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06/04/2023 | FRANCE | N°20/06353

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 06 avril 2023, 20/06353


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6



ARRÊT AU FOND

DU 06 AVRIL 2023



N° 2023/160



N° RG 20/06353



N° Portalis DBVB-V-B7E-BGAPR



[S] [P]

S.A. AXA FRANCE IARD





C/



[F] [H]

L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

S.C.P. MANDATAIRES JUDICIAIRES [T]

Compagnie d'assurance L'ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS

CPAM DES ALPES MARITIMES





Copie exécutoire délivrée

le :

à :



-Me Hervé ZUELGARAY
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-Me Céline CECCANTINI



-Me Catherine COTTRAY-LANFRANCHI









Décision déférée à la Cour :



Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NICE en date du 15 Juin 2020 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 18/...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

ARRÊT AU FOND

DU 06 AVRIL 2023

N° 2023/160

N° RG 20/06353

N° Portalis DBVB-V-B7E-BGAPR

[S] [P]

S.A. AXA FRANCE IARD

C/

[F] [H]

L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

S.C.P. MANDATAIRES JUDICIAIRES [T]

Compagnie d'assurance L'ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS

CPAM DES ALPES MARITIMES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

-Me Hervé ZUELGARAY

-Me Céline CECCANTINI

-Me Catherine COTTRAY-LANFRANCHI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NICE en date du 15 Juin 2020 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 18/03151.

APPELANTS

Monsieur [S] [P]

né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 11] (TUNISIE),

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Hervé ZUELGARAY, avocat au barreau de NICE.

S.A. AXA FRANCE IARD ,

demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Hervé ZUELGARAY, avocat au barreau de NICE.

INTIMES

Monsieur [F] [H]

né le [Date naissance 5] 1979 à [Localité 1] ([Localité 1]),

demeurant [Adresse 12]

représenté par Me Céline CECCANTINI, avocat au barreau de NICE.

L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT,

demeurant [Adresse 9]

représenté et assisté par Me Catherine COTTRAY-LANFRANCHI, avocat au barreau de NICE substituée par Me Marie-Monique CASTELNAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE.

S.C.P. MANDATAIRES JUDICIAIRES [T]

Es qualités de « Administrateur judiciaire » de la :

« Entreprise Générale du Bâtiment - EMGB »

Inscrite au RCS de NICE sous le numéro 519.908.362,

Assignée le 25/09/2020 à étude. Assignée le 25/09/2020 à étude,

demeurant [Adresse 7]

Défaillante.

Compagnie d'assurance L'ASSURANCE MUTUELLE DES MOTARDS,

Assignée le 22/09/2020 à personne habilitée. Assignée le 22/09/2020 à personne habilitée,

demeurant [Adresse 10]

Défaillante.

CPAM DES ALPES MARITIMES,

Assignée le 25/09/2020 à personne habilitée. Assignée le 25/09/2020 à personne habilitée.

demeurant [Adresse 8]

Défaillante.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 Février 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Anne VELLA, Conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président

Madame Anne VELLA, Conseillère

Madame Fabienne ALLARD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023.

ARRÊT

Par défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Avril 2023,

Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Exposé des faits et de la procédure

Le 11 septembre 2012 à Menton, M. [F] [H] qui circulait sur sa moto a été victime d'un accident de la circulation impliquant une camionnette conduite par M. [S] [P], assurée auprès de la société Axa France iard.

Il a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 18 octobre 2016 rectifiée par ordonnance du 9 juin 201, a désigné le docteur [G] pour évaluer les conséquences médico-légales de l'accident en allouant à la victime une somme provisionnelle de 12'000 € à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel global.

L'expert a déposé son rapport définitif le 18 août 2017.

Par actes des 19, 21 et 22 juin 2018, M. [H] a fait assigner son employeur, la société entreprise de maçonnerie générale du bâtiment (EMGB) représentée par la SCP [T] en sa qualité de liquidateur, M. [P] et son assureur la société Axa France Iard (Axa), l'assurance mutuelle des motards, devant le tribunal de grande instance de Nice, pour les voir condamner à l'indemniser de ses préjudices corporels et ce, au contradictoire de l'agent judiciaire de l'État et de la CPAM des Alpes Maritimes.

La société EMGB représentée par la SCP [T] en sa qualité de liquidateur, M. [P], l'assurance mutuelle des motards et la CPAM des Alpes Maritimes n'ont pas comparu.

Par jugement du 15 juin 2020, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire a :

- dit que la société Axa et M. [P] respectivement assureur et conducteur du véhicule impliqué dans l'accident doivent indemniser M. [H] de l'intégralité des préjudices qu'il a subis ;

- condamné la société Axa à payer à M. [H] en deniers ou quittance la somme de 76'938,52€ en réparation de son préjudice ;

- condamné in solidum la société Axa et M. [P] à verser à l'agent judiciaire de l'État la somme de 8212,44€ en deniers ou quittance, augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement au titre des arrérages versés, au titre de l'allocation temporaire d'invalidité acquise à titre provisoire du 29 octobre 2013 au 28 octobre 2018 ;

- déclaré la décision commune et opposable à la CPAM des Alpes Maritimes ;

- condamné la société Axa à payer à M. [H] la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Axa et M. [P] à payer à l'agent judiciaire de l'État la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum la société Axa et M. [P] aux entiers dépens de l'instance avec distraction ;

- rejeté toutes demandes, fins, prétentions plus amples ou contraires.

Après avoir constaté que le droit à indemnisation intégrale de la victime n'est pas discuté, le tribunal a évalué à la somme de 76'938,52€ le montant revenant à la victime, et il a détaillé ainsi les différents chefs de dommage de la victime directe :

- dépenses de santé actuelles : 4327,77€, dont 3796,62€ pris en charge par l'organisme social et 531,15€ revenant à M. [H],

- perte de gains professionnels actuels : rejet, M. [H] ne produisant aucun justificatif des heures supplémentaires qu'il aurait effectuées avant l'accident et son arrêt de travail,

- frais d'assistance par tierce personne temporaire à raison de 2h par jour pendant deux mois puis d'1h par jour pendant un mois : 2400€ en fonction d'un coût horaire de 16€ conformément à la demande de la victime,

- frais de copie de dossier médical : 15,71€

- perte de gains professionnels futurs : aucune perte n'est alléguée par la victime, si bien que le montant de la rente allocation temporaire d'invalidité ne peut être déduite,

- incidence professionnelle : 15'000€ au titre d'une pénibilité accrue et d'un arrêt de la participation de la victime aux séjours et sorties pédagogiques, et après imputation de la rente accident du travail au titre des arrérages échus de 8212,44€, la somme de 6787,56€ revenant la victime et 212,44€ après imputation totale des arrérages de la rente,

- déficit fonctionnel temporaire sur une base mensuelle de 795€ : 5234,10€

- souffrances endurées 4/7 : 20'000€

- préjudice esthétique temporaire : 1000€ au titre du port d'une attelle de contention pendant trois semaines et d'un besoin d'un double béquillage pendant deux mois,

- déficit fonctionnel permanent 13 % : 27'170€

- préjudice d'agrément : 10'000€

- préjudice esthétique permanent de 2,5/7 : 3800€.

Par acte du 10 juillet 2020, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, la société Axa et M. [P] ont interjeté appel à l'égard de toutes les parties de cette décision en visant chacune des mentions contenues au dispositif et valant condamnation à paiement de sommes à leur encontre.

M. [H] et l'Agent judiciaire de l'État (AJE) ont formé appel incident.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 7 février 2023.

Prétentions et moyens des parties

Dans leurs conclusions d'appelant du 2 septembre 2020, la société Axa et M. [P] demandent à la cour de :

' juger que M. [H] a perçu une provision totale de 15'000€ dont 2500€ versées par la mutuelle des motards et 13'000€ versés par la société Axa ;

' fixer le préjudice de M. [H] de la façon suivante :

- dépenses de santé actuelles : 48,10€

- frais d'assistance par tierce personne temporaire : 1860€

- perte de gains professionnels actuels : rejet

- déficit fonctionnel temporaire : 3365,94€

- souffrances endurées : 10'000€

- préjudice esthétique temporaire : 500€

- incidence professionnelle : 5000€ et donc aucune somme revenant à la victime après imputation de l'allocation temporaire d'invalidité,

- déficit fonctionnel temporaire permanent : 20'000€ et après imputation du solde de l'allocation temporaire d'invalidité pour 1546,89€ celle de 18'478,11€ revenant à la victime

- préjudice esthétique permanent : 3500€

- préjudice d'agrément : néant,

' confirmer le jugement qui a rejeté la demande de M. [H] au titre de la perte de gains professionnels actuels ;

' fixer la créance de l'agent judiciaire de l'État à la somme de 6546,89€ ;

' débouter l'agent judiciaire de l'État du surplus de ses demandes, fins et conclusions ;

' débouter M. [H] du surplus de ses demandes au titre des pertes de gains professionnels actuels, et du surplus de ses demandes, fins et conclusions ;

' le condamner avec l'agent judiciaire de l'État à leur verser la somme de 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il demande à la cour de rectifier l'erreur commise par le premier juge qui a refusé de déduire les provisions versées à hauteur de 15'500€ au motif qu'aucun justificatif de versement n'aurait été produi, alors que ces versements ne sont pas contestés.

M. [H] a bénéficié d'une allocation temporaire d'invalidité du 29 octobre 2013 au 28 octobre 2018 moyennant une somme annuelle de 1633,57€. Il est constant que la rente accident du travail, l'allocation temporaire d'invalidité et la pension militaire d'invalidité indemnisent d'une part les pertes de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle de l'incapacité et d'autre part le déficit fonctionnel permanent. En l'absence de perte de gains professionnels futurs et d'incidence professionnelle la rente indemnise nécessairement le poste de préjudice personnel de déficit fonctionnel permanent. En l'espèce la date de consolidation a été fixée au 15 novembre 2014 et le recours subrogatoire ne peut s'exercer qu'à compter de cette date ce qui correspond à une somme de 6546,89€, et non pas de 8212,44€.

S'agissant de la fixation des préjudices,

- ils ne contestent pas les sommes allouées au titre des dépenses de santé actuelles à hauteur de 48,10€ correspondant aux dépenses de santé restées à la charge de la victime. En revanche la nécessité d'un vélo d'appartement pour 199€ et d'un électro stimulateur pour 284,05€ n'est pas justifiée par l'expert,

- le besoin par tierce personne temporaire sera indemnisé sur la base d'un coût horaire de 12€

- l'indemnisation de la perte de gains professionnels actuels reste dans l'attente de la production d'une attestation de l'employeur de M. [H] venant confirmer qu'il aurait effectivement effectué des heures supplémentaires sur la période concernée s'il n'avait pas été victime de son accident,

- le déficit fonctionnel temporaire sera calculé sur la base mensuelle de 650€,

- la durée du préjudice esthétique temporaire justifie l'allocation d'une indemnité réduite à 500€,

- l'incidence professionnelle doit être indemnisée par la somme de 5000€ montant sur lequel vient s'imputer l'allocation temporaire d'invalidité de 6546,89€ de telle sorte qu'il ne revient aucune somme à la victime,

- le déficit fonctionnel permanent de 20.025€ est soumis à imputation de la créance du tiers payeur soit la somme de 1546,89€ au titre du solde de sa créance, et donc 18'478,11€ revenant à la victime,

- le préjudice esthétique permanent ouvre droit à l'allocation d'une somme de 3500€,

- le préjudice d'agrément qui vise exclusivement à réparer l'impossibilité pour la victime de pratiquer une activité sportive n'est pas justifié.

Dans ses conclusions d'appel incident du 26 janvier 2023, M. [H] demande à la cour de :

' confirmer le jugement qui a condamné la société Axa à lui payer les sommes suivantes :

- frais divers : 14,71€

- dépenses de santé actuelles : 531,15€

- préjudice d'agrément : 10'000€

- article 700 du code de procédure civile : 1000€

' le réformer pour le surplus ;

' condamner la société Axa à lui payer les sommes suivantes :

- souffrances endurées : 25'000€

- préjudice esthétique temporaire : 2500€

- incidence professionnelle : 15'000€

- déficit fonctionnel permanent : 39'000€

- préjudice esthétique permanent : 6000€

- perte de gains professionnels actuels : 1503,98€

- frais d'assistance par tierce personne temporaire : 2790€

- déficit fonctionnel temporaire : 4669,50€,

' juger que la somme allouée produira intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal à compter du 23 janvier 2018 par application des articles L. 211-9 et L. 211-12 du code des assurances ;

' juger que la créance de l'agent judiciaire de l'État est fixer à la somme de 6546,89€ et qu'elle s'imputera sur sa créance conformément à la législation ;

' condamner la société Axa à lui verser la somme de 4000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel outre les dépens du référé et les frais d'expertise.

Il fait valoir :

- qu'il a été contraint d'acheter deux appareils de rééducation et que ces dépenses de santé actuelles s'établissent à 531,15€. Au cours de la période de rééducation le chirurgien a préconisé des séances dont l'expert judiciaire a fait état. Les dépenses correspondant à l'achat de matériel sont justifiées,

- l'assistance par tierce personne temporaire sera indemnisée en fonction d'un taux horaire de 18€,

- il subit une perte de gains professionnels actuels au titre d'une perte de perception de sommes pour les heures supplémentaires qui sont visées dans son état de services. Le montant a été au mois de juin 2013 de 203,24€ et donc sur sept mois et demi une somme de 1503,98€,

- le déficit fonctionnel temporaire sera indemnisé sur la base mensuelle de 900€

- les souffrances endurées valent bien l'octroi d'une somme de 25'000€ et il sollicite la majoration de ce poste à 4,5/7 en raison des complications indirectes de l'accident à savoir des problèmes urologiques, une infection nosocomiale lors de la seconde intervention et des troubles psychologiques,

- le préjudice esthétique temporaire évalué à 2,5/7 au titre du port d'une attelle de contention pendant trois semaines, d'un double béquillage pendant deux mois, et enfin d'une période de cinq mois de sevrage de béquillage sera réparé par l'allocation de 2500€,

- l'incidence professionnelle est sollicitée au titre d'une pénibilité accrue et il conclut à la confirmation du jugement qui lui a alloué la somme de 15'000€,

- le déficit fonctionnel permanent sera indemnisé par l'octroi d'une somme de 39'000€,

- qu'il a subi un préjudice d'agrément dont il justifie par la production de plusieurs attestations de ses proches pour la randonnée, le vélo ou le ski outre la moto. Le montant qui lui a été alloué à hauteur de 10'000€ est parfaitement justifié.

Il souscrit à l'argumentation de la société Axa sur la créance de l'agent judiciaire de l'État doit être fixée à 6546,89€.

Il demande l'application du double taux puisque la consolidation a été connue par la société Axa le 23 août 2017 et qu'elle devait formuler une offre définitive au plus tard le 23 janvier 2018. Or il n'a jamais reçu aucune offre.

Selon conclusions du 21 décembre 2020, l'agent judiciaire de l'État demande à la cour de :

' confirmer purement et simplement le jugement ;

' débouter la société Axa et M. [P] de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions ;

' les condamner in solidum à lui verser la somme de 2000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de son conseil.

Il explique que sa créance s'établit à 8212,44€ correspondant à des arrérages versés au titre d'une allocation temporaire d'invalidité au taux de 12 %, acquise à titre provisoire du 29 octobre 2013 au 28 octobre 2018, montant imputable sur les pertes de gains professionnels, incidence professionnelle et le déficit fonctionnel permanent. Dans l'hypothèse d'une absence de perte de gains professionnels ou d'incidence professionnelle la pension est imputable sur la totalité du poste de déficit fonctionnel permanent.

En réponse aux conclusions de la société Axa et de M. [P], elle oppose que la pension d'invalidité n'a pas été renouvelée et que sa créance est liquide et exigible. Il convient de distinguer la consolidation judiciaire et la consolidation administrative. La réduction du montant des arrérages servis à M. [H] ne peut être faite mathématiquement à compter de la date de la consolidation judiciaire.

La CPAM des Alpes Maritimes, assignée par la société Axa et M. [P], par acte d'huissier du 25 septembre 2020, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.

Par courrier adressé au greffe de la cour d'appel le 11 octobre 2022 elle a indiqué que le sinistre a été géré par l'employeur de M. [H] et qu'elle n'a aucune créance à faire valoir.

La SCP [B] [D], en sa qualité de liquidateur de la société EMGB assignée par la société Axa et M. [P], par acte d'huissier du 25 septembre 2020, remis en l'étude de l'huissier n'a pas constitué avocat.

La société l'assurance mutuelle des motards assignée par la société Axa et M. [P], par acte d'huissier du 22 septembre 2020, délivré à personne habilitée et contenant dénonce de l'appel n'a pas constitué avocat.

L'arrêt sera rendu par défaut conformément aux dispositions de l'article 474 du code de procédure civile.

Motifs de la décision

Le droit à indemnisation intégrale de M. [H] n'est pas discuté. L'appel porte sur l'indemnisation du préjudice corporel de la victime et sur l'imputation des débours de l'agent judiciaire de l'État en sa qualité de tiers payeur.

Sur le préjudice corporel

L'expert, le docteur [E] [G], a indiqué que M. [H] a présenté une fracture de l'extrémité supérieure du tibia gauche, une fracture de la main gauche, une contusion de l'épaule gauche, et une contusion de la cheville gauche, la fracture complexe du tibia ayant nécessité une ostéosynthèse, outre une décompensation anxio-dépressive traitée par prise en charge psychiatrique à compter du mois de juin 2015 et partiellement imputable à l'accident et qu'il conserve comme séquelles des gonalgies gauches majorées par la station debout et la marche prolongée, une limitation de la flexion du genou associée à un syndrome rotulien et une discrète amyotrophie du quadriceps, un raccourcissement du quatrième métacarpien avec gêne douloureuse et sur le plan psychologique la persistance d'une décompensation anxieuse.

Il a conclu à :

- des périodes d'incapacité temporaire totale de travail du 11 septembre 2012 au 12 mai 2013 puis du 10 juin 2014 au 1er juillet 2014,

- une perte de gains professionnels actuels qui reste à documenter,

- un besoin en aide humaine de 2h par jour pendant deux mois puis d'1h par jour le mois suivant,

- un déficit fonctionnel temporaire total du 19 septembre 2012 au 12 mai 2013,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50 % du 25 novembre 2012 au 25 janvier 2013,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25 % du 26 janvier 2013 au 12 mai 2013, puis du 11 juin 2014 au 1er juillet 2014,

- un déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 10 % du 13 mai 2014 au 9 juin 2014, puis du 2 juillet 2014 au 14 novembre 2014,

- une consolidation au 15 novembre 2014,

- des souffrances endurées de 4/7,

- un préjudice esthétique temporaire laissé à l'appréciation de la juridiction,

- un déficit fonctionnel permanent de 13 %,

- un préjudice esthétique permanent de 2,5/7,

- un préjudice d'agrément total et définitif qui peut être admis pour la pratique du tennis, du ski alpin, du football et des randonnées en terrain accidenté,

- il peut être admis une incidence professionnelle à type de pénibilité accrue à la profession exercée sans incident sur sa capacité de gain.

Son rapport constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime, né le [Date naissance 4] 1979, de son activité de professeur de sciences et vie de la terre, âgé de 35 ans à la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Préjudices patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Dépenses de santé actuelles 531,15€

L'agent judiciaire de l'État ne réclame aucune somme au titre de ce poste de préjudice alors que la CPAM ne fait valoir aucun débours en l'état de la prise en charge par l'employeur.

M. [H] réclame paiement de sommes restées à sa charge.

Celle de 48,10€ correspondant à des frais médicaux qu'il a engagés sans être remboursée n'est pas discutée par la société Axa.

M. [H] explique qu'il a fait l'acquisition d'un vélo d'appartement et d'un électro stimulateur pour accélérer sa rééducation.

L'expert a retenu que dans les suites immédiates de l'accident, il a présenté une fracture complexe de l'extrémité supérieure du tibia gauche, une contusion de l'épaule gauche, et une contusion de la cheville gauche. La période entre l'accident et la consolidation a duré vingt six mois. Le docteur [G] a noté en page 7 de son rapport et dans les commémoratifs des différentes étapes du suivi médical, que dès sa sortie d'hospitalisation, M. [H] a entrepris une rééducation fonctionnelle, initialement à son domicile à raison de cinq séances par semaine jusqu'en mars 2013, puis en moyenne deux à trois séances par semaine jusqu'à sa reprise du travail, puis une séance par semaine jusqu'à fin 2014, et il a ajouté qu'il fallait noter une auto-rééducation à son domicile par électro stimulation et vélo d'appartement.

En procédant à cette annotation, le docteur [G] qui n'a pas expressément réfuté ce recours à une 'auto-rééducation' en a admis et validé le principe qui est cohérent avec d'une part le caractère sérieux des blessures, compliquées par une infection nosocomiale, la rééducation initiale au domicile de la victime et d'autre part la longue durée de la période qui a précédé la consolidation. En conséquence il convient de faire droit aux demandes de remboursement de ces appareils, acquis au mois de mars 2013 et dont M. [H] fournit les factures pour les montants sollicités de 199€ pour le vélo d'appartement et de 284,05€ pour l'électro stimulateur.

Ce poste s'établit à 531,15€.

- Frais de copie 14,71€

M. [H] réclame paiement de la somme de 14,71€ qu'il a dépensée pour la copie et l'accès à son dossier médical, montant que les tiers responsable ne conteste pas.

- Perte de gains professionnels actuels 1503,98€

Ce poste vise à compenser une incapacité temporaire spécifique concernant les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus.

M. [H] qui n'a pas subi de perte dans la perception de son traitement invoque une perte entre le 11 septembre 2012 et le 12 mai 2013 date de sa reprise d'activité professionnelle en raison de l'absence de perception des 'heures années supplémentaires' dites HAS. Il explique qu'il bénéficiait de '1,5 HAS' et précise qu'est supplémentaire toute heure d'enseignement effectuée au-delà du maximum hebdomadaire de service et les heures sont qualifiées de HSA lorsqu'elles sont inscrites à l'emploi du temps et qu'elles sont donc assurées tout au long de l'année scolaire.

La société Axa et M. [P] soutiennent que dans l'attente d'une attestation de l'employeur mentionnant que M. [H] aurait effectivement effectué ces heures supplémentaires pendant la période concernée s'il n'avait pas été victime de son accident, la demande doit être rejetée.

Pour justifier de sa demande, M. [H] verse aux débats un 'état des services d'enseignement' de l'année scolaire 2012/2013, c'est à dire à la veille de l'accident dont il a été victime le 11 septembre 2012, qui porte mention d'un 'total des HSA de 1,50' ainsi que son bulletin de paye du mois de juin 2013 sur lequel figure au titre des 'heures années enseignement' une somme cumulée de 203,24€.

Il se déduit qu'en réponse à l'argumentation opposée par la société Axa et M. [P], M. [H] démontre que les heures dites 'HAS' à hauteur de 1,50 étaient expressément comprises dans la définition de son service, et qu'il les a de nouveau assurées à sa reprise d'activité. En conséquence sa perte sur sept mois et 12 jours s'établit à 1503,98€.

- Assistance de tierce personne 2790€

La nécessité de la présence auprès de M. [H] d'une tierce personne n'est pas contestée dans son principe ni son étendue pour l'aider dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, suppléer sa perte d'autonomie mais elle reste discutée dans son coût.

L'expert précise, en effet, qu'il a eu besoin d'une aide humaine à raison de 2h par jour pendant deux mois puis d'1h par jour le mois suivant.

En application du principe de la réparation intégrale et quelles que soient les modalités choisies par la victime, le tiers responsable est tenu d'indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne saurait être réduit en cas d'aide familiale ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées. Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser, des tarifs d'aide à domicile en vigueur dans la région, l'indemnisation se fera sur la base d'un taux horaire moyen de 18 €.

L'indemnité de tierce personne s'établit :

- pendant la période de deux mois et à raison de 2h par jour à 2232€ (62j x 2h x 18€)

- pendant la période d'un mois à raison d'1h par jour à 558€ (31j x 1h x 18€),

et au total la somme de 2790€.

Préjudices patrimoniaux

permanents (après consolidation)

- Perte de gains professionnels futurs pas de demande

M. [H] ne réclame aucune somme à ce titre. En l'absence d'assiette la créance de l'AJE au titre de l'allocation temporaire d'invalidité ne trouve pas à s'imputer.

- Incidence professionnelle 15.000€

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap.

L'expert a admis la réalité d'une incidence professionnelle au titre d'une pénibilité accrue à la profession exercée, en visant la modification de la pratique pédagogique de la victime afin d'éviter la station debout prolongée durant les cours, les déplacements à pied de son véhicule au collège, la descente de l'estrade, mais aussi une majoration de l'irritabilité en cours et une éviction de participation aux voyages scolaires. Le premier juge a évalué à 15.000€ l'indemnisation de ce poste, dont M. [H] sollicite la confirmation, montant que la cour valide.

Sur cette somme s'imputent les arrérages de l'allocation temporaire d'invalidité.

Une discussion s'instaure pour déterminer si les arrérages versés avant consolidation doivent s'imputer.

Par application de l'article L.824-1 du code de la fonction publique le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille fixée par décret, correspondant au pourcentage d'invalidité.

Dans un premier temps, cette allocation est versée pendant cinq ans puis à la fin de cette période, le fonctionnaire est soumis à un examen médical et en cas de persistance des infirmités, elle est versée sans limite de durée. En cas de guérison, elle n'est plus versée.

Il se déduit des dispositions légales que l'ATI vient indemniser une incapacité permanente partielle, qui en l'espèce a été considérée comme justifiée et perçue pendant une période de cinq ans à compter du 29 octobre 2013 et jusqu'au 28 octobre 2018, sans renouvellement. Les tiers responsables estiment que la créance antérieure à la consolidation venant indemniser des préjudices temporaires n'est pas due. Ils ne seront pas suivis dans leur prétention, dès lors que l'attribution de l'ATI comme le précise le texte précité est venue indemniser 'une incapacité permanente d'au moins 10 %' et peu importe que les règles du droit administratif aient conduit à un paiement partiel et antérieur à la consolidation.

Il s'ensuit que c'est l'intégralité des sommes versées par l'AJE au titre des arrérages échus du 29 octobre 2013 au 28 octobre 2018 qui s'impute sur le poste d'incidence professionnelle et donc à hauteur de 8212,44€ et qu'elle a vocation à réparer.

Ce tiers payeur sera intégralement désintéressé et une indemnité de 6787,56€ (15.000€ - 8212,44€) revient à ce titre à M. [H].

Préjudices extra-patrimoniaux

temporaires (avant consolidation)

- Déficit fonctionnel temporaire 3460,05€

Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l'existence et le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel pendant l'incapacité temporaire.

Il doit être réparé sur la base d'environ 810€ par mois, eu égard à la nature des troubles et de la gêne subie soit :

- déficit fonctionnel temporaire total de 76 jours : 2052€

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 50% de 62 jours : 837€

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 25% de 129 jours : 128,25€

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 10% de 164 jours : 442,80€

et au total la somme de 3460,05€.

- Souffrances endurées 20.000€

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison des traumatismes initiaux, de l'intervention chirurgicale nécessité par son état, et pour les séances de rééducation.

Il a été évalué à 4/7 par l'expert. M. [H] demande à la cour de majorer cette évaluation à 4,5/7 en raison des troubles qu'il a subis à la suite d'une infection nosocomiale dont il a été victime.

Toutefois et dans l'évaluation de ce poste très largement circonstancié en pages 15 et 16 de son rapport l'expert a tenu compte d'un retard de cicatrisation et de la survenue d'une prostatite iatrogène ayant nécessité divers soins urologiques. Par conséquent M. [H] est débouté de sa demande tendant à voir majorer le chiffrage de ce poste qui sera indemnisé par l'octroi d'une somme de 20.000€.

- Préjudice esthétique temporaire 1500€

Le principe de l'indemnisation de ce poste n'est pas contesté par les tiers responsables qui en discutent le montant.

Il est constant que M. [H] a porté une attelle de contention anté-brachio-palmaire pendant trois semaines et qu'il a été contraint à un double béquillage sur une durée de deux mois, suivi de cinq mois de sevrage d'un béquillage qui a été partiel, et donc au total sur une période d'un peu moins de huit mois, ce qui justifie l'octroi d'une somme de 1500€.

permanents (après consolidation)

- Déficit fonctionnel permanent 30.000€

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence personnelles, familiales et sociales.

Il est caractérisé par des gonalgies gauches majorées par la station debout et la marche prolongée, une limitation de la flexion du genou associée à un syndrome rotulien et une discrète amyotrophie du quadriceps, un raccourcissement du quatrième métacarpien avec gêne douloureuse et sur le plan psychologique la persistance d'une décompensation anxieuse, ce qui conduit à un taux de 13 % justifiant une indemnité de 30.000€ pour un homme âgé de 35 ans à la consolidation.

- Préjudice esthétique 5000€

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique. Évalué à 2,5/7 au titre de cicatrices opératoires et d'une plaie traumatique, il doit être indemnisé à hauteur de 5000€.

- Préjudice d'agrément 10.000€

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

L'expert a retenu un préjudice d'agrément au titre de la pratique du ski alpin, du tennis, de la randonnée en terrains accidentés, de la course à pied et du football, en indiquant que celles du vélo, de la natation et de la randonnée sur terrain plat demeuraient possibles de façon limitée et adaptée.

M. [H] justifie ne plus pouvoir pratiquer certaines activités sportives auxquelles il s'adonnait régulièrement avant l'accident, suivant attestations concordantes versées aux débats, ce qui justifie de confirmer le montant de 10.000€ alloué par le premier juge qui a pris en considération qu'il était un homme encore jeune et sportif et que les séquelles qu'il conserve limitent grandement les activités sportives ou de loisir.

Le préjudice corporel global subi par M. [H] s'établit ainsi à la somme de 89.799,89€ soit, après imputation des débours de l'AJE (8212,44€ ), une somme de 81.587,45€ lui revenant qui, en application de l'article 1231-7 du code civil, porte intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 15 juin 2020 à hauteur de 76.938,52€ et du prononcé du présent arrêt soit le 6 avril 2023 à hauteur de 4648,93€.

Sur les demandes de l'agent judiciaire de l'État

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné in solidum la société Axa et M. [P] à verser à l'AJE la somme de 8212,44€ augmentée de l'intérêt au taux légal à compter du prononcé du jugement du 15 juin 2020.

L'équité justifie d'allouer à l'AJE une somme de 1200€ en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés devant la cour.

Sur le double taux

M. [H] demande à la cour de sanctionner la société Axa au paiement du double de l'intérêt au taux légal à compter du 23 janvier 2018, soit cinq mois après que la date de la consolidation a été portée à sa connaissance et au motif qu'il n'a jamais été destinataire d'une offre définitive de règlement.

La société Axa n'a pas conclu sur cette demande.

La demande additionnelle portant sur l'application de l'article 211-13 du code des assurances formulée pour la première fois devant la cour est recevable dès lors qu'elle constitue le complément de la demande originaire.

En vertu de l'article L 211-9 du code des assurances, l'assureur est tenu de présenter à la victime qui a subi une atteinte à sa personne une offre d'indemnité, qui comprend tous les éléments indemnisables du préjudice, dans le délai maximum de huit mois à compter de l'accident, laquelle peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime ; l'offre définitive doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

La sanction de l'inobservation de ces délais, prévue par l'article L 211-13 du même code, réside dans l'octroi des intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif.

Le docteur [G], expert a indiqué avoir transmis son rapport au greffe du tribunal de grande instance de Nice le 18 août 2018 et il a mentionné que la copie a été transmise aux parties. Il n'est pas indiqué dans ce document à quelle date cette transmission est intervenue. Donc en appliquant les dispositions de l'article R.211-44 du code des assurances qui prévoient que dans un délai de vingt jours à compter de l'examen médical, le médecin adresse un exemplaire de son rapport à l'assureur, à la victime et, le cas échéant au médecin qui a assisté celle-ci, il convient de considérer que les parties ont eu connaissance de ce rapport au plus tard le 7 septembre 2018, de telle sorte que la société Axa se devait de formuler une offre au plus tard le 7 février 2018.

Il ressort de la lecture du jugement que la société Axa a formulé devant le tribunal de grande instance et selon conclusions signifiées le 31 mai 2019, les offres d'indemnisation suivantes :

- dépenses de santé actuelles : 531,15€

- frais de copie : 14,71€

- perte de gains professionnels actuels : 1503,98€

- assistance par tierce personne temporaire : 2790€

- incidence professionnelle : 6787,56€

- déficit fonctionnel temporaire : 3460,05€

- souffrances endurées : 20.000€

- préjudice esthétique temporaire : 1500€

- déficit fonctionnel permanent : 30.000€

- préjudice esthétique permanent : 5000€

- préjudice d'agrément : 10.000€.

- préjudice esthétique permanent : 3500€.

Pour interrompre le cours du doublement des intérêts au taux légal, cette offre doit d'une part être complète, c'est à dire contenir des offres sur chacun des postes de préjudice retenus par l'expert et d'autre part contenir des propositions d'indemnisation qui ne soient pas manifestement insuffisantes, c'est à dire ne pas représenter moins du tiers des montants alloués.

L'offre présentée le 31 mai 2019 devant le premier juge était incomplète pour ne pas contenir une offre au titre du préjudice d'agrément pourtant admis à titre permanent par l'expert.

Selon ses conclusions d'appelante signifiées le 2 septembre 2020 la société Axa a formulé devant la cour les offres d'indemnisation suivantes avant imputation de la créance de l'AJE :

- dépenses de santé actuelles : 48,10€

- perte de gains professionnels actuels : confirmation du rejet du premier juge

- assistance par tierce personne temporaire : 1860€

- incidence professionnelle : 5000€

- déficit fonctionnel temporaire : 3365,94€

- souffrances endurées : 10.000€

- préjudice esthétique temporaire : 500€

- déficit fonctionnel permanent : 20.025€

- préjudice d'agrément : rejet

- préjudice esthétique permanent : 3500€.

Cette offre demeure incomplète puisqu'elle ne comporte toujours pas d'offre au titre du préjudice d'agrément.

En conséquence, la sanction du doublement des intérêts au taux légal est justifiée au titre de la tardiveté et du caractère incomplet des offres. En conséquence, la société Axa est condamnée au doublement de cet intérêt au taux légal sur la période du 8 février 2018 jusqu'au présent arrêt devenu définitif, sur le préjudice global de M. [H] augmentée de la créance du tiers payeur, soit au total celle de 89.799,89€.

Sur les demandes annexes

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime et à l'AJE sont confirmées.

La société Axa et M. [P] qui succombent partiellement dans leurs prétentions et qui sont tenus à indemnisation supporteront la charge des entiers dépens d'appel. L'équité ne commande pas de leur allouer une somme au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité justifie d'allouer à M. [H] une indemnité de 2000€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour.

Par ces motifs

La Cour,

- Confirme le jugement,

hormis sur le montant de l'indemnisation de la victime et les sommes lui revenant,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Fixe le préjudice corporel global de M. [H] à la somme de 89.799,89€ ;

- Dit que l'indemnité revenant à cette victime s'établit à 76.938,52€ ;

- Condamne in solidum la société Axa et M. [P] à payer à M. [H] les sommes de :

* 76.938,52€, répartie comme suit

- dépenses de santé actuelles : 531,15€

- frais de copie de dossier : 14,71€

- perte de gains professionnels actuels : 1503,98€

- assistance par tierce personne temporaire : 2790€

- incidence professionnelle : 6787,56€

- déficit fonctionnel temporaire : 3460,05€

- souffrances endurées : 20.000€

- préjudice esthétique temporaire : 1500€

- déficit fonctionnel permanent : 30.000€

- préjudice esthétique permanent : 5000€.

- préjudice d'agrément : 10.000€

sauf à déduire les provisions versées, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement, soit le 15 juin 2020 à hauteur de 76.938,52€ et du prononcé du présent arrêt soit le 6 avril 2023 à hauteur de 4648,93€

* 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;

- Condamne la société Axa France iard au paiement des intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur la somme de 89.799,89€ à compter du 8 février 2018 et jusqu'au présent arrêt devenu définitif ;

- Condamne in solidum la société Axa et M. [P] à payer à l'agent judiciaire de l'Etat la somme de 1200€ au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour ;

- Déboute la société Axa et M. [P] de leur demande au titre de leurs propres frais irrépétibles exposés en appel ;

- Condamne in solidum la société Axa et M. [P] aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-6
Numéro d'arrêt : 20/06353
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;20.06353 ?
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