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06/04/2023 | FRANCE | N°18/05254

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 06 avril 2023, 18/05254


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 6 Avril 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/05254 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCFLV







SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF -





C/



[G] [E]

SARL ART TM

SA SOCIETE AXA FRANCE

















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



M

e Joseph MAGNAN



Me Romain CHERFILS



Me Julie FEHLMANN

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 07 Février 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/03077.



APPELANTES



SCM CABINET ZUCCO RUFFINI Z...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 6 Avril 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/05254 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCFLV

SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF -

C/

[G] [E]

SARL ART TM

SA SOCIETE AXA FRANCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Joseph MAGNAN

Me Romain CHERFILS

Me Julie FEHLMANN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 07 Février 2018 enregistrée au répertoire général sous le n° 15/03077.

APPELANTES

SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO

, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée à l'audience par Me Alice DINAHET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Benjamin DERSY de la SARL CINERSY, avocat au barreau de NICE substituée à l'audience par Me Laure SAMMUT, avocat au barreau de NICE

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF -

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée à l'audience par Me Alice DINAHET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Benjamin DERSY de la SARL CINERSY, avocat au barreau de NICE substituée à l'audience par Me Laure SAMMUT, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [G] [E]

né le 29 Janvier 1962 à [Localité 5], demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Myriam DUBURCQ de la SCP DONNET - DUBURCQ, avocat au barreau de GRASSE

SARL ART TM

, demeurant [Adresse 3]

défaillante

SA SOCIETE AXA FRANCE CIE AXA prise en sa qualité d'assureur de la STE ART TM et de la STE ROUBERT AMENAGEMENT,

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Julie FEHLMANN, avocat au barreau de GRASSE et ayant pour avocat plaidant Me Jean-max VIALATTE de la SELARL LEGIS-CONSEILS, avocat au barreau de GRASSE,

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sophie LEYDIER, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2023, puis avisées par message le 16 Mars 2023, que la décision était prorogée au 6 Avril 2023.

ARRÊT

FAITS ET PROCÉDURE

Le 13 juillet 2005, mesdames [W] et [G] [E] ont conclu avec le cabinet d'architectes ZUCCO assuré par la MAF un contrat d'architecte avec mission complète afin d'extension de leur propriété située à [Localité 5] conformément à un permis de construire en date du 11 juillet 2005 comportant une étude du sol ayant donné lieu à un rapport du 25 mars 2005 par la société SOL-ESSAIS.

La SARL ART TM, assurée par AXA, a été chargée du gros 'uvre. Le lot "doublage cloisons" a été confié à la SARL ROUBERT, assurée par AXA également. Le lot "plomberie" a été confié à la société RICHIER ROUBAUDI, le lot "électricité extraction" à la SARL LORA CONCEPT, le BET G ALLEMAND est intervenue en qualité d'ingénieur béton.

La réception a été formée le 20/03/2007.

Des désordres ont été dénoncés :

Fissures et lézardes au droit de l'extension de la villa et en extérieur

Des phénomènes d'humidité intérieure

Décollement d'enduit

Des infiltrations en plafond du dégagement de l'entrée à l'étage

Une expertise judiciaire a été ordonnée le 15/09/2010. Le rapport a été déposé le 20/12/2013.

Par acte des 27, 29, 30 avril et 19 mai 2015, [G] [E] épouse [P] a assigné la cabinet d'architectes [H] ZUCCO, la compagnie MAF, la SARL ART TM, la compagnie AXA, assureur de la SARL ART TM, la SARL LORA CONCEPT ELECTRICITE, la SARL RICHIER - ROUBAUDI, la SARL ROUBERT, la BET G ALLEMAND, la compagnie LES SOUSCRIPTEURS DU LLOYDS DE LONDRES, la compagnie AXA, assureur de la SARL ROUBERT devant la juridiction de première instance.

Par jugement en date du 7 février 2018, le Tribunal de Grande instance de Grasse a :

CONDAMNE in solidum, d'une part, le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF, solidairement entre eux, et, d'autre part, la SARL ART TM et la SA AXA solidairement entre eux, à verser à [G] [E] épouse [P] la somme de 200.949, 40 EUR, toutefois dans une limite de 30 % de cette somme s'agissant de la SARL ART TM et de la SA AXA ;

DEBOUTE [G] [E] épouse [P] du surplus de ses demandes;

REJETTE toute demande en garantie ;

REJETTE toute demande plus ample ou contraire ;

CONDAMNE le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO, la Compagnie

MAV, la SARL ART TM et la SA AXA aux entiers dépens de l'espèce, dont distraction faite au profit de Me DONNET, Me LORENZI, Me VIALATTE

CONDAMNE le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO, la compagnie MAF, la SARL ART TM et la SA AXA à verser à [G] [E] épouse [P] la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [G] [E] épouse [P] à verser à la SARL LORA CONCEPT RENELLI ELECTRICITE somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [G] [E] épouse [P] à verser aux SOUSCRIPTEURS DU LLOYDS DE LONDRES à la somme de 2.000 EUR au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision.

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe le 22 mars 2018, la SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO et la Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF) ont interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

Condamné in solidum, d'une part, le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF, solidairement entre eux, et, d'autre part, la SARL ART TM et la SA AXA solidairement entre eux, à verser à [G] [E] épouse [P] la somme de 200949,40 EUR, toutefois dans une limite de 30% de cette somme s'agissant de la SARL ART TM et de la SA AXA ; Rejeté toute demande en garantie du cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et de la compagnie MAF,

Rejeté toute demande plus ample ou contraire du cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF,

Condamné le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO, la compagnie MAF, la SARL ART TM et la SA AXA aux entiers dépens de l'espèce, dont distraction faite au profit de Me DONNET, Me LORENZI, Me VIALATTE ;

Condamné Je cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO, la compagnie MAF, la SARL ART TM et la SA AXA à verser à [G] [E] épouse [P] la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejeté toute autre demande du cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et de la compagnie MAF, au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Par conclusions du 30 octobre 2018 la SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO et la Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF), appelants sollicitent voir:

Débouter la requérante de l'intégralité de ses demandes visant à la condamnation solidaire du Cabinet d'Architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et de la MAF avec les autres requis, la solidarité ne se présumant pas.

Subsidiairement, si le cabinet d'architectes était entrainé dans les liens de la responsabilité, déclarer recevable et fondé son recours en garantie quasi délictuel dirigé contre la société ART TM et son assureur la compagnie AXA, car cette entreprise est seule responsable des fautes d'exécution et des manquements retenus à l'origine des désordres.

Dire et juger que la Cie AXA devra ainsi relever et garantir les concluants de l'intégralité des éventuelles condamnations pouvant être prononcées à leur encontre au bénéfice de la dame [E].

Rejeter toute demande au titre du préjudice de jouissance.

Condamner le ou les succombants à payer au cabinet d'Architectes exposant et à la MAF la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les entiers dépens distraits au profit de Maître Joseph MAGNAN, Avocat.

Par conclusions du 28 novembre 2022 madame [G] [N] [E] épouse [P], intimée sollicite voir :

CONFIRMER en toutes ses dispositions le Jugement dont appel,

DONNER ACTE à Madame [P] du désistement de ses demandes formulées à l'égard de la SARL ART TM compte-tenu de sa radiation et du maintien dans la procédure de son assureur, la société AXA FRANCE IARD.

A titre principal : la garantie construction de l'article 1792 du Code civil

DEBOUTER le Cabinet d'Architectes ZUCCO RUFFINI ZUCCO de toutes ses demandes, fins et conclusions,

DIRE et JUGER que les désordres, malfaçons, inachèvements et non-conformités qui affectent les ouvrages de construction et de réfection constituent un défaut de conception et d'exécution, le Cabinet d'Architectes appelant étant investi d'une mission complète de conception et de maîtrise d'ouvrage,

DECLARER le Cabinet d'Architectes ZUCCO RUFFINI ZUCCO maçonnerie générale responsable des malfaçons, inachèvements et non-conformités qui affectent les ouvrages par eux édifiés, en application notamment des articles 1792 et suivants du Code Civil,

CONDAMNER en conséquence le Cabinet d'Architectes ZUCCO RUFFINI ZUCCO et la Compagnie d'assurance MAF outre la Compagnie d'assurance AXA, assureur de la SARL ART TM, à payer à Madame [P] la somme de 195.949,40 € en réparation de son préjudice matériel, outre la somme de 50.000 € en réparation de son trouble de jouissance,

DIRE ET JUGER que les sommes ci-dessus seront indexées sur l'indice bâtiment BT 01 à compter de la date du dépôt du rapport de l'Expert judiciaire jusqu'à complet paiement,

A titre subsidiaire : la responsabilité contractuelle de l'ancien article 1147 du Code civil

DECLARER les locateurs d'ouvrage ci-dessus rappelés, responsables des désordres, malfaçons, inachèvements et non-conformités, in solidum, tels que définis par l'Expert judiciaire en application de l'article 1147 du Code Civil qui était applicable à l'époque du litige et qui est devenu l'article 1231-1 du même Code,

Les CONDAMNER, en application des textes ci-dessus rappelés, in solidum, aux mêmes sommes ;

En tout état de cause :

CONDAMNER en tout état de cause, l'appelant et son assureur à payer à

Madame [P] la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER l'appelants et tous les succombants en tous les dépens

La Compagnie d'Assurance AXA France, intimée a déposé des conclusions en date du 24 Septembre 2018. Ces conclusions ont été déclarées irrecevables par ordonnance du 23 Octobre 2018 pour non-respect du délai imparti par les articles 909, 910, 911-1 du Code de procédure civile.

Citée en l'étude, la SARL ART TM n'a pas constitué avocat.

Par ordonnance de dessaisissement désistement partiel en date du 10 avril 2018, le magistrat de la mise en état a constaté le dessaisissement partiel de la Cour concernant la SARL BET G ALLEMAND et la Société LES SOUSCRIPTEURS DU LLYOD'S DE LONDRES.

L'affaire a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 12 décembre 2022 et fixée à l'audience du 11 Janvier 2023 à laquelle elle a été retenue.

MOTIVATION

Sur la responsabilité des désordres :

La SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO et la Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (MAF) ont interjeté appel du jugement de première instance en ce qu'il a condamné in solidum, d'une part, le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF, solidairement entre eux, et, d'autre part, la SARL ART TM et la SA AXA solidairement entre eux, à verser à [G] [E] épouse [P] la somme de 200949,40 EUR, toutefois dans une limite de 30% de cette somme s'agissant de la SARL ART TM et de la SA AXA.

Les appelants soutiennent que les désordres ont leur origine soit dans les malfaçons commises par l'entreprise ART TM qui a assuré l'exécution du gros 'uvre des travaux, soit dans les choix économiques du maitre d'ouvrage notamment quant à l'absence de mise en 'uvre de micropieux au soutien de la partie ancienne du bâti, ou dans les circonstances naturelles liées à la sécheresse. Par ailleurs une partie des désordres litigieux affectent des parties de la construction hors intervention des locateurs d'ouvrages.

En fait, un rapport de visite en date du 30 novembre 2009 d'un ingénieur 'conseil, monsieur [V] relève divers désordres de fissurations intérieures et extérieures, de traces d'humidité.

Ce rapport a motivé la saisine du juge des référés.

L'expert désigné par le juge des référés constate :

-dans le hall d'entrée des fissures au sol, au plafond, à gauche de la porte d'accès au petit bureau à la jonction des bâtiments, du doublage l'ancien mur de façade

-Dans le petit bureau à l'intérieur de la tour, des tâches d'humidité

-dans le rangement tâche d'humidité sous le radiateur

-chambre 1 : à l'extérieur de l'angle supérieur droit de ,la fenêtre décollement de deux plaques du doublage ayant provoqué une fente verticale

-dégagement desservant la cage de l'escalier : à la jonction des parties ancienne et nouvelle , fissuration du carrelage , doublage de la paroi gauche lézardé de haut en bas avec décochement vers l'extérieur du BA13 et tache d'humidité en cueilli de plafond

-R-1 : dans la chambre 2 deux fissures horizontales à partir de l'angle supérieur de droit , au niveau du linteau

-R-1 salle d'eau sous-jacente à celle du niveau supérieur tache d'humidité

-R-1 chambre 3 à l'aplomb de la chambre 1 : taches d'humidité due à un phénomène de condensation et à la proximité de la cabine de douche

-terrasse : enduit de façade décollé sur la hauteur de l'angle sud-est jusqu'à la jardinière en contrebas

-rangement traces d'humidité sur le mur de soutènement à gauche en entrant et dans le petit cabinet de toilette

-dégagement desservant la chambre 3 et la salle d'eau :au niveau du plafond fissuration horizontale de la sous-face du rampant

-séjour (extension) : absence d'isolation thermique en plafond

-terrasse du rez-de-jardin : fissure orientée ne nord /sud au droit de la jonction de la partie de la terrasse portant sur le terrain remblayé

-escalier extérieur : lézarde sur la hauteur du R+0 et de l'édicule ; la portion inférieure de cette lézarde présente au niveau du carrelage du palier de repos de l'escalier un éclatement d'enduit avec désaffleurement ; ce palier recevant une partie des eaux en provenance de la toiture est dépourvu d'étanchéité ou de protection est probablement à l'origine de l'humidité constatée sous le fenestron du petit bureau

-entrée du garage partie ancienne R+1 : lézarde à la jonction du mur de soutènement de la voie avec la façade du garage

-une nouvelle fissure a été relevée sur le mur de refend au-dessus de la volée montante de l'escalier et à droite de l'accès à la chambre du niveau inférieur

Le bâtiment est dépourvu de gouttières.

A l'extérieur, les fissures et lézardes se situent :

-à la jonction des bâtiments notamment au droit de la porte d'entrée

-sur la volée d'escalier de jardin desservant le porche d'entrée de la maison créée à l'occasion de l'extension de la construction ancienne

-le long de la forme en ciment au pied nord de l'ancienne construction destinée à recevoir les eaux pluviales de la toiture

-le long de l'arrête de l'angle sud-est du bâtiment ancien

-la jonction entre la terrasse Ouest et le balcon sud

L'expert indique :

-qu'à la lecture du rapport de SOLS-ESSAIS l'angle sud-est de la construction existante aurait dû être conforté par l'utilisation de la technique des micropieux et un délai d'attente d'un an aurait dû être respecté avant de réaliser les finitions.

-que les fissures et lézardes affectant le gros-'uvre et le second 'uvre à l'intérieur se localisent essentiellement à la jonction de l'ancien et du nouveau bâtiment et en façade Est de l'ancien bâtiment.

-qu'il n'existe pas de joint de dilatation sur le second 'uvre notamment de l'étage ;

-qu'il n'existe pas de drain périphérique, de collecte des eaux pluviales en violation du permis de construire ;

-que l'humidité se localise dans la partie ancienne de la maison sur les murs contre terre des deux niveaux et particulièrement sur la paroi Ouest du petit bureau aménagé dans la tour, dans le rangement de la chambre principale et dans l'ancienne cour anglaise aménagée.

Elle a pour origine la pénétration dans les murs contre terre des eaux en provenance des terrains environnant mais également des toitures dépourvues de gouttières et de dispositif de collecte permettant d'éloigner les eaux pluviales des pieds de façade alors que ce dispositif était préconisé par SOL ESSAIS.

Ces pénétrations sont significatives d'une absence de traitement des parois enterrées par l'extérieure ou l'intérieur.

-que la venue d'eau dans le local situé sous le séjour a pour origine également l'absence de drain périphérique

-que l'humidité en plafond de la salle d'eau du niveau inférieur et dans l'angle nord/est et en plafond de la chambre au même niveau résulte d'un phénomène de condensation provoquée par la présence d'un pont thermique aggravé par l'absence de VMC

-que les infiltrations en plafond du dégagement de l'entrée à l'étage au droit de la jonction entre les bâtiments ont pour origine un point de pénétration des eaux de pluie au niveau du solin installé en liaison entre la couverture en tuiles et l'édicule du garage.

Il constate qu'il a été remédié aux infiltrations en solin et à l'absence d'isolation thermique en plafond en cours d'expertise.

La SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO ne conteste pas qu'elle était investi d'une mission complète de maître d''uvre.

Les investigations réalisées sur les fondations ont permis de révéler un défaut d'adaptation de l'ouvrage au sol, les fondations étant trop superficielles sous la terrasse du bloc Est et un défaut de respect de la règle d'échappée de 3H/2V entre les appuis de la terrasse et le pied du mur de soutènement en pierres jointes.

L'expert précise que les causes des désordres se situent aux stades de la conception (insuffisance des documents graphiques et descriptifs de l'ouvrage au regard du rapport de SOL ESSAIS) et de l'exécution des ouvrages (absence de recours à un ingénieur géologue et structure tout en ignorant le rapport SOL ESSAIS) y compris par le maître d''uvre de l'opération.

S'agissant d'une opération de construction sur ou ajouté à un immeuble existant, il incombe au concepteur de prévoir un ouvrage qui ne porte pas atteinte à l'existant et d'adapter le projet en conséquence spécialement lorsqu'il détient des éléments techniques en ce sens et en l'espèce le rapport SOL ESSAIS géologue et hydrologue établi préalablement à la demande de permis de construire.

Ce rapport indique expressément que pour la réalisation des travaux d'agrandissement et de rénovation de l'immeuble de madame [P], il convient de consolider les fondations en partie Sud Est et de prévoir un système de drainage des eaux en provenance des propriétés voisines et de toiture.

Il ressort par ailleurs du rapport d'expertise que les désordres affectant la partie Sud-Est résultent d'un défaut d'adaptation des fondations classiques trop superficielles et ne respectant pas la règle d'échappées 3H/2V des avoisinants.

S'agissant de l'extension de la bâtisse la mise en 'uvre de fondations sur massifs était subordonnée dans le rapport SOL ESSAI à la mise en place d'un drainage périphérique d'un joint de rupture et d'un joint de dilatation dans la perspective de l'apparition d'un tassement différentiel d'adaptation.

Le maître d''uvre indique qu'un joint de dilatation a été pratiqué au niveau du gros 'uvre mais ne fait pas état de joint de rupture.

Il a été constaté l'absence de joint de dilatation du second 'uvre et rien ne permet d'imputer cette carence à une immixtion du maître d'ouvrage.

Un rapport Saretec réalisé dans le cadre d'une déclaration de sinistre sécheresse été 2007 confirme que les désordres relèvent de la garantie décennale à l'exception d'une fissure.

Alors que l'expert indique que l'absence des travaux de drainage, voire de ceinture périphérique comme indiqué par le sapiteur, contribue aux désordres constatés sur la structure, aux pénétrations d'eau en paroi contre terre du local sous-jacent au séjour et de l'ancienne cour anglaise précédemment aménagée en extension du bâti ancien, dans le bureau de la tour, la SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO qui ne justifie d'aucun document relatif aux structures de l'ancien et du nouveau bâtiment ne rapporte pas la preuve d'avoir saisi le maître d'ouvrage d'un projet tenant compte de ces impératifs et ne peut prétendre, comme pour l'absence de mise en place des micropieux, qu'il s'agit d'un choix économique du maître d'ouvrage.

Il y a donc lieu de retenir avec le premier juge que le maître d''uvre comme l'entreprise n'ont pas suffisamment pris en compte le rapport préliminaire du géologue joint à la demande de permis de construire notamment en s'abstenant d'avoir recours à l'assistance d'un ingénieur structure.

En ce qui concerne l'humidité, elle se localise dans la partie ancienne de la maison sur les murs contre terre des deux niveaux et particulièrement sur la paroi Ouest du petit bureau aménagé dans la tour, dans le rangement de la chambre principale et dans l'ancienne cour anglaise aménagée.

Elle a pour origine la pénétration dans les murs contre terre des eaux en provenance des terrains environnant mais également des toitures dépourvues de gouttières et de dispositif de collecte permettant d'éloigner les eaux pluviales des pieds de façade, dispositif non mis en 'uvre par le concepteur du projet bien que préconisé par SOL ESSAIS et dont il n'est pas établi que le défaut soit le fait du maître de l'ouvrage.

Enfin, la SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO ne peut, en sa qualité de maître d''uvre concepteur et en charge de la surveillance des travaux, imputer l'absence de ventilation à la seule entreprise en charge des travaux. Il lui appartenait en effet d'attirer l'attention de l'entreprise sur ce manquement.

Il en résulte que la demande de mise hors de cause de la SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO est mal fondée.

Par voie de conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a condamné in solidum le maître d''uvre et son assureur, l'entreprise et son assureur à payer à madame [P] les travaux utiles à la disparition des désordres sur le fondement de l'article 1792 du code civil, les travaux d'agrandissement entrant dans le champ de la garantie décennale et les désordres constatés rendant l'ouvrage impropre à sa destination et pour partie inexploitable.

La responsabilité du concepteur et de la surveillance des travaux apparaît prépondérante dans la mesure où les pièces du dossier ne mettent pas en évidence que le maître d''uvre a véritablement piloter les travaux ; le partage de responsabilité de 70% à la charge du concepteur et 30% à la charge de l'entreprise est conforme aux éléments du dossier.

Le jugement de première instance sera ainsi confirmé en ce qu'il a réparti la charge définitive des responsabilités à hauteur de 70% pour le maître d''uvre et 30% pour l'entrepreneur et la demande du CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO et de son assureur d'être relevé et garanti par la société ART TM et son assureur de l'intégralité des condamnations prononcées à leur encontre sera rejetée.

En revanche, madame [P] se désistant de sa demande dirigée contre la société ART TM compte tenu de la radiation de celle-ci, le jugement de première instance sera réformé en conséquence.

Sur les préjudices :

Les appelantes ne contestent pas dans le dispositif de leurs conclusions le montant des travaux de reprise proposés par l'expert qui doivent être réalisés sous le contrôle d'un maître d''uvre et d'un ingénieur structure et les sommes demandées de ce chef.

L'indexation de cette somme sur l'indice bâtiment BT01 à compter de la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire soit le 20/12/2013 n'est pas davantage contestée.

Madame [P] demande une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice de jouissance indexée sur l'indice BT01.

La SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO et LA MAF conclut au rejet de toute demande de dommages intérêts au titre du préjudice de jouissance.

Le juge de première instance a alloué de ce chef une somme de 5000 euros considérant qu'une partie de la maison était rendue inhabitable.

Madame [P] ne produisant pas plus de justificatif qu'en première instance se contentant de reprendre une observation d'un rapport de monsieur [V] en date du 21 mai 2014 indiquant que le manque de ventilation provoque une insalubrité des penderies, d'une chambre et de la salle de bain, sa demande de ce chef, contestée par la partie adverse, sera rejetée.

De plus l'indice bâtiment BT01 n'est pas applicable à une somme allouée en réparation d'un préjudice de jouissance.

Sur les autres demandes :

Rien ne justifie d'infirmer le jugement de première instance sur les dispositions relatives aux dépens et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Parties perdantes, La SCM CABINET ZUCCO RUFFINI ZUCCO et LA MAF seront condamnées aux dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande d'allouer à madame [G] [E] épouse [P] une somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par défaut et par mise à disposition au greffe :

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Grasse du 07 févier 2018 sauf en ce qu'il condamne in solidum, d'une part, le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF, solidairement entre eux, et, d'autre part, la SARL ART TM et la SA AXA solidairement entre eux, à verser à [G] [E] épouse [P] la somme de 200.949, 40 EUR, toutefois dans une limite de 30 % de cette somme s'agissant de la SARL ART TM et de la SA AXA ;

Statuant à nouveau de ce chef

Condamne in solidum, le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF d'une part, et la SA AXA d'autre part, à verser à [G] [E] épouse [P] la somme de 195 949, 40 euros

Dit que cette somme sera indexée sur l'indice bâtiment BT01 à compter de la date du dépôt du rapport de l'expert judiciaire soit le 20/12/2013.

Dit que dans leur rapport entre eux le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF supporteront 70%, la SA AXA 30% de la charge définitive de la dette.

Y ajoutant,

Condamne in solidum le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF à payer à madame [G] [E] épouse [P] une somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum le cabinet d'architectes ZUCCO/RUFFINI/ZUCCO et la compagnie MAF aux dépens dont distraction au profit de Maître Joseph MAGNAN.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 6 Avril 2023

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/05254
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;18.05254 ?
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