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05/05/2023 | FRANCE | N°19/08795

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 05 mai 2023, 19/08795


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 05 MAI 2023



N° 2023/ 92



RG 19/08795

N° Portalis DBVB-V-B7D-BELJZ







SARL KGH CUSTOMS SERVICES





C/



[C] [L]





















Copie exécutoire délivrée le 5 Mai 2023 à :



- Me Yann PREVOST, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Laurent LAILLET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V379






























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 07 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/02350.





APPELANTE



Société MAERSK LOGISTICS & SERVICES FR...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 05 MAI 2023

N° 2023/ 92

RG 19/08795

N° Portalis DBVB-V-B7D-BELJZ

SARL KGH CUSTOMS SERVICES

C/

[C] [L]

Copie exécutoire délivrée le 5 Mai 2023 à :

- Me Yann PREVOST, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Laurent LAILLET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

V379

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MARSEILLE en date du 07 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/02350.

APPELANTE

Société MAERSK LOGISTICS & SERVICES FRANCE, venant aux droits de la Société KGH CUSTOMS SERVICES, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Yann PREVOST de la SELARL PREVOST & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [C] [L], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Laurent LAILLET de la SELARL CARLINI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2023.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE

Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2023

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

M. [C] [L] a été embauché initialement selon contrat de travail à durée indéterminée à effet du 26 mai 2008, par la société Norfram Gertrans, en qualité de déclarant en douane niveau 6 coefficient 200 de la convention collective nationale des transports routiers.

Le contrat de travail a été transféré à la société Manusport Logistics puis à compter du 2 juin 2014 à la société KGH Customs Services, le salarié devenant cadre groupe 4 coefficient 119.

Le salarié a été licencié pour motif économique par lettre recommandée du 19 juillet 2017, la rupture étant acquise au 9 août 2017 par l'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle.

Contestant notamment la légitimité de son licenciement, M.[L] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille par acte du 9 octobre 2017.

Selon jugement du 7 mai 2019, le conseil de prud'hommes en sa formation de départage, a statué comme suit :

Dit le licenciement de M.[L] dépourvu de cause économique réelle et sérieuse.

Condamne la société KGH Customs Services à payer à M.[L] la somme de 33 894 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter de la décision.

Condamne la société KGH Customs Services à payer à M.[L] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Rejette toute autre demande.

Le conseil de la société a interjeté appel par déclaration du 29 mai 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 28 août 2019, la société demande à la cour de :

«Infirmer le jugement de la section départage en ce qu'il a dit que le licenciement économique était sans cause réelle et sérieuse,

Infirmer le jugement de la section départage en ce qu'il a condamné la société KGH à la somme de 33 894 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Infirmer le jugement de la section départage en ce qu'il a condamné la société KGH à la somme de 1 500 € euros au titre de l'article 700 ;

STATUANT DE NOUVEAU

Dire que le licenciement de Monsieur [C] [L] pour motifs économiques est justifié ;

Dire que la société KGH CUSTOMS SERVICES a respecté son obligation de reclassement ;

Débouter l'ensemble des demandes de Monsieur [C] [L] .»;

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 18 novembre 2019, M.[L] demande à la cour de :

«SUR L'APPEL PRINCIPAL

Monsieur [L] sollicite la confirmation du jugement rendu par le CPH de [Localité 3] en ce qu'il a :

- dit le licenciement de [C] [L] dépourvu de cause économique réelle et sérieuse ;

- condamné de ce chef la société KGH CUSTOMS SERVICES à payer à [C] [L] la somme de 33894 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- précisé que les condamnations concernant des créances de nature indemnitaire porteront intérêt aux taux légal à compter de la présente décision ;

- condamné la société KGH CUSTOMS SERVICES à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société KGH CUSTOMS SERVICES aux dépens ;

DEBOUTER la société KGH CUSTOMS SERVICES de toutes ses demandes fins et conclusions contraires.

SUR L'APPEL INCIDENT

Monsieur [L] sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de ses autres demandes, soit:

- 4 120 euros au titre d'indemnité de licenciement ;

- 1 721 euros au titre de rappel du 13ème mois ;

- 5 000 euros au titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation.

Et, statuant à nouveau :

CONDAMNE la société KGH CUSTOMS SERVICES à lui verser :

- 10 590,03 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 059 euros à titre d'indemnité de congés payés afférente ;

- 882,50 euros au titre de rappel du 13ème mois ;

- 88,25 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés ;

- 5 621,52 euros au titre d'indemnité de licenciement ;

- 5 000 euros au titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de formation.

DEBOUTER la société KGH CUSTOMS SERVICES de toutes ses demandes fins et conclusions contraires.

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER la société KGH CUSTOMS SERVICES au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur l'effet dévolutif

Il ressort des conclusions de M.[L] qu'il a abandonné sa demande au titre des heures supplémentaires, de sorte que sur ce chef, l'intimé est réputé en application de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile, s'être approprié les motifs du jugement qui a rejeté sa demande.

Sur le bien fondé du licenciement

Au visa de l'article L.1233.3 du code du travail, la société considère que les premiers juges ont fait une mauvaise interprétation de fait et de droit, les difficultés économiques ayant été indiquées dans la lettre du 19 juillet 2017 remise en mains propres lors de l'entretien préalable au licenciement, ainsi que dans la lettre de licenciement, à savoir la fermeture contrainte de l'établissement de [Localité 3] dont l'activité a toujours été déficitaire depuis son ouverture en 2014.

Elle indique produire aux débats les chiffres démontrant ces difficultés économiques, expliquant que la présence d'une salariée au sein de l'établissement de [Localité 3] résulte du retard pris pour son transfert dans un poste de reclassement au Havre, effectif au 1er juillet 2018.

Il résulte des dispositions de l'article sus-visé que la suppression ou transformation d'emploi ou la modification du contrat de travail refusée par le salarié doivent être consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ou à la cessation d'activité de l'entreprise.

La cour observe que dans ses écrits des 5 et 19 juillet 2017 ainsi que dans la lettre de licenciement, l'employeur s'est borné à indiquer comme motif : la fermeture de notre établissement de [Localité 3] en raison de difficultés économiques.

Outre le fait que ces difficultés économiques ne sont nullement explicitées ni documentées, la cour relève à l'instar du salarié que la fermeture de l'établissement n'est pas intervenue de façon concomitante au licenciement puisqu'il résulte du constat d'huissier du 8 mars 2018 qu'une salariée était toujours présente dans les lieux .

Par ailleurs, à supposer que l'établissement de [Localité 3] ait connu des difficultés économiques - et non l'entreprise elle-même - la lettre de licenciement est insuffisamment motivée puisqu'il aurait dû être invoqué une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa comptititvité, motif autonome.

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont dit le licenciement non fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement

L'intimé considère ne pas être rempli de ses droits au titre des indemnités de rupture, et réclame par ailleurs, un 13ème mois au prorata temporis.

L'appelante n'a pas répondu sur ces points.

1- sur l'indemnité compensatrice de préavis

Si le licenciement économique est jugé sans cause réelle et sérieuse, le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) devient également sans cause réelle et sérieuse, de sorte que l'employeur est tenu de payer au salarié l'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférente, indépendamment de la contribution que l'employeur a versé à Pôle Emploi, laquelle n'ayant pas été versée au salarié ne peut être déduite, et indépendamment de l'inexécution du préavis.

Le salarié sollicite pour la première fois en cause d'appel cette indemnité mais, étant la conséquence du licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu de faire droit à la demande en paiement en son principe et montant correspondant à trois mois de salaire brut.

2- sur l'indemnité conventionnelle de licenciement

L'intimé demande un rappel d'indemnité, sur une moyenne de salaire de 4 244,34 euros

basée sur les trois derniers mois, invoquant les dispositions de l'article 17 de l'annexe IV de la convention collective.

Dans la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, l'article 17 de l'annexe IV relative aux ingénieurs et cadres prévoit que l'ingénieur ou le cadre licencié qui compte au moins 3 années de présence dans l'entreprise, a droit à une indemnité de licenciement calculée en fonction de son ancienneté sur la base de son salaire effectif au moment où il cesse ses fonctions. Le taux de cette indemnité est de 4/10 de mois par année de présence et le cas échéant, de 3/10 de mois par année de présence dans les catégories techniciens et agents de maîtrise et employés.

C'est à tort que l'intimé calcule son indemnité sur la base d'une moyenne alors que le texte visé ci-dessus diffère de l'indemnité légale, et qu'il ne peut combiner les deux méthodes de calcul, de sorte que seule la somme de 3 656,01 euros peut être retenue comme figurant sur le dernier bulletin de salaire du mois de juillet 2017.

En considération du taux visé ci-dessus et reprenant la méthode de calcul de M.[L] (6 ans de non cadre et 3 ans et 5 mois en tant que cadre), l'indemnité de licenciement s'établit à la somme de : (3 656,01 x 3/10 x 6) + (3 656,01 x 4/10 x 3) + (3 656,01 x 4/10 x 5/12) = 11 577,37 €, dont il convient de déduire la somme versée de 7 818,89 €, soit un solde dû de 3 758,46 euros.

3- sur le 13ème mois

En application de l'article 26 de l'accord du 18 avril 2002, le 13e mois est calculé prorata temporis pour les bénéficiaires ne justifiant pas d'une année civile complète de travail effectif, tel qu'il est défini par les dispositions légales et sans contestation de la société sur son montant, il y a lieu de faire droit à la demande de l'intimé.

Sur l'obligation de formation

Au visa de l'article L.6321-1 du code du travail, M.[L] réitère sa demande à titre de dommages et intérêts, indiquant que ce manquement n'a pas permis de proposer des solutions de reclassement de nature à éviter son licenciement.

L'article L.6321-1 du Code du travail édicte:

« L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.

Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.

Les actions de formation mises en 'uvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1° de l'article L.6312-1. Elles peuvent permettre d'obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l'acquisition d'un bloc de compétences. »

Même si l'employeur n'a pas conclu sur ce chef de demande, la cour relève que M.[L] formule une demande forfaitaire sans expliciter le préjudice qu'il a subi, en indiquant par exemple les postes auxquels il aurait pu prétendre ou les formations qu'il a demandées et qui lui auraient été refusées, - étant observé qu'il a conservé le même emploi après le licenciement -, de telle sorte qu'il ne démontre pas un préjudice particulier qui justifie d'être réparé.

En conséquence, la décision doit être confirmée sur ce point.

Sur les frais et dépens

L'appelante succombant au principal doit s'acquitter des dépens, être débouté de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre, payer à M.[L] la somme supplémentaire de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme, dans ses dispositions soumises à la cour, le jugement déféré SAUF s'agissant de l'indemnité de licenciement et du 13ème mois,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et Y ajoutant,

Condamne la société KGH Customs Services à payer à M. [C] [L] les sommes suivantes :

- 3 758,46 euros au titre d'un solde d'indemnité de licenciement,

- 882,50 euros au titre du 13ème mois,

- 88,25 euros au titre des congés payés afférents,

- 10 590,03 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1 059 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société KGH Customs Services aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/08795
Date de la décision : 05/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-05;19.08795 ?
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