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02/05/2023 | FRANCE | N°22/11010

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 02 mai 2023, 22/11010


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 02 MAI 2023



N° 2023/ 147













Rôle N° RG 22/11010 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ24V







[L] [J]

[M] [J]

[F] [J]





C/



S.A.S. SPI





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sandra JUSTON

Me Gilles ALLIGIER










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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de DRAGUIGNAN en date du 27 Juin 2022 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 20/00567.





APPELANTS



Madame [L] [J]

née le 24 Mars 1960

demeurant [Adresse 5]



Monsieur [M] [J]

né le 12 Novembre 1988

demeurant [Adresse 4] S...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 02 MAI 2023

N° 2023/ 147

Rôle N° RG 22/11010 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ24V

[L] [J]

[M] [J]

[F] [J]

C/

S.A.S. SPI

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sandra JUSTON

Me Gilles ALLIGIER

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de DRAGUIGNAN en date du 27 Juin 2022 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 20/00567.

APPELANTS

Madame [L] [J]

née le 24 Mars 1960

demeurant [Adresse 5]

Monsieur [M] [J]

né le 12 Novembre 1988

demeurant [Adresse 4] SUISSE

Monsieur [F] [J]

demeurant [Adresse 1]

Tous représentés par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Laurent LE GLAUNEC, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

INTIMEE

S.A.S. SPI Prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Gilles ALLIGIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

et ayant pour avocat plaidant Me Michel IZARD de la SCP LES AVOCATS IZARD & PRADEAU, avocat au barreau de DRAGUIGNAN,

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 13 Mars 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Danielle DEMONT, Conseillère

Madame Louise DE BECHILLON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Mai 2023,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Par acte reçu le 6 avril 2014 par Me [Z], Notaire à [Localité 6], la Sarl Sime Promotion a vendu en l'état futur d'achèvement à Mme [L] [P] épouse [J] et à ses deux fils, MM. [M] et [F] [J], en indivision, une maison individuelle à construire au [Adresse 2], à [Localité 6], le bien formant le lot 35 du Lotissement dénommé [7].

Cette vente a été précédée d'un contrat préliminaire sous seing privé du 11 mars 2014 avec dépôt de garantie et au prix de 1.200.000 euros TTC payables par tranche au fur et à mesure de l'avancée des travaux ; la livraison stipulée au contrat de vente était le 30 juin 2014.

La réception et la remise des clés entre la Sarl Sime Promotion et les acquéreurs a été effectuée le 14 août 2014 et a donné lieu à un procès-verbal de réserves et des travaux de reprise des malfaçons ont été effectués dans un contexte de dégradation des relations contractuelles entre les parties, conduisant les consorts [J] à solliciter du président du tribunal de grande instance de Draguignan la désignation d'un expert afin d'apprécier la qualité des travaux réalisés et de connaître les préconisaitons techniques de nature à remédier aux désordres.

Par ordonnance de référé rendue le 10 mai 2017, M. [H] [U] a été désigné. Remplacé par Mme [S], celle-ci a déposé son rapport au greffe du tribunal le 24 juin 2019, évaluant le montant des travaux à effectuer pour remédier aux désordres constatés à la somme de 35 745,60 euros.

Par exploit d'huissier délivré en date du 13 janvier 2020, les consorts [J] ont fait assigner la Sas Spi (anciennement dénommée Sime Promotion) en réparation de leurs préjudices matériel, de jouissance, et moral.

Saisi par la Sas Spi d'un incident tendant à voir déclarée irrecevable l'action intentée par les consorts [J], le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Draguignan, par ordonnance rendue le 27 juin 2022, a :

- déclaré [L] [J], [M] [J] et [F] [J] irrecevables en leurs demandes formées au titre des désordres apparents et des désordres cachés d'un montant de

36 999,60 euros ;

- renvoyé la cause et les parties pour conclusions au fond sur les demandes indemnitaires résultant du préjudice matériel pour non respect du protocole, du préjudice de jouissance, du préjudice moral et des demandes accessoires ;

- rejeté les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les dépens suivraient le cours de l'instance principale.

Le juge de la mise en état a considéré que les demandes indemnitaires au titre des désordres non apparents, soumis aux dispositions de l'article 1792-3 du code civil, étaient forcloses, la réception étant intervenue le 2 septembre 2014.

Par déclaration en date du 28 juillet 2022, les consorts [J] ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées et déposées par voie électronique en date du 1er mars 2023, Mme [L] [J] et MM. [M] et [F] [J] demandent à la cour de :

- infirmer la décision rendue,

- débouter la société SPI de toutes ses demandes au titre de la forclusion et de la prescription,

- la condamner à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Les appelants estiment en premier lieu que l'on ne peut retenir la date de la réception pour faire courir le délai d'action, dès lors que la société SPI a poursuivi ses interventions jusqu'au mois d'avril 2016 ; qu'ils lui ont adressé une lettre recommandée le 31 août 2014 faisant état de nombreuses difficultés dans l'exécution du contrat, ainsi que plusieurs lettres et courriels, jusqu'à la signature d'un protocole entre les parties le 22 octobre 2015 admettant clairement la réalité des difficultés rencontrées dans le cadre des travaux. Ils estiment par conséquent que le délai de deux ans ne peut courir qu'à compter de la signaure du protocole et que la saisine du juge des référés est incluse dans ce délai.

Ils ajoutent qu'il est acquis que la forclusion est interrompue en cas de reconnaissance de sa responsabilité par le constructeur et que ce protocole matérialise cette reconnaissance.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées par voie électronique en date du 24 novembre 2022, la Sas Spi demande à la cour de :

- rejeter toutes les demandes des consorts [J],

- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- dire et juger que les consorts [J] sont irrecevables pour forclusion en leur demande présentée au visa des articles 1601-3 et suivants du code civil, de condamnation à hauteur de 30.179,60 € TTC (incluse dans la demande de 36.999, 90€), au titre des désordres apparents et

rejeter ces demandes,

- dire et juger les consorts [J] irrecevables pour prescription en leur demande de condamnation présentée au visa des articles 1601-3 et suivants du code civil, à hauteur de 6.820,00 € TTC (incluse dans la demande de 36.999, 90€), au titre des désordres relevant de la

garantie de bon fonctionnement des équipements, et rejeter ces demandes,

- dire et juger les consorts [J] irrecevables pour forclusion et prescription, en leur demande présentée au visa des articles 1601-3 et suivants du code civil, de condamnation au paiement de la somme de 60.000 € au titre d'un préjudice de jouissance et de la somme de 45 000 euros au titre d'un préjudice moral et rejeter ces demandes,

- condamner les appelants in solidum au paiement de la somme de 5.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des dépens avec distraction au profit de Me Gilles Alligier sur ses offres de droits par application des dispositions des articles 696 et 699 du code de procédure civile.

La Sas Spi expose que la demande de condamnation de la somme de 36 999,60 euros correspondant au chiffrage retenu par l'expert est fondée sur les articles 1601-3 et suivants du code civil et contient en premier lieu des demandes au titre de désordres apparents, qui relèvent de l'article 1642-1 du code civil, lesquels sont forclos un an après le procès verbal de réception conformément à l'alinéa 2 de l'article 1648 du même code, de sorte que le protocole intervenu le 22 octobre 2015 ne peut interrompre ce délai qui était échu depuis le 13 août 2015.

S'agissant des désordres non apparents, elle expose que les règles des ventes en état futur d'achèvement renvoient aux articles régissant la garantie décennale, dont le point de départ est la date de réception des travaux, soit le 2 septembre 2014, que le délai a donc expiré le 1er septembre 2016 sans avoir été valablement interrompu par la signature du protocole du 22 octobre 2015 qui ne visait pas les travaux sur lesquels les vices sont apparus.

Elle estime donc cette demande également forclose et considère que les demandes indemnitaires liées au trouble de jouissance et au préjudice moral, sont atteintes par les mêmes forclusions et prescriptions.

MOTIFS

Aux termes de l'article 1642-1 du code civil, le vendeur d'un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l'expiration d'un délai d'un mois après la prise de possession par l'acquéreur, des vices de construction ou des défauts de conformité alors apparents.

Il n'y aura pas lieu à résolution du contrat ou à diminution du prix si le vendeur s'oblige à réparer.

L'article 1648 du même code prévoit en son alinéa 2que dans le cas de cette disposition, l'action doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformité apparents.

Conformément à ces textes, s'agissant des désordres apparents, les parties ayant signé un procès-verbal de réception et de remise des clés le 14 août 2014, le délai de forclusion de l'action en réparation des vices apparents doit être fixé au 13 septembre 2015.

Le fait que postérieurement à la réception, les consorts [J] aient fait part de nouvelles réserves à la société Sime Production n'a pas pour effet de prolonger le délai d'action, mais s'inscrit au contraire parfaitement dans les termes de l'article 1642-1 sus-cité.

Enfin, comme l'a justement relevé le juge de la mise en état, le fait qu'un protocole ait été signé entre les parties le 22 octobre 2015, soit postérieurement au délai de forclusion, est sans effet sur l'acquisition de ce délai.

Par conséquent, il convient de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'action au titre des désordres apparents.

S'agissant des désordres non apparents,il doit être relevé que l'expert a considéré qu'aucun d'entre eux n'était susceptible de compromettre la solidité de l'ouvrage au sens des dispositions de l'article 1792 du code civil, de sorte que ceux-ci relèvent donc de l'article 1792-3 du même code, en application duquel les autres éléments de l'ouvrage font l'objet d'une garantie de bon fonctionnement d'une durée minimale de deux ans à compter de sa réception.

S'agissant du muret, dont les consorts [J] font valoir que l'état s'est dégradé antérieurement aux opérations d'expertise, il doit pareillement être observé que l'expert judiciaire n'a pas considéré que les fissures compromettaient la solidité de l'ouvrage.

Le fait que les acquéreurs aient effectivement signalé à la société Sime Production diverses réserves postérieurement à la signature du procès-verbal de réception, ou encore que les parties aient signé un accord relatif à la prise en charge de certains travaux par cette même société, n'autorise pas le report du point de départ du délai de forclusion prévu par l'article 1792-3 sus-cité.

Ces demandes formées au titre des désordres non apparents sont donc forcloses; l'ordonnance sera donc confirmée de ce chef également.

Les demandes indemnitaires au titre du préjudice matériel découlant du non respect du contrat et du protocole établi entre les parties, au titre du préjudice de jouissance, et au titre du préjudice moral, seront pour leur part déclarées recevables.

L'ordonnance déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les frais du procès

Les dépens de l'appel seront assumés par les consorts [J], lesquels seront par ailleurs condamnés à régler à la SAS Sime Production la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [L] [J] et MM. [M] et [F] [J] in solidum aux entiers dépens de l'instance ;

Condamne Mme [L] [J] et MM. [M] et [F] [J] in solidum à régler à la SAS Sime Production la somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 22/11010
Date de la décision : 02/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-02;22.11010 ?
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