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09/05/2023 | FRANCE | N°23/00630

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Rétention administrative, 09 mai 2023, 23/00630


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA



ORDONNANCE

DU 09 MAI 2023



N° 2023/ 0630











RG 23/00630

N° Portalis DBVB-V-B7H-BLH3Q



























Copie conforme

délivrée le 09 Mai 2023 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP



Signature,

le greffier





























Décision déférée à la Cour :



Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 06 mai 2023 à 15h02.







APPELANT



Monsieur [K] [X]

né le 06 janvier 1994 à [Adresse 1] (GEORGIE)

de nationalité géorgienne



non comparant représe...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA

ORDONNANCE

DU 09 MAI 2023

N° 2023/ 0630

RG 23/00630

N° Portalis DBVB-V-B7H-BLH3Q

Copie conforme

délivrée le 09 Mai 2023 par courriel à :

-l'avocat

-le préfet

-le CRA

-le JLD/TJ

-le retenu

-le MP

Signature,

le greffier

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 06 mai 2023 à 15h02.

APPELANT

Monsieur [K] [X]

né le 06 janvier 1994 à [Adresse 1] (GEORGIE)

de nationalité géorgienne

non comparant représenté par Me Alexandre AUBRUN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office

INTIME

Monsieur le préfet des Alpes Maritimes

Représenté par M. [Y] [H]

MINISTÈRE PUBLIC :

Avisé et non représenté

DEBATS

L'affaire a été débattue en audience publique le 09 mai 2023 devant Madame Catherine LEROI, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Michèle LELONG, Greffière,

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 mai 2023 à 14h30,

Signée par Madame Catherine LEROI, Conseillère et Madame Michèle LELONG, Greffière,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;

Vu l'arrêté pris le 19 août 2022 par le préfet des Alpes Maritimes faisant obligation de quitter le territoire national ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 3 mai 2023 par le préfet des Alpes Maritimes notifiée le même jour à 15h22 ;

Vu l'ordonnance du 6 mai 2023 à 15h03 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant le maintien de Monsieur [X] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et rejetant sa contestation de l'arrêté de placement en rétention ;

Vu l'appel interjeté le 7 mai 2023 à 12h16 par Monsieur [X] ;

Monsieur [X] n'a pas souhaité comparaître.

Son avocat a été régulièrement entendu ; se référant à l'acte d'appel, il soulève plusieurs exceptions de nullité de procédure portant sur :

- la nullité de l'interpellation pour une infraction au code de la route non constituée au vu des dispositions de l'article R 317-8 du code de la route ;

- le défaut de justification de l'habilitation de l'agent ayant consulté le FAED, ce qui constitue une nullité d'ordre public ;

- l'irrecevabilité de la requête préfectorale en prolongation de la rétention à défaut d'y avoir annexé le formulaire des droits en garde à vue en langue géorgienne et la signature illisible figurant sur l'arrêté faisant obligation de quitter le territoire national.

Il soutient par ailleurs que l'arrêté de placement en rétention est irrégulier pour insuffisance et caractère erroné de la motivation, erreur manifeste d'appréciation et atteinte disproportionnée portée au respect dû à la vie privée protégé par l'article 8 de la CEDH en ce que M. [X] dispose d'une adresse et son épouse connaît une grossesse difficile nécessitant sa présence à ses côtés.

Il sollicite la mise en liberté de M. [X].

Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de la décision déférée. Il fait valoir que la procédure est régulière, que s'agissant de la consultation du FAED, celui-ci ne peut être consulté que par un agent habilité en la personne de Mme [S] en l'espèce, et que l'absence de procès-verbal justifiant de cette habilitation ne peut suffire à invalider la procédure, conformément aux dispositions de l'article 15-5 du code de procédure pénale.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.

La requête préfectorale en prolongation de la rétention apparaît recevable, le formulaire en langue géorgienne portant sur les droits de M. [X], lequel ne constitue pas une pièce justificative utile au sens de l'article R 743-2 du CESEDA, se trouvant de surcroît annexé à la procédure et le fait que la signature de l'agent ayant pris l'arrêté de placement en rétention, soit illisible, n'ayant aucune incidence sur la recevabilité de la requête préfectorale en prolongation de la rétention.

L'article 8 du décret en date du 8 avril 1987 relatif au FAED dispose que :

Les fonctionnaires et militaires individuellement désignés et habilités des services d'identité judiciaire de la police nationale, du service central de renseignement criminel de la gendarmerie nationale ainsi que des unités de recherches de la gendarmerie nationale peuvent seuls avoir accès aux données à caractère personnel et aux informations contenues dans le traitement :

1° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande de l'autorité judiciaire, des officiers de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale, ou des agents des douanes habilités à effectuer des enquêtes judiciaires en vertu des dispositions de l'article 28-1 du code de procédure pénale ;

2° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande de l'autorité judiciaire, des fonctionnaires de la police ou des militaires de la gendarmerie dans le cadre des recherches aux fins d'identification des personnes décédées prévues aux articles L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales et 87 du code civil et du décret n° 2012-125 du 30 janvier 2012 relatif à la procédure extrajudiciaire d'identification des personnes décédées ;

3° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande des officiers de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale en vertu des dispositions des articles L. 611-1-1 , L. 611-3 et L. 611-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

4° Pour procéder aux opérations d'identification à la demande des officiers de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale en vertu des dispositions de l'article 78-3 du code de procédure pénale.

Le fichier FAED, fichier automatisé des empreintes digitales, a été créé par le décret n°o 87-249 du 8 avril 1987. Il est également utilisé pour vérifier l'identité des personnes retenues en application de l'article 78-3 du code de procédure pénale ou dans les conditions de l'article L. 142-2 du CESEDA. Plus précisément, il permet d'identifier les personnes par comparaison biométrique des traces et empreintes relevées sur les lieux de commission d'infractions et de s'assurer de la véritable identité des personnes mises en cause dans une procédure pénale ou condamnées à une peine privative de liberté. L'enregistrement de traces d'empreintes digitales ou palmaires donne lieu à l'établissement d'une fiche alphabétique qui comporte notamment l'identification de la personne, la nature de l'affaire et la référence de la procédure, l'origine de l'information et les clichés anthropométriques dans le cas d'empreintes. Toutes les informations peuvent être conservées pendant 25 ans. L'accès au FAED est prévu par le décret en date du 8 avril 1987.

La CEDH juge 'que la conservation, dans un fichier des autorités nationales, des empreintes digitales d'un individu identifié ou identifiable constitue une ingérence dans le droit au respect de la vie privée' (M. K. c. France du 18 avril 2013, requête no 19522/09, point 29 ' S. et [W] c/ Royaume-Uni, § 86) et d'autre part, que la législation interne doit donc ménager des garanties appropriées pour empêcher toute utilisation de données à caractère personnel qui ne serait pas

conforme aux garanties prévues dans l'article 8 CEDH (S. et [W], précité, § 103, [N] c/ France, requête no 16428/05, § 62 ; [B] c/ France, requête no 5335/06, § 61).

Au regard de l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée que constituent, au sens de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la conservation dans un fichier automatisé des empreintes digitales d'un individu identifié ou identifiable et la consultation de ces données, l'habilitation des agents à les consulter est une garantie institutionnelle édictée pour la protection des libertés individuelles.

Par arrêt en date du 14 octobre 2021, la première chambre civile de la Cour de Cassation a jugé que, s'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'agent ayant consulté les fichiers d'empreintes était expressément habilité à cet effet, la procédure se trouve entachée d'une nullité d'ordre public, sans que l'étranger qui l'invoque ait à démontrer l'existence d'une atteinte portée à ses intérêts.

Il ressort de la procédure qu'il a été procédé à une consultation du FAED le 3 mai 2023 au nom de Mme [O] [S] ainsi que le démontre l'imprimé de consultation ; toutefois les pièces de la procédure ne permettent pas de vérifier que cette consultation a effectivement été faite par Mme [S], agent habilité à cette fin.

L'article 15-5 du code de procédure pénale rappelle que seuls les personnels spécialement et individuellement habilités peuvent procéder à la consultation de ces traitements informatiques, que la réalité de cette habilitation peut être contrôlée à tout moment par un magistrat à son initiative ou à la demande de l'intéressé et que l'absence de mention de cette habilitation sur les différentes pièces de la procédure résultant de la consultation de ces traitements n'emporte pas, par elle-même, la nullité de la procédure.

Toutefois, ce texte ne dispense pas la préfecture de justifier de l'habilitation de l'agent consultant, le juge devant être mis en mesure de vérifier ce point.

En l'occurrence, cette preuve n'est pas rapportée : en effet la seule mention du nom de Mme [S] et d'un numéro précédant ce nom, ne suffit pas à établir, en l'état des explications techniques portées à la connaissance de la juridiction, que cette consultation a été faite par un agent dûment habilité.

Au vu de ces éléments, il convient , sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés, de constater que la procédure est irrégulière, d'infirmer la décision du premier juge et de mettre fin à la rétention de M. [X].

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Infirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 06 Mai 2023.

Et statuant à nouveau, mettons fin à la rétention de M. [K] [X] ;

LUI RAPPELONS son obligation de quitter le territoire et que le fait de se maintenir irrégulièrement sur le territoire français sans motif légitime, après avoir fait l'objet d'une mesure régulière de placement en rétention ou d'assignation à résidence ayant pris fin sans qu'il ait pu être procédé à son éloignement, est passible d'une peine d'un an d'emprisonnement et 3.750 € d'amende.

Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 23/00630
Date de la décision : 09/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-09;23.00630 ?
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