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14/04/2023 | FRANCE | N°19/09419

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-2, 14 avril 2023, 19/09419


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2



ARRÊT AU FOND

DU 14 AVRIL 2023



N° 2023/156













Rôle N° RG 19/09419 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BENHI







SARL CAP AT TWO





C/



[I] [G]

















Copie exécutoire délivrée

le : 14 avril 2023

à :



Me Cédrick DUVAL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 381)



Me Amandine

ORDINES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 210)

























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX EN PROVENCE en date du 02 Mai 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00299.





APPELA...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 14 AVRIL 2023

N° 2023/156

Rôle N° RG 19/09419 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BENHI

SARL CAP AT TWO

C/

[I] [G]

Copie exécutoire délivrée

le : 14 avril 2023

à :

Me Cédrick DUVAL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 381)

Me Amandine ORDINES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 210)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX EN PROVENCE en date du 02 Mai 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 17/00299.

APPELANTE

SARL CAP AT TWO, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Cédrick DUVAL de la SELARL CABINET DUVAL AVOCATS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Fanny ROUVIERE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

Madame [I] [G], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Amandine ORDINES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023

Signé par Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Madame [I] [G] a été embauchée par la société CAP AT TWO, boutique de vêtements sous l'enseigne «'L.A STORE'» au sein du centre commercial « AVANT CAP » situé à [Localité 3], par contrat à durée indéterminée à compter du 1er août 2006 en qualité de vendeuse.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce de détail de l'habillement.

L'entreprise occupait à titre habituel moins de onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 février 2017, Madame [G] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement prévu le 10 mars 2017 et mise à pied à titre conservatoire avec effet immédiat.

Le 28 février 2017, elle a été placée en arrêt de travail.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 mars 2017, l'entretien préalable a été reporté au 17 mars 2017.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 23 mars 2017, Madame [G] a été licenciée pour faute grave.

Madame [I] [G] a saisi, par requête réceptionnée au greffe le 21 avril 2017, le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence aux fins de contester la cause réelle et sérieuse de son licenciement, demander une indemnisation à ce titre et diverses sommes à caractère indemnitaire.

Par jugement du 2 mai 2019 notifié le 27 mai 2019, le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence, section commerce, a ainsi statué':

- dit Madame [G] recevable et bien fondée en son action,

- juge le licenciement de Madame [G] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamne la SARL CAP AT TWO à verser à Madame [G] les sommes suivantes':

- 15'000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3'100,02 euros au titre de son préavis,

- 310,00 euros au titre des congés payés afférents,

- 3'352,05 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1'291,67 euros à titre de rappels de salaire sur mise à pied conservatoire,

- 129,16 euros au titre des congés payés afférents,

- 150,00 euros au titre de réparation du préjudice lié à la remise tardive des documents de fin de contrat,

- 1'180,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute la SARL CAP AT TWO de l'intégralité de ses demandes,

- condamne la SARL CAP AT TWO aux entiers dépens.

Par déclaration du 13 juin 2019 notifiée par voie électronique, la SARL CAP AT TWO a interjeté appel du jugement et sollicité son infirmation en toutes ses dispositions.

Par conclusions notifiées le 18 novembre 2019, Madame [G] a interjeté appel incident de ce jugement.'

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions notifiées au greffe par voie électronique le 22 janvier 2020, la société CAP AT TWO, appelante, demande à la cour, au visa des articles 696 et 700 du code de procédure civile, de :

- infirmer le jugement rendu le 2 mai 2019 par le conseil de prudhommes d'Aix-en-Provence en ce qu'il a :

- jugé le licenciement de Madame [G] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société CAP AT TWO au versement des sommes suivantes :

- 15'000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 100,02 euros au titre de son préavis,

- 310,00 euros de congés payés afférents,

- 3 352,05 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1 291,67 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,

- 129,67 euros à titre de congés payés afférents,

- 150,00 euros à titre de réparation du préjudice lié à la remise tardive des documents de fin de contrat par la société,

- 1'180,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant à nouveau,

- dire que le licenciement pour faute grave est parfaitement régulier et justifié,

- dire et juger que la SARL CAP AT TWO n'a commis aucune faute dans l'exécution du contrat de travail de Madame [G],

- débouter Madame [G] de sa demande de requalification de son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de toutes ses demandes subséquentes (indemnité de licenciement indemnité compensatrice de préavis, congés payés y afférents, paiement de la mise à pied conservatoire et congés payés y afférents, nullité des sanctions),

- débouter Madame [G] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire et abusif,

- débouter Madame [G] de ses demandes de dommages-intérêts pour une remise tardive de l'attestation Pôle emploi de l'attestation de salaire à la caisse primaire d'assurance-maladie,

- débouter Madame [G] de l'ensemble de ses demandes fins et prétention,

- la condamner à lui verser la somme de 2'500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance,

- la condamner à lui verser la somme de 2'500,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés à hauteur de cour,

- la condamner aux entiers dépens en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

A l'appui de son recours, la société appelante fait valoir en substance que :

sur le licenciement'pour faute grave':

- le licenciement pour faute grave de Madame [G] est parfaitement justifié, la salariée ayant usé de violence physique et verbale à l'égard de la directrice du magasin'étant précisé que celle-ci était coutumière de marques d'agressivité imprévisibles et disproportionnées';

- la production des anciennes sanctions avait pour objet de placer le comportement de Madame [G] dans un contexte général';

- le poste de la salariée n'a pas été supprimé en raison de la procédure de sauvegarde judiciaire, celle-ci ayant été remplacée dès le 1er avril 2017 par le biais d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet';

- Madame [G] n'argue d'aucun élément particulier à l'appui d'un licenciement vexatoire ou/et abusif';

sur le manquement à l'obligation de sécurité':

- la salariée ne s'est jamais plainte d'un quelconque harcèlement moral auprès de son employeur avant son courrier du 28 février 2017 et ne justifie aucun lien entre son état de santé et son lieu de travail';

- Madame [G] évoque une situation de harcèlement sans formuler de demande indemnitaire à ce titre ni viser les articles du code du travail relatif au harcèlement moral';

- c'est au contraire Madame [G] qui s'est rendue coupable de harcèlement et de manquement à l'obligation de sécurité à l'égard de ses collègues de travail';

sur la demande d'annulation des sanctions disciplinaires':

- les sanctions, étant prescrites, ne sauraient être annulées';

sur la remise tardive des documents de fin de contrat':

- elle a remis à la salariée son attestation Pôle emploi ainsi que l'attestation de paiement à la CPAM dans des délais normaux à la suite de la rupture du contrat de travail et conformément à ses obligations, étant précisé que Madame [G] n'a pas été licenciée le 27 février 2017 mais le 23 mars 2017'et que les documents de fin de contrat sont quérables et non portables.

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 31 mars 2020, Madame [G] demande à la cour de':

confirmer la décision rendue par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a statué comme suit :

- dit Madame [G] recevable et bien fondée en son action,

- juge le licenciement de Madame [G] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamne la SARL CAP AT TWO à verser à Madame [G] les sommes suivantes':

- 15'000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 100,02 euros au titre de son préavis,

- 310,00 euros de congés payés afférents,

- 3 352,05 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1 291,67 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,

- 129,67 euros à titre de congés payés afférents,

- 150,00 euros à titre de réparation du préjudice lié à la remise tardive des documents de fin de contrat par la société,

- 1'180,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la SARL CAP AT TWO de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la SARL CAP AT TWO aux entiers dépens,

réformer la décision rendue par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a statué comme suit':

- débouté Madame [G] de sa demande relative à la réparation du préjudice lié au manquement à l'obligation de sécurité de résultat,

- débouté Madame [G] de sa demande relative à la réparation du préjudice distinct lié à la brusque rupture,

- condamné la SARL CAP AT TWO à lui verser 150,00 euros au titre de réparation du préjudice lié à la remise tardive des documents de fin de contrat,

en conséquence,

- dire et juger recevable et bien fondée son action,

- condamner la société CAP AT TWO à lui payer la somme de 10'000,00 euros à titre de dommages et intérêts du fait de l'exécution déloyale du contrat de travail ainsi que du manquement de la société à son obligation de sécurité,

- annuler les sanctions disciplinaires antérieures au licenciement,

- condamner la société CAP AT TWO à lui payer la somme de 5'000,00 euros en réparation du préjudice distinct lié à la brusque rupture et aux circonstances de la rupture de son contrat de travail,

- condamner la société CAP AT TWO à lui payer la somme de 789,36 euros en réparation du préjudice lié à la remise tardive des documents de fin de contrat par la société,

- condamner la société CAP AT TWO au paiement de la somme de 3'000,00 euros à titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L'intimée réplique que':

sur l'annulation des avertissements':

- les deux avertissements, qui seraient intervenus les 20 octobre 2011 et 9 décembre 2014 et qui sont invoqués dans la lettre de licenciement, doivent être annulés'en ce qu'ils sont prescrits';

- en tout état de cause, l'avertissement du 9 décembre 2014 pour 10 minutes de retard lors de la prise de poste était disproportionné et ne concernait pas un comportement déplacé ou violent';

- aucun avertissement notifié le 20 octobre 2011 n'est versé aux débats par la société';

sur le manquement de l'obligation de sécurité':

- elle a alerté en vain à plusieurs reprises de la dégradation des relations de travail du fait du comportement inapproprié de Madame [O] et été placée dans une situation de détresse';

- elle présente des éléments laissant supposer l'existence d'un harcèlement';

sur le licenciement':

- la société ne justifie pas des griefs qui lui sont reprochés';

- elle a subi un préjudice distinct du fait du caractère vexatoire du licenciement et des accusations mensongères portées à son encontre';

sur la remise tardive des documents de fin de contrat':

- elle a dû attendre un mois et demi pour recevoir ses documents de fin de contrat et pouvoir s'inscrire au chômage';

- elle n'a par ailleurs reçu son attestation de salaire au titre de la période de maladie du 28 février au 18 mai 2017 que le 22 mai 2017.

Une ordonnance de clôture est intervenue le 30 janvier 2023, renvoyant la cause et les parties à l'audience des plaidoiries du 1er mars suivant.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'annulation des sanctions disciplinaires':

L'article L.1471-1 du code du travail en ses dispositions applicables au litige prévoit que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Au titre des dispositions transitoires de la loi du 14 juin 2013 et alors que le délai de prescription, en l'espèce quinquennal, a commencé à courir antérieurement à la date de promulgation de la loi, le nouveau délai de prescription de deux ans, issu de la loi du 14 juin 2013, s'applique à compter de la date de promulgation, sans que le délai total de prescription ne puisse excéder cinq ans.

L'article L1332-5 du code du travail précise qu'aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction.

La société CAP AT TWO soutient que la demande d'annulation des deux sanctions est prescrite.

Il est observé que la salariée relève elle-même qu'au regard de leur ancienneté, les avertissements datés du 20 octobre 2011 et du 9 décembre 2014 ne pouvaient plus être invoqués par l'employeur à l'appui du licenciement. En réalité, un seul des deux avertissements (celui du 20 octobre 2011) est antérieur de plus de trois ans à l'engagement de la procédure de licenciement le 27 février 2017 et ne pouvait être invoqué par l'employeur.

S'agissant de l'avertissement du 20 octobre 2011':

Le délai de prescription de cinq ans de l'action en contestation de l'avertissement du 20 octobre 2011 a commencé à courir antérieurement à la date de promulgation de la loi du 14 juin 2013, soit en l'espèce le 20 octobre 2011. Madame [G] disposait jusqu'au 17 juin 2015 pour saisir le conseil de prud'hommes.

Ayant saisi le conseil de prud'hommes le 21 avril 2017, l'action en contestation de cet avertissement est prescrite.

S'agissant de l'avertissement du 9 décembre 2014':

L'action de contestation de cet avertissement ayant été engagée le 21 avril 2017, soit au-delà du délai de prescription de deux ans visé par l'article L. 1471-1 du code du travail, elle est également prescrite.

Le jugement déféré est confirmé sur ces points.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité'par l'employeur':

Aux termes de l'article L. 1222-1 code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

La charge de la preuve de l'exécution déloyale du contrat de travail par l'employeur pèse exclusivement sur la salariée.

L'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail et de l'article L. 4121-2 du même code dans leur version applicable au présent litige, impose à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Il est constant que l'employeur ne peut s'exonérer de sa responsabilité au titre de l'obligation de sécurité qu'en justifiant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L.4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

Madame [G] fait valoir que la directrice du magasin, Madame [O], la rabaissait sans cesse devant la clientèle. Elle dit avoir alerté à ce sujet à plusieurs reprises Madame [N], membre fondateur de la société et épouse du gérant à compter de 2014. Elle évoque une situation de harcèlement.

Elle verse aux débats notamment les pièces suivantes':

- deux attestations de personnes se présentant comme des clientes de la boutique de vêtements évoquant une agressivité de la responsable de la boutique envers Madame [G] (Madame [R]'indiquant avoir été témoin au mois d'octobre 2016 «'de la manière brutale avec laquelle s'est exprimée sa responsable de boutique envers [I]. Nous sommes restés choqués par l'agressivité, sans fondement, de cette responsable froide à l'égard de notre vendeuse. Ce mépris envers un employé est inacceptable et contraire à l'éthique du commerce'» (attestation du 8 avril 2017)'; Madame [C] [H]': «'Melle [I] [G] était occupée à me conseiller et me présenter d'éventuels modèles pouvant convenir à mes fils lorsque la responsable du magasin s'est permise de couper notre conversation et à apostropher de manière fort agressive Melle [I] [G] s'est excusée et lui a fait justement remarquer qu'elle était en clientèle ce qui n'a pas eu l'air de déranger la responsable'» (attestation du 15 avril 2017))';

- l'attestation du 6 avril 2017 d'une employée d'une autre boutique de la galerie marchande, Madame [P], qui indique': «'j'ai constaté à plusieurs reprises passant devant sa boutique avoir assister à des méchancetés des brimades de sa responsable Mme [O] [E] j'étais outrée elle lui parlait comme un chien et la rabaissant devant tout le monde'»';

- des attestations de personnes à qui elle s'est confiée (Madame [J], pharmacienne'; Madame [Y] podologue'; Madame [A] tenant un salon de coiffure)';

- des attestations de clients louant les qualités de vendeuse de la salariée (attestation du 4 juillet 2017 de Madame [Z]'; attestation du 26 juin 2017 de Madame [K]'; attestation du 8 décembre 2017 de Madame [T]).

La salariée se réfère également à une attestation du 27 septembre 2017 communiquée par l'employeur émanant de Madame [L], gérante de la boutique TIMBERLAND située dans le même centre commercial et associée de Madame [N], qui indique': «'J'atteste par la présente que Madame [G] [I] est venue souvent très énervée et agitée chez TIMBERLAND alors que je m'y trouvais avec Madame [N] pour se plaindre notamment de consignes qui lui étaient données, ou encore du peu d'attention que lui manifestait l'équipe eu égard à son âge, du fait qu'elle se sentait isolée ou encore qu'elle ne pouvait accepter d'exécuter des tâches qu'elle estimait en dessous de ses compétences'».

Madame [G] produit également':

- un courrier de 7 pages adressé en recommandé le 28 février 2017 (soit concomitamment au début de la procédure de licenciement) et réceptionné par l'employeur le 2 mars 2017 dans lequel elle fait «'part de l'attitude excessive et haineuse de la responsable de boutique, Mme [E] [O]'» à son égard, s'en prenant à elle «'ouvertement'», «'épiant et critiquant le moindre de'» ses «'agissements au sein du magasin'», faisant une différence entre les employés, «'copinant'» avec certains et ne la considérant pas «'comme un membre à part entière de l'équipe'». Elle relate également la scène à l'origine notamment du licenciement et conclut': «'Pourquoi tant de haine et de mépris à mon égard'' N'appelle-t-on pas cela du harcèlement moral'''»';

- son dossier médical qui fait état dans le compte-rendu de la visite médicale du 30 novembre 2016 de «'difficultés relationnelles avec la hiérarchie'» et mentionne': «'Relationnel avec responsable : dit que sa responsable est jalouse d'elle'; dit que la responsable lui a dit Parle de harcèlement de la part de sa resp il y a 2-3 ans. A impliqué sa patronne (ex belle-soeur). Dit que maintenant est sur le qui vive, dit que sa resp est toujours aigrie ou moment joyeux, la salarié dit qu'elle est comme un animal blessé, je ne me laisse plus faire = je m'arrête. "C'est en dent de scie et j'ai du mal à m'y faire'. Dit que sa resp va lui apprendre son travail. Sa patronne a repris sa responsable. Dit que sa resp parle mal, est froide. Son collègue a pris sa défense une fois face à sa responsable. L'ambiance s'est améliorée. Sa resp s'est calmé car la salariée a l'appui de sa patronne. Essaie d'être au-dessus, prend conseil auprès de son entourage. Se focalise sur les clients. (')'»'; le dossier médical mentionne des difficultés lors de la visite médicale du 10 mars 2017 («'dit qu'elle est épiée, traquée, dit qu'on lui reproche tout et son contraire. le 26 février dit qu'alors qu'elle s'occupait de ses clients la responsable lui a reproché de parler avec sa cliente, au lieu de travailler .. de ranger les affaires. bref altercation avec la responsable.

bref travaille avec une boule au ventre en permanence rapporte des brimades sur sa façon de s'habiller, brimades sur sa coiffure de la part de sa responsable dit que "sa responsable est jalouse d'elle, "dit qu'on lui reproche son maquillage devant d'autres personnes etc.. par ailleurs rapporte que la responsable lui aurait fait des attouchements et propos malsains.

bref n'en peut plus, dit que son médecin traitant l'a arrêtée pour burn out vu arrêt : "burn out sur harcèlement professionnel"'»)';

- une photocopie d'écran de téléphone portable mentionnant deux appel le soir du 26 février 2017 à «'[X]'» (selon Madame [G], Madame [X] [N], ancienne gérante du magasin) d'un 1 minute et 11 secondes et de 2 minutes 47 secondes.

Ces éléments ne suffisent pas à démontrer une exécution déloyale du contrat par l'employeur. Les attestations émanant de personnes extérieures à la boutique ne sont en effet pas suffisamment précises et circonstanciées pour établir des agissements inadaptés de la responsable de la boutique à l'encontre de Madame [G]. Les autres pièces reposent exclusivement sur ses dires ou les reprennent.

Par ailleurs, la salariée dénonce pour la première fois auprès de son employeur des conditions de travail dégradées et une situation de harcèlement professionnel du fait du comportement de sa responsable hiérarchique concomitamment à l'engagement de la procédure de licenciement et sa mise à pied conservatoire. Il ne peut dans ces conditions être reproché à l'employeur non informé de ne pas avoir pris les mesures de sécurité nécessaires.

Le jugement entrepris est donc confirmé en ce qu'il a débouté Madame [G] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Sur le bien-fondé du licenciement pour faute grave :

Aux termes de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article L.1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve.

La lettre de licenciement du 23 mars 2017 énonce :

« Le 26 février 2017, alors que la boutique était ouverte, vous avez violemment, pris à partie votre chef de magasin Madame [E] [O], allant jusqu'à vous en prendre physiquement à cette dernière.

Le facteur déclencheur de cette altercation réside dans le fait que les deux petites filles du client dont vous vous occupiez, jouaient avec le paillasson de l'une des cabines d'essayage de la boutique.

Soucieuse de la sécurité et de la santé de ces petites filles ainsi que de la tranquillité de l'autre client qui était juste à côté, dans une autre cabine d'essayage, Madame [O] vous a demandé de bien vouloir les mettre en garde sur le fait que ce paillasson était poussiéreux.

Il ressort des témoignages que suite à cette demande, vous avez eu une réaction disproportionnée en répondant de manière agressive à votre responsable en les termes suivants':

- Vous n'aviez pas vu

- Elle n'avait rien à vous dire

- Vous n'êtes pas baby-sitter

- Vous n'étiez pas d'accord

Surprise et gênée de cette scène se déroulant sous les yeux des clients, Madame [O] a juste titre tentait d'apaiser la situation.

Cette tentative est malheureusement demeurée infructueuse dans la mesure où la situation n'a fait que s'aggraver.

En effet, plutôt que de vous calmer et reprendre le cours de votre travail, vous avez poursuivi

Madame [O] en cabine afin de vous en prendre physiquement à cette dernière, lui donnant un coup sur le bras.

Or un tel comportement empreint de violences et menace physique est inacceptable au sein d'une entreprise prestataire de services telle que la nôtre.

Par la suite, et comme si cela ne suffisait pas vous avez aggravé la situation en persistant dans votre attitude agressive.

En effet, vous n'avez eu de cesse d'invectiver Madame [O] en affirmant « haut et fort'» que vous n'étiez pas d'accord avec cette réflexion.

Il convient de vous rappeler qu'il ressort des prérogatives de Madame [O] qu'elle doit veiller au respect des directives de sa direction, la sécurité, la santé des clients en font également partie. Le climat qui règne dans notre magasin est primordial, les clients doivent s'y sentir le mieux possible. Vous n'êtes pas sans savoir que le moment des essayages est crucial et déclencheur de la vente.

De plus, Madame [O], en tant que chef de magasin, est votre supérieure de sorte que vous vous devez d'adopter un comportement respectueux à son égard.

Or tel n'a malheureusement pas été le cas ce jour-là.

Votre comportement est donc gravement fautif.

Outre l'agression physique de votre supérieure hiérarchique, vous aggravez votre cas en prenant à partie le client donc vous vous occupiez, en lui demandant si vous étiez baby-sitter et s'il était normal de « se prendre ce genre de réflexion ! ».

Il est à peine utile de vous préciser que votre comportement a créé un climat de gêne et d'insécurité, créant un malaise dans la boutique toute la journée !

En effet, des salariés présents ce jour là témoignent de ce que vous avez « boudé » le restant de l'après-midi devant le mur à jeans homme se situant à l'entrée du magasin'ce qui ne donne pas du tout envie aux clients de rentrer dans le magasin.

Ce comportement ne saurait être accepté, d'autant plus que ce climat était tellement pesant que nous n'avons opéré que deux malheureuses ventes par la suite, alors que le dimanche est une journée de forte affluence dans la galerie commerciale où notre magasin se trouve !

Votre comportement, portant atteinte à l'image commerciale de notre entreprise, a de fait désorganisé le service à la clientèle.

Vos agissements s'inscrivent donc dans une totale contradiction avec l'image conviviale que nous nous efforçons de véhiculer au quotidien.

En outre, le climat de gêne et d'insécurité que vous avez créé a fortement déstabilisé vos collègues de travail !

En effet, alors que tel semble être le dernier de vos soucis, vos collègues de travail se sont trouvés très mal à l'aise face à cette situation et craignent de manière générale toutes vos réactions, lesquelles sont de manière générale imprévisibles et disproportionnées.

Or nous ne saurions également accepter que notre personnel éprouve un quelconque sentiment de stress en se rendant sur leur lieu de travail.

La violence verbale et physique dont vous avez fait preuve ce jour-là n'est pas constitutive du comportement que notre personnel doit adopter.

Vous n'êtes également pas sans ignorer qu'aucun salarié ne doit subir d'agissement ayant pour objet ou pour effet de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

De plus défiant toutes les directives qui vous étaient données, vous avez discrédité la réputation professionnelle de votre supérieure hiérarchique devant d'autres salariés de l'entreprise de nos clients.

Il convient de vous rappeler qu'au-delà des règles de bienséance qui sont nécessaire sur un lieu de travail, il est indispensable d'adopter une attitude respectueuse à l'encontre des autres salariés.

Votre attitude est d'autant plus déplorable qu'il ne s'agit pas d'un cas isolé mais d'un comportement habituel tant envers vos collègues de travail que les clients de la boutique.

Depuis votre embauche, nous avons constamment à vous reprocher vos problèmes de ponctualité ainsi que votre attitude envers vos collègues de travail et parfois envers les clients de notre entreprise.

En effet malgré les nombreux rappels à l'ordre sur votre comportement lesquels sont restés sans effets, nous n'avons eu d'autre choix que de vous notifier deux avertissements les 20 octobre 2011 et 9 décembre 2014.

Par ailleurs, nous vous rappelons que nous n'avons pas manqué de patience et de bienveillance à votre égard depuis votre embauche au sein de notre entreprise, et ce, malgré les multiples plaintes de vos collègues de travail.

Tous témoignent de ce qu'ils ont d'importantes difficultés à communiquer avec vous et à gérer votre comportement vis-à-vis d'eux même et des clients.

En effet, il ressort des attestations que TOUS ont eu, à plusieurs reprises, une altercation avec vous.

Vos collègues de travail témoignent de ce que vous leur manquez de respect tant en privé que devant les clients, ainsi que du fait que vous ne tolérez aucune remarque, et ce d'autant plus lorsqu'elle vient de votre supérieure, Madame [O].

En somme, tous les salariés de l'entreprise ressentent une réelle crainte à travailler avec vous.

Votre attitude empreinte d'agressivité ne peut être tolérée davantage.

Nous regrettons d'autant plus cette situation que nous avons toujours privilégié une relation de travail basée sur le respect mutuel et la communication.

Pire encore, et comme si le mécontentement général de vos collègues de travail ne suffisait pas, certains n'osent même plus rentrer dans la boutique quand vous y êtes !

Ainsi la gêne et l'insécurité ressentie par vos collègues de travail, est également un sentiment partagé par certains clients !

Votre attitude ne correspond donc en aucun point à celle que nous sommes en droit d'attendre de la part de notre personnel, laquelle a indiscutablement causé un préjudice à notre entreprise.

Par ailleurs ce sentiment de crainte que vous créez est ressenti tant lors de votre présence sur votre lieu de travail, que lors de votre absence !

En effet, votre père s'est présenté à plusieurs reprises au magasin et également téléphoné en essayant d'intimider votre direction en ayant des propos menaçant, le 1er mars dernier il est rentré dans le magasin a regardé vos collègues de travail et a dit « je suis le papa de [I], je fais connaissance' » inutile de vous dire que de par sa stature (environ 1,90 et plus de 100kg) et son regard, ce comportement à véritablement propagé un sentiment de crainte et de danger à tout le personnel de l'entreprise »

La salariée a donc été licenciée pour faute grave pour s'être emportée verbalement puis physiquement le 26 février 2017 à l'encontre de sa responsable de boutique devant des clients et employés portant atteinte à l'image du commerce.

A l'appui de ces griefs, l'employeur verse notamment aux débats les pièces suivantes':

- un courriel du 26 février 2017 émanant de [B], vendeuse à la boutique L.A. STORE qui indique': «'Bonsoir [X], Je vous fais part du récit de l'incident dont j'ai été témoin aujourd'hui le 26/02/2017 au LA Store : Suite à une remarque de notre responsable de boutique, [I] s'est mise hors d'elle. Elle s'en est prise ouvertement d'un geste violent envers [E], elle a hurlé dans tout le magasin à plusieurs reprises et à également pris le client à parti pour «'faire remarquer l'ambiance dans laquelle elle travaille'» devant le reste de l'équipe et devant la cliente que servait a ce moment [E]. J'ai été témoin de toute la scène et je reste à votre disposition pour plus de détails si vous avez besoin'»';

- une attestation du 3 mars 2017 également de Madame [B] [M] relatant l'altercation du dimanche 26 février et expliquant que Madame [G] s'est mise «'à hurler d'un bout à l'autre du magasin'» après que sa responsable lui ait dit de «'dire ou faire quelque chose pour les enfants du client'» dont elle s'occupait'«'qui étaient en train de's'amuser avec le paillasson de la cabine qui n'était pas très propre'»'; que la responsable a «'voulu faire redescendre le ton de [I] en lui parlant très calmement'» et qu'à ce moment-là Madame [G] a un «'geste déplacé'» et «'lui a frappé le bras'» puis a suivi la responsable à nouveau en «'hurlant'à plusieurs reprises qu'elle n'était pas d'accord avec la réflexion que venait de lui faire [E], en prenant son client à parti en lui demandant si "elle était baby-sitter et si il était normal de se prendre ce genre de réflexion 'en mettant mal à l'aise [E] alors que sa cliente était dans la dernière cabine. [E] s'est donc excusé auprès des clients pour cette situation. Je pense que [I] a très bien compris qu'elle avait dépassé une limite'»'; que Madame [G] a ensuite «'passé l'après midi à bouder devant le mur à jean homme. Ce qui n'était pas agréable pour les clients qui voulaient entrer dans le magasin'»'; Madame [M] relate d'autres faits non datés' qui l'ont marquée ;

- un courrier/ attestation de Madame [E] [O], responsable du magasin LA STORE qui fait part de «'problèmes'» rencontrés du fait de «'l'attitude antiprofessionnelle'» de Madame [G] et de difficultés à manager la salariée lui reprochant «'des dizaines de fois d'être jalouse d'elle'» lui répondant qu'elle n'a rien à lui apprendre car elle sert «'des sandwichs'», pensant qu'elle est traitée différemment, «'incapable de se remettre en question'»,'hurlant «'dans le magasin plein de clients si elle est mécontente'», s'excluant toute seule par son comportement de l'équipe'; Madame [O] évoque plusieurs altercations violentes': «'concernant ses retards incessants'- ses tenues non conformes avec notre magasin - le fait que son téléphone personnelle reste à sa disposition en boutique et sonne régulièrement - son stationnement quotidien de son véhicule sur des places handicapées - le non-respect de mes consignes simples'»'; elle précise que «'le fait'» que le 26 février «'elle ait été violente et insultante à mon égard, aux yeux de tous (équipe et clientèle) ne nous permet pas de continuer à travailler avec elle'»'; qu' «'une fois de plus, de trop, la réaction de [I] m'a plongé dans la honte'»'; elle précise que tout ce qu'elle lui a «'demandé ce jour là était de faire reposer ce tapis gentiment à la petite fille avec laquelle elle avait déjà créé un contact'»';

- une attestation du 21 mars 2017 d'[S] [W], étudiant en BTS par alternance, qui indique': «'Le dimanche 26 février 2017, ma responsable [E] et [I] se sont parlées en ma présence, cela était sur le thème du travail, et la conversation s'est animée'» et évoque des propos tenus par Madame [G]': «'Vous êtes une responsable de pacotille'», «'manipulatrice'» et «'incompétente'»'; il précise avoir déjà eu également une altercation avec Madame [G] au sujet de son travail, avoir été traité par celle-ci de «'petit merdeux'», qu'elle a précisé qu'elle «'avait la possibilité'» de le «'virer'» et jeté dans la conversation un jean dans sa direction';

- un courriel du 21 mars 2017 émanant de Monsieur [F] [U] (vendeur dans la boutique LA STORE) adressé à Madame [X] [N] relatant un incident pendant les soldes d'hiver 2016': «'Problème sandra : Une cliente regarde les ceintures quand au même moment [I] passe derrière elle pour emmener un jean en cabine, la cliente recule et lui marche accidentellement sur les pieds, [I] hurle «'Aie, vous pouvez pas faire attention !!!'» la cliente s'excuse mais lui fait remarquer son comportement agressif, [I] s'énerve et rentre en conflit avec la cliente, je dis à [I] de se calmer mais elle ne veut rien savoir, et pendant que j'encaisse la cliente, [I] continu de la provoquer'»';

- des attestations de salariés ou anciens salariés louant les qualités de Madame [O] en tant que responsable de magasin et relatant le comportement régulièrement agressif et parfois déplacé de Madame [G] et évoquant des faits datant parfois de plusieurs années.

Il ressort de ces éléments que Madame [G] a eu le 26 février 2017 une réaction excessive, violente à l'égard de sa responsable hiérarchique sans aucune provocation, ce en présence de collègues de travail et de clients. S'agissant du fait de violence physique, seule Madame [B] [M] l'évoque explicitement.

Il résulte des témoignages produits des différents salariés ou stagiaires du magasin (actuels et anciens) que ce type d'emportement de Madame [G] n'était pas un acte isolé mais n'avait jamais été si virulent, surtout à l'égard de sa responsable hiérarchique, traitée de «'responsable de pacotille'», «'manipulatrice'» et «'incompétente'».

Ces faits, constitutifs d'une faute, justifiaient la rupture du lien contractuel, nonobstant l'existence d'un seul antécédent disciplinaire deux ans et demi auparavant (pour un retard et le mouvement d'humeur consécutif après que la remarque lui en ait été faite) et les qualités de la salariée dans le domaine de la vente non remises en cause par l'employeur.

Au regard de l'ancienneté de la salariée (plus de 10 ans) et de l'antécédent disciplinaire de plus de deux ans et demi,1 il sera retenu que la poursuite de l'exécution du contrat de travail pendant la durée du préavis qui caractérise une faute grave n'était manifestement pas impossible.

Il convient dès lors, par voie d'infirmation du jugement entrepris, de débouter Madame [G] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement est par contre confirmé en ce qu'il a condamné la société CAP AT TWO au paiement des sommes suivantes :

- 3 100,02 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 310,00 euros au titre des congés payés afférents,

- 3 352,05 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Il résulte des dispositions de l'article L. 1332-3 du code du travail que seule une faute grave peut justifier le non-paiement du salaire pendant une mise à pied conservatoire.

En l'espèce, il résulte de ce qui précède que le licenciement ne repose pas sur une faute grave.

La société CAP AT TWO est en conséquence redevable des salaires dont Madame [G] a été privée durant la période de mise à pied conservatoire ainsi que des congés payés afférents.

Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a condamné la société CAP AT TWO à payer à Madame [G] la somme de 1 291,67 à titre de rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire outre celle de 129,67 au titre des congés payés afférents.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement vexatoire :

Le salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse peut solliciter l'indemnisation du préjudice subi et consécutif à un licenciement brutal et vexatoire, distinct du préjudice résultant de la perte d'emploi sous réserve de prouver le comportement fautif de l'employeur dans les circonstances de la rupture, la réalité du préjudice allégué et le lien de causalité.

Madame [G] n'établit aucun manquement de la part de l'employeur dans la mise en 'uvre de la procédure de licenciement. Elle ne démontre pas le caractère vexatoire du licenciement, ni de préjudice spécifique. Le jugement entrepris est dès lors confirmé en ce qu'il l'a déboutée de cette demande.

Sur la demande d'indemnisation au titre de la remise tardive des documents de fin de contrat par la société':

Madame [G] expose par ailleurs avoir attendu le 13 avril 2017, soit un mois et demi après son licenciement, pour recevoir ses documents de fin de contrat et s'inscrire au chômage.

Cependant, le solde de tout compte, le certificat de travail et l'attestation Pôle emploi sont quérables et non portables ainsi que le précise l'employeur dans la lettre de licenciement. Il n'est donc pas justifié de manquement s'agissant de ces documents.

La société CAP AT TWO ne répond pas s'agissant du délai de transmission de l'attestation de salaire au titre de la période de maladie du 28 février 2017 au 18 mai 2017. S'il ne s'agit pas d'un document de fin de contrat à proprement parler, il devait être adressé rapidement après réception des arrêts maladie pour l'établissement du droit aux indemnités journalières de la salariée.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné pour ce motif la société à payer la somme de 150,00 euros de dommages et intérêts de ce chef.

Sur les demandes accessoires :

Il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis à la charge de la société CAP AT TWO les dépens de première instance et alloué à Madame [G] une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Madame [G], qui succombe en ses demandes, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application en l'espèce des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les demandes de l'ensemble des parties présentées à ce titre seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné la société CAP AT TWO à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et s'agissant des dispositions relatives aux dépens,

STATUANT à nouveau sur ces chefs et y ajoutant,

DIT que le licenciement de Madame [I] [G] repose sur une cause réelle et sérieuse,

DEBOUTE Madame [I] [G] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Madame [I] [G] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-2
Numéro d'arrêt : 19/09419
Date de la décision : 14/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-14;19.09419 ?
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