COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 05 AVRIL 2023
N° 2023/0434
Rôle N° RG 23/00434 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLCFO
Copie conforme
délivrée le 05 Avril 2023 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 03 avril 2023 à 14h22.
APPELANT
Monsieur [B] [L]
né le 24 Octobre 1985 à [Localité 1]
de nationalité Tunisienne
comparant en personne, assisté de Me Maeva LAURENS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat choisi et de Mme [G] [M] (Interprète en langue Arabe) en vertu d'un pouvoir général inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
INTIME
Monsieur le préfet des BOUCHES DU RHONE
Représenté par Madame [U] [V]
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 05 avril 2023 devant Madame Laurence DEPARIS, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Madame Michèle LELONG, Greffière,
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 05 avril 2023 à 16h15,
Signée par Madame Laurence DEPARIS, Conseillère et Madame Michèle LELONG, Greffière,
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'interdiction définitive du territoire national prononcée le 24 février 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence,
Vu la décision de placement en rétention prise le 31 mars 2023 par le préfet des BOUCHES DU RHONE notifiée le 1er avril 2023 à 10h50 ;
Vu l'ordonnance du 03 avril 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de Monsieur [B] [L] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
Vu l'appel interjeté le 04 avril 2023 par Monsieur [B] [L] ;
Monsieur [B] [L] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare : je laisse la parole à mon avocate.
Son avocat a été régulièrement entendu ; il conclut à la nullité de la procédure du fait du défaut d'interprète sur le courrier du préfet lui demandant ses observations, le privant ainsi de la possibilité de faire des observations avant qu'un arrêté ne soit pris à son encontre, et au défaut de diligences de l'administration. Il ne comprend absolument pas le français. Il était assisté d'un interprète lors de la procédure pénale. Il n'a pas pu faire valoir ses droits ni contester l'arrêté de placement en rétention. Les documents produits aujourd'hui sont irrecevables ils n'ont jamais été communiqués auparavant.
Le représentant de la préfecture sollicite confirmation de la décision frappée d'appel. Je vous remets le courrier en date du 17 mars 2023 visant les pièces envoyées au consulat. Cette procédure est effectuée avant le placement en rétention. Ce courrier n'était pas en procédure. Les autorités ont bien été saisies.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.
Sur la nullité de procédure du fait du défaut d'interprète
L'article L. 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit qu'en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.
Aux termes des articles L 741-10 et L 743-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile la décision de placement en rétention ne peut être contestée que devant le juge des libertés et de la détention, dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification, et dans une audience commune aux deux procédures, sur lesquelles le juge statue par ordonnance unique lorsqu'il est également saisi aux fins de prolongation de la rétention en application de l'article L. 742-1.
L'étranger fait valoir qu'il n'a pas été assisté d'un interprète lors de la lecture du courrier adressé par le préfet et notifié le 14 mars 2023. Toutefois, ce courrier est destiné à recueillir ses observations avant la décision de placement en rétention et d'éloignement vers la Tunisie. La décision déférée n'a pas statué sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention et dès lors M. [L] ne peut faire état d'un grief quant à ce défaut d'interprétariat. Il ne peut être par ailleurs affirmé que l'absence de traduction de ce document est à l'origine de l'absence de contestation de l'arrêté de placement, cet arrêté ayant été par ailleurs notifié à l'étranger.
Sur le moyen tiré du défaut de diligences de l'administration
La directive européenne n°2008-115/CE dite directive 'retour' dispose en son article 15§1 que toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. La rétention doit reposer sur des circonstances de fait qui la rendent nécessaire et proportionnée ( CJUE 5 juin 2014 M. [N], C-146/14).
Suivant l'article L. 742-1 du CESEDA, quand un délai de quarante-huit heures s'est écoulé depuis la décision de placement en rétention, le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins de prolongation de la rétention. Aux termes de l'article 742-3 du CESEDA, si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de 28 jours à compter de l'expiration du délai de 48 heures.
Aux termes de l'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.
Si ce texte impose en effet au préfet d'effectuer sans désemparer les démarches nécessaires à l'exécution, dans les meilleurs délais, de la décision d'éloignement, l'appréciation des diligences qu'il a effectuées doit être faite in concreto en tenant compte des circonstances propres à chaque cas.
S'il est constant qu'il n'appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la légalité de la décision fixant le pays de retour, il lui incombe d'apprécier les diligences mises en oeuvre pour reconduire l'intéressé dans son pays ou tout autre pays.
Monsieur [B] [L] a été placé en rétention le 1er avril 2023. Les autorités consulaires tunisiennes ont été saisies d'une demande d'identification et de délivrance d'un laissez-passer consulaire par courrier en date du 31 mars 2023 avant sa sortie de détention.
Dès lors, les diligences utiles à l'exécution de la mesure d'éloignement ont été effectuées sans que les textes n'imposent à ce stade d'autres diligences à l'administration. En outre, le courrier adressé au consul général le 17 mars 2023 et listant les pièces transmises et notamment une audition, une fiche d'empreinte et trois photographies d'identité, soumis au débat contradictoire, attestent de l'envoi du dossier du retenu avant sa sortie de détention.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 03 avril 2023.
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
La greffière, La présidente,