, le tribunal de commerce de Marseille a prononcé la liquidation judiciaire de la société et désigné Me [G] [K] en qualité de liquidateur.

Selon jugement du 30 avril 2019, le conseil de prud'hommes a débouté Mme [M] de l'ensemble de ses prétentions et l'a condamnée aux dépens.

Le conseil de Mme [M] a interjeté appel par déclaration du 16 mai 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 15 février 2023, Mme [M] demande à la cour de :

« À titre principal,

Vu les dispositions de l'article R. 1471-2 du code du travail,

Vu les dispositions de l'article 22-1 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative, modifié par la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019,

Désigner un médiateur afin d'entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour permettre de trouver une solution au litige qui les oppose,

Les enjoindre de rencontrer un médiateur qui les informe sur l'objet et le déroulement d'une mesure de médiation,

À titre subsidiaire,

Recevoir Madame [U] [M] en son appel et le déclarer recevable et bien fondé,

Réformer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Marseille le 30 avril 2019,

Et, Statuant à nouveau,

Juger que le contrat de travail dont bénéficiait Madame [U] [M] a été rompu par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 12 octobre 2018 expédiée par la salariée à son employeur, par laquelle la salariée a pris acte de sa rupture aux torts et griefs de ce dernier,

Juger que les motifs invoqués par Madame [U] [M] sont légitimes,

Requalifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail qui a lié Madame [U] [M] à la société LE JARDIN DES CIGALONS en un licenciement abusif,

Ce faisant, Fixer les créances de Madame [U] [M] au passif de la société LE JARDIN DES CIGALONS aux sommes suivantes :

1°) la somme brute de 48.159,18 € à titre de rappel sur salaires et accessoires dus à la salariée pour la période du 01/07/2016 au 12/10/2018, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

2°) la somme brute de 4.815,92 € à titre de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

3°) la somme nette de 8.000,00 € à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et préjudice moral et financier du fait de l'absence de salaire, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

4°) la somme brute de 78.478,40 € à titre de rappel sur heures supplémentaires dues à la salariée pour la période du 01/07/2016 au 30/06/2018, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

5°) la somme brute de 7.847,84 € à titre de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

6°) la somme brute de 39.239,20 € à titre de dommages-intérêts compensatoires des repos compensateurs non pris du fait de l'employeur pour la période du 01/07/2016 au 30/06/2018, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

7°) la somme brute de 3.923,92 € au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

8°) la somme nette de 31.490,82 € (5.258,47 € x 6 mois) à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

9°) la somme nette de 31.550,82 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement illégitime et abusif, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

10°) la somme brute de 10.516,94 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

11°) la somme brute de 1.051,69 € à titre de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

12°) la somme nette de 2.957,89 € à titre d'indemnité légale de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

Condamner Maître [G] [K] ès-qualité à remettre à Madame [U] [M], sous astreinte de 100,00 € par jour de retard passé le délai de 30 jours à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, les bulletins de salaires relatifs aux condamnations ci-dessus à caractère salarial, ainsi qu'une attestation Pôle Emploi, en tenant compte, un certificat de travail et un reçu pour solde de tout compte (articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution),

Enjoindre en outre, sous astreinte identique, Maître [G] [K] es-qualité d'avoir à régulariser la situation de Madame [U] [M] auprès des organismes sociaux au bénéfice desquels ont été prélevées les cotisations détaillées sur les bulletins de salaire qui lui ont été remis (articles L. 131-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution),

Faire application des dispositions de l'article 1154 du code civil et Dire et Juger que les intérêts de retard seront capitalisés année par année et qu'ils produiront eux-mêmes des intérêts,

Juger en tant que de besoin que la moyenne mensuelle des derniers salaires s'élève à la somme de 5.258,47€,

Déclarer l'arrêt à intervenir opposable au CGEA de [Localité 6],

Débouter Maître [G] [K] es-qualité et le CGEA de [Localité 6] du surplus de leurs demandes,

Juger que les entiers dépens de l'instance seront passés en frais privilégiés dans la procédure de liquidation judiciaire (article 696 du CPC).»

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 16 février 2023, Me [K] ès qualités de liquidateur de la société «Le jardin des cigalons» demande à la cour de :

«A TITRE LIMINAIRE SUR LA DEMANDE DE MEDIATION (Cf. ccl appelante du 16/02/2023)

Vu le caractère d'ordre public du livre 6 du code de commerce sur les procédures collectives ;

Vu les articles 12 et 21 du code de procédure civile ;

Vu le coût pécuniaire de la médiation ;

Vu l'impécuniosité de la procédure collective ;

Vu l'absence de garantie par l'AGS des frais de procédure et autres dépens ;

Débouter [U] [M] de sa demande nouvelle en appel tendant à recourir à la médiation.

SUR LE FOND :

Confirmer le jugement du conseil des prud'hommes de MARSEILLE du 30/04/2019 et débouter [U] [M] de toutes ses demandes dès lors :

- Qu'elle ne justifie pas d'un lien de subordination, ;

- Qu'elle est domiciliée au siège social de la société LE JARDIN DES CIGALONS .

- Qu'elle indique n'avoir perçu aucun salaire depuis sa date d'embauche soit pendant plus de 27 mois et ne justifie d'aucune démarche visant à recouvrer ses salaires et sans démontrer être restée à la disposition permanente de l'entreprise ;

- Qu'elle a signé le bail commercial en qualité de représentante de la société LE JARDIN DES CIGALONS en cours de formation et plus précisément en qualité de futur membre associé de la société ;

- Qu'elle a également fait des actes relevant de la gestion dès lors qu'elle a signé un avertissement adressé à une salariée en mars 2018 ;Qu'elle est l'ex-conjointe du gérant, Monsieur [L] [H] ;

- Que Monsieur [H] [L] est un habitué des procédures collectives et des liquidations judiciaires et connaît les démarches ainsi que l'intervention d'un organisme de garantie des salaires qu'il a été gérant des sociétés suivantes LES FLAMBOYANTS, SIRET 812 808 459 00018, DADI (le CAFE DE LA PLACE), SIRET 509 932 513 00013, Monsieur [L] [H], SIRET 387 512 742 00066, et 10 10OCEANE (BAR DES SPORTS), SIRET 438 664 393 00010 qui ont toutes fait l'objet d'une liquidation judiciaire ;

A titre subsidiaire,

Débouter Mme I. [M] de sa demande de rappel de salaire dès lors qu'elle ne justifie pas soit de l'accomplissement d'une prestation de travail, soit qu'elle soit demeurée à la disposition de la société LE JARDIN DES CIGALONS pendant 27 mois, sans réclamer le paiement de ses salaires ;

Très subsidiairement,

Vu les articles 1273 et suivants devenus 1329 et suivants du Code civil ;

Débouter Mme I. [M] de ses demandes de rappel de salaires dès lors que son comportement de démontre qu'elle a renoncé au paiement de son salaire, pour procurer une facilité de trésorerie au commerce de la société familiale, en supportant ou en partageant ainsi le risque de l'entrepreneur ; Que ses créances ont perdu leur caractère salarial et que l'opération s'analyse en un prêt commercial pour les besoins de l'exploitation de l'entreprise afin d'éviter ou de différer une cessation des paiements ;

Dire et juger que la garantie AGS ne s'applique à ce type de créance et débouter Mme I. [M] de ses demandes au titre de la garantie AGS à ce titre.

Débouter Madame [M] de sa demande d'heures supplémentaires et de dommages et intérêts compensatoires des repos compensateurs non pris, dès lors qu'elle n'étaye pas ses demandes au titre d' heures supplémentaires qui auraient été accomplies avec l'assentiment de l'employeur, ou qui auraient été rendues nécessaires par les tâches à accomplir par le salarié.

Débouter Mme I. [M] de sa demande au titre de la prise d'acte dès lors que les manquements invoqués étaient anciens (27 mois) et non pas empêchés la poursuite du contrat dès lors qu'ils ont jamais été soulevés au cours d'exécution l'exécution du contrat de travail ;

Dire et juger que la prise d'acte doit produire les effets d'une démission ;

Débouter Madame [M] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé dès lors que la simple différence entre les heures mentionnées sur les bulletins de salaires et les heures effectuées ne suffit pas à caractériser l'infraction de travail dissimulé et que le caractère intentionnel d'une dissimulation d'emploi salarié n'est pas rapporté ;

A titre infiniment subsidiaire

Vu les dispositions de l'article L.3121-11 et suivants du code travail,

Débouter Madame [M] de sa demande au titre des dommages et intérêts compensatoires pour repos compensateurs non pris, qui ne sont destinés qu'à indemniser le préjudice subi du fait de la perte d'un temps de repos, puisque par définition, le salarié a continué à travailler et à être payé au lieu d'obtenir un temps de récupération indemnisé ;

Débouter Madame [M] de sa demande en l'absence de justification précise du préjudice subi (absence de documents communiqués sur ce point), il y a lieu de de sa demande et à tout le moins de la ramener à de plus justes proportions ;

Débouter Madame [M] de sa demande de l'incidence de congés payés dès lors que ces dommages et intérêts, qui n'ont pas le caractère de salaires, et ne peuvent entrer dans l'assiette des congés payés (calculés sur la base des salaires perçus Cf. . L. 3141-22 du code travail) ;

Débouter Madame [M] des demandes indemnitaires celle-ci se fondant sur un salaire mensuel de référence erroné ;

Fixer en tant que de besoin l'indemnité compensatrice de préavis (L. 1234-1 et L.1234-5 C.TRAV) l'indemnité compensatrice de congés payés (L.3143-26 et suivants C.TRAV) et l'indemnité de licenciement (L.1234-9 C.TRAV) ;

Vu l'article L.1235-3 du Code du travail dans sa rédaction issue de l'Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 - art. 2

Ramener au minimum légal le montant des dommages et intérêts, soit en l'espèce 3 mois, en l'état d'une ancienneté en année pleine, de deux ans.

Vu l'article 457 du code de procédure civile, consacrant au jugement la valeur d'un acte authentique ;

Débouter la salariée de toute demande de délivrance de documents sous astreinte, alors que le liquidateur judiciaire n'a pas présidé à la rupture de leur contrat qui est antérieure à la liquidation judiciaire et donc à sa mission, et alors lors qu'en matière de vérification des créances salariales dans le cadre d'une procédure collective, ce jugement prud'homal rendu entre le salarié, le mandataire judiciaire représentant l'employeur et l'AGS, comporte la date d'embauche, la qualification et le salaire de référence, la date de rupture et les indemnités octroyées au titre de cette rupture ;

Dire et juger que l'AGS devra procéder à l'avance des créances à l'avance des créances résultant de l'exécution et de la rupture du contrat de travail telles que définies aux articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, compte tenu du plafond de garantie applicable (articles L. 3253-17 et D. 3253-5), dans les termes et conditions des articles L.3253-19 et suivants du Code du travail.»

Par conclusions d'intervenant forcé communiquées au greffe par voie électronique le 8 novembre 2019, l'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 6] demande à la cour de :

«Confirmer le jugement du conseil des prud'hommes de MARSEILLE du 30/04/2019 et débouter Mme [U] [M] de toutes ses demandes dès lors :

- Qu'elle ne justifie pas d'un lien de subordination, ;

- Qu'elle est domiciliée au siège social de la société LE JARDIN DES CIGALONS .

- Qu'elle indique n'avoir perçu aucun salaire depuis sa date d'embauche soit pendant plus de 27 mois et ne justifie d'aucune démarche visant à recouvrer ses salaires et sans démontrer être restée à la disposition permanente de l'entreprise ;

- Qu'elle a signé le bail commercial en qualité de représentante de la société LE JARDIN DES CIGALONS en cours de formation et plus précisément en qualité de futur membre associé de la société ;

- Qu'elle a également fait des actes relevant de la gestion dès lors qu'elle a signé un avertissement adressé à une salariée en mars 2018 ;Qu'elle est l'ex-conjointe du gérant, Monsieur [L] [H] ;

- Que Monsieur [H] [L] est un habitué des procédures collectives et des liquidations judiciaires et connaît les démarches ainsi que l'intervention d'un organisme de garantie des salaires qu'il a été gérant des sociétés suivantes LES FLAMBOYANTS, SIRET 812 808 459 00018, DADI ([Adresse 5]), SIRET 509 932 513 00013, Monsieur [L] [H], SIRET 387 512 742 00066, et OCEANE (BAR DES SPORTS), SIRET 438 664 393 00010 qui ont toutes fait l'objet d'une liquidation judiciaire;

A titre subsidiaire

Débouter Mme I. [M] de sa demande de rappel de salaire dès lors qu'elle ne justifie pas soit de l'accomplissement d'une prestation de travail, soit qu'elle soit demeurée à la disposition de la société LE JARDIN DES CIGALONS pendant 27 mois, sans réclamer le paiement de ses salaires ;

Très subsidiairement,

Vu les articles 1273 et suivants devenus 1329 et suivants du Code civil ;

Le comportement de Mme I. [M] démontre qu'elle a renoncé au paiement de son salaire, pour procurer une facilité de trésorerie au commerce de la société familiale, en supportant ou en partageant ainsi le risque de l'entrepreneur ; Que ses créances ont perdu leur caractère salarial et que l'opération s'analyse en un prêt commercial pour les besoins de l'exploitation de l'entreprise afin d'éviter ou de différer une cessation des paiements ;

Dire et juger que la garantie AGS ne s'applique à ce type de créance et débouter Mme I. [M] de ses demandes au titre de la garantie AGS à ce titre.

Débouter Madame [M] de sa demande d'heures supplémentaires et de dommages et intérêts compensatoires des repos compensateurs non pris, dès lors qu'elle n'étaye pas ses demandes au titre d'heures supplémentaires qui auraient été accomplies avec l'assentiment de l'employeur, ou qui auraient été rendues nécessaires par les tâches à accomplir par le salarié.

Débouter Mme I. [M] de sa demande au titre de la prise d'acte dès lors que les manquements invoqués étaient anciens (27 mois) et non pas empêchés la poursuite du contrat dès lors qu'ils ont jamais été soulevés au cours d'exécution l'exécution du contrat de travail ;

Dire et juger que la prise d'acte doit produire les effets d'une démission ;

Débouter Madame [M] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé dès lors que la simple différence entre les heures mentionnées sur les bulletins de salaires et les heures effectuées ne suffit pas à caractériser l'infraction de travail dissimulé et que le caractère intentionnel d'une dissimulation d'emploi salarié n'est pas rapporté

A titre infiniment subsidiaire

Vu les articles L. 622-21 et suivants du code de commerce ;

Constater et fixer les créances de Madame [U] [M] en fonction des justificatifs produits ; à défaut débouter Madame [U] [M] de ses demandes ;

Vu les dispositions de l'article L.3121-11 et suivants du code travail,

Dire et juger que les dommages et intérêts compensatoires pour repos compensateurs non pris ne sont destinés qu'à indemniser le préjudice subi du fait de la perte d'un temps de repos, puisque par définition, le salarié a continué à travailler et à être payé au lieu d'obtenir un temps de récupération indemnisé ;

Dire et juger qu'en l'absence de justification précise du préjudice subi (absence de documents communiqués sur ce point), il y a lieu de débouter Madame [M] de sa demande et à tout le moins de la ramener à de plus justes proportions ;

Dire et juger que ces dommages et intérêts, qui n'ont pas le caractère de salaires, ne peuvent entrer dans l'assiette des congés payés (art. L. 3141-22 du Code du travail) ;

Débouter Madame [M] de sa demande d'incidence congés payés ;

Dire et juger qu'il ne peut être fait droit au quantum des demandes indemnitaires de Madame [M],celle-ci se fondant sur un salaire mensuel de référence erroné ;

Fixer en tant que de besoin l'indemnité compensatrice de préavis (L.1234-1 et L.1234-5 C.TRAV) l'indemnité compensatrice de congés payés (L.3143-26 et suivants C.TRAV) et l'indemnité de licenciement (L. 1234-9 C.TRAV.) ;

Vu l'article L.1235-3 du Code du travail dans sa rédaction issue de l'Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 - art. 2

Ramener au minimum légal le montant des dommages et intérêts, soit en l'espèce 3 mois, en l'état d'une ancienneté en année pleine, de deux ans.

Vu les articles L. 3253-6 et suivants du code du travail,

Dire et juger qu'en application de l'article L. 3253-17 du code du travail, la garantie AGS est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret (article D.3253-5 du Code du travail), en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d'assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposées par la loi ;

Dire et juger que l'obligation de l'UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 6] de faire l'avance de montant total des créances définies aux articles L. 3253-6 et suivants du Code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L. 3253-17 et D. 3253-5), ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L. 3253-19 du Code du travail ;

Dire et juger que l'UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 6] ne doit pas sa garantie pour les demandes au titre des frais irrépétibles visés à l'article 700 du CPC, des dépens, de l'astreinte, des cotisations patronales ou résultant d'une action en responsabilité ;

Dire et juger que le jugement d'ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels (art. L. 622-28 C.COM) ;

Débouter Madame [U] [M] de toute demande contraire et la condamner aux entiers dépens.»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur la demande de médiation

Compte tenu de l'impécuniosité de la procédure collective, il n'y a pas lieu d'enjoindre aux parties de participer à une telle mesure.

Sur l'existence d'un contrat de travail

L'appelante fait valoir qu'en présence d'un contrat de travail apparent, les intimés sont débiteurs de la charge de la preuve mais qu'ils ne font nullement état d'indices pouvant laisser présumer que l'emploi confié ne reposerait sur aucune réalité.

Elle indique justifier des démarches entreprises pour que ses salaires lui soient payés et produire notamment des attestations démontrant qu'elle effectuait une prestation dans le cadre d'une subordination juridique.

Les intimés relèvent que Mme [M] est domiciliée au siège de la société et est l'ex-conjointe du gérant, s'est présentée comme future associée de la société lors de la signature du bail commercial, et donc comme dirigeante de fait, rappelant que M. [L] [H] est un habitué des procédures de liquidation judiciaire et citant également d'autres personnes se présentant comme salariés avec un important arriéré de salaires, alors même qu'ils sont à la tête d'autres activités commerciales.

Dans la mesure où Mme [M] produit notamment un contrat de travail écrit et des bulletins de salaire, il appartient aux intimés de rapporter la preuve du caractère fictif de ce contrat.

Or, les éléments cités ci-dessus sont insuffisants à démontrer que Mme [M] s'est comportée comme dirigeante de fait, alors même qu'elle justifie par plusieurs attestations notamment du cuisinier (pièce n°6), d'une autre employée (pièce n°10) et de clients qu'elle effectuait une prestation de travail polyvalente au profit de la société.

En conséquence, le jugement doit être infirmé, étant relevé en outre que la fraude n'est ni alléguée ni démontrée.

Sur l'exécution du contrat de travail

1- sur le paiement de la rémunération

Le liquidateur ne démontre pas que le règlement des salaires a été effectif sur la période considérée soit du 1er juillet 2016 au 12 octobre 2018 alors que Mme [M] était à disposition de son employeur, comme démontré par les attestations relatées, de sorte que la créance n'est pas sérieusement contestable comme a pu le constater la formation de référés.

La novation de créance de salaire en prêt commercial pour les besoins de l'exploitation de l'entreprise afin de différer la cessation des paiements n'est démontrée par aucune pièce et dès lors, il convient de faire droit à la demande en paiement non discutée dans son montant.

2- sur la résistance abusive

Contrairement à ce qu'elle prétend, Mme [M] n'a jamais sollicité par écrit son employeur antérieurement à la procédure tant judiciaire que collective, de sorte qu'elle ne démontre pas d'une part une résistance de nature abusive et d'autre part, un préjudice en découlant, les liens de proximité avec le gérant laissant un doute sur sa connaissance de la situation de la société.

En conséquence, la demande à titre de dommages et intérêts doit être rejetée.

3- sur les heures supplémentaires

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l'espèce, la salariée indique qu'elle effectuait au minimum 7 heures de plus que la durée légale et travaillait 7 jours sur 7, précisant travailler de 8h jusqu'à minuit et des nuits complètes en l'absence du veilleur de nuit.

Elle prétend se référer à un chiffrage, au solde de congés payés non pris inscrits sur les bulletins de salaire et à l'attestation de M. [F] (pièce n°6) lequel indique «avoir vu Mme [M] [U] travailler plus que ses heures normales, 7 jour sur 7 et à tous les postes...».

La cour relève l'absence de décompte sur la période considérée et la linéarité des horaires sur 52 semaines issue du chiffrage contenu dans les conclusions qui ne reflète aucune réalité crédible, l'absence des bulletins de salaire d'octobre et novembre 2017, l'absence de tout élément portant sur des horaires de nuit comme invoqué et l'absence de production d'agendas venant corroborer les horaires mais en reflet, l'absence manifeste d'outils utilisés par l'employeur pour comptabiliser les heures de travail de la salariée et l'absence de décompte produit par lui.

En considération de l'ensemble de ces éléments, la cour a la conviction que Mme [M] a effectué des heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées, mais pas dans la proportion affichée de 77 heures supplémentaires par semaine, étant précisé que les calculs de la salariée sont erronés comme ne respectant pas les dispositions conventionnelles, lesquelles prévoient 3 seuils de déclenchement d'heures supplémentaires avec des majorations différentes du droit commun (10-20-50%) et qu'elle a en outre retenu d'août 2017 à juin 2018 (date à laquelle elle a arrêté son décompte), un salaire de base inférieur à celui payé.

La créance salariale doit être fixée ainsi :

- année 2016 : 1 430 euros pour 130 heures supplémentaires

- année 2017 : 3 197,70 euros pour 260 heures supplémentaires

- année 2018 (jusqu'au 30/06): 1 829,10 euros pour 130 heures supplémentaires

soit un total de 6 456,60 euros outre l'incidence de congés payés.

4- sur les repos compensateurs

Contrairement à ce qu'invoque la salariée, le contingent annuel d'heures supplémentaires dans la convention collective HCR n'est pas de 130 heures mais de 360 heures dans les établissements permanents.

Au regard du nombre d'heures retenu par la cour, la salariée n'est pas fondée en sa demande de repos compensateurs non pris.

5- sur le travail dissimulé

L'article L.8221-5-2° du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

En l'espèce, si l'employeur a démontré sa négligence dans le suivi de la charge de travail de Mme [M], il ne peut en être déduit qu'il a entendu dissimuler son activité en ce que manifestement Mme [M] était totalement autonome dans ses fonctions et n'a formulé aucune demande en paiement pendant la période contractuelle et seulement de façon opportuniste, après la procédure collective.

Dès lors, Mme [M] doit être déboutée de sa demande indemnitaire forfaitaire formée sur le fondement de l'article L.8223-1 du code du travail.

Sur la rupture du contrat de travail

Même si le manquement relatif aux salaires est ancien, - sans aucune demande de Mme [M] en dépit de ce qu'elle prétend, celle-ci n'ayant fait aucune demande amiable directe avant la procédure de référé initiée début juillet 2018 -, il est constant que la situation n'a pas été régularisée par l'employeur, de sorte que la prise d'acte effectuée par lettre recommandée du 12 octobre 2018 distribuée le lendemain, doit être prise en considération, s'agissant de manquements graves à l'exécution loyale du contrat de travail de nature à justifier la rupture immédiate du contrat de travail.

Le salaire de référence demandé par Mme [M] sur 12 mois ne peut être retenu comme calculé avec un nombre d'heures supplémentaires erroné, étant précisé que n'ayant pas demandé d'heures supplémentaires sur les trois derniers mois, le calcul du salaire de référence lui est plus défavorable. En conséquence, la cour fixe le salaire de référence à la somme de 2 250,93 euros.

Il n'est pas discuté que Mme [M] n'a pas perçu d'indemnité compensatrice de préavis laquelle doit être fixée à deux mois de salaire.

S'agissant de l'indemnité de licenciement, son montant s'établit pour 2 ans et trois mois d'ancienneté, à la somme de 1 266,15 euros.

La salariée ne justifie pas de sa situation économique postérieure de sorte que son indemnisation au titre de la perte de l'emploi et du préjudice moral causé, eu égard au respect du barème, est justifiée à hauteur de la somme de 6 800 euros.

Sur les autres demandes

L'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 6] doit sa garantie sur les créances fixées.

Le liquidateur devra remettre un bulletin de salaire récapitulatif énonçant les sommes dues par année, un certificat de travail, une attestation Pôle Emploi et un reçu de solde de tout compte s'il y a lieu, mais la nécessité d'une astreinte n'est pas démontrée.

La demande de régularisation auprès des organismes sociaux, sans les nommer et sans indication de la nature de l'obligation mise à la charge du liquidateur doit être rejetée.

La procédure collective intervenue dès le 17 octobre 2018 a interrompu le cours des intérêts, de sorte que la demande relative aux intérêts et à leur capitalisation n'a pas d'objet.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Infirme la décision déférée en toutes ses dispositions,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société «Le Jardins des Cigalons» représentée par Me [G] [K], ès qualités de mandataire liquidateur, les créances de Mme [U] [M], au titre de l'exécution du contrat de travail, aux sommes suivantes :

- 48 159,18 euros brut à titre de rappel de salaires du 01/07/2016 au 12/10/2018,

- 4 815,92 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 6 456,60 euros brut au titre des heures supplémentaires des années 2016, 2017 et 2018,

- 645,66 euros brut au titre des congés payés afférents,

Déboute Mme [M] de ses demandes à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, au titre des repos compensateurs et du travail dissimulé,

Dit que la prise d'acte a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société «Le Jardins des Cigalons» représentée par Me [G] [K], ès qualités de mandataire liquidateur, les créances de Mme [M], au titre de la rupture du contrat de travail, aux sommes suivantes:

- 4 501,86 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 450,18 euros brut au titre des congés payés afférents,

- 1 266,15 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 6 800 euros à titre d'indemnité pour perte de l'emploi et préjudice moral,

Déclare l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 6] tenue à garantie pour l'ensemble de ces sommes dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles,

Ordonne la remise à Mme [M] par le liquidateur de documents conformes au présent arrêt : un bulletin de salaire récapitulatif énonçant les sommes allouées par année, un certificat de travail, une attestation Pôle Emploi et un reçu de solde de tout compte s'il y a lieu,

Déboute Mme [M] de ses demandes d'astreinte, de régularisation auprès des organismes sociaux et au titre des intérêts et de leur capitalisation,

Laisse les dépens d'appel à la charge de la société «Les Jardins des Cigalons» représentée par Me [K], mandataire liquidateur.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/08040
Date de la décision : 26/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-26;19.08040 ?
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