COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 04 AVRIL 2023
N° 2023/00426
Rôle N° RG 23/00426 - N° Portalis DBVB-V-B7H-BLB5F
Copie conforme
délivrée le 04 Avril 2023 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 01 Avril 2023 à 14h16.
APPELANT
Monsieur [U] [F]
né le 03 octobre 1991 à [Localité 5]
de nationalité algérienne
comparant en personne, assisté de Me Aurélie BOURJAC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, commis d'office, et de M. [G] [C] (Autre) en vertu d'un pouvoir général, inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence.
INTIME
Monsieur le préfet du VAR
Représenté par Madame Sylvie VOILLEQUIN
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 04 Avril 2023 devant Madame Catherine LEROI, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Elodie BAYLE, Greffière,
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 04 Avril 2023 à 16h25,
Signée par Madame Catherine LEROI, Conseillère et Mme Elodie BAYLE, Greffière,
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 1er mars 2023 par le préfet du VAR , notifié le même jour validé par jugement du tribunal administratif de Nice en date du 6 mars 2023 ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 1er mars 2023 par le préfet du VAR notifiée le même jour à 16h50 ;
Vu l'ordonnance du 1er avril 2023 à 14h16 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant une seconde prolongation de la rétention de Monsieur [U] [F] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
Vu l'appel interjeté le 03 avril 2023 à 12h50 par Monsieur [U] [F] ;
Monsieur [U] [F] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare : 'vous m'avez demandé le passeport la dernière fois. Je l'ai remis. Je demande seulement la liberté. Je vais devenir fou dans ce centre. Je ne le referai plus. J'ai fait une erreur. J'habite [Localité 2] et j'ai un justificatif d'hébergement chez ma soeur. J'habitais chez elle avant. Je refuse d'aller en Algérie. J'ai ramené mon passeport comme vous me l'avez demandé. Si je quitte le territoire est ce qu'on va me donner un document pour pouvoir circuler '
Mme Le président lui explique les modalités de l'assignation à résidence.
Monsieur [U] [F] : je suis d'accord'.
Son avocat a été régulièrement entendu ; se référant à l'acte d'appel , il soutient que la préfecture ne justifie pas de la réalisation des diligences nécessaires à l'éloignement de M. [F] dans les meilleurs délais, en l'absence de relances des autorités consulaires algériennes pendant la première prolongation de la rétention et qu'il n'existe pas de perspectives d'éloignement au regard de la suspension par l'Algérie de ses relations diplomatiques avec la France, comme l'a relevé la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans une décision en date du 16 février 2023 ; il sollicite en conséquence l'infirmation de la décision déférée. Il fait valoir qu'à défaut de remise en liberté, M. [F] doit être assigné à résidence car il satisfait toutes les conditions nécessaires, ayant remis son passeport au centre de rétention récemment et produisant une attestation d'hébergement par sa soeur.
Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de la décision contestée. Il soutient que les diligences ont été réalisées par la préfecture qui n'a aucun devoir de relance des autorités étrangères, que la remise d'un passeport ne conditionne plus le départ à la délivrance d'un laissez-passer par les autorités consulaires et qu'une demande de routing a été faite dès le 3 avril 2023. Il s'oppose à la demande d'assignation à résidence de l'intéressé qui n'avait jamais fait mention d'une adresse chez sa soeur, qui a refusé au début de remettre son passeport et qui a indiqué dans un premier temps ne pas vouloir repartir en Algérie.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.
Sur la demande de remise en liberté :
Aux termes de l'article L742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le juge des libertés et de la détention peut être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d'urgence absolue ou de menace d'une particulière gravité pour l'ordre public ;
2° Lorsque l'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l'intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l'obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l'exécution de la décision d'éloignement ;
b) de l'absence de moyens de transport.
L'étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l'article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d'une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas soixante jours.
Il convient de préciser que l'absence de passeport équivaut à la perte ou à la destruction de documents de voyage au sens de l'article L 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Aux termes de l'article L741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet.
En l'espèce, la préfecture, par courrier en date du 1er mars 2023, soit le jour-même du placement en rétention, a sollicité le consul général de la République algérienne afin de procéder à l'identification de l'intéressé et à la délivrance d'un laissez-passer. Si elle ne justifie pas de relance des autorités algériennes pendant la première prolongation de la rétention, il convient d'observer qu'il n'appartient pas à la préfecture d'adresser des injonctions aux autorités étrangères souveraines et encore moins lorsqu'est alléguée une suspension volontaire de son activité diplomatique par le pays concerné, d'éventuelles relances ne pouvant rester que lettre morte. Il apparaît en outre que l'administration a prévu l'audition de M. [F] dès le 5 avril 2023, date de la reprise des relations diplomatiques avec l'Algérie.
Le défaut de diligences de la préfecture n'est donc pas démontré.
En l'état de la reprise des relations avec l'Algérie à compter du 5 avril 2023 et compte tenu de la remise de son passeport par l'intéressé rendant inutile la délivrance d'un laissez-passer, il est justifié de l'existence de perspectives réelles d'éloignement de M. [F].
Sur la demande d'assignation à résidence :
L'assignation à résidence se trouve subordonnée en application de l'article L 743-13 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile à l'existence de garanties de représentation effectives ainsi qu'à la remise préalable de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité en échange d'un récépissé valant justification de l'identité
et sur lequel est portée la mention de la décision d'éloignement en instance d'exécution. Lorsque l'étranger s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une décision mentionnée à l'article L 700-1, à l'exception de son 4°, l'assignation à résidence fait l'objet d'une motivation spéciale.
L'appréciation de l'opportunité d'accorder cette mesure, qui ne saurait non plus être automatique, suppose que les éléments de la procédure ne laissent pas apparaître un risque de non exécution de la mesure d'éloignement.
En l'espèce, M. [F] a remis son passeport en cours de validité aux services de police du centre de rétention ; il justifie par ailleurs d'une adresse chez sa soeur Mme [F] [K] épouse [Y] demeurant [Adresse 3].
Si effectivement M. [F] a souvent indiqué qu'il refusait de repartir en Algérie, il a toutefois fait preuve de bonne volonté en remettant son passeport et indique finalement à l'audience être disposé à repartir en Algérie.
Au regard de ces garanties de représentation, il sera mis fin à la rétention de M. [U] [F] qui sera assigné à résidence.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Infirmons partiellement l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 01 avril 2023 ;
DISONS n' y avoir lieu à prolongation de la rétention de Monsieur [U] [F] ;
DISONS qu'en échange de la remise de son passeport en cours de validité au centre de rétention de [Localité 4], Monsieur [U] [F] est astreint à résider chez Mme [F] [K] épouse [Y] demeurant [Adresse 3] ;
DISONS que Monsieur [U] [F] devra se présenter tous les jours de la semaine, y compris les samedi, dimanche et jour férié, au commissariat de police de [Localité 2] situé [Adresse 1] en vue de l'exécution de la mesure d'éloignement et jusqu'à son départ devant intervenir au plus tard le 15 mai 2023 ;
LUI RAPPELONS son obligation de quitter le territoire et que le défaut de respect des obligations d'assignation à résidence, est passible , suivant les articles L 743-17 et L.824-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une peine de 3 ans d'emprisonnement.
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
Le greffier, Le président,