COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 10 MAI 2023
N° 2023/0651
Rôle N° RG 23/00651 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLIDX
Copie conforme
délivrée le 10 Mai 2023 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 06 mai 2023 à 15h05.
APPELANT
Monsieur [K] [I]
né le 18 Avril 1989 à [Localité 2] (TUNISIE)
de nationalité Tunisienne
comparant en personne, assisté de Me Yann LE DANTEC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office
INTIME
Monsieur le préfet des Alpes Maritimes
Représenté par Monsieur [V] [B]
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 10 Mai 2023 devant Monsieur Nicolas ERNST, Vice-Président placé près le premier président à la cour d'appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de Mme Anaïs DOMINGUEZ, greffière,
ORDONNANCE
contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 10 Mai 2023 à 16h20
Signée par Monsieur Nicolas ERNST, Vice-Président placé près le premier président et Mme Michèle LELONG, greffière
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 3 mai 2023 par le préfet des Alpes Maritimes , notifié le même jour à 12h15 ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 3 mai 2023 par le préfet des Alpes Maritimes notifiée le même jour à 12h15;
Vu l'ordonnance du 06 Mai 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant le maintien de Monsieur [K] [I] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
Vu l'appel interjeté le le 9 mai 2023 par Monsieur [K] [I] ;
Monsieur [K] [I] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare :
J'ai un enfant de 10 mois, que je n'ai pas reconnu, je veux le reconnaître. J4attends mon passeport, en cours de renouvellement au consulat. J'ai touvé un appartement en France. Je souhaite être libéré. Si je ne peux pas rester en France, je veux aller en Italie.
Son avocat a été régulièrement entendu ; il conclut :
Je m'en remets au mémoire d'appel.
Les conditions de consultation du FAED ne sont pas régulières : nous ne pouvons nous assurer que l'agent était habilité.
Nous sollicitons une assignation à résidence. Il y a une copie du passeport, une adresse stable à [Localité 1]. Il voudrait pouvoir reconnaître son enfant. Il aurait une promesse d'embauche. Il n'a pas d'antécédents, alors qu'il est en France depuis 2016. Le principe est l'assignation à résidence, le placement en rétention doit être l'exception.
Le représentant de la préfecture sollicite :
- Nous sommes sur une retenue administrative. Nous avons un rapport FAED mais pas d'élément permettant d'attester de son habilitation. Mais l'arrêt de la CJUE est utilisé de manière détournée.
- Sur l'assignation à résidence, le passeport est manquant donc il ne peut bénéficier de cette mesure. Je demande la confirmation.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.
Sur l'exception de procédure
Par arrêt en date du 8 novembre 2022, la CJUE a jugé que le contrôle des conditions de légalité de la rétention d'un ressortissant d'un pays tiers qui découlent du droit de l'Union doit conduire cette autorité à relever, le cas échéant, la méconnaissance d'une condition de légalité découlant du droit de l'Union quand bien même elle n'a pas été soulevée par la personne concernée, sous réserves du principe du contradictoire, et ce afin d'assurer de manière effective le respect des conditions strictes auxquelles la légalité d'une mesure de rétention doit répondre.
En l'espèce, le premier juge, a, au terme de la décision déférée, apprécié d'une part la contestation de la décision de placement en rétention et, d'autre part, le bien fondé de la demande de prolongation de la rétention administrative. Il a statué en considération des pièces portées à sa connaissance et à celle des parties, en ce compris les conditions de consultation du FAED.
Ce faisant, celui-ci n'apparaît pas avoir manqué à son obligation de relever d'office, sur la base des éléments du dossier portés à sa connaissance, tels que complétés ou éclairés lors de la procédure contradictoire devant lui, l'éventuel non-respect d'une condition de légalité.
Le fait, pour M.[I], de considérer pour la première fois en cause d'appel que la personne ayant consulté le FAED n'était pas habilitée pour s'y prêter, ne démontre pas l'absence de contrôle effectif par le premier juge des conditions strictes de légalité de la mesure de rétention.
Par ailleurs, selon l'article 74 alinéa 1er du code de procédure civile, 'les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public.'
Il découle de ces dispositions que la partie qui a conclu sur le fond devant le premier juge est irrecevable à présenter une exception en cause d'appel.
En l'espèce, il est constant que l'exception tenant au défaut de preuve de l'habilitation de l'agent ayant consulté le FAED, est soulevé postérieurement au débat au fond devant le premier juge.
Cette exception est dès lors irrecevable.
Sur l'assignation à résidence
L'assignation à résidence se trouve subordonnée en application de l'article L 743-13 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile à l'existence de garanties de représentation effectives ainsi qu'à la remise préalable de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d'un récépissé valant justification de l'identité
et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution. Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.
L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non exécution de la mesure d'éloignement.
S'il soutient que le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation et qu'il a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne privilégiant pas un régime d'assignation à résidence, M.[I], qui justifie d'une adresse par la production d'une attestation d'hébergement de sa compagne, Mme [H] qui réside à [Localité 1] (06), n'est toutefois pas titulaire d'un passeport en original et en cours de validité remis au directeur du centre de rétention administrative. S'il indique avoir un enfant, sa compagne confirme, dans son attestation, qu'il n'a pas reconnu leur enfant commun.
Il a par ailleurs fait part de son opposition à quitter le territoire national.
Dans ces conditions, l'arrêté portant placement en rétention est motivé et non entâché d'une erreur maifeste d'appréciation en ce que l'assignation à résidence constituerait un risque sérieux de non exécution de la mesure d'éloignement.
Le moyen sera rejeté.
Du tout, l'ordonnance déférée sera confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 06 Mai 2023.
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
Le greffier, Le président,