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11/05/2023 | FRANCE | N°18/18915

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 11 mai 2023, 18/18915


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2023



N° 2023/





Rôle N° RG 18/18915 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDNJF







SA SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT





C/



[F] [P]

[U] [K]

Société ERILIA

Compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD

SAS SEBA MEDITERRANEE

SARL PORTA BATIMENT



Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Maxime ROUILLOT



Me Laure LAYDEVANT
>

Me Julie DE VALKENAERE







Copie certifiée conforme délivrée

le :

à l'expert judiciaire :



Monsieur [H] [D]





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 08 Novembre 2018 enregistré au r...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/18915 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDNJF

SA SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT

C/

[F] [P]

[U] [K]

Société ERILIA

Compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD

SAS SEBA MEDITERRANEE

SARL PORTA BATIMENT

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Maxime ROUILLOT

Me Laure LAYDEVANT

Me Julie DE VALKENAERE

Copie certifiée conforme délivrée

le :

à l'expert judiciaire :

Monsieur [H] [D]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 08 Novembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/00436.

APPELANTE

Société ERILIA

, venant aux droits de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT

, venant elle-même aux droits de la Société d'Economie Mixte Vallaurienne (SEMIVAL)

, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Maxime ROUILLOT de la SELARL SELARL D'AVOCATS MAXIME ROUILLOT- FRANCK GAMBINI, avocat au barreau de NICE substituée par Me Joy PESIGOT, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [F] [P]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/014517 du 28/12/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

né le 14 Septembre 1968 à [Localité 10], demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Laure LAYDEVANT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Madame [U] [K]

née le 27 Avril 1956 à [Localité 10], demeurant [Adresse 8]

défaillante

Société ERILIA

venant aux droits de la SOCIETE SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT ,

, demeurant [Adresse 7]

défaillante

Compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD

, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Julie DE VALKENAERE de l'AARPI LASTELLE & DE VALKENAERE, avocat au barreau de NICE

SAS SEBA MEDITERRANEE , représentée par la SCP BR ET ASSOCIES es qualité de Liquidateur Judiciaire,

, demeurant [Adresse 9]

défaillante

SARL PORTA BATIMENT

C/O Me [S] [B] ES QUALITE DE LIQUIDATEUR JUDICIAIRE, demeurant C/O Me [B] [S] - [Adresse 3]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Inès BONAFOS, Présidente, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023.

ARRÊT

EXPOSÉ DU LITIGE

La SOCIETE D'ECONOMIE MIXTE VALLAURIENNE (SEMIVAL) était propriétaire d'un immeuble ancien situé dans le centre historique de [Localité 12], situé îlot [Adresse 1], au [Adresse 6] (06).

Cet immeuble est mitoyen avec celui qui appartenait à Madame [L] [P], décédée le 26 juin 2013, laissant pour héritiers Monsieur [F] [P] et Madame [U] [K].

En 2009, la société SEMIVAL a entrepris des travaux de rénovation de son immeuble.

Sont intervenus à l'opération:

- la société SEBA Méditerranée, en qualité de maître d''uvre,

- la société PORTA chargée des travaux de gros 'uvre, assurée auprès de la société AXA FRANCE IARD.

Madame [P] s'est plainte au mois de juin 2009 de l'apparition de fissures dans son appartement ainsi que dans les parties communes.

Suite à sa déclaration de sinistre auprès de son assureur, une expertise amiable a été diligentée par le cabinet SARETEC qui a déposé son rapport le 05 février 2010.

Par actes des 9, 12 et 20 mai 2014, Monsieur [F] [P] a fait assigner les sociétés SEMIVAL, SEBA Méditerranée et PORTA en référé expertise.

Par ordonnance de référé du 30 juin 2014, une expertise a été ordonnée, le premier expert désigné ayant été remplacé par Monsieur [D] [H].

La société PORTA a été déclarée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de DRAGUIGNAN par jugement du 23 mai 2011.

La société SEBA a également été déclarée en liquidation judiciaire par jugement du 17 janvier 2017.

Par acte du 27 mai 2014, Monsieur [F] [P] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de GRASSE les sociétés SEMIVAL, SEBA Méditerranée, et PORTA aux fins d'obtenir principalement leur condamnation à lui payer par provision 10 062,16 euros au titre des dommages causés par elles, outre les coûts des travaux de reprise (mémoire).

Par conclusions additionnelles, Monsieur [P] a sollicité la condamnation solidaire des sociétés SEMIVAL, SEBA MEDITERRANEE et PORTA BATIMENT au paiement d'une somme de 38 424 euros au titre des dommages matériels subis, outre 20 000 euros au titre du préjudice moral.

La société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT, venant aux droits de la société SEMIVAL, a appelé en garantie la compagnie AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur de la société PORTA, cocontractante de la société SEMIVAL, afin d'être relevée et garantie des éventuelles condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 10 mars 2016.

Par jugement réputé contradictoire du 8 novembre 2018, le tribunal de grande instance de GRASSE a:

- condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à l'indivision de Monsieur [F] [P] et Madame [U] [K], la somme de 42 000 euros au titre des dommages et intérêts causés par les entreprises pour les travaux à entreprendre avec indexation sur l'indice BT 01,

- condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à Monsieur [F] [P] la somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral subi,

- ordonné la mise hors de cause de la société SEBA MEDITERRANEE,

- constaté que l'action en garantie de cette dernière devient sans objet,

- condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à Monsieur [F] [P] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à la société SEBA et à la société AXA France IARD la somme de 2 500 euros, chacune, au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT en tous les dépens, dont les frais d'expertise judiciaire.

Par déclaration reçue au greffe le 30 novembre 2018, la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT a relevé appel dudit jugement en toutes ses dispositions, en intimant :

1/ Monsieur [F] [P],

2/ Madame [U] [K],

3/ la SAS SEBA MEDITERRANEE,

4/ la SARL PORTA BATIMENT,

5/ la SA AXA FRANCE IARD.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 04 juillet 2022, la Société ERILIA, venant aux droits de la SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT suivant un traité de fusion absorption en date du 31 mars 2021, appelante demande à la cour:

Vu les dispositions de l'article 2224 du code civil

Vu les dispositions de l'article 1217 du code civil et 1231-1

Vu les dispositions de l'article 1241 du code civil

A titre principal

PRENDRE ACTE de l'intervention de la société ERILIA venant aux droits de la SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT suivant un traité de fusion absorption en date du 31 mars 2021,

JUGER que les consort [P]/ [K] ne rapportent pas la preuve de l'imputabilité des désordres affectant leur immeuble aux travaux de réhabilitation de l'immeuble de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT,

En conséquence,

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à l'indivision de Monsieur [F] [P] et Madame [U] [K] la somme de 42 000 euros au titre des dommages et intérêts causés par les entreprises pour les travaux à entreprendre avec indexation sur l'indice BT 01,

DEBOUTER Monsieur [P] de toutes fins, prétentions de ce chef,

JUGER que Monsieur [F] [P] ne rapporte pas la preuve du lien de causalité entre le départ puis le décès de sa maman et les désordres affectant l'immeuble, ni du préjudice qu'il subit du fait du départ de sa maman en maison de retraite,

En conséquence,

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à Monsieur [F] [P] la somme de 10 000 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral,

DEBOUTER Monsieur [P] de toutes fins, prétentions de ce chef,

A titre subsidiaire,

JUGER que la responsabilité de la société ERILIA, venant aux droits de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT, doit être limitée à la prise en charge de 50 % du coût des réparations,

INFIRMER la condamnation de la société SEMIVAL à payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER Monsieur [P] aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL ROUILLOT-GAMBINI, représentée par Maître Maxime ROUILLOT, avocat aux offres de droit,

Toujours à titre subsidiaire

JUGER que les sociétés PORTA et SEBA sont responsables des désordres reprochés à la réhabilitation de l'immeuble litigieux,

FAIRE DROIT à l'appel en garantie formé par la société ERILIA, venant aux droits de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à l'encontre de la compagnie AXA FRANCE IARD, prise en sa qualité d'assureur de la société PORTA,

En conséquence,

CONDAMNER la société AXA FRANCE IARD à relever et garantir la société ERILIA, venant aux droits de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre,

En tout état de cause,

DEBOUTER Monsieur [P] [F] de l'ensemble de ses demandes, fins et moyens,

DEBOUTER la société AXA de l'ensemble de ses demandes,

CONDAMNER la société AXA FRANCE I.AR.D à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL ROUILLOT-GAMBINI, représentée par Maître Maxime ROUILLOT, avocat aux offres de droit.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 24 novembre 2021, Monsieur [F] [P], intimé, demande à la cour:

Vu les dispositions de l'article 1382 du Code civil ancien, 1240 nouveau

Vu le rapport d'expertise amiable établi par la SARETEC en date du 5 février 2010,

Vu les mises en demeure en date du 18 août 2010 et 17 septembre 2010,

Vu l'état descriptif des travaux par Monsieur [F] [P],

Vu les factures et devis fournis,

Vu le rapport d'expertise amiable,

Vu le rapport d'expertise définitif,

RECEVOIR Monsieur [P] en sa constitution d'intimé et le DECLARER recevable en son appel incident.

CONFIRMER le jugement dont appel:

- en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant au droit de la société SEMIVAL dans la survenance des désordres,

- en ce qu'il a condamné cette société à payer à l'indivision de Monsieur [F] [P] et Madame [U] [K] la somme principale de 42 000 euros au titre des dommages causés par les entreprises pour les travaux à entreprendre,

Le réformer sur le montant des dommages intérêts alloués, et statuer à nouveau:

CONDAMNER la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant aux droits de la société SEMIVAL ou tout autre responsable à lui payer la somme de 100 000 euros au titre du préjudice moral subi,

CONDAMNER la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant au droit de la société SEMIVAL ou tout autre responsable à lui payer la somme de 17 640 euros au titre de son préjudice de jouissance,

CONDAMNER la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant au droit de la société SEMIVAL ou tout autre responsable à payer à l'indivision de Monsieur [F] [P] et Madame [U] [K] la somme de 52 920 euros au titre du préjudice financier subi du fait de la perte des loyers,

Au besoin, PRONONCER ces condamnations solidairement avec la société SEBA MEDITERRANEE, la société PORTA BATIMENT et AXA FRANCE IARD,

Condamner la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant au droit de la société SEMIVAL, au besoin solidairement avec la société SEBA MEDITERRANEE, la société PORTA BATIMENT, la SA AXA FRANCE IARD, à lui payer la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant aux droits de la société SEMIVAL, au besoin solidairement avec la société SEBA MEDITERANEE, la société PORTA BATIMENT, la SA AXA FRANCE IARD, aux entiers dépens dont les frais d'expertise ordonnée par ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Grasse en date du 30 juin 2014.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 21 mai 2019, la société AXA FRANCE IARD, intimée, demande à la cour:

Vu les dispositions de l'article 1147 du Code Civil (aujourd'hui 1217 du Code Civil),

Vu les dispositions de l'article 1382 du Code Civil (aujourd'hui 1241du Code Civil),

Vu le rapport déposé par Monsieur [H] [D] le 10 mars 2016,

Confirmer le jugement entrepris,

Débouter la SA SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant aux droits de la société D'ECONOMIE MIXTE VALLAURIENNE- SEMIVAL de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Condamner la SA SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT venant aux droits de la société D'ECONOMIE MIXTE VALLAURIENNE SEMIVAL au paiement de la somme de 2 500 euros en cause d'appel sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Madame [U] [K] n'a pas constitué avocat.

La déclaration d'appel lui a été signifiée par acte du 06 février 2019 (dépôt étude).

La SAS SEBA MEDITERRANEE n'a pas constitué avocat.

La déclaration d'appel a été signifiée par acte du 07 février 2019 remis à la SCP BR ET ASSOCIES, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire (à sa secrétaire, personne habilitée).

La SARL PORTA BATIMENT n'a pas constitué avocat.

La déclaration d'appel a été signifiée par acte du 07 février 2019 (dépôt étude) à Maître [B] [S], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire, laquelle a refusé de recevoir l'acte au motif que les opérations de liquidation sont clôturées en son étude depuis le 18 février 2016.

Les dernières conclusions de l'appelante ont été signifiées à ces trois parties par actes des 13, 18 et 27 juillet 2022.

L'ordonnance de clôture est intervenue le16 janvier 2023.

MOTIFS

A titre liminaire, et dans la mesure où tous les intimés défaillants n'ont pas été cités à leur personne, il sera statué par défaut en application de l'article 474 alinéa 2 du code de procédure civile.

Au vu des justificatifs produits, il convient d'accueillir l'intervention de la société ERILIA venant aux droits de la SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT suivant un traité de fusion absorption en date du 31 mars 2021.

Sur la recevabilité de certaines demandes

Alors qu'il résulte des assignations délivrées à la SARL PORTA BATIMENT et à la SAS SEBA MEDITERRANEE qu'elles ont toutes les deux fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, clôturée pour la première, et dont l'issue n'est pas justifiée pour la seconde, que les organes de ces procédures collectives n'ont pas été intimés, et qu'il n'est fait état d'aucune déclaration de créances, les demandes de condamnations à paiement formées par Monsieur [P] à l'encontre de ces sociétés doivent être déclarées irrecevables.

Par ailleurs, la cour rappelle qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions des parties, de sorte que les prétentions énoncées par l'appelante relative au caractère nouveau de certaines demandes formées en appel par Monsieur [P] dans les motifs de ses conclusions et non reprises dans le dispositif de celles-ci, ne seront pas examinées, étant observé qu'il n'y a pas lieu de relever d'office l'irrecevabilité des demandes relatives au préjudice de jouissance et au préjudice financier formées en appel par Monsieur [P] alors qu'il s'agit de demandes accessoires et complémentaires aux demandes d'indemnisation du préjudice matériel résultant des désordres invoqués, pouvant être ajoutées en appel par les parties, en vertu de l'article 566 du code de procédure civile.

Sur les désordres, les responsabilités et les recours

Il résulte des pièces régulièrement produites et des explications des parties:

- que par courrier du 26 octobre 2009, Monsieur [F] [P] informait la SEMIVAL de l'apparition d'énormes fissures depuis le début de ses travaux, sur toute la longueur et la largeur des murs de l'immeuble appartenant à sa mère (pièce 1),

- que par courrier du 29 octobre 2009, la SEMIVAL lui fixait un rendez-vous au 2 novembre suivant en présence du maître d'oeuvre 'afin d'examiner tous les problèmes survenus et de les résoudre immédiatement' (pièce 2),

- que dans son rapport d'expertise amiable clôturé le 05 février 2010 , l'expert du cabinet SARETEC a notamment indiqué:

* l'immeuble de Madame [P] comprend un RDC et 3 étages, les appartements du RDC et du 1er étage sont loués, le fils de Madame [P] occupe l'appartement du 2ème étage et elle-même occupait habituellement celui du 3ème étage, mais étant âgée et compte tenu des nuisances engendrées par les travaux elle a préféré s'installer provisoirement dans une autre ville,

* l'immeuble de Madame [P] fait l'angle de la [Adresse 2] et [Adresse 6], il est mitoyen, dans cette dernière avec celui que la SEMIVAL fait actuellement rénover dans le cadre d'un plan de résorption de l'habitat insalubre,

* avoir constaté dans la cage d'escalier dans le mur du fond et mitoyen à l'immeuble SEMIVAL diverses fissures verticales ou inclinées du 1er au 2ème et du 2ème au 3ème,

au deuxième étage dans la chambre de Monsieur [P] dont la peinture est neuve, des fissures visiblement récentes en cueillie, fissures en hachures cloisons Nord, et un réseau de fissures sur le mur sud (mitoyen à l'immeuble SEMIVAL),

une lézarde inclinée de, sous la fenêtre, traversante puisqu'on la voit aussi en façade [Adresse 6],

de nombreuses fissures sont également apparues dans l'appartement du 3ème étage, dans la cuisine, contre le mur mitoyen et en façade [Adresse 6], la peinture est ancienne et on constate que des fissures avaient été rebouchées il y a sans doute longtemps, elles se sont rouvertes, la plus notable étant une fissure horizontale,

les fenêtres des trois étages situées à environ un mètre de la mitoyenneté avec l'immeuble SEMIVAL sont bloquées et il existe un décalage important entre les deux vantaux,

une auréole jaunâtre en bas du mur de l'escalier mitoyen à l'immeuble SEMIVAL entre le 2ème et le 3ème étage atteste d'une infiltration,

au même endroit, le mur mitoyen était enfoncé et grossièrement rebouché, ce trou résultant manifestement d'un incident de chantier,

la fenêtre de la cage d'escalier située en partie supérieure du mur mitoyen a été obturée, côté immeuble SEMIVAL, par des parpaings,

lors de la visite du chantier SEMIVAL, il a été constaté que le câble TV passant précédemment à l'extérieur contre la façade se trouvait à l'intérieur de locaux de SEMIVAL,

* les fissures sur le mur mitoyen résultent de l'effet des vibrations engendrées par les travaux de démolition et de scellement des nouvelles poutres, voire par endroit de dalles prenant appui sur le mur mitoyen; il s'agit d'un mur en pierres non appareillées et hourdées d'un mortier pauvre, par nature très sensible aux vibrations ;

il s'est produit aussi un déplacement horizontal de la façade [Adresse 6], sans doute lors de démolitions de planchers qui la butonnaient; dans cette hypothèse, les nouveaux planchers ont rétabli l'équilibre; ce déplacement est à l'origine de la fissure en façade du 3ème étage et du blocage des fenêtres; cette hypothèse est corroborée par les fissures en hachures du 2ème étage, caractéristiques de mouvements horizontaux (page 7 du rapport),

* l'infiltration résulte du fait que la toiture de l'immeuble SEMIVAL, qui est plus basse que celle de l'immeuble [P], a été déposée et que le solin assurant l'étanchéité de la pénétration continue de cette toiture contre la partie en émergence du mur mitoyen, n'est pas encore réalisée,

* l'obturation de la fenêtre et le passage du câble d'antenne à l'intérieur des locaux SEMIVAL ont une même origine: la pente de l'ancien toit de l'immeuble SEMIVAL étant trop faible vis-à-vis des règles de l'art actuel, elle a été augmentée, ce qui amène à remonter le faîtage; la nouvelle toiture est donc, au niveau de ces deux éléments, plus haute qu'avant,

* Monsieur [M], directeur de la SEMIVAL, s'est dit lors de la réunion d'expertise amiable contradictoire « tout à fait conscient que les travaux de rénovation lourde réalisés dans des immeubles vétustes entraînent le plus souvent des dégradations et des inconvénients chez les voisins et a indiqué être disposé à faire réaliser les travaux de réparation nécessaires », dont il demandait à l'expert d'en faire la liste (page 8 du rapport),

- que la SEMIVAL n'apportait aucune réponse aux deux courriers du 18 août 2010 et du 17 septembre 2010 qui lui étaient adressés par l'assureur protection juridique de Madame [P] afin de faire réaliser les travaux de reprise préconisés par l'expert amiable, et le mettant en demeure de le faire (pièces 9 et 10 de Monsieur [P]),

- que l'expert judiciaire constatait lors de sa visite du 20 octobre 2014 la réalité des désordres invoqués par les consorts [P] énumérés dans le rapport d'expertise amiable susvisé, et précisait avoir constaté des désordres supplémentaires dans les appartements du RDC et du 1er étage (lesquels n'avaient pas pu être visités à cause de l'absence des locataires lors de l'expertise amiable) soit:

* au RDC dans la cuisine une grosse fissure sur le linteau de la fenêtre [Adresse 6] de 4 mm de largeur, cette fissure part de l'angle Sud de la fenêtre et se poursuit vers le plafond avec un angle de 45° et avec une largeur de 4 mm,

l'angle Sud Est présente un affaissement important, l'allège de la fenêtre présente une fissure inclinée à 45° de 4 mm de largeur, les vantaux de la fenêtre [Adresse 6] présentent un décrochement de 22 mm au droit de l'axe de la fenêtre;

dans le séjour, le décalage des volets de la fenêtre [Adresse 6] est de 15 mm (affaissement du volet Sud), le décalage des volets de la fenêtre [Adresse 11] est de 15 mm (affaissement du volet Ouest),

il apparaît ainsi que l'angle Nord-Est de l'immeuble [P] est resté stable, et des tassements se sont produits pour les murs porteurs qui s'éloignent de cet angle,

en plafond, il existe 2 poutres porteuses qui présentent des fissures longilignes, et l'angle Nord-Ouest du logement présente une fissure verticale à l'angle des cloisons,

- que l'expert [D] a notamment conclu:

* l'immeuble des consorts [P], dont le mur de façade est contre la [Adresse 6], est constitué de trois murs en pierres porteurs, qui sont séparés par les deux alignements de fenêtres; au cours du temps, ces trois murs ont subi des tassements et des déplacements différentiels; le mur Nord situé à l'angle des deux rues est resté stable, le mur central a subi de légers mouvements, et le mur Sud a subi des mouvements importants entraînant également des désordres sur le mur mitoyen avec le défendeur VALLAURIENNE/SEMIVAL,

* trois types de dommages sont consécutifs aux désordres constatés:

1/ des défauts d'étanchéité à l'air et à l'eau découlant des fissurations importantes affectent le mur de la façade Sud,

2/ des dommages esthétiques (fissures) affectent les cloisons et les planchers intérieurs à l'immeuble,

3/ des défauts de fonctionnement affectent les fenêtres suite aux déformations excessives du mur de la façade Est,

* les désordres de type fissures devaient exister en juillet 2008 (forte probabilité), cependant les parties ne mentionnent l'apparition de fissures qu'en juin 2009,

* les désordres résultent du tassement du mur mitoyen qui a généré un affaissement de l'angle Sud Est de l'immeuble [P], deux causes probables sont à l'origine de ce tassement:

1/ les travaux de réfection des réseaux d'eaux usées et d'eaux pluviales à l'initiative de la ville de [Localité 12] en 2007,

2/ les travaux de démolitions réalisés par le défendeur PORTA en 2009, il apparaît probable que lors des travaux de 2007, des fissures se soient produites sur les étages inférieurs de l'immeuble [P] et que les étages supérieurs n'ont fait l'objet d'une fissuration que lors des travaux effectués en 2009 par le défendeur VALLAURIENNE/SEMIVAL,

* il apparaît que le défendeur VALLAURIENNE/SEMIVAL a fait un choix dans sa programmation budgétaire pour réaliser les constructions entreprises à proximité de l'immeuble du demandeur, en prévoyant un budget spécifique pour réparer les désordres qui pouvaient affecter les immeubles mitoyens à ses travaux,

* la seule malfaçon certaine réalisée par l'entreprise PORTA est celle qui concerne le percement accidentel de la cage d'escalier de l'immeuble du demandeur, ce désordre a été réparé pendant le chantier,

* le défendeur VALLAURIENNE/SEMIVAL a fait le choix de procéder aux travaux de réparations des désordres pouvant affecter les immeubles voisins à son chantier; de fait la responsabilité de la réparation des désordres le concerne exclusivement'.

Alors que l'intimé [P] sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce que le premier juge a retenu la responsabilité de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT dans la survenance des désordres sur le fondement des troubles anormaux de voisinage, l'appelante est mal fondée à soutenir qu'il fonderait exclusivement ses demandes sur l'article 1382 du code civil applicable au litige.

Il convient de rappeler qu'en application du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage, le maître de l'ouvrage des travaux réalisés sur son fonds est responsable de plein droit à l'égard du voisin victime, dès lors que sont établis un lien entre les travaux et les désordres, ainsi que l'anormalité du trouble.

Les constructeurs, dont les maîtres d'oeuvre, voisins occasionnels, sont également responsables de plein droit à l'égard du voisin victime, si la preuve est rapportée d'une relation de cause directe entre les troubles subis et les travaux effectués par l'entrepreneur ou la mission confiée au maître d'oeuvre.

Et, le maître de l'ouvrage comme les constructeurs ne peuvent échapper à cette responsabilité de plein droit que par la preuve d'une force majeure.

En l'espèce, la matérialité des désordres constatés par les experts et la réalité des dommages consécutifs, ainsi que leur caractère anormal ne sont pas discutés par les parties.

Au vu des photographies produites, de l'ancienneté de l'immeuble appartenant aux consorts [P] (dont la construction date de 1700) et des structures des immeubles de cet îlot du centre-ville historique de la même époque, dont l'expert [D] a précisé qu'elles sont fortement imbriquées, avec des murs mitoyens entre les divers immeubles, les murs porteurs étant constitués de pierres jointoyées, de sorte que tous les éléments verticaux deviennent porteurs avec le temps, ainsi que des constatations de l'expert amiable et de l'expert judiciaire relativement à l'existence de fissures antérieures aux travaux de réhabilitation entrepris par SEMIVAL, il est possible de retenir comme l'a conclu l'expert judiciaire que l'une des causes probable des désordres (déjà visibles sur photographies prises en 2008) réside dans la réfection des réseaux réalisés en 2007.

Néanmoins, il est indéniable que les multiples dommages ayant affecté gravement l'immeuble appartenant aux consorts [P] sont apparus en juin 2009, soit quelques mois seulement après le début des travaux réalisés sous la maîtrise d'ouvrage de SEMIVAL début 2009, consistant notamment dans des démolitions de plancher, réalisation d'ouverture dans un mur porteur, reprises en sous-oeuvre de baies, percements pour passage de canalisations, décaissement du plancher bas du sous-sol, tranchée extérieure pour pose de canalisations, percements de façade [Adresse 6] et démolitions pour création d'un puits de lumière, exécutés par l'entreprise PORTA, l'expert [D] ayant relevé que certains ouvrages démolis étaient intimement liés au mur mitoyen avec l'immeuble [P] (page 22) de sorte que la responsabilité de plein droit de la société SEMIVAL pour trouble de voisinage est principalement engagée, étant observé que l'appelante n'établit l'existence d'aucune force majeure exonératoire.

La responsabilité de la société SEMIVAL, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société ERILIA, doit donc être retenue à hauteur de 90%, sans que Monsieur [P] soit fondé à soutenir qu'en l'absence de mise en cause de la commune et de la remise des plans concernant les travaux effectués sur les canalisations et les réseaux en 2007 par l'appelante, cette dernière devrait assumer seule la responsabilité de l'ensemble des désordres, alors que Monsieur [P] n'a pas lui-même estimé utile d'attraire en la cause le maître d'ouvrage de ces travaux effectués en 2007.

Contrairement à ce qu'a estimé le premier juge et à ce qu'a proposé l'expert, le seul fait pour le maître d'ouvrage d'avoir prévu dans le budget défini pour l'opération un poste pour les dommages aux avoisinants, et d'avoir ensuite reconnu devant l'expert amiable que des travaux de rénovation lourde réalisés dans des immeubles vétustes entraînent le plus souvent des dégradations et des inconvénients chez les voisins, est insuffisant à établir qu'il aurait délibérément pris le risque, en toute connaissance de cause, de causer les dommages qui sont effectivement survenus et d'en assumer l'intégralité des réparations.

Et, il appartenait à minima aux constructeurs professionnels, soit le maître d'oeuvre, la SAS SEBA MEDITERRANEE, et l'entreprise de gros-oeuvre PORTA BATIMENT qui a réalisé des démolitions d'ouvrages porteurs dans un site ancien, d'attirer particulièrement l'attention du maître d'ouvrage sur la nécessité de vérifier l'état des structures des bâtiments à démolir et des avoisinants avant le commencement des travaux, et, en cas de besoin, de prévoir de conforter les bâtiments mitoyens afin d'éviter la survenance de dommages aux avoisinants.

L'appelante est donc fondée à soutenir que la responsabilité des sociétés PORTA et SEBA est engagée pour partie dans la survenance des désordres.

Cependant, il convient de relever que l'appelante ne formule aucune demande de condamnation à l'encontre de ces sociétés qui ont fait l'objet d'une liquidation judiciaire et qu'elle exerce une action directe à l'encontre du seul assureur de la société PORTA, soit la SA AXA FRANCE IARD, laquelle ne conteste pas le principe de sa garantie, mais soutient d'une part, que le rapport d'expertise judiciaire lui est inopposable puisqu'elle n'a pas été attraite aux opérations de l'expert, et, d'autre part, que la responsabilité de son assurée n'est pas engagée.

Comme le rappelle exactement l'appelante, le rapport d'expertise judiciaire est une pièce du dossier qui a été soumise à la discussion contradictoire des parties pendant la procédure, et le fait que l'assureur n'ait pas été appelé aux opérations d'expertise judiciaire n'empêche pas la juridiction d'apprécier les éléments techniques fournis par cet expert, étant observé que d'autres éléments sont versés aux débats par le demandeur à l'action, dont notamment le rapport de l'expert amiable SARETEC qui a été établi au contradictoire de la SARL PORTA, présente lors de ses investigations.

Contrairement à ce que prétend la SA AXA FRANCE IARD, la responsabilité de son assurée ne se limite pas au percement accidentel de la cage d'escalier de l'immeuble des consorts [P], mais elle est engagée, pour les motifs précités, dans la mesure où l'entreprise de gros-oeuvre PORTA s'est vue confier et a réalisé des travaux importants de démolitions d'ouvrages porteurs sans prendre aucune précaution particulière, alors qu'en sa qualité de professionnelle de la construction, elle ne pouvait ignorer les risques afférents à l'intervention sur des immeubles très anciens mitoyens et constituant un ensemble dans un îlot dont les structures étaient devenues dépendantes les unes des autres.

Mais, dans la mesure où la responsabilité du maître d'oeuvre a été également retenue, le recours de l'appelante à l'encontre de la SA AXA FRANCE IARD ne peut prospérer qu'à hauteur de la part de responsabilité de la société PORTA qui doit être retenue dans la proportion de 50% du montant des condamnations à intervenir.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce que la responsabilité du maître d'ouvrage sur le fondement du trouble de voisinage a été retenue, mais infirmé en ce que les recours du maître d'ouvrage ont été rejetés.

Sur l'indemnisation

Préjudice matériel:

C'est à juste titre que le premier juge a entériné l'évaluation des travaux de reprise des désordres à la somme de 42 000 euros TTC telle que proposée par l'expert, cette évaluation n'étant pas discutée par les parties.

Cependant, dans la mesure où la responsabilité de la société SEMIVAL, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société ERILIA, est retenue à hauteur de 90 %, le jugement doit être infirmé et cette dernière sera condamnée à régler à l'indivision de Monsieur [F] [P] et de Madame [U] [K] la somme de 37 800 euros, outre indexation en fonction de la variation de l'indice BT01 publié par l'INSEE entre le 10 mars 2016, date du dépôt du rapport définitif de l'expert au greffe, et le jour du parfait paiement.

Préjudices immatériels:

Il résulte des pièces produites que les travaux entrepris sous la maîtrise d'ouvrage de la société SEMIVAL ont causé des troubles de voisinage importants qui ont gravement affecté les conditions de vie des habitants de l'immeuble appartenant aux consorts [P], dont Madame [L] [P] qui y résidait depuis de très nombreuses années et qui était âgée de 78 ans au moment du sinistre (pièce 6 de Monsieur [P]), ainsi que Monsieur [F] [P] qui y résidait également et qui y réside toujours.

Il est avéré que Monsieur [F] [P] a subi un préjudice moral en raison des multiples tracas liés à la gestion de la situation de son logement et de celui de sa mère auprès de laquelle il vivait avant le sinistre, et de l'impossibilité d'obtenir de la société SEMIVAL une indemnisation rapide du montant des travaux de reprise préconisés par les experts, de sorte qu'il a été contraint d'agir en justice.

Le premier juge a justement apprécié le préjudice moral subi par Monsieur [F] [P] en lui accordant la somme de 10 000 euros et l'intimé n'est pas fondé à réclamer une somme de 100 000 euros à ce titre, ce montant étant manifestement exagéré, d'autant que les certificats médicaux produits en pièces 21 et 22 ne permettent nullement d'établir que la perte de son emploi et l'impossibilité pour lui d'exercer une activité professionnelle résulte directement des désordres ayant affecté son cadre de vie.

Depuis 2009, Monsieur [F] [P] vit toujours dans l'immeuble sinistré, dont il indique que l'état s'est encore aggravé puisque les travaux de reprise n'ont pas été exécutés et que la façade de l'immeuble n'est pas étanche à l'air et à l'eau depuis 12 ans.

Toutefois, il résulte des annexes au rapport d'expertise judiciaire qu'après l'envoi par l'expert de la note aux parties, une tentative de conciliation lui a été proposée par le maître d'ouvrage, et qu'un rendez-vous avait été fixé le 15 décembre 2015, mais qu'il a été refusé, de sorte qu'en cours de procédure, le maître d'ouvrage a indiqué à l'expert qu'il ne lui semblait pas possible d'envisager une conciliation à l'amiable.

S'il est incontestable que Monsieur [F] [P] subit un préjudice de jouissance résultant directement des dommages aux avoisinants dont le maître d'ouvrage est responsable, ce préjudice doit néanmoins être évalué en tenant compte de ce refus, mais également de l'ancienneté de l'immeuble, de sorte qu'il doit être évalué à la somme de 12 000 euros.

Monsieur [F] [P] ne justifie par aucune pièce que les appartements du RDC et du 1er étage étaient loués sans interruption depuis l'année 1988, les copies partiellement incomplètes des baux produits datant de début 2007 (pièces 26 et 26bis).

La seule attestation de Madame [K] (pièce 25) partie à l'indivision [P]/[K] est insuffisante à établir qu'à partir de 2011, ces logements ne pouvaient plus être loués en raison du sinistre intervenu en juin 2007, étant précisé qu'aucune pièce émanant des locataires (dont un éventuel courrier donnant congé) ne sont pas produits et qu'il ressort du rapport de l'expert qu'aucun préjudice de jouissance n'a été allégué lorsqu'il a adressé aux parties une note pour traiter ce chef de mission (page 27 du rapport).

En l'état, il y a lieu de débouter Monsieur [F] [P] de sa demande d'indemnisation au titre d'un préjudice locatif dont la réalité n'est pas suffisamment démontrée.

Dans la mesure où la responsabilité de la société ERELIA, venant aux droits de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT, a été retenue à hauteur de 90 %, elle doit être condamnée à régler à l'indivision de Monsieur [F] [P] et Madame [U] [K], représentée par Monsieur [F] [P], les sommes suivantes :

- 9 000 euros au titre du préjudice moral,

- 10 800 euros au titre du préjudice de jouissance.

Et, sans qu'il y ait lieu à condamnation solidaire, il y a lieu de condamner la SA AXA FRANCE IARD à relever et garantir la société ERELIA à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, le jugement entrepris doit être partiellement infirmé seulement en ce que la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT a été condamnée à payer à la SAS SEBA MEDITERRANEE et à la SA AXA FRANCE IARD une indemnité de 2 500 euros chacune au titre des frais irrépétibles.

Succombant chacune partiellement en appel, la société ERELIA et la SA AXA FRANCE IARD doivent être condamnées par moitié aux dépens d'appel et à régler à Monsieur [F] [P] une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Les autres demandes au titre de l'article 700 doivent être rejetées, ainsi que le recours de la société ERELIA contre la SA AXA FRANCE IARD concernant les dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS

LA COUR :

Statuant publiquement et par défaut,

ACCUEILLE l'intervention de la société ERILIA venant aux droits de la SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT,

INFIRME le jugement entrepris excepté en ce que le premier juge a :

- condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à Monsieur [F] [P] une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamné la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT aux entiers dépens dont les frais d'expertise ordonnés par ordonnance de référé du 30 juin 2014,

STATUANT A NOUVEAU,

ET Y AJOUTANT,

Vu la théorie des troubles anormaux causés aux voisins,

DIT que la responsabilité de la société SEMIVAL, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société ERILIA, de la SAS SEBA MEDITERRANNEE et de la SARL PORTA BATIMENT est engagée dans la survenance des désordres affectant l'immeuble appartenant aux consorts [P]/ [K],

DECLARE irrecevables les demandes de condamnation à paiement formées par Monsieur [F] [P] à l'encontre de la SAS SEBA MEDITERRANNEE et de la SARL PORTA BATIMENT,

DIT que la responsabilité de la société SEMIVAL, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société ERILIA, doit être retenue à hauteur de 90 %,

En conséquence,

CONDAMNE la société ERILIA, venant aux droits de la société SOPHIA ANTIPOLIS HABITAT à payer à Monsieur [F] [P] représentant l'indivision [P]/[K]:

- la somme de 37 800 euros, outre indexation en fonction de la variation de l'indice BT01 publié par l'INSEE entre le 10 mars 2016 et le jour du parfait paiement, au titre du préjudice matériel,

- 9 000 euros au titre du préjudice moral,

- 10 800 euros au titre du préjudice de jouissance,

CONDAMNE la SA AXA FRANCE IARD à relever et garantir la société ERELIA à hauteur de 50 % des condamnations susvisées prononcées à son encontre,

DIT qu'une copie du présent arrêt sera adressée à l'expert judiciaire, Monsieur [H] [D],

CONDAMNE la société ERELIA et la SA AXA FRANCE IARD à régler chacune par moitié à Monsieur [F] [P] une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

REJETTE les autres demandes, dont celles formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société ERELIA et la SA AXA FRANCE IARD par moitié aux dépens d'appel et en ordonne la distraction.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/18915
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;18.18915 ?
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