COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 09 MAI 2023
N° 2023/0636
Rôle N° RG 23/00636 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLH3W
Copie conforme
délivrée le 09 Mai 2023 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 05 mai 2023 à 15h45.
APPELANT
Monsieur [V] [F]
né le 29 juillet 2002 à [Localité 1] (TUNISIE)
de nationalité tunisienne
comparant en personne, assisté de Me Alexandre AUBRUN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office,
INTIME
Monsieur le préfet du Var
Non comparant, ni représenté
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 09 Mai 2023 devant Madame Catherine LEROI, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Madame Michèle LELONG, Greffière,
ORDONNANCE
Réputée contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 mai 2023 à 17h30
Signée par Madame Catherine LEROI, Conseill7RE et Mme Michèle LELONG, Greffière,
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 19 janvier 2023 par le préfet du Var, notifié le même jour ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 03 mai 2023 par le préfet du Var notifiée le même jour à 11h20;
Vu l'ordonnance du 05 mai 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant le maintien de Monsieur [V] [F] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
Vu l'appel interjeté le 08 mai 2023 par Monsieur [V] [F] ;
Monsieur [V] [F] a comparu et a été entendu en ses explications ; s'exprimant parfaitement en français, il déclare :
'j'ai fait appel pour que vous me donniez une chance. Je veux quitter la France pour aller en Allemagne. Si je vais être tranquille. Je n'ai pas de passeport. J'ai un hébergement en France. C'est mon grand-père qui m'héberge. J'ai une adresse à [Localité 3]'.
Son avocat a été régulièrement entendu ; se référant à l'acte d'appel, il soulève deux moyens justifiant la mainlevée de la rétention, à savoir le défaut de notification de l'arrêté de placement en rétention au procureur de la République de [Localité 2] et la consultation du FAED par un agent dont l'habilitation n'est pas établie.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.
Sur le défaut de notification de l'arrêté de placement en rétention au procureur de la République de Nice :
Aux termes de l'article L 741-8 du CESEDA, le procureur de la République est informé immédiatement de tout placement en rétention.
Il ressort de l'examen du dossier que les procureurs de la République de Nice et de [Localité 3] ont été informés du placement en rétention de M. [F] par courriels reçus le 3 mai 2023 à 11h09.
Le moyen sera en conséquence rejeté.
Sur le défaut d'habilitation de l'agent ayant consulté le FAED :
L'article 8 du décret en date du 8 avril 1987 relatif au FAED dispose que :
Les fonctionnaires et militaires individuellement désignés et habilités des services d'identité judiciaire de la police nationale, du service central de renseignement criminel de la gendarmerie nationale ainsi que des unités de recherches de la gendarmerie nationale peuvent seuls avoir accès aux données à caractère personnel et aux informations contenues dans le traitement :
1° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande de l'autorité judiciaire, des officiers de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, ou des agents des douanes habilités à effectuer des enquêtes judiciaires en vertu des dispositions de l'article 28-1 du code de procédure pénale ;
2° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande de l'autorité judiciaire, des fonctionnaires de la police ou des militaires de la gendarmerie dans le cadre des recherches aux fins d'identification des personnes décédées prévues aux articles L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales et 87 du code civil et du décret n° 2012-125 du 30 janvier 2012 relatif à la procédure extrajudiciaire d'identification des personnes décédées ;
3° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande des officiers de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale en vertu des dispositions des articles L. 611-1-1 , L. 611-3 et L. 611-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
4° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande des officiers de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale en vertu des dispositions de l'article 78-3 du code de procédure pénale.
Le fichier FAED, fichier automatisé des empreintes digitales, a été créé par le décret n°o 87-249 du 8 avril 1987. Il est également utilisé pour vérifier l'identité des personnes retenues en application de l'article 78-3 du code de procédure pénale ou dans les conditions de l'article L. 142-2 du CESEDA. Plus précisément, il permet d'identifier les personnes par comparaison biométrique des traces et empreintes relevées sur les lieux de commission d'infractions et de s'assurer de la véritable identité des personnes mises en cause dans une procédure pénale ou condamnées à une peine privative de liberté. L'enregistrement de traces d'empreintes digitales ou palmaires donne lieu à l'établissement d'une fiche alphabétique qui comporte notamment l'identification de la personne, la nature de l'affaire et la référence de la procédure, l'origine de l'information et les clichés anthropométriques dans le cas d'empreintes. Toutes les informations peuvent être conservées pendant 25 ans. L'accès au FAED est prévu par le décret en date du 8 avril 1987.
La CEDH juge 'que la conservation, dans un fichier des autorités nationales, des empreintes digitales d'un individu identifié ou identifiable constitue une ingérence dans le droit au respect de la vie privée' (M. K. c. France du 18 avril 2013, requête no 19522/09, point 29 ' S. et [O] c/ Royaume-Uni, § 86) et d'autre part, que la législation interne doit donc ménager des garanties appropriées pour empêcher toute utilisation de données à caractère personnel qui ne serait pas conforme aux garanties prévues dans l'article 8 CEDH (S. et [O], précité, § 103, [E] c/ France, requête no 16428/05, § 62 ; [S] c/ France, requête no 5335/06, § 61).
Au regard de l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée que constituent, au sens de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la conservation dans un fichier automatisé des empreintes digitales d'un individu identifié ou identifiable et la consultation de ces données, l'habilitation des agents à les consulter est une garantie institutionnelle édictée pour la protection des libertés individuelles.
En l'occurrence, il résulte du procès-verbal de police en date du 2 mai 2023 à 18h15 que le FAED a été consulté par Mme [X] agent spécialement habilitée à cette fin.
La procédure apparaît donc régulière et la décision sera confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 05 Mai 2023.
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
La greffière, La présidente,