COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 06 AVRIL 2023
N° 2023/0445
Rôle N° RG 23/00445 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLCPV
Copie conforme
délivrée le 06 Avril 2023 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 05 avril 2023 à 12h17.
APPELANT
Monsieur [V] [K]
né le 09 mars 2002 à [Localité 3]
de nationalité tunisienne
comparant en personne, assisté de Me Rodolphe PREZIOSO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office et de M. [X] [J] (Interprète en langue arabe) en vertu d'un pouvoir général, inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
INTIME
Monsieur le préfet des [Localité 2]
Représenté par Madame Sylvie VOILLEQUIN
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 06 avril 2023 devant Madame Catherine LEROI, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Madame Michèle LELONG, Greffière,
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 06 avril 2023 à 15h40,
Signée par Madame Catherine LEROI, Conseillère et Madame Michèle LELONG, Greffière,
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 02 avril 2023 par le préfet des [Localité 2] , notifié le même jour à 17h20 ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 02 avril 2023 par le préfet des [Localité 2] notifiée le même jour à 17h20 ;
Vu l'ordonnance du 05 avril 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de Monsieur [V] [K] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et rejetant sa contestation de l'arrêté de placement en rétention ;
Vu l'appel interjeté le 05 avril 2023 par Monsieur [V] [K] ;
Monsieur [V] [K] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare : 'Je veux rester ici, je n'ai pas d'avenir dans mon pays. J'ai perdu mon passeport'.
Son avocat a été régulièrement entendu ; se référant à l'acte d'appel, il soutient que l'arrêté de placement en rétention est irrégulier :
* sur le plan de la légalité externe, pour insuffisance de motivation s'agissant de la prise en compte de la situation personnelle de M. [K], en ce qu'il a été omis de préciser qu'il dispose d'un hébergement stable et effectif sur le territoire français,
* sur le plan de la légalité interne, pour erreur d'appréciation au regard de ses garanties de représentation et défaut de proportionnalité du placement en rétention en ce qu'il n'a pas été mis en mesure de justifier de son adresse par les services de police.
Il sollicite en conséquence la mainlevée de la rétention ou à défaut l'assignation à résidence de M. [K].
Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de la décision déférée. Il fait valoir que l'arrêté de placement en rétention est parfaitement motivé en fait et en droit, que M. [K] ne justifie pas d'un passeport, s'est déjà soustrait à une OQTF et se maintient en situation irrégulière.
Il sollicite le rejet de la demande d'assignation à résidence.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.
Aux termes de l'article L741-1 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, l'autorité administrative peut placer en rétention pour une durée de 48 heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision. Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L 612-3.
Ce dernier article dispose que le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :
1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
2° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ;
3° L'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;
4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;
5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;
6° L'étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l'un des États avec lesquels s'applique l'acquis de Schengen, fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par l'un des États ou s'est maintenu sur le territoire d'un de ces États sans justifier d'un droit de séjour ;
7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ;
8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.
En l'occurrence, l'arrêté de placement en rétention critiqué est motivé par le défaut de demande de titre de séjour par l'intéressé qui réside sur le territoire national depuis fin 2019- début 2020 l'absence de garanties de représentation suffisantes , le défaut de remise d'un passeport en cours de validité et de justification d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à l'habitation principale, le non-respect d'une précédente obligation de quitter le territoire français en date du 10 juin 2021 et le fait que M. [K] déclare vouloir se maintenir en France.
La décision de placement en rétention cite les textes applicables à la situation de M. [V] [K] et énonce les circonstances qui justifient l'application de ces dispositions.
Si l'intéressé a indiqué l'adresse de son oncle M. [O] [C] demeurant [Adresse 1] lors de son audition par les fonctionnaires de police, il n'en a pas justifié. Il sera relevé à cet égard qu'il n'a pas demandé, comme il en avait le droit, à joindre ce dernier en cours de retenue afin qu'il confirme son hébergement et que l'attestation d'hébergement versée aux débats est postérieure à l'arrêté de placement en rétention.
Les circonstances relevées par le préfet dans l'arrêté de placement en rétention correspondent donc aux éléments dont ce dernier disposait au jour de sa décision, étant précisé qu'il n'est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'étranger, dès lors que les motifs qu'il retient suffisent à justifier le placement en rétention au regard des critères légaux.
En conséquence, l'arrêté comporte les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement et M. [V] [K], au regard de l'ensemble des circonstances relevées, a pu être regardé comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire. C'est donc sans méconnaître le principe de proportionnalité et de nécessité et en procédant à un examen de la situation de l'étranger que la décision de placement en rétention a été prise.
Il convient, dans ces conditions, de rejeter la contestation de l'arrêté de placement en rétention.
L'assignation à résidence se trouve subordonnée en application de l'article L 743-13 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile à l'existence de garanties de représentation effectives ainsi qu'à la remise préalable de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d'un récépissé valant justification de l'identité
et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution. Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.
L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non exécution de la mesure d'éloignement.
En l'espèce, si M. [K] justifie d'une adresse par la production d'une attestation d'hébergement de son oncle, il n'est pas titulaire d'un passeport en original et en cours de validité remis au directeur du centre de rétention administrative et a par ailleurs fait part de son opposition à quitter le territoire national.
Dans ces conditions, une assignation à résidence constituerait un risque sérieux de non exécution de la mesure d'éloignement et la demande sera rejetée.
La décision déférée sera en conséquence confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 05 Avril 2023.
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
La greffière, La présidente,