COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-5
ARRÊT AU FOND
DU 25 MAI 2023
N° 2023/
GM/PR
Rôle N°22/12104
N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ635
[E] [D]
C/
[W] [Z]
Copie exécutoire délivrée
le : 25/05/2023
à :
- Me Timothée HENRY, avocat au barreau de GRASSE
- Me Loïc RENAUD, avocat au barreau de COLMAR
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de GRASSE en date du 04 Août 2022 enregistré au répertoire général sous le n° F 22/00010.
APPELANT
Monsieur [E] [D], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Timothée HENRY, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Agnès BALLEREAU-BOYER, avocat au barreau de GRASSE
INTIMEE
Madame [W] [Z], demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Loïc RENAUD, avocat au barreau de COLMAR
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre
Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller
Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Pascale ROCK.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023
Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Karen VANNUCCI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Par jugement du 17 juin 2021, le conseil de prud'hommes de Grasse a :
-dit que le contrat de travail liant M. [E] [D] à Mme [W] [Z] est un contrat à temps complet,
-fixé le salaire moyen à 2255, 42 euros brut,
-dit que le licenciement prononcé à l'encontre de Mme [W] [Z] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-condamné M. [E] [D] à payer à Mme [W] [Z] les sommes suivantes :
- 10 148, 58 euros au titre d'un rappel de salaires
- 1014, 85 euros au titre des congés payés afférents
- 6766, 26 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif
- 1356, 38 euros de retenue sur salaire pendant la mise à pied
- 2 866, 25 euros d'indemnité légale de licenciement
- 4 510, 84 euros d'indemnité compensatrice de préavis
- 451, 08 euros de congés payés afférents
- 1200 euros au titre des frais irrépétibles
-condamné M. [E] [D] à remettre à Mme [W] [Z] ses bulletins de salaires rectifiés selon la présente décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à compter du 60ème jour et limitée à 90 jours, le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte,
-débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,
-condamné M. [E] [D] aux entiers dépens.
M. [E] [D] n'a pas exécuté son obligation relative aux bulletins de salaires dans le délai imparti par le jugement.
Par requête enregistrée au greffe le 10 janvier 2022, Mme [W] [Z] a sollicité du conseil de prud'hommes de Grasse qu'il liquide l'astreinte qui avait été ordonnée par le jugement du 17 juin 2021 et qu'il condamne M. [E] [D] à lui payer une somme de 4 500 euros à ce titre.
Par jugement du 4 août 2022, le conseil de prud'hommes de Grasse a :
-dit et jugé que M. [E] [D] n'était pas dans une impossibilité matérielle et absolue pour exécuter plus tôt le jugement,
-condamné M. [E] [D] à payer à Mme [W] [Z] la somme suivante : 4 500 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prévue par le jugement du 17juin 2021,
-débouté Mme [W] [Z] de ses autres demandes,
-débouté M. [E] [D] de ses autres demandes reconventionnelles,
-condamné M. [E] [D] aux entiers dépens.
Le 2 septembre 2022, M. [E] [D] a interjeté appel.
Sa déclaration d'appel est ainsi rédigée : 'Cet appel est limité et tend à l'annulation, l'infirmation ou la réformation des chefs du jugement Objet/Portée de l'appel : expressément critiqués suivants :
«- dit et juge que M. [E] [D] n'était pas dans une impossibilité matérielle t absolus pour exécuter plus tôt le jugement,
-condamne M. [E] [D] à payer à Mme [W] [Z] la somme suivante : 4.500 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prévue par le jugement du 17juin 2021,
-déboute M. [E] [Z] de ses autres demandes,
-débouté M. [E] [D] de ses autres demandes reconventionnelles,
-condamne M. [E] [D] aux entiers dépens. »
L'affaire a reçu fixation selon les dispositions de l'article 905 du code de procédure civile.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 février 2023, M. [E] [D] demande à la cour de :
-juger qu'il est bien fondé et recevable en son appel,
-infirmer le jugement en ce qu'il a :
-dit et jugé que M. [E] [D] n'était pas dans une impossibilité matérielle et absolue pour exécuter plus tôt le jugement,
-condamné M. [E] [D] à payer à Mme [W] [Z] 4 500 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prévue par le jugement du 17 juin 2021,
-débouté M. [E] [D] de ses autres demandes reconventionnelles,
-condamné M. [E] [D] aux entiers dépens,
statuant à nouveau :
-déclarer que M. [D] était dans l'impossibilité matérielle et absolue d'exécuter plus tôt le jugement (sur l'aspect de la rectification des bulletins de paie),
en conséquence :
-débouter Mme [W] [Z] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions.
-condamner Mme [W] [Z] aux entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de la société Capstan Cote d'Azur en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Au soutien de sa demande tendant à faire dire que son appel est recevable, l'employeur fait valoir que :
-l'intimée soutient qu'il serait irrecevable dans la mesure où la demande de liquidation de l'astreinte, formulée à hauteur de 4500 euros, ne dépassait pas le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes fixé à 5.000 euros,
- ce taux de compétence (5000 euros) n'est cependant applicable qu'aux instances introduites depuis le 1er septembre 2020,
-or en l'espèce, l'intimée a initialement saisi le conseil de prud'hommes le 29 janvier 2020, tandis que le taux de compétence était alors fixé à 4000 euros seulement,
-Le jugement qui a finalement été rendu le 4 août 2022 (sur la demande de liquidation de l'astreinte) n'est que la continuation de celui rendu le 17 juin 2021 (sur le fond et sur la demande de fixation d'une astreinte),
- Mme [Z] persiste malgré tout dans son argumentation en faisant valoir que le jugement du 17 juin 2021, qui fixe statue au fond et ordonne l'astreinte, a dessaisi le conseil de prud'hommes,
-aussi, selon Mme [Z], il conviendrait de prendre en compte le 10 janvier 2022 (date à laquelle elle a une nouvelle fois saisi le conseil pour demander la liquidation de l'astreinte) et non le 29 janvier 2020 (date à laquelle avait saisi au fond le conseil et demander la fixation d'une astreinte) pour déterminer le taux de ressort applicable,
-toutefois, les anciennes dispositions demeurent applicables devant la cour d'appel a tous les procès dont la première instance a été engagée avant l'abrogation de la règle par le décret (abrogation de la règle de l'unicité de |'instance, abrogation des dispositions spéciales relatives à la péremption d'instance).
-il apparaît, au surplus, que le montant de ce taux de compétence est en réalité indifférent puisque, en l'espèce lors de la seconde saisine du conseil (en liquidation de l'astreinte), Mme [Z] avait par ailleurs formulé une demande indéterminée. En effet, elle avait également sollicité du conseil qu'il ordonne à M. [D] de lui remettre des bulletins de paie et ce, sous une nouvelle astreinte de 80 euros par jour de retard,
-compte tenu de cette demande indéterminée de Mme [Z], le jugement du 4 août 2022 était bien susceptible d'appel,
-à toutes fins utiles, il est précisé qu'il importe peu que le jugement du 4 août 2022 ait indique par erreur qu'il était rendu en dernier ressort.
Sur le fond et pour s'opposer à la demande de l'intimé de liquidation de l'astreinte, l'employeur fait valoir qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité d'exécuter le jugement. Il voulait s'exécuter de bonne foi mais l'injonction mise à sa charge ne dépendait pas de lui.
Par l'intermédiaire de son avocat, il a rapidement entrepris toutes les démarches pour exécuter le jugement, tant Me [F] que le cabinet d'expertise comptable BDO n'ont cessé de relancer le CESU pendant des mois.
Cette rectification des bulletins de paie ne pouvait pas être effectuée par le cabinet d'expertise comptable BDO et encore moins par M. [E] [D] mais uniquement par le CESU lui-même.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 mars 2023, Mme [W] [Z] demande à la cour de :
-rejeter l'appel de M. [E] [D] comme étant irrecevable et subsidiairement infondé,
-confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
y ajoutant,
-condamner M. [E] [D] à payer à Mme [W] [Z] :
1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif,
2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Sur sa demande tendant à faire juger irrecevable l'appel de l'employeur, la salariée avance que :
-en l'espèce, c'est elle qui a initialement saisi le conseil de prud'hommes de Grasse le 10 janvier 2022 en liquidation de l'astreinte (fixée par le jugement initial du 17 juin 2021) et sa demande de liquidation portait alors sur la somme de 4 500 euros
-dans ces conditions, seul un pourvoi en cassation était ouvert à l'encontre du jugement querellé,
-pour tenter de justifier la recevabilité de son appel, M. [E] [D] soutient qu'en elle aurait initialement saisi le conseil de prud'hommes non pas le 10 janvier 2022 mais bien le 29 janvier 2020 (au fond et pour voir fixer une astreinte contre son employeur) tandis que le taux de compétence était alors fixé à 4000 euros seulement,
-la thèse de M. [E] [D] est infondée. Conformément à l'alinéa 1 de l'article 481 du code de procédure civile : « Le jugement, dès son prononcé, dessaisit le juge de la contestation qu'il tranche. ». Ainsi, en rendant son jugement au fond le 17 juin 2021 (lequel fixait une astreinte) le conseil a été dessaisi,
-pour tenter d'échapper à l'irrecevabilité de son appel, M. [E] [D] soutient également que le taux de compétence serait en réalité indifférent puisque Mme [W] [Z] aurait formulé par ailleurs une demande indéterminée en sollicitant du conseil de prud'hommes la remise de bulletins de paie sous une nouvelle astreinte de 80 euros par jour de retard.
-cependant, ce moyen est inopérant. En effet en vertu des dispositions combinées des articles R.211-3-24 du code de l'organisation judiciaire et de l'article 761 du code de procédure civile, une demande indéterminée n'ouvre pas le droit d'interjeter appel si comme en l'espèce elle a pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas le taux du dernier ressort,
-de plus, conformément à l'article R.1462-1 2° du code du travail « Le conseil de prud'hommes statue en dernier ressort lorsque la demande tend à la remise, même sous astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer, à moins que le jugement ne soit en premier ressort en raison du montant des autres demandes ».
-en l'occurrence, la demande indéterminée de remise de bulletins de salaire de la salariée n'ouvrait pas le droit à l'employeur d'interjeter appel. De plus, la demande de liquidation de l'astreinte de celui-ci ne dépassait pas le taux de compétence en dernier ressort.
Sur sa demande subsidiaire tendant à dire que l'appel est infondé, la salariée affirme que l'employeur ne rapporte pas la preuve d'une impossibilité à laquelle il a été confronté d'exécuter l'obligation assortie d'une astreinte, se contentant de verser au débat des échanges qu'il a eus avec un cabinet d'expertise comptable et le CESU.
Aucune disposition légale ou réglementaire ne lui imposait de faire procéder à l'établissement des bulletins de salaire incriminés par le CESU. M. [E] [D] aurait tout aussi bien pu faire établir des bulletins de salaire rectifiés par son expert-comptable.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la procédure
1-Sur la recevabilité de l'appel
L'article 34 du code de procédure civile énonce : La compétence en raison du montant de la demande ainsi que le taux du ressort au-dessous duquel l'appel n'est pas ouvert sont déterminés par les règles propres à chaque juridiction et par les dispositions ci-après.
L'ancien article D1462-3 du code du travail, dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 20 août 2020, disposait alors : Le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes est de 4 000 euros.
Cependant, le taux du ressort a été modifié et a été fixé à 5000 euros, concernant les instances introduites devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er septembre 2020 et ce conformément à l'article 2 du décret n° 2020-1066 du 17 août 2020.
Ainsi, l'article D1462-3 du code du travail, dans sa version en vigueur depuis le 20 août 2020 dispose désormais :Le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes est de 5 000 euros.
Enfin, l'astreinte, mesure de contrainte destinée à vaincre la résistance opposée à l'exécution d'une injonction, en est l'accessoire, le jugement rendu sur une demande en paiement d'une somme dont le montant est inférieur au taux du dernier ressort, n'est pas susceptible d'appel lorsque celle-ci est assortie d'une demande d'astreinte.
En l'espèce, l'intimée soutient d'abord que l'appel de M. [E] [D] est irrecevable notamment parce que le jugement du 4 août 2022 a été rendu en dernier ressort.
-Sur la voie de recours ouverte contre le jugement du 4 août 2022
Pour déterminer si l'appel de l'employeur contre le jugement du 4 août 2022 est recevable ou non, la cour doit rechercher si le jugement a été rendu en premier ou dernier ressort au regard des règles applicables et des montants des demandes qui ont été formées.
A titre liminaire, la cour observe que même si le jugement mentionne qu'il a été rendu en dernier ressort, cette mention ne la dispense pas de rechercher s'il est éventuellement quand même susceptible d'appel et ce par application de l'article 536 du code de procédure civile.
Le jugement du 4 août 2022 a été rendu sur la requête de la salariée reçue le 10 janvier 2022 par le greffe. L'instance prud'homale a été introduite par la salariée après l'entrée en vigueur de la réforme du taux du ressort et le taux du ressort applicable à ce jugement était alors de 5000 euros.
Toujours pour déterminer si ce jugement était susceptible d'appel, la cour doit ensuite rechercher quels étaient les montants des demandes des parties.
S'agissant des demandes de l'employeur, celles-ci se limitaient à demander le rejet des prétentions de la salariée.
Concernant les demandes formulées par la salariée, il est tout d'abord acquis aux débats que la salariée avait présenté une demande de liquidation de l'astreinte et ce à hauteur de 4500 euros (liquidation de l'astreinte de 50 euros par jour de retard fixée par un précédent jugement du 17 juin 2021).
Cette demande, inférieure au taux du ressort alors applicable, ne saurait ouvrir la voie de l'appel à l'employeur.
L'employeur soutient ensuite que la salariée avait également présenté une demande de nature indéterminée et ce au moment des plaidoiries. Cette autre demande formulée par la salariée lui ouvrirait donc la voie de recours de l'appel.
En l'espèce, il appartient à l'appelant, qui soutient que la salariée avait présenté une demande indéterminée lui ouvrant la voie de recours de l'appel, de le démontrer.
Or, s'agissant de la nature précise de cette demande litigieuse, le jugement du 4 août 2022 indique qu'il s'agit d'une demande de la salariée de nouvelle astreinte concernant les bulletins de paie rectifiés. Cette définition de cette demande est corroborée par une note en délibéré adressée au conseil du 14 mars 2022 par l'employeur. En effet, dans cette note, M. [E] [D] indique qu'il répond, par cette note en délibéré, à la demande nouvelle suivante de la salariée : 'au cours des plaidoiries, les époux [Z] ont soulevé le fait qu'ils n'avaient pas reçu certains bulletins de paie rectifiés de la période courant de novembre 2016 à novembre 2019".
Il apparaît donc que la salariée avait aussi présenté une demande de remise de bulletins de paie rectifiés sous astreinte.
Pour déterminer si cette demande indéterminée était susceptible d'appel ou non, les règles applicables sont les suivantes :
-en premier lieu, l'article R1462-1 2° du code du travail dispose : Le conseil de prud'hommes statue en dernier ressort :2° Lorsque la demande tend à la remise, même sous astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l'employeur est tenu de délivrer, à moins que le jugement ne soit en premier ressort en raison du montant des autres demandes,
-cependant, lorsque la demande tend à faire rectifier un document remis par l'employeur à l'occasion de la rupture du contrat de travail, la demande est indéterminée,
-par exception, lorsque la demande constitue la conséquence nécessaire d'une demande en paiement chiffrée, la demande tendant à la rectification de bulletins de paie est sans incidence sur l'ouverture des voies de recours.
En l'espèce, il apparaît que la demande de la salariée de remise de certains bulletins de salaires rectifiés est la conséquence de ses demandes en paiement chiffrées présentées lors de l'instance précédente au fond.
En effet, lors de l'instance initiale, la salariée avait sollicité un rappel de salaires auquel le conseil avait fait droit dans son jugement du 17 juin 2021.
Dans ces conditions, la demande indéterminée de remise de bulletins de salaires rectifiés est sans incidence sur les voies de recours.
En conclusion, les demandes qui ont été présentées par la salariée au conseil lors de l'instance en liquidation de l'astreinte n'étaient pas susceptibles d'ouvrir la voie de l'appel.
Ainsi, en se référant à la seule instance en liquidation de l'astreinte, le jugement du 4 août 2022 n'était pas susceptible d'appel.
-Sur l'incidence des voies de recours ouvertes contre le jugement du 17 juin 2021
Pour tenter d'échapper à l'irrecevabilité de son appel, l'employeur fait valoir que pour déterminer la voie de recours ouverte contre le jugement du 4 août 2022 ayant liquidé l'astreinte, il conviendrait en réalité de se référer à celle ouverte contre le jugement au fond du 17 juin 2021 (jugement ayant statué au fond et ayant mis une astreinte à la charge de l'employeur).
Pour lui, le jugement du 17 juin 2021 ayant indéniablement été rendu en premier ressort, l'appel est en conséquence ouvert contre celui du 4 août 2022.
Pour déterminer si l'appel était ouvert ou non contre le jugement du 4 août 2022, la cour doit se référer aux demandes des parties formulées dans le cadre de la seule instance à l'issue de laquelle il a été rendu.
Or, l'instance en question est celle qui a été introduite le 10 janvier 2022 lorsque la salariée a saisi le conseil de prud'hommes pour demander la liquidation de l'astreinte.
Contrairement à ce que soutient la salariée, la cour ne saurait prendre en considération les demandes qui ont été formées dans le cadre de l'instance au fond initialement introduite le 29 janvier 2020.
Ces deux instances sont en effet différentes. La première instance portait sur le fond de l'affaire et avait pour objectif de déterminer les droits et créances du salarié. L'astreinte qui a été fixée était seulement destinée à vaincre la résistance opposée à l'exécution d'une injonction.
La seconde instance, dont la cour est saisie, porte sur la liquidation de l'astreinte. Il s'agit d'une action autonome et distincte de l'instance au fond. Elle n'a pas la même finalité que l'instance au fond.
A cet égard, le fait que le jugement du 17 juin 2021 mentionne que le conseil se réserve le droit de liquider l'astreinte ne signifie pas que le conseil n'était pas dessaisi. Une telle mention indique seulement que le conseil s'est expressément réservé le pouvoir de liquider l'astreinte conformément à l'article L 131-3 du code des procédures civiles d'exécution. Le jugement du 17 juin 2021 n'était pas un jugement avant-dire droit au fond.
Ainsi, pour déterminer la voie de recours ouverte contre le jugement du 4 août 2022 ayant liquidé l'astreinte, la cour doit seulement prendre en considération les demandes ayant été formées par les parties dans le cadre de l'instance en liquidation de l'astreinte.
Comme la cour l'a précédemment relevé, le jugement du 4 août 2022 a été rendu en dernier ressort.
En conséquence, l'appel de M. [E] [D] contre le jugement de liquidation de l'astreinte est irrecevable.
Sur la demande de dommages-intérêts de l'intimée
Vu l'article 1240 du code civil,
La demande de dommages-intérêts de la salariée pour procédure abusive est rejetée. La faute de l'appelant, qui a pu se méprendre sur l'étendue de ses droits, est insuffisamment démontrée.
Sur les frais du procès
En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, M. [E] [D] sera condamné aux dépens
Il n'est pas inéquitable de débouter Mme [W] [Z] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
M.[E] [D] est débouté de sa demande d'indemnité de procédure.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud'homale,
-déclare irrecevable l'appel contre le jugement du 4 août 2022,
y ajoutant,
-rejette la demande de dommages-intérêts de Mme [W] [Z],
-rejette les demandes d'indemnités de procédure,
-condamne M. [E] [D] aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT