COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-1
ARRÊT AU FOND
DU 31 MARS 2023
N° 2023/122
Rôle N° RG 19/16751 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BFC4W
[B] [O]
C/
SELARL MJ [L] mandataire liquidateur de la SARL ORNELLA
Association AGS CGEA DE [Localité 7]
Copie exécutoire délivrée
le :
31 MARS 2023
à :
Me Diane ECCLI, avocat au barreau de TOULON
Me Laura CUERVO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 30 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F18/00848.
APPELANT
Monsieur [B] [O], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Diane ECCLI, avocat au barreau de TOULON
INTIMEES
SELARL MJ [L], prise en la personne de Maître [W] [L], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la SARL ORNELLA, désigné à ces fonctions par jugement en date du 4 février 2019, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Laura CUERVO, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
Association AGS CGEA DE [Localité 7], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Julie GRIMA, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller
Madame Emmanuelle CASINI, Conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023
Signé par Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, pour le Président empêché et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [B] [O] a été engagé par la SARL ORNELLA, à compter du 1er avril 2017 selon Monsieur [O] et à compter du 1er juin 2017 selon la SARL ORNELLA, sans contrat de travail écrit, en qualité de responsable de magasin.
Le 24 avril 2018, Monsieur [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de dire que la relation de travail a débuté le 1er avril 2017, de solliciter la qualification de cadre niveau 8, responsable de magasin, de solliciter un rappel de salaire et une indemnité pour travail dissimulé, de dire le licenciement verbal intervenu à la fin du mois de septembre 2017 irrégulier et sans cause réelle et sérieuse et de condamner l'employeur au paiement d'indemnités de rupture, notamment.
Par lettre du 7 septembre 2018, Monsieur [O] a été convoqué à un entretien préalable et par lettre du 24 septembre 2028, il a été licencié pour faute grave pour les motifs suivants :
'Nous avons eu à déplorer de votre part plusieurs agissements constitutifs d'une faute grave.
Vous avez été embauché au sein de notre société à compter du 1er juin 2017 en qualité de responsable de magasin par contrat de travail à durée indéterminée.
A compter du 25 septembre 2017, vous ne vous êtes plus présenté à votre poste de travail et n'avez pas justifié de votre absence.
Depuis cette date nous sommes sans nouvelle de votre part.
J'ai appris que depuis le 24 mars 2018, vous êtes gérant de la société AG DISTRIBUTION et ce sans m'en avoir avisée.
Contre toute attente, en avril 2018, vous avez finalement décidé de faire appel à un Avocat afin de solliciter devant le Conseil de prud'hommes de MARSEILLE l'allocation d'un rappel de salaires sur une période de 6 mois, d'un rappel d'heures supplémentaires, des dommages et intérêts pour travail dissimulé ainsi que pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et irrégularité de la procédure de licenciement.
Ces demandes sont totalement injustifiées. Vous avez toujours été payé de vos salaires dès votre embauche le 1er juin 2017, à hauteur de 2.564,23 € bruts et non 5.333 € bruts comme vous le prétendez aujourd'hui.
De plus, vous n'avez jamais effectué la moindre heure supplémentaire.
Surtout, vous n'avez pas été licencié mais avez décidé de ne plus vous présenter à votre poste de travail sans aucune explication depuis le 25 mai 2017.
Nous ne pouvons tolérer ce comportement.
Par lettre recommandée avec AR du 5 septembre, nous vous avons mis en demeure de justifier de votre absence. Alors que vous avez nécessairement reçu cette lettre, vous ne nous avez fourni aucune explication et n'avez donné aucune suite à nos demandes.
Cette conduite met en cause la bonne marche de notre société.
Par lettre recommandée avec AR du 10 septembre 2018 nous vous avons donc convoqué à un entretien préalable, assortissant cette convocation d'une mise à pied conservatoire.
Cet entretien préalable a été fixé le 17 septembre 2018 à 10h00.
Les explications recueillies auprès de vous au cours de notre entretien du 17 septembre 2018 ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet ; nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave'.
Le 4 février 2019, la SARL ORNELLA a été placée en liquidation judiciaire et la SELARL MJ [L] a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.
Suivant jugement du 30 septembre 2019, le conseil de prud'hommes a :
- dit que la date de licenciement de Monsieur [O] est le 24 septembre 2018.
- dit que le motif de licenciement de Monsieur [O] est fondé en cause réelle et sérieuse.
- fixé le montant de la créance de Monsieur [O] à valoir sur la liquidation de la société ORNELLA, administrée par Me [W] [L], agissant ès-qualités de mandataire liquidateur, aux sommes suivantes:
* 742 € au titre du rappel de salaire pour la période du 22 mai 2017 au 31 mai 2017.
* 74.20 € au titre des congés payés afférents.
* 742 € au titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé sur la période du 22 mai au 31 mai 2017.
- dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire s'élève à la somme de 2.782,99 €.
- déclaré le jugement opposable au CGEA-ASSEDIC en qualité de gestionnaire de l'AGS dans les limites de l'article L.3253-8 du code du travail.
- débouté Monsieur [O] du surplus de ses demandes, fins et conclusions.
- débouté Maître [W] [L], agissant ès-qualités et le CGEA-ASSEDIC du surplus de leurs demandes, fins et conclusions.
- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.
Monsieur [O] a interjeté appel de ce jugement.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 9 novembre 2022 il demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 30 septembre 2019 en ce qu'il a dit que la date de licenciement de Monsieur [O] est le 24 septembre 2018 ; dit que le motif de licenciement de Monsieur [O] est fondé en cause réelle et sérieuse ; fixé le montant de la créance de Monsieur [O] à valoir sur la liquidation de la société ORNELLA, administrée par Me [W] [L], agissant ès-qualités de mandataire liquidateur, aux sommes suivantes : 742 € au titre du rappel de salaire pour la période du 22 mai 2017 au 31 mai 2017, 74,20 € au titre des congés payés afférents, 742 € au titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé pour la période du 22 mai 2017 au 31 mai 2017; dit que la moyenne des trois derniers mois de salaires s'élève à la somme de 2.782,99 €; déclaré le jugement opposable au CGEA-ASSEDIC en qualité de gestionnaire de l'AGS dans les limites de l'article L.3253-8 du code du travail ; débouté Monsieur [O] du surplus de ses demandes, fins et conclusions.
En conséquence :
Sur le contrat de travail et son exécution :
- dire et juger que Monsieur [O] a bel et bien été embauché par la société ORNELLA à compter du 1er avril 2017 en qualité de cadre niveau 8, responsable de magasin.
- condamner la société ORNELLA (prise en la personne de son liquidateur) à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes :
o Rappel de salaire de :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 31.998 € bruts (= 6 x 5.333 €)
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 16.697,94 € € bruts (= 6 x 2.782,99 €)
o Indemnité compensatrice de congés payés afférente :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 3.199,80 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 1.669,79 € bruts
o Rappel de salaire pour heures supplémentaires :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 45.479,46 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 23.735,73 € bruts
o Indemnité compensatrice de congés payés afférente à parfaire :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 4547,95 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 2.373,57 € bruts
o Contrepartie repos pour dépassement du contingent d'heures supplémentaires :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 13.202,58 €
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 6.890,43 € bruts
o Indemnité forfaitaire pour travail dissimulé de :
A titre principal en appliquant un salaire de 5. 333 € bruts : 31.998 € nets
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2. 782,99 € bruts : 16.697,94 € nets
Sur le licenciement :
A titre principal,
- dire et juger que le licenciement de Monsieur [O] du 22 septembre 2017 est dépourvu de cause réelle et sérieuse et est irrégulier.
- condamner la société ORNELLA (prise en la personne de son liquidateur) à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes :
o dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 15.999 € nets
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 8.348,97 € nets
o Préavis :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 15.999,99 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 8.348,97 € bruts
o Indemnité compensatrice de congés payés afférents :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 1.599,99 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 834,90 € bruts
o Indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 5.333 € nets
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 2.782,99 € nets
- ordonner la remise de l'attestation pôle emploi et des bulletins de salaire du 1er avril au 30 septembre 2017 sous astreinte de 200 € par jour de retard et par document.
A titre subsidiaire, si par extraordinaire il était considéré qu'il n'y avait pas eu de licenciement le 22 septembre 2017,
- dire et juger que le licenciement de Monsieur [O] du 24 septembre 2018 est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
- écarter le montant maximal d'indemnisation prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail notamment en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne, les articles 4 et 10 de la convention 158 de l'OIT et le droit au procès équitable.
- condamner la société ORNELLA (prise en la personne de son liquidateur) à payer à Monsieur [O] les sommes suivantes :
o dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 15.999 € nets
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 8.348,87 € nets
o Préavis :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 15.999 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 8.348,87 € bruts
o Indemnité compensatrice de congés payés afférents :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 1.599 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 834,89 € bruts
o Poursuite du paiement du salaire jusqu'à septembre 2018 :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 63.996 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 33.395,88 € bruts
o Indemnité compensatrice de congés payés afférents :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 6.399,60 € bruts
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 3 339,59 € bruts
o Indemnité de licenciement si le licenciement sans cause réelle et sérieuse date du 24 septembre 2018 :
A titre principal en appliquant un salaire de 5.333 € bruts : 1. 976,43 € nets
A titre subsidiaire en appliquant un salaire de 2.782,99 € bruts : 1.043,62 € nets
- ordonner la remise des bulletins de salaire depuis avril 2017 jusqu'à septembre 2018 rectifiés sous astreinte de 200 € par jour de retard et par document.
En tout état de cause :
- débouter la société ORNELLA, son liquidateur ès-qualités et le CGEA de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions prises à l'encontre de Monsieur [O].
- se réserver la liquidation de l'astreinte.
- ordonner les intérêts de droit à compter de la demande.
- ordonner la capitalisation des intérêts.
- fixer le salaire à la somme de 5.333 € bruts.
- condamner la société défenderesse à tout droit de recouvrement ou d'encaissement.
- dire que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle sera évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.
- la condamner à payer la somme de 1.800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile correspondant à la première instance et 2.500 € correspondant à celle d'appel du même chef.
- la condamner aux entiers dépens.
- fixer les créances de Monsieur [B] [O] au passif de la société ORNELLA, prise en la personne de son liquidateur, et déclarer l'arrêt à intervenir opposable au CGEA et dire que l'AGS CGEA devra procéder à l'avance des créances de Monsieur [B] [O] dans les limites légales et réglementaires applicables.
Suivant conclusions n°3 signifiées par voie électronique le 20 août 2022, la SELARL MJ [L], prise en la personne de Maître [W] [L], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la SARL ORNELLA, demande à la cour de :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 30 septembre 2019 en ce qu'il a :
* dit que la date de licenciement de Monsieur [O] est le 24 septembre 2018.
* dit que le motif de licenciement de Monsieur [O] est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
* dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire s'élève à la somme de 2.782,99 €.
* déclaré le jugement opposable au CGEA-ASSEDIC en qualité de gestionnaire de l'AGS dans les limites de l'article L.3253-8 du code du travail.
* débouté Monsieur [O] du surplus de ses demandes, fins et conclusions.
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Marseille du 30 septembre 2019 en ce qu'il a fixé le montant de la créance de Monsieur [O], à valoir sur la liquidation de la société ORNELLA, administrée par Me [W] [L], agissant ès-qualités de mandataire liquidateur, aux sommes suivantes :
* 742 € au titre du rappel de salaire pour la période du 22 mai 2017 au 31 mai 2017.
* 74.20 € au titre des congés payés afférents.
* 742 € au titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé sur la période du 22 mai au 31 mai 2017.
Par conséquent,
- débouter Monsieur [O] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
- condamner Monsieur [O] au paiement de la somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile d'appel.
- condamner Monsieur [O] aux entiers dépens.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 23 juillet 2020, l'UNEDIC Délégation AGS- CGEA de [Localité 7] demande à la cour de :
- vu la mise cause du CGEA en application de l'article L.625-3 du code de commerce, vu les articles L.3253-6 à L.3253-21 du code du travail régissant le régime de garantie des salaires et les plafonds applicables, vu les articles 6 et 9 du code de procédure civile, vu l'article L.625-4 du code de commerce.
- infirmer la décision attaquée en ce qu'elle a accordé à Monsieur [O] :
* 742 € au titre du rappel de salaire pour la période du 22 mai 2017 au 31 mai 2017.
* 74.20 € au titre des congés payés afférents.
* 742 € au titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé sur la période du 22 mai au 31 mai 2017.
- le débouter de ses chefs de demandes.
- le confirmer pour le surplus et débouter Monsieur [O] de l'ensemble de ses demandes comme étant infondées et injustifiées.
- en tout état, diminuer le montant des sommes réclamées à titre de dommages-intérêts en l'état des pièces produites.
- débouter Monsieur [O] de sa demande de paiement d'heures supplémentaires.
- débouter Monsieur [O] de sa demande de dommages-intérêts (article L.8223-1 du code du travail) pour travail dissimulé.
- dire et juger que l'indemnité demandée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut pas excéder la durée effective du travail effectuée par Monsieur [O].
- débouter Monsieur [O] de l'ensemble de ses demandes formulées à l'encontre du CGEA pour la demande relative à la condamnation sous astreinte.
- déclarer inopposable à l'AGS- CGEA la demande formulée par Monsieur [O] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- en tout état, constater et fixer en deniers ou quittances les créances de Monsieur [O]selon les dispositions des articles L.3253 -6 à L.3253-21 et D.3253 -1 à D.3253-6 du code du travail.
- dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-19 et L.3253-17 du code du travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail, plafonds qui incluent les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale ou d'origine conventionnelle imposée par la loi, ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204 A du code général des impôts.
- dire et juger que les créances fixées, seront payables sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L.3253-20 du code du travail.
- dire et juger que le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels en vertu de l'article L.622-28 du code de commerce.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I. Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail
Il n'est plus discuté par la SARL ORNELLA que les parties sont liées par un contrat de travail verbal, à durée indéterminée et à temps complet.
1- Sur la date du début de la relation contractuelle
Monsieur [O] soutient que la relation de travail a débuté en avril 2017 et qu'il a d'abord été affecté au magasin de [Localité 5] puis au magasin de [Localité 6].
La SARL ORNELLA conclut que la relation contractuelle n'a débuté qu'à compter du 1er juin 2017 ainsi qu'en attestent les bulletins de salaire et l'attestation pôle emploi remis à Monsieur [O] et les pièces produites par ce dernier ne suffisent pas à la démonstration d'une relation contractuelle qui aurait commencé avant le 1er juin 2017. La cour constatera que le décompte d'heures supplémentaires produit par le salarié ne débute qu'au mois de juin 2017, confirmant ainsi que la relation contractuelle n'a débuté qu'à cette date. La mention, dans la lettre de licenciement, de la date du 25 mai 2017, est une erreur de plume.
Pour soutenir que le contrat de travail a commencé à s'exécuter au mois d'avril 2017, Monsieur [O] produit :
- un relevé d'appels téléphoniques en mai 2017 et des échanges de messages écrits téléphoniques ('textos').
- des factures et des bons de livraison des mois de juin et août 2017, d'autres non datés.
- un courrier de la société VIA location du 26 avril 2017, comportant comme destinataire la SARL ORNELLA et adressé à Monsieur [O] ('Bonjour Monsieur [O], veuillez-trouver ci-joint le contrat de location moyenne durée en trois exemplaires du véhicule immatriculé ...Merci d'apposer votre signature et le cachet de l'entreprise...'), le contrat de location dudit véhicule établi au nom de la SARL ORNELLA et signé le 26 avril 2017. Monsieur [O] indique que ce courrier confirme un transport en camion réalisé afin de déménager une grande partie du matériel de la SARL ORNELLA dans les Bouches-du-Rhône.
- la fiche de la SARL ORNELLA sur le site 'société.com' indiquant une immatriculation au RCS dans le Var le 6 avril 2017.
- la lettre de licenciement qui mentionne 'Surtout, vous n'avez pas été licencié mais avez décidé de ne plus vous présenter à votre poste de travail sans aucune explication depuis le 25 mai 2017".
Il ressort de ces pièces que le relevé d'appels de mai 2017 concerne des appels sur un téléphone mobile et mentionne que le correspondant a appelé 'sans laisser de message'. Ces éléments ne démontrent donc rien d'une relation de travail.
Les factures et bons de livraisons produits comportent une date concernant la période postérieure au 1er juin 2017 et donc n'établissent pas une relation de travail au mois de mai 2017, période évoquée par Monsieur [O].
Le courrier du 26 avril 2017 concerne, comme le conclut Monsieur [O], un contrat de location d'un camion en vue d'un déménagement d'une partie des éléments du fonds de commerce de la SARL ORNELLA vers [Localité 6]. Le seul fait que le nom de Monsieur [O] apparaisse sur ce courrier ne suffit pas à caractériser que Monsieur [O] a effectivement travaillé continûment pour le compte de la SARL ORNELLA et sous sa subordination pour la période revendiquée du mois d'avril 2017.
De même, il ne peut être déduit de la mention de la date du 25 mai 2017 dans la lettre de licenciement une embauche antérieure puisque Monsieur [O] reconnaît lui-même qu'il n'a plus exécuté de prestation de travail à compter de septembre 2017, date également retenue par l'employeur dans la lettre de licenciement (25 septembre 2017) et ainsi la date du 25 mai 2017 est bien un erreur de plume.
Dans ces conditions, la preuve d'une relation, dans le cadre d'un contrat de travail, antérieurement au 1er juin 2017, n'est pas rapportée.
2. Sur la demande de classification de cadre niveau 8
Monsieur [O] soutient qu'il a été engagé en qualité de responsable de magasin, statut cadre, niveau 8. Il indique que les grilles de salaire issues de la convention collective du commerce de détail de fruits et légumes mentionnent l'existence de 8 niveaux ; que l'accord du 14 décembre 2016, relatif à la classification des emplois mentionne, en son annexe II, dans la grille des emplois repères, que le poste de directeur de magasin relève de classification cadre niveau II ; qu'il encadrait une équipe, disposait de moyens de paiement pour les marchandises, passait les commandes, vérifiait les chiffres et résultats du magasin, tout cela n'ayant jamais été contesté par l'employeur et peu important que le montant du salaire convenu soit au-dessus du minimum conventionnel, au vue de son expérience.
La SARL ORNELLA conteste cette revendication et soutient que Monsieur [O] a été engagé en qualité de chef de magasin, statut agent de maîtrise, niveau 6, et qu'en réalité il devrait relever du niveau 5 dans la mesure où le point de vente de [Localité 4] - [Localité 6] comptait moins de 10 salariés. Elle relève que le niveau 8 n'est d'ailleurs pas prévu par la convention collective ni par l'accord collectif du 14 décembre 2016. Elle conteste le fait que Monsieur [O] gérait seul le magasin.
*
Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle de démontrer qu'il assure, de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.
Selon les dispositions de la convention collective, dans sa rédaction issue du 12 juillet 2001, le niveau 8 du statut cadre correspond à des fonctions mettant en oeuvre des responsabilités de choix, des moyens et de réalisation des objectifs et correspond aux fonctions repères de directeur d'hypermarché, d'entrepôt régional ou de fonction support.
Or, force est de constater que Monsieur [O] procède par affirmation et ne produit pas élément qui établirait qu'il a assuré, de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.
Les factures et bons de commande au nom de la SARL ORNELLA ainsi que les messages écrits téléphoniques ('textos') produits ne rapportent assurément pas cette preuve.
Dans ces conditions sa demande sera rejetée.
3. Sur le montant et le paiement du salaire
Monsieur [O] soutient qu'il avait été convenu entre les parties d'un salaire de 4. 000 € nets par mois (soit environ 5.333 € bruts) pour 151,67 heures de travail mensuel, compte tenu de sa classification et de ses responsabilités. Il sollicite donc la somme de 31.998 € pour la période du 1er avril 2017 au 30 septembre 2017, outre les congés payés afférents. Il conteste avoir été réglé d'une quelconque somme et la partie adverse ne communique aucune pièce justifiant du paiement qu'elle prétend avoir effectué alors que c'est à la SARL ORNELLA, qui se prétend avoir été libérée de son obligation, d'en rapporter la preuve. Subsidiairement, si par extraordinaire, la cour ne considérait pas que le salaire serait de 5.333 € bruts mensuels, mais de 2.782,99 € bruts comme le prétend l'employeur, il demande de fixer le rappel de salaire, a minima, à la somme de 16.697,94 € bruts (= 6 x 2.782,99), avec une incidence congés payés de 1.669,79€ bruts.
La SARL ORNELLA conclut que Monsieur [O] procède par affirmation et ne justifie d'aucun accord entre les parties ; que ses attributions ne correspondent ni plus ni moins à un poste de chef de magasin qui relève, selon la convention collective applicable, soit du niveau 5, s'il gère une équipe de moins de 10 salariés, soit du niveau 6, si l'équipe est de plus de 10 salariés ; que le salaire de base a été convenu entre les parties à la somme de 2.782,99 €, ce qui est cohérent avec le minimum conventionnel, en précisant que le niveau le plus élevé prévoit un salaire conventionnel minimal de 2.934,75 €. Elle fait également valoir que les salaires des mois de juin, juillet, août et septembre 2017 ont été réglés à Monsieur [O], les trois premiers mois en espèces et le mois de septembre 2017 par chèque et Monsieur [O] n'a jamais contesté le fait qu'il avait été rémunéré en espèces puis par chèque. Elle reconnaît avoir commis l'erreur de ne pas établir de bulletins de salaire mais a cependant régularisé depuis la situation, confirmant ainsi que des salaires ont bien été versés. Par ailleurs, Monsieur [O] n'étant plus venu travailler et n'ayant pas justifié son absence, il ne peut prétendre à aucune rémunération à compter du 25 septembre 2017.
Le CGEA AGS conclut à l'inaction de Monsieur [O] qui n'a fait aucune demande de paiement de salaire pendant six mois ; que le salarié ne prouve pas le montant du salaire qu'il réclame alors que le CGEA verse aux débats des bulletins de salaires ( bulletins de salaire que Monsieur [O] avait bien omis de produire) ainsi que l'attestation pôle emploi mentionnant un salaire de 2 782.99 €. Le CGEA prétend que Monsieur [O] devra verser ses relevés de comptes bancaires couvrant la période du 1er juin 2017 au 30 septembre 2017 et demande le rejet de la demande.
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Alors que Monsieur [O] a été débouté de sa demande de classification de son emploi au statut cadre niveau 8, il ne produit aucune pièce démontrant d'un salaire convenu à hauteur de 5.333 € bruts. Il ne produit pas davantage d'élément caractérisant les responsabilités qu'il revendique et le seul fait qu'il ressort d'un message écrit téléphonique ('texto') que la gérante lui a donné un numéro de carte bancaire ne suffit pas à caractériser un niveau de responsabilité justifiant le paiement du salaire revendiqué.
Il convient donc de retenir la demande subsidiaire du salarié, à savoir un montant de salaire de 2.782,99 €, tel qu'il figure sur les bulletins de salaire.
Alors qu'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de ce qu'il a bien payé le salaire, la seule production des bulletins de salaire ne suffit pas à rapporter cette preuve.
La SARL ORNELLA qui affirme avoir payé les salaire de juin, juillet, août 2017 en espèces n'en rapporte pas la preuve. Elle produit la copie d'un chèque comportant la date du 17 octobre 2017, libellé à l'ordre de Monsieur [O] pour la somme de 3.000 €. Cependant, outre le fait que la SARL ORNELLA ne prouve pas l'encaissement de ce chèque, son montant ne correspond ni au montant du salaire figurant sur le bulletin de salaire du mois de septembre 2017 (167,67 €) ni au montant, encore différent, figurant sur l'attestation pôle emploi (2.782,99 €).
Dans ces conditions, la demande de Monsieur [O] est fondé pour la somme de 11.131,96 € (4 mois x 2.782,99 €), outre la somme de 1.113,19 € bruts à titre de congés payés.
4. Sur la demande au titre des heures supplémentaires
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments, après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties. Dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Monsieur [O] soutient avoir réalisé de nombreuses heures supplémentaires, soit 112 heures majorées à 25% et 769 heures majorées à 50%. Il réclame la somme de 45.479,46 € à titre de rappel de salaire au titre d'un salaire de base de 5.333 €, ou subsidiairement la somme de 23.735,73 € au titre d'un salaire de base de 2.782,99 €, outre les congés payés.
Monsieur [O] présente un décompte indiquant, pour chaque jour, des heures d'arrivée et des heures de départ et le total des heures supplémentaires par semaine, du 17 juin 2017 au 23 septembre 2017.
La SARL ORNELLA conclut que la production d'un décompte, réalisé vraisemblablement après coup, et non au fur et à mesure des heures prétendument réalisées, et qui n'est corroboré par aucun autre élément n'est pas de nature à étayer une demande de rappel d'heures supplémentaires tel que l'exige la jurisprudence. Monsieur [O] ne produit aucun témoignage que ce soit de collègues ou de clients ou de proches, qui viendrait confirmer qu'il a effectivement réalisé des heures supplémentaires et ne justifie d'aucune démarche envers son employeur pour obtenir le paiement d'heures supplémentaires, à l'exception de la mise en demeure de son avocat qui interviendra plus de quatre mois après qu'il ait quitté son poste.
Le CGEA-AGS conclut qu'en l'absence de tout élément probant, il conviendra de débouter Monsieur [O] de sa demande à ce titre ou en tout état d'en diminuer considérablement le montant.
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Le décompte de Monsieur [O] fait état, jour par jour, d'une heure d'embauche, d'une heure de départ, d'une amplitude horaire journalière de travail et récapitule les heures de travail par jour et par semaine.
Cette pièce est assurément suffisamment précise quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
La SARL ORNELLA ne produit aucune pièce.
La cour constate également, à la lecture attentive de ce décompte, que les informations contenues dans la colonne correspondant aux dimanches sont en partie tronquées et inexploitables. D'autre part, Monsieur [O] n'a pas mentionné les temps de pause et notamment les pauses déjeuners.
En conséquence, au vu de l'ensemble des éléments soumis à son appréciation, la cour fixe la créance de Monsieur [O] à la somme de 8.074 €, outre la somme de 807,40 € au titre des congés payés afférents.
Selon l'article 4.1.4. de la convention collective, « Le contingent annuel d'heures supplémentaires que l'employeur est autorisé à faire effectuer sans autorisation de l'inspecteur du travail est fixé à 150 heures.
Toutefois, conformément à la loi, les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel de 130 heures fixé par voie réglementaire ouvrent droit à un repos compensateur dont la durée est égale à 50 % de ces heures supplémentaires ».
Il en résulte qu'il convient de fixer l'indemnité due en contrepartie du repos compensateur à la somme de 1.669,85 €.
Sur la demande d'indemnité au titre d'un travail dissimulé
Monsieur [O] fait valoir qu'en dépit d'une embauche en avril 2017, la SARL ORNELLA n'a pas fait de déclaration unique d'embauche ni aucune autre déclaration et n'a pas délivré un seul bulletin de salaire avant août 2018, une fois le conseil de prud'hommes saisi. Il considère que la SARL ORNELLA était pleinement consciente de ses obligations mais a décidé de les nier, le plaçant dans l'impossibilité de pouvoir fournir un quelconque document justificatif auprès de pôle emploi, notamment. De plus, il a travaillé bien plus que 35 heures par semaine mais il n'a jamais été déclaré ni payé pour les heures travaillées effectuées.
La SARL ORNELLA conclut avoir régularisé la situation de Monsieur [O] ainsi qu'en atteste la déclaration à l'embauche effectuée en septembre 2017, puis elle a ensuite régularisé la délivrance de bulletins de salaire, confirmant le versement des salaires à Monsieur [O] pour la période d'emploi de juin à septembre 2017 ainsi que l'acquittement des cotisations afférentes. Elle considère qu'il n'y a pas de travail dissimulé, la situation ayant été régularisée et Monsieur [O] ne démontre pas que l'employeur s'est, de manière intentionnelle, soustrait à l'accomplissement des formalités relatives à la déclaration d'embauche ou à l'établissement des bulletins de salaires.
Le CGEA - AGS conclut que l'emploi de Monsieur [O] a bien été déclaré et l'employeur s'est acquitté des cotisations relatives aux salaires.
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L'article L 8221-5 du code du travail prévoit : « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales ».
L'article L 8223-1 du code du travail prévoit qu' en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Il appartient au salarié d'apporter la preuve d'une omission intentionnelle de l'employeur.
Il est produit l'accusé de réception de la déclaration préalable d'embauche délivré par l'URSSAF qui indique que la déclaration a été faite le 18 septembre 2017 et concerne une embauche de Monsieur [O] à compter du 19 septembre 2017.
Ainsi, et alors que la SARL ORNELLA reconnaît avoir engagé Monsieur [O] à compter du 1er juin 2017, elle ne justifie pas l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L.1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche, depuis le début de la relation salariale.
Par ailleurs, il n'est produit que les bulletins de salaire des mois d'août et de septembre 2017.
L'absence de déclaration préalable d'embauche avant le 19 septembre 2017, la non délivrance de bulletins de salaire et le volume des heures supplémentaires effectuées par le salarié, la persistance et la constance dans le temps du recours aux heures supplémentaires non payées, l'absence totale de mention sur les bulletins de paie de l'accomplissement de la moindre heure supplémentaire, caractérisent assurément l'intention frauduleuse de l'employeur.
Ces agissements sont constitutifs d'un travail dissimulé justifiant l'allocation de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L 8223-1 du code du travail, à hauteur de 16.697,94 €.
II. Sur la rupture du contrat de travail
A titre principal, Monsieur [O] soutient que la rupture du contrat de travail est intervenue le 22 septembre 2017 lorsque que l'employeur lui a demandé de quitter l'entreprise à la fin de la saison. Monsieur [O] fait valoir, par ailleurs, que la SARL ORNELLA ne rapporte pas la preuve de la faute grave et produit une lettre de mise en demeure de justifier de son absence, du 3 septembre 2018, qu'il n'a pas reçue et qui n'est que la réponse de l'employeur à la saisine du conseil de prud'hommes.
La SARL ORNELLA conclut que Monsieur [O] ne produit aucun élément qui viendrait corroborer ses affirmations. En réalité, à compter du 25 septembre 2017, Monsieur [O] ne s'est plus présenté à son poste de travail, ce qu'il ne conteste pas, et n'a pas justifié son absence. A la fin de la saison, le point de vente de [Localité 4] a été fermé et Monsieur [O] devait venir travailler sur le point de vente de FREJUS mais il ne s'est jamais présenté à son poste. Il n'a plus donné de nouvelle à son employeur ni n'a démissionné et il attendra le mois de février 2018, soit plus de quatre mois après son départ, pour adresser un premier recommandé à son employeur via son avocat. La SARL ORNELLA précise qu'elle a adressé une mise en demeure au salarié par courrier du 3 septembre 2018 de justifier de son absence. Monsieur [O] a quitté son poste pour créer la société AG DISTRIBUTION située à TRETS et spécialisée dans le secteur d'activité du commerce de gros de fruits et légumes.
Le CGEA-AGS conclut que Monsieur [O] a abandonné son poste le 25 septembre 2017 et que le licenciement pour faute grave est justifié.
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Alors qu'il appartient au salarié de rapporter la preuve d'un licenciement verbal intervenu le 22 septembre 2017, force est de constater que Monsieur [O] ne produit pas la moindre pièce qui établirait que la SARL ORNELLA a rompu verbalement le contrat de travail à cette date. Monsieur [O] sera donc débouté de sa demande tendant à considérer qu'il y a eu licenciement le 22 septembre 2017.
La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. Elle doit être prouvée par l'employeur.
Pour démontrer la réalité, l'imputabilité au salarié et la gravité des faits commis et reprochés dans la lettre de licenciement du 24 septembre 2018, la SARL ORNELLA verse une lettre de mise en demeure du 3 septembre 2018 d'avoir à justifier son absence mais dont il n'est pas prouvé qu'elle ait été envoyée et reçue par Monsieur [O].
Ainsi, alors que Monsieur [O] conteste avoir abandonné son poste et soutient que c'est la SARL ORNELLA qui l'a renvoyé et qui ne lui a plus fourni de travail, la SARL ORNELLA ne justifie pas de l'envoi d'une mise en demeure préalable de reprendre son poste ou de justifier de son absence, a attendu près d'un an avant d'engager la procédure de licenciement - celle-ci étant manifestement une réaction de l'employeur à la procédure engagée par le salarié devant le conseil de prud'hommes - et ne justifie pas davantage d'une quelconque désorganisation de la société.
Il s'ensuit que non seulement le licenciement de Monsieur [O] ne repose pas sur une faute grave mais est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
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Monsieur [O] sollicite le paiement des salaires du 1er octobre 2017 à octobre 2018. La SARL ORNELLA conclut que Monsieur [O] ne s'est plus présenté à son poste de travail et ne peut donc réclamer le paiement d'un salaire à compter d'octobre 2017.
Cependant, il appartient à l'employeur de fournir un travail au salarié qui se tient à sa disposition et de payer la rémunération. L'employeur doit donc démontrer que le salarié avait refusé d'exécuter son travail ou ne s'était pas tenu à sa disposition.
En espèce, le licenciement de Monsieur [O], pour abandon de poste et absence de justification de son absence, a été jugé sans cause réelle et sérieuse et la SARL ORNELLA ne démontre pas que Monsieur [O] a refusé d'exécuter son travail. Par contre, elle démontre qu'à compter du 1er mars 2018 Monsieur [O] a créé une société (la SARL AG DISTRIBUTION) dont il était le gérant et qu'ainsi, à compter de cette date, Monsieur [O] n'était plus à sa disposition.
Dans ces conditions, il convient de fixer la créance salariale de Monsieur [O] à la somme de 2.782,99 € x 5 mois = 13.914,95 €, outre la somme de 1.391,49 € au titre des congés payés afférents.
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Au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, Monsieur [O] soulève la non-conformité du barème issu de l'article L.1235-3 du code du travail aux conventions internationales, à savoir aux articles 4 et 10 de la convention n°158 de l'OIT et à l'article 24 de la Charte sociale européenne du 3 mai 1996, textes ratifiés par la France.
Toutefois, le barème d'indemnisation du salarié licencié sans cause réelle et sérieuse n'est pas contraire à l'article 10 de la convention n°158 de l'Organisation internationale du travail, en ce qu'il tient compte de l'ancienneté du salarié, de son niveau de rémunération, et de la gravité de la faute commise par l'employeur, étant rappelé que le licenciement injustifié visé par l'article 10 couvre à la fois le licenciement sans cause réelle et sérieuse et le licenciement nul. En outre, si Monsieur [O] se prévaut également des dispositions de la Charte sociale européenne, il convient de rappeler que la loi française ne peut faire l'objet d'un contrôle de conformité à l'article 24 de cette Charte, qui n'est pas d'effet direct. L'article L.1235-3 du code du travail doit donc recevoir application.
Compte tenu de son âge au moment de la rupture du contrat de travail (44 ans), de son ancienneté (un an révolu), de sa qualification, de sa rémunération (2.782,99 €), de la circonstance que le licenciement a été opéré au sein d'une entreprise employant moins de onze salariés, des circonstances de la rupture mais également de l'absence de toute justification de sa situation professionnelle postérieurement à la rupture du contrat de travail, il sera accordé à Monsieur [O] une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 2.000 €.
Il convient d'accorder à Monsieur [O] la somme de 2.782,99 €€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et celle 278,29 € au titre des congés payés afférents (Monsieur [O] n'ayant pas démontré sa qualification de cadre) ainsi que la somme de [2.782,99 € x 1/4 x (1+3/12)] = 869,67 € au titre de l'indemnité de licenciement.
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La remise d'un bulletin de salaire rectificatif conforme à la teneur du présent arrêt s'impose sans qu'il y ait lieu de prévoir une astreinte, aucun élément laissant craindre une résistance du mandataire liquidateur n'étant versé au débat.
Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation soit à compter du 26 avril 2018, et les sommes allouées de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jugement pour la partie confirmée et à compter du présent arrêt pour le surplus.
Il convient d'ordonner la capitalisation des intérêts qui est de droit lorsqu'elle est demandée.
Comme le sollicite le CGEA de [Localité 7], il convient de rappeler que le jugement d'ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels.
Il convient de rappeler que l'obligation du C.G.E.A, gestionnaire de l'AGS, de procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-8 et suivants du code du travail se fera dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-19 et L.3253-17 du code du travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L.3253-20 du code du travail.
Le présent arrêt devra être déclaré opposable à l'AGS et au CGEA de [Localité 7].
La disposition du jugement relative aux frais irrépétibles sera infirmée et il est équitable de laisser à la charge de la liquidation judiciaire de la SARL ORNELLA la somme de 2.500 € au titre des frais non compris dans les dépens que Monsieur [O] a engagés en première instance et en cause d'appel.
La disposition du jugement relative aux dépens sera confirmée et les dépens d'appel seront à la charge de la liquidation judiciaire de la SARL ORNELLA, partie succombante, par application de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et en matière prud'homale,
Pour une meilleure compréhension, infirme le jugement en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que Monsieur [B] [O] et la SARL ORNELLA sont liés par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juin 2017,
Dit que le relation contractuelle a été rompue par le licenciement du 24 septembre 2018,
Dit que le licenciement du 24 septembre 2018 est sans cause réelle et sérieuse,
Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la SARL ORNELLA la créance de Monsieur [B] [O] aux sommes suivantes:
- 11.131,96 € à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juin 2017 à septembre 2017,
- 1.113,19 € au titre des congés payés afférents,
- 13.914,95 € à titre de rappel de salaire pour la période d'octobre 2017 à février 2018 inclus,
- 1.391,49 € au titre des congés payés afférents,
- 8.074 € au titre des heures supplémentaires,
- 807,40 € au titre des congés payés afférents,
- 1.669,85 € au titre de la contrepartie en repos pour dépassement du contingent d' heures supplémentaires,
- 16.697,94 € au titre de l'indemnité pour travail dissimulé,
- 2.000 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2.782,99 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 278,29 € au titre des congés payés afférents,
- 869,67 € au titre de l'indemnité de licenciement,
- 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Ordonne la remise par le mandataire liquidateur à Monsieur [B] [O] d'un bulletin de salaire rectificatif conforme à la teneur du présent arrêt,
Rejette les demandes de classification au statut cadre niveau 8, d'inconventionnalité du barème de l'article L.1235-3 du code du travail et d'astreinte,
Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2018 et les sommes allouées de nature indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jugement pour la partie confirmée et à compter du présent arrêt pour le surplus.
Ordonne la capitalisation des intérêts,
Rappelle que le jugement d'ouverture de la procédure collective de la SARL ORNELLA a opéré arrêt des intérêts légaux et conventionnels,
Dit la présente décision opposable au CGEA-AGS de [Localité 7],
Dit que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L.3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L.3253-19 et L.3253-17 du code du travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judiciaire, et sur justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l'article L.3253-20 du code du travail,
Rappelle qu'en cas d'exécution forcée, le droit proportionnel à la charge du créancier ne peut être perçu quand le recouvrement ou l'encaissement de sommes par un huissier mandaté est effectué sur le fondement d'un titre exécutoire constatant une créance née de l'exécution d'un contrat de travail, par application des dispositions des articles R.444-53 et R.444-55 du code de commerce,
Laisse les dépens d'appel à la charge de la liquidation judiciaire de la SARL ORNELLA.
LE GREFFIER Mme Stéphanie BOUZIGE,
Pour le Président empêché