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26/05/2023 | FRANCE | N°19/01302

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 26 mai 2023, 19/01302


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 26 MAI 2023



N°2023/ 102





RG 19/01302

N° Portalis DBVB-V-B7D-BDVKD







[U] [Y]





C/



Société MIDI PROTECTION



















Copie exécutoire délivrée

le 26 Mai 2023 à :



-Me Soraya SLIMANI, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Fabienne BENDAYAN-CHETRIT, avocat au barreau de MARSEILLEr>










Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00389.







APPELANT



Monsieur [U] [Y], demeurant [Adresse 1]



représenté...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 26 MAI 2023

N°2023/ 102

RG 19/01302

N° Portalis DBVB-V-B7D-BDVKD

[U] [Y]

C/

Société MIDI PROTECTION

Copie exécutoire délivrée

le 26 Mai 2023 à :

-Me Soraya SLIMANI, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Fabienne BENDAYAN-CHETRIT, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 18/00389.

APPELANT

Monsieur [U] [Y], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Soraya SLIMANI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Christine SIHARATH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Société MIDI PROTECTION, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Fabienne BENDAYAN-CHETRIT, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Février 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023, délibéré prorogé en raison de la survenance d'une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 26 Mai 2023.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Mai 2023.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS ET PROCÉDURE

M. [U] [Y] a été engagé à compter du 6 janvier 2006 en qualité de responsable technico-commercial sans contrat et à durée indéterminée par la société Midi Protection.

La convention collective applicable était celle de commerce de gros du 23 juin 1970.

Au dernier état de la relation contractuelle, le salarié occupait le poste de responsable d'établissement, cadre niveau 9 (IX), échelon 1 pour un salaire mensuel de base de 3 281 euros bruts au vu de ses bulletins de salaire.

M. [Y] était convoqué le 24 juin 2015 à un entretien préalable à une mesure de licenciement fixé au 3 juillet 2015. Il était licencié pour motif économique par courrier du 24 juillet 2015.

Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre M. [Y] saisissait le 22 février 2018 le conseil de prud'hommes de Marseille en paiement d'indemnités.

Par jugement du 21 décembre 2018 le conseil de prud'hommes de Marseille a statué comme suit:

« Dit que le motif du licenciement économique est parfaitement justifié,

Condamne la société Midi Protection à régler à Monsieur [U] [Y] les sommes suivantes:

- 13 000 € a titre de dommages et intérêts pour défaut de proposition de formation de reclassement,

- 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Déboute Monsieur [U] [Y] de toutes ses autres demandes,

Déboute la société Midi Protection de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamne le défendeur aux entiers dépens».

Par acte du 21 janvier 2019, le conseil de M. [Y] a interjeté appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 27 juillet 2020, M. [Y] demande à la cour de :

« Confirmer le jugement en ce qu'il a constaté que Monsieur [U] [Y] doit être rempli de son droit en matière de non-respect de l'obligation de reclassement et de proposition d' adaptation et en ce qu'il lui a alloué la somme de 500 € au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

Infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau par ajout ou substitution,

En conséquence,

Dire et Juger que le licenciement n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Dire et Juger la rémunération moyenne mensuelle à parfaire est de 5.237,98 euros bruts,

Condamner la société Midi Protection à payer à Monsieur [U] [Y] les sommes suivantes :

- 78.682,01 euros à titre de rappel de salaires,

- 7.868,20 euros à titre de rappel de congés payés sur rappel de salaires,

- 15.500,00 euros à titre de rappel de prime,

- 8.400,00 euros à titre de reliquat d'allocation chômage,

- 15.405,81 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de son obligation d'adaptation,

- 5.237,98 euros à titre d'indemnité pour irrégularité de procédure,

- 47.141,82 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5.237,98 euros à titre de rappel de reliquat d'indemnité compensatrice de préavis,

- 523,80 euros à titre de reliquat de congés payés sur préavis,

- 10.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudices matériel et moral,

- 3.000,00 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en cause d'appel et de première instance.

Dire et Juger les condamnations porteront intérêts au taux légal avec anatocisme à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes.

Condamner la société à communiquer au salarié les documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte de 150 € par jour de retard et par document. ».

Dans ses dernières écritures communiquées au greffe par voie électronique le 12 janvier 202, la société Midi Protection demande à la cour de :

« Réformer le jugement en ce qu'il a :

- dit que le motif du licenciement économique est parfaitement justifié,

- condamné la société Midi Protection à régler à Monsieur [U] [Y] les sommes suivantes 13 000€ à titre de dommages et intérêts pour défaut de proposition de formation de reclassement et 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [Y] de l'ensemble de ses autres demandes

En conséquence, il plaira à la Cour de :

Débouter Monsieur [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Dire et Juger qu'eu égard aux dispositions de la Convention Collective application à la relation contractuelle le statut cadre niveau X est inapplicable.

Dire et Juger que Monsieur [Y] ne rapporte nullement la démonstration de la fonction de Directeur revendiquée.

Dire et Juger que la demande de reliquat formée par le salarié repose sur un décompte erroné et non conforme aux dispositions de la Convention Collective.

Constater la carence de Monsieur [Y] relativement à la démonstration d'un accord sur l'allocation d'une prime de 7 % sur le chiffre d'affaires.

Constater le décalage du montant des primes perçues par Monsieur [Y] avec celui correspondant à l'application du taux de 7%.

En conséquence,

Dire et Juger que les primes versées au salarié sont dénuées de lien avec le chiffre d'affaires réalisé par lui ou par la Société Midi Protection

En conséquence,

Débouter Monsieur [Y] de sa demande de rappel de salaire

Dire et Juger la procédure de licenciement pour motif économique régulière.

Dire et Juger qu'il n'y a pas lieu à réintégration des prétendus détournements allégués et opposés à Monsieur [F] [V]

Dire et Juger que l'employeur justifie de l'impossibilité de reclassement de Monsieur [Y].

Dire et Juger que le licenciement de Monsieur [Y] repose sur un motif économique parfaitement justifié.

En conséquence,

Débouter Monsieur [Y] de l'ensemble de ses demandes afférentes à la rupture du contrat de travail.

Débouter Monsieur [Y] de sa demande de dommages et intérêts distincte au titre du préjudice matériel et moral.

Condamner Monsieur [Y] au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens ».

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les « dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

I . Sur l'exécution du contrat de travail

A. Sur le rappel de salaire au titre de la classification

Le salarié soutient qu'il n'a pas été rétribué eu égard aux fonctions réellement exercées et que l'absence de contrat de travail était de nature à étendre considérablement les missions qui lui étaient imparties, que ses fonctions dépassaient celles de responsable d'établissement et qu'étant le seul cadre de l'entreprise, il était en réalité le directeur de l'entreprise Midi Protection depuis le 11 janvier 2011, ce qui correspondait au niveau 10, échelon de 2 de la convention collective nationale applicable et de l'accord du 3 mars 2015 relatif aux salaires au 1er mars 2015 prévoyant somme de 5 237,98 € mensuels.

Il fait valoir qu'il coordonnait l'activité et assumait l'application de la politique générale de l'entreprise, avec un pouvoir de direction sur les salariés et une large délégation en application des dispositions de la convention collective applicable.

Il précise également que la société Midi Protection ne disposait que d'un seul et unique établissement à [Localité 2] et que le poste de responsable de site ne peut correspondre.

Il produit notamment les éléments suivants :

- les cartes de visite le mentionnant comme directeur de l'entreprise et son profil sur le compte Viadéo ( pièce 4 et 6)

- le bon de commande EDF du 16 février 2015 indiquant la fonction de directeur et le badge à son nom et en qualité de directeur en tant qu'invité par l'organisation du salon de la prévention et de la gestion des risques (pièce 3)

- l'accueil du site Internet de l'entreprise Midi Protection l'indiquant en tant que responsable de la rédaction du site (pièce 5)

- le courrier de l'employeur en réponse au commissaire au compte « J'ai actuellement engagé une procédure de licenciement économique de mon directeur de site (..) Cession du véhicule du directeur des frais de déplacement et représentation afférents (...) » (pièce 22)

- l'e-mail du 18 décembre 2022 du salarié adressé à [F] [V] « (...) dans la continuité de l'intégration dans ma fonction de directeur, vous m'avez proposé (...)» (pièce 12)

- un récapitulatif des activités, établi par le salarié (pièce 2).

- le témoignage du 4 octobre 2017 de M. [S], serrurier « J'ai rencontré M. [Y] lors d'un entretien d'embauche qui s'est conclu par la signature d'un contrat au sein de l'entreprise Midi Protection. Lors de cet entretien M. [Y] m'a donné son accord pour le poste recherché après avoir discuté ensemble des attentes de l'entreprise et de la rémunération correspondante. M. [V] m'a indiqué que c'était son directeur et c'est pour cette raison que pendant toute la durée de ma présence au sein de Midi Protection du 12 septembre 2012 au 16 janvier 2015 s'est vers M. [Y] qu'avec mes collègues nous nous adressions exclusivement

à lui pour toutes question professionnelle : congés, absence exceptionnelle, demande d'augmentation, avant sur frais, formation (...)» (pièce 34).

L'employeur conteste l'argumentation et les éléments produits indiquant que le salarié ne rapporte pas la démonstration des missions et des tâches attachées au poste de directeur qui lui auraient été confiées, précisant en particulier que les cartes de visite ont été commandées le 20 mai 2015 par l'épouse de M. [Y] employée au sein de la société en qualité de secrétaire comptable et que le salarié était informé des difficultés économiques de l'entreprise et de la procédure de licenciement envisagé.

L'employeur souligne que la classification revendiquée par M. [Y], soit le niveau 10 (X), échelon 2, ne s'applique pas à une entreprise de petite taille n'employant que cinq salariés et que l'échelon 2 s'applique au directeur général d'une entreprise de grande taille non mandataire social en l'état de la convention collective applicable à la relation contractuelle.

La société produit notamment les pièces suivantes :

- les témoignages de M. [D] (salarié de la société), M. [A](fournisseur de la société depuis 15 ans), M. [W] (fournisseur de la société), M. [E] (fournisseur de la société depuis 17 ans), M. [G] (fournisseur de la société depuis 17 ans), M. [J] (fournisseur de la société depuis 12 ans), M. [O] (gérant), M. [K] [C] (responsable de chantier de la société), M. [Z] (client de la société ), et M. [P] (salarié de la société ) qui attestent que le rôle de M. [Y] était d'être en charge de la partie administrative, qu'il était seulement l'adjoint ou l'assistant de M. [F] [V] et qu'il ne s'est jamais présenté en tant que directeur de la société, les questions commerciales revenant à M. [V] et les questions techniques à M. [K] (pièces 10 à 19 et 36).

- l'e-mail du 21 décembre 2010 de Midi Protection ([X] [Y]) à Audit Révision Expertise Comptable indiquant « Oui [T] vient d'envoyer un mail à [F]. Lequel a répondu qu'il fallait donc faire passer Jo au niveau 9 et non 10 comme chef d'établissement et NON directeur (...) » (pièce 30).

- Le décret du 18 décembre 2008 précisant les critères déterminants l'appartenance à une catégorie d'entreprise (pièce 47).

Le salarié qui revendique une classification différente de celle figurant sur son contrat de travail ou son bulletin de salaire doit démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il estime être la sienne au regard de la convention collective applicable.

Les fonctions réellement exercées, qui sont prises en compte pour déterminer la qualification d'un salarié, sont donc celles qui correspondent à son activité principale, et non celles qui sont exercées à titre accessoire ou occasionnel.

En l'état de la convention collective nationale des commerces de gros du 23 juin 1970, le salarié était passé au vu de son bulletin de salaire au niveau 9 (IX) échelon 1 correspondant au poste de 'chef d'établissement d'importance moyenne ayant la responsabilité complète de la gestion des résultats au chef de service d'importance équivalente'.

Le salarié revendique la classification niveau 10 (X) échelon 2. Ce niveau correspond au fait de « diriger par délégation ou de participer à la direction de l'entreprise, de coordonner l'activité de plusieurs responsables qui disposent d'une large délégation entre lesquels il est amené à faire des arbitrages en fonction de la politique générale de l'entreprise dont il assume l'application ».

L'échelon 2 équivaut au poste de 'directeur général d'une entreprise de grande taille, non mandataire social'.

En l'espèce, la société Midi Protection est une petite entreprise employant moins de 10 salariés et avec un chiffre d'affaires inférieur à 2 millions d'euros, ce qui ne correspond pas à une entreprise de grande taille telle que précisée à l'échelon 2.

Par ailleurs, la plupart des pièces produites par le salarié sont de simples documents où figure le titre de directeur sans que soit établie la réalité des tâches relevant du poste de directeur dont se prévaut le salarié et n'ont de ce fait, aucune force probante.

Les nombreux témoignages versés par la société contredisent l'attestation de M. [S] et limitent les fonctions de M. [Y] à la gestion administrative et non au pouvoir de décision d'un directeur de société. Enfin, l'e-mail du 21 décembre 2010 est explicite sur le statut retenu pour le salarié qui est le niveau 9 et qui correspond aux indications figurant sur son bulletin de salaire.

En conséquence, le salarié n'établit pas avoir assuré de façon permanente dans le cadre de ses fonctions les tâches relevant de la classification revendiquée et c'est par une juste appréciation de la cause que le conseil des prud'hommes a débouté le salarié de sa demande à ce titre ainsi que de sa demande au titre du reliquat d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur ce fondement.

La cour confirme la décision déférée sur ces points.

B. Sur le rappel de salaire au titre de la prime de 7%

Le salarié réclame le paiement d'une prime représentant 7% du chiffre d'affaires global de la société, supérieur à 460'000 €. Il explique que l'employeur a changé à plusieurs reprises le mode de calcul de la prime, que pour l'année 2014 il ne lui a été versé que 3000 € et que pour l'année 2015 la société ne lui a rien versé malgré le caractère constant fixe et général de la prime.

Pour preuve de l'existence de cette prime, le salarié produit notamment en pièce 26 un tableau écrit de la main de l'employeur décrivant les modalités de versement des primes, les bulletins de salaire comportant la mention avance sur commissions (pièce 27), son courrier du 25 octobre 2015 (pièce 13) et son e-mail du 18 décembre 2012 adressé à [F] [V] relatif à la modification du système de commissionnement avec un tableau récapitulatif des commissions perçues (pièce 12) .

L'employeur soutient que si des primes ont été versées pour récompenser le travail et l'investissement des salariés, aucun accord écrit ne vient entériner le bénéfice de la gratification revendiquée, qu'un simple constat mathématique permet de relever que les sommes versées ne correspondent nullement à 7 %, que le salarié n'a cessé de modifier les modalités d'octroi de cette prétendue prime et que les prétentions du salarié sont fantaisistes.

S'agissant du courriel qui lui a été adressé, l'employeur indique n'en avoir jamais été destinataire, le courriel ayant fait l'objet d'une suppression sur son ordinateur par l'épouse de M. [Y], employée comme secrétaire comptable de la société et présente le mardi 18 décembre 2012. Concernant le tableau produit, il précise qu'il s'agit d'un brouillon non contractuel établi au début de la relation contractuelle faisant apparaître les désaccords du salarié et de son employeur.

L'employeur produit notamment les éléments suivants :

- le courrier du 13 novembre 2015 en réponse à la lettre de M. [Y] du 25 octobre 2015 réclamant un reliquat pour l'année 2014 au titre de la prime indexée sur le chiffre d'affaires : « (...) cette réclamation suscite le plus grand étonnement dans la mesure où il n'a jamais été convenu de versement d'une prime indexée sur le chiffre d'affaires. À cet égard je vous rappelle que depuis votre entrée en fonction vous avait bénéficié du versement de primes particulièrement conséquentes mais dénuées de tout lien avec le chiffre d'affaires de l'entreprise (...) » (pièce 28).

- récapitulatif des primes brutes figurant sur le bulletin de salaire de M. [Y] et attestées par le cabinet d'expertise comptable Audrec (pièce 29).

- le témoignage de M. [K] [C] responsable chantier de la société confirmant « que le système de prime était identique avec M. [Y] [U], à savoir les primes et gratifications en récompense du travail fourni. Ces primes n'ont jamais été contractuelles, ni indexées sur un indicateur particulier. Elles permettaient une récompense quand l'entreprise avait réalisé une bonne année (...) C'est M. [V] seul qui décidait de son versement, montant en fonction de son ressenti, de mon travail et de mon investissement (...) » (pièce 39)

En matière de prime et de gratification, il appartient à celui qui se prévaut d'un usage d'apporter la preuve que la prime ou la gratification relève de cet usage répondant à des caractères de

constance et de fixité.

En l'espèce, aucun document contractuel ne prévoit la prime sollicitée et le salarié ne démontre pas que les primes dont il a bénéficié correspondent au pourcentage revendiqué, ses explications sur les différentes modalités d'application n'étant également étayées par aucun élément probant.

En effet, le tableau présenté par l'appelant en pièce 26 comme une pièce essentielle de sa démonstration concerne les demandes du salarié 'Jo' pour un montant de 10'000 € pour 1 200 000 euros soit un pourcentage d'environ 0,83 % et un montant de 15'000 € pour 1 300 000 euros soit environ un pourcentage de 1,15 %. L'employeur '[F] ' proposant 0,67 % pour 1 200 000 euros et 1,007% pour 1 300 000 euros.

Cette pièce n'est pas datée, ni signée et ne peut être considérée comme un engagement contractuel de la part de l'employeur et surtout les pourcentages envisagés par l'un comme par l'autre ne correspondent pas à une prime de 7 % du chiffre d'affaires, ni même à la baisse du pourcentage évoquée par l'appelant dans ses conclusions.

Par ailleurs, les sommes effectivement versées par l'employeur au cours des années 2008 à 2015 au titre des primes brutes mentionnées au cours de l'année sur les bulletins de salaire comme des 'avances sur commission' et complétées en fin d'année au titre d'une 'prime exceptionnelle' ne correspondent également pas au montant de 7 % du chiffre d'affaires de la société et ne sont pas fixes et constantes.

Le témoignage de M. [K] [C] corrobore le fait que ces primes étaient versées en récompense d'un travail fourni et non en fonction du chiffre d'affaire de la société.

Enfin, l'e-mail du 18 décembre 2012 ne saurait en tout état de cause constituer un élément attestant de l'existence de cette prime dans la mesure où le salarié ne produit pas la réponse de l'employeur à cet e-mail alors que ce dernier n'aurait pas manqué d'y répondre comme il l'a fait le 13 novembre 2015 et que subsiste un doute quant à la bonne réception de ce mail par l'employeur.

Le salarié ne justifie donc ni de l'existence de la prime revendiquée, ni de la possibilité d'une modification de cette dernière au cours de la relation contractuelle, ni d'une quelconque fixité et constance de celle-ci et c'est par une juste appréciation de la cause que les premiers juges l'ont débouté de sa demande de rappel de prime.

La cour confirme le jugement entrepris de ce chef.

C. Sur le rappel de salaire au titre des allocations chômage

Le salarié estime que la prestation allocation chômage à laquelle il aurait eu droit en raison des primes sur chiffre d'affaires des années 2014 -2015 aurait du s'élever à 2500 € par mois et qu'il a eu un préjudice lié à la perte de ses droits à Pôle Emploi du fait de la carence de son employeur.

La cour qui n'a pas retenu l'existence des primes réclamées par le salarié déboute par voie de confirmation le salarié sur ce point.

II. Sur le licenciement

A. Sur la régularité de la procédure de licenciement

Le salarié soutient qu'il a été convoqué par lettre remise en main propre le 24 juin 2015 pour un entretien préalable fixé au 3 juillet 2015 et que le courrier qui lui a été remis à cette date doit s'analyser comme une lettre de licenciement puisqu'elle fait état des circonstances ayant amené au licenciement et des conséquences de ces circonstances sur son emploi et qu'il n'a pas pu s'exprimer pendant l'entretien préalable.

Il estime que si l'objet de cette lettre est une « proposition de contrat de sécurisation professionnelle », le licenciement pour motif économique était bel et bien décidé avant même le déroulement de l'entretien préalable alors que le salarié doit bénéficier d'un délai de réflexion pour accepter ou refuser le CSP et que l'employeur n'était pas délié de son obligation de reclassement.

Il souligne que la notification n'est pas intervenue par lettre recommandée avec avis de réception mais remise en main propre au salarié contre décharge et que le délai minimum de 15 jours entre l'entretien préalable et la notification du licenciement économique n'a pas été respectée contrairement aux dispositions de l'article L. 1233 -15 du code du travail.

L'employeur n'a pas répondu sur ce point.

La convocation à l'entretien préalable en vue du licenciement économique prévu le 3 juillet 2015 a été réalisée par lettre remise en main propre contre décharge conformément aux dispositions de l'article L.1233-11 du code du travail.

Le compte rendu de M. [N], conseiller ayant assisté le salarié lors de l'entretien préalable (pièce 10 appelant) indique que les motifs économiques ont été exposés au salarié par l'employeur et que contrairement à ce qui est allégué, ce dernier a pu s'exprimer .

Le courrier du 3 juillet 2015 remis en main propre au salarié contre récépissé a eu pour objet de concrétiser la proposition de contrat de sécurisation professionnelle dont il a été fait état lors de l'entretien. Ce courrier ne fait que reprendre les motifs économiques et la réorganisation envisagée pour la suite sans qu'il ne soit indiqué expressément que le salarié était licencié, les termes du courier indiquant 'nous sommes dans l'obligation de poursuivre notre licenciement économique à votre égard 'et proposant au salarié d'adhérer un contrat de sécurisation professionnelle. Il est bien mentionné un délai de 21 jours pour prendre la décision.

Enfin, le courrier de licenciement du 24 juillet 2015 a été régulièrement adressé au salarié par lettre recommandée avec accusée réception et il y a eu 21 jours entre l'entretien et la lettre de licenciement conformément aux dispositions de l'article L. 1233-15 du code du travail.

Dès lors, la procédure est régulière.

Le salarié, par voie de confirmation, doit être débouté de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure.

B. Sur le bien fondé du licenciement

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige en application des dispositions de l'article L.1235-2, alinéa 2 est libellée dans les termes suivants :

A la suite de notre entretien du vendredi 3 juillet2015, nous sommes au regret de vous informer que nous sommes dans l'obligation de poursuivre notre licenciement économique à votre égard pour le motif suivant :

L'année 2014 s'est soldée par un chiffre d'affaires de 1 253 KE, contre 1 447 KE en 2013, soit une baisse de 193 KE

Cette baisse provient d'une conjoncture difficile ainsi qu'une chute continue des « ventes Marchandises/équipements ».

Pour mémoire, les ventes d'équipement n'ont représenté que 150 KE en 2014, contre 260 KE en 2013, 421KE en 2012.

En 2015, nous avons appris que la société Midi Protection n'était pas reconduite pour le marché de la ville de [Localité 4] (qu'elle détenait depuis plus de 12 ans). Ce marché représentait en moyenne entre 300 KE et 500 KE de chiffre d'affaires annuel. Il a pris fin en juin 2015.

A ce jour, la chute des ventes « Marchandises » se poursuit sur 2015 (69 KE à fin juin 2015, contre 80 KE à fin juin 2014), et le portefeuille de commandes ne permet pas de compenser la perte du marché Ville de [Localité 4].

Je suis donc amené à prendre des dispositions afin de réorganiser la structure de la société de manière à réduire sensiblement ses coûts/pour faire face à cette baisse du chiffre d'affaires.

Dans le cadre de cette réorganisation je suis amené à envisager de supprimer le seul poste de cadre administratif de la société et donc de procéder à un licenciement sur votre poste pour motif économique.

Nous avons étudié les pistes de reclassement vous concernant, mais la structure extrêmement légère de notre société ne nous le permet pas.

La nouvelle réorganisation s'articulera donc autour d'une secrétaire comptable, et de 3 ouvriers, et permettra je l'espère de faire face aux difficultés que nous rencontrons.

Nous vous rappelons que vous pouvez bénéficier, en application de l'article L. 1233-65 du code du travail, d'un contrat de sécurisation professionnelle (CSP).

Dans ce cadre, il vous a été remis une documentation d'information établie par Pôle Emploi ainsi qu'un dossier d'acceptation du CSP et vous disposiez, depuis cette date, d'un délai de réflexion de vingt et un jours, soit jusqu'au vendredi 24 juillet 2015 pour l'accepter ou pour la refuser.

Si vous optez pour ce dispositif, vous devez dans ce délai de 21 jours, nous remettre le bulletin d'acceptation et la demande d'allocation spécifique, dûment remplis, que nous transmettons à pôle Emploi, votre contrat de travail sera alors rompu le lundi 27 juillet 2015 d'un commun accord, aux conditions qui vous ont été exposées et qui figure dans le document qui vous ont été remis.

En cas de refus ou si vous omettez de nous faire part de votre accord dans le délai mentionné ci-dessus, cette lettre constituera la notification de votre licenciement pour motif économique.

Votre préavis d'une durée de 3 mois dont le délai court à compter de la première présentation de la présente lettre. Au cours de ce préavis, vous pourrez vous absenter deux heures par jour ou 40 heures pendant l'ensemble du préavis pour rechercher un nouvel emploi.

Que vous acceptiez ou non le contrat de sécurisation professionnelle, vous bénéficiez :

- D'une priorité de réembauchage pendant un an et à compter de la rupture de votre contrat à condition de manifester par écrit votre désir d'user de cette priorité dans ce délai d'un an. Cette priorité concerne les emplois compatibles avec votre qualification actuelle ou avec celles que vous viendrez à acquérir sous réserve que vous nous en ayez informé ;

- De l'indemnité de licenciement prévue par la convention collective.

Au terme de votre contrat, nous tiendrons à votre disposition votre certificat de travail, votre solde de tout compte ainsi que votre attestation Pôle Emploi.

En vertu des dispositions de l'article L.1232-6 du Code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; la motivation de cette lettre fixe les limites du litige ».

Le salarié conteste la réalité du motif économique et indique que pour une entreprise de moins de 11 salariés, les difficultés économiques et la diminution du chiffre d'affaires doivent uniquement être appréciées au regard du deuxième trimestre de l'année 2014, qu'ainsi la perte du marché de la ville de [Localité 4] ayant pris à la fin du mois de juin 2015 ne peut être pris en compte d'autant que ce marché n'était pas rentable en termes de marge.

Il indique également concernant le chiffre d'affaires que la comparaison doit être faite au niveau du deuxième trimestre de l'année 2015 du deuxième trimestre de l'année 2014 et non sur l'année et que les difficultés dont argue l'employeur ne saurait justifier le licenciement.

Il estime que la baisse de 15 K € des ventes marchandises entre fin juin 2014 et fin juin 2015 n'a rien de significative si on la compare avec le total des produits d'exploitation sur l'année 2015 qui s'élève à 1'026'489 €, que la baisse des commandes s'explique par les fluctuations du marché que le chiffrage du devis réalisé représente un potentiel de 2'396'000 €.

Il précise également que les chiffres avancés sont altérés, une facture émise pour le compte de la société Kaufman n'ayant pas été volontairement comptabilisée, que la lettre du commissaire au compte aurait dû être envoyée avant la date de son rapport sur les comptes annuels de l'exercice clos le 31 décembre 2014 et que ce rapport ne fait apparaître aucune difficulté économique caractérisée.

En ce qui concerne la réorganisation, le salarié fait observer n'est pas fait mention de la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise dans la lettre de licenciement et qu'en réalité son éviction permettait à la société de réduire les coûts.

Le salarié soutient enfin les difficultés de la société trouve leur origine dans l'utilisation des fonds de la société par le président à des fins purement personnelles (voyages en famille, carburant, entretien de voitures) et que la comptabilité de la société tombe sous le coup de la loi pénale.

L'employeur observe que le salarié fonde son argumentation en page 20 sur des dispositions applicables postérieurement à la procédure de licenciement et que c'est à la date du licenciement que le motif économique doit être apprécié.

Il indique que le salarié tente de tromper la religion de la cour en travestissant les termes de la lettre de licenciement puisqu'en l'espèce la réorganisation de l'entreprise ne caractérise nullement l'élément originel du licenciement économique et que seules les difficultés économiques dûment justifiées par l'entreprise et plus particulièrement par la baisse du chiffre d'affaires constituent le motif du licenciement.

L'employeur considère que les allégations fallacieuses et mensongères du salarié ne sont assorties d'aucune pièce de nature à justifier les prétendus détournements de fonds à l'initiative de M. [V] alors que la comptabilité de la société a fait l'objet d'un double contrôle par l'expert comptable mais également par le commissaire au compte.

Il précise également que les nouvelles pièces produites par le salarié, particulièrement contestables, témoignent que M. [Y] et son épouse se sont rendus coupables de vols de documents appartenant à l'entreprise et que même en procédant à une réintégration des montants excipés, le bilan financier de l'entreprise s'avère tout aussi catastrophique.

L'employeur observe enfin que le salarié était de son côté coutumier de l'usage du télépéage durant les week-ends et qu'il n'hésitait pas à faire supporter à la société le coût des restaurants où il se rendait avec son épouse.

En application de l'article L1233-3 du code du travail dans sa version antérieure au 1er décembre 2016, « est constitutif d'un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non-inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; lorsqu'une entreprise fait partie d'un groupe, les difficultés économiques de l'employeur doivent s'apprécier tant au sein de la société, qu'au regard de la situation économique du groupe de sociétés exerçant dans le même secteur d'activité, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux sociétés ou entreprises situées sur le territoire national » ;

Une réorganisation de l'entreprise ne constitue un motif de licenciement que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe dont elle relève, en prévenant des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi du salarié licencié ;

Le motif économique doit être apprécié à la date de la rupture du contrat de travail soit en l'espèce au mois de juillet 2015 et il est constant que la société Midi Protection n'a qu'un seul établissement, de sorte que les difficultés économiques doivent s'apprécier au sein de cet établissement.

Pour caractériser les difficultés économiques l'employeur produit les bilans de la société notamment pour les années à 2013, 2014, 2015, les rapports du commissaire aux comptes certifiant les comptes annuels comme réguliers et sincères, les courriers de la ville de [Localité 5] et de la ville de [Localité 4] du 23 mars 2015 concernant les marché de travaux non reconduits au début de l'année 2015 et le courrier de l'expert-comptable du 23 juin 2015 qui alerte la société en ces termes « dans le cadre de sa mission il a été constaté une forte diminution de la vente des équipements constatés sur l'exercice 2014 (-41 % par rapport à l'exercice 2013) qui se poursuit sur l'exercice 2015 et la perte du marché de la ville de [Localité 4] sur l'exercice 2015. Compte tenu de la situation je pense que les faits mentionnés ci-dessus sont de nature à compromettre la continuité de l'exploitation de la société Midi protection dans ces conditions je vous remercie de bien vouloir me donner votre analyse de la situation et le cas échéant les mesures envisagées pour assurer la continuité de l'exploitation de la société » (pièces intimée 1 et 6A/B/C).

L'examen de ces pièces fait ainsi apparaître une diminution constante du résultat de la société sur la période concernée.

En effet, entre l'exercice clos de l'année 2013 et celui de l'année 2014 le compte de résultat mentionne une diminution de - 54 026 euros du bénéfice, portant à la somme de 8 739 € le bénéfice à l'issue de l'année 2014 et entre l'exercice clos de l'année 2014 et celui de 2015 le compte de résultat mentionne une perte de - 35'272 €.

Le chiffre d'affaires net est passé de 1.447.422 en 2013 à 1.253.919 en 2014 à 1.024.962 en 2015 et 826.771 euros en 2016 confirmant une baisse importante de l'activité de la société.

Il est constaté par ailleurs que :

- la chute des ventes de marchandises apparaît clairement dans les comptes annuels (bilans 2013- 2014 et 2015) puisqu'en 2013 les ventes s'élevaient à 260'593 euros alors qu'en 2014 elles n'étaient que de 150'502 euros, soit une baisse de 110'091 euros, cette baisse se poursuivant sur les six premiers mois de l'année 2015 en raison notamment de la perte des deux marchés des villes de [Localité 5] et de [Localité 4] en mars et juin 2015. Contrairement à ce que que soutient l'appelant; ces pertes ont bien une incidence significative sur la baisse du chiffre d'affaires et les difficultés de la société. Par ailleurs, la société n'avait pas à répondre aux courriers des villes de [Localité 5] ou de [Localité 4] lui notifiant l'attribution du marché à une autre société en raison d'une offre plus avantageuse au niveau économique que la sienne.

Ainsi le chiffre d'affaire net des produits d'exploitation entre 2014 et 2015 a subi une baisse de 228'957€, contre 193'503 € entre 2013 et 2014.

- les opération concernant l'examen des comptes annuels et l'élaboration des bilans se réalisent au début de l'année suivante. L'expert comptable, commissaire aux comptes, s'est rendu compte à l'issue de la période des bilans en 2015 des éléments évoqués dans son courrier et du fait de la perte des marchés pendant cette période, il ne peut donc lui être reproché de ne pas avoir envoyé son courrier avant la fin de l'exercice 2014 comme soutenu par l'appelant.

- l'appelant ne justifie pas ni de la date, ni de l'existence du chiffrage des devis dont il indique qu'ils représenteraient un potentiel de 2'396'000 pour l'entreprise, ces derniers ne pouvant au surplus être pris en compte que lors de leur acceptation formelle.

- la réorganisation évoquée par l'appelant n'est pas le motif du licenciement mais la conséquence envisagée par l'employeur, le salarié ne devant pas être remplacé dans l'emploi occupé.

- la facture émise pour le compte de la société Kaufman figure dans le le grand livre client (pièce 33)

- les dépenses personnelles de M. [V] au regard de l'ensemble des indicateurs retenus ne peuvent être à l'origine des difficultés économiques de l'entreprise.

En conséquence, l'employeur justifie de la réalité des motifs économiques et la cour par voie de confirmation rejette la demande du salarié à ce titre ainsi que ses demandes financières subséquentes et notamment les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

C. Sur le manquement à l'obligation d'adaptation et de reclassement

Le salarié soutient que la société n'a pas proposé de formation permettant une adaptation rapide du salarié à un autre poste dans l'entreprise et ne lui a pas fait de proposition de reclassement.

Il estime que les e-mails du 15 juillet 2015 et le témoignage de M. [G] ne peuvent pallier ce manquement dans la mesure où la notification du licenciement est intervenue le 3 juillet 2015. Il souligne que l'employeur ne justifie en rien de l'ordre des licenciements retenus conformément à l'article L. 1233-5 du code du travail.

L'employeur indique que des stages de formation ont été mis en place par l'entreprise mais que le salarié a refusé d'y participer. Il fait valoir qu'à la date du licenciement, l'entreprise ne comptait qu'un effectif de cinq salariés, soit une secrétaire comptable, un chef de chantier, deux ouvriers et M. [Y], de sorte qu'aucun reclassement au sein de l'entreprise n'était envisageable et que bien que non tenu à une obligation de reclassement externe, il a sollicité d'autres entreprises.

Le licenciement économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles situés dans l'entreprise et les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie en vertu des dispositions de l'article 1233-4 du code du travail dans sa version applicable au litige.

L'obligation de reclassement pesant sur l'employeur doit être menée de façon sérieuse et loyale, elle est une obligation de moyens.

En l'espèce, il résulte des pièces produites que l'employeur a bien proposé au salarié de participer à une formation en avril 2015 intitulée « développer son efficacité au quotidien ». Cette formation bien que relevant de la formation professionnelle continue pouvait permettre une adaptation du salarié à un nouvel emploi mais n'a pas été acceptée par le salarié (pièces 8 et 9 intimée).

Par ailleurs, il est constant que la société ne disposant que d'un seul établissement avait un effectif de salariés très réduit qui ne permettait pas les permutations ou les aménagements de poste en raison notamment du niveau de qualification du salarié et le registre unique du personnel produit par la société atteste au surplus qu'à la date du licenciement et postérieurement, aucun poste n'était disponible (pièce7 intimée).

Enfin, l'employeur, alors qu'il n'y était pas obligé, a réalisé des démarches aux fins de reclassement de son salarié auprès d'entreprises externes avant la notification du licenciement du 24 juillet 2015 (pièce 19 bis, 50 et 51 ) .

En conséquence, la cour considère que l'employeur a respecté avec loyauté son obligation d'adaptation et de reclassement et qu'aucune faute ne peut lui être reprochée sur le fondement de l'article L.1233- 4 du code du travail et par voie d'infirmation déboute le salarié de ce chef et des demandes indemnitaires de ce chef.

III. Sur les autres demandes

Les circonstances du licenciement ne sont ni brutales ni vexatoires, et en tout état de cause, le salarié ne justifie ni d'un préjudice distinct, ni d'un lien avec les pièces médicales produites.

M. [Y] qui succombe doit s'acquitter des dépens, être débouté de sa demande faite en application de l'article 700 du code de procédure civile, et à ce titre, condamné à payer à la société somme de 1 000 €.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré SAUF s'agissant du manquement à l'obligation d'adaptation et de reclassement ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Rejette la demande indemnitaire pour manquement à l'obligation d'adaptation et de reclassement ;

Condamne M. [U] [Y] à payer à la société Midi Protection la somme de 1 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne M. [U] [Y] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/01302
Date de la décision : 26/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-26;19.01302 ?
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