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30/03/2023 | FRANCE | N°18/08898

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 30 mars 2023, 18/08898


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 30 MARS 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/08898 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCQDQ







SA ALLIANZ IARD





C/



[W] [K]

[G] [L]











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Céline CONCA



Me Julien BLOT









Décision déférée à la Cour :


r>Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 27 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 15/09191.





APPELANTE



SA ALLIANZ IARD

, demeurant [Adresse 1]

représentée à l'audience par Me Céline CONCA de la SCP MARCHESSAUX CONCA CARILLO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 30 MARS 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/08898 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCQDQ

SA ALLIANZ IARD

C/

[W] [K]

[G] [L]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Céline CONCA

Me Julien BLOT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 27 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 15/09191.

APPELANTE

SA ALLIANZ IARD

, demeurant [Adresse 1]

représentée à l'audience par Me Céline CONCA de la SCP MARCHESSAUX CONCA CARILLO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Madame [W] [K]

née le 28 Février 1955 à [Localité 5], demeurant [Adresse 3]

représentée à l'audience par Me Julien BLOT, avocat au barreau de MARSEILLE

Monsieur [G] [L]

, demeurant [Adresse 2]

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2023.

ARRÊT

EXPOSÉ DU LITIGE

[W] [K] a confié à [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5] ( MCM), des travaux d'amélioration et de rénovation d'une maison individuelle lui appartenant, située au [Adresse 4], composée de deux appartements de 77 M2 environ destinés à la location.

Le 27 juin 2008, [W] [K] a signé un devis établi par [G] [L] sous l'enseigne MCM pour un montant total de 109 595,56 euros TTC, fixant le début du chantier au 1er octobre 2008 et une fin de chantier au 17 mars 2009.

[W] [K] a réglé à la MCM, entre le 27 juin 2008 et le 20 février 2009, une somme totale de 106 531,29 euros.

Par courrier recommandé du 8 juin 2009, non réclamé, [W] [K] a mis en demeure [G] [L] exerçant sous l'enseigne MCM de terminer les travaux sous quinzaine, et fait état de travaux non-faits, à finir ou à reprendre.

Par courrier recommandé du 6 juillet 2009, non réclamé, [W] [K] a mis en demeure [G] [L] exerçant sous l'enseigne MCM de remédier à divers désordres et non-finitions, suivant liste établie après la tenue d'une réunion ayant eu lieu en sa présence sur le chantier le 26 juin 2009.

Par acte du 24 septembre 2009, [W] [K] a fait signifier par huissier les deux précédentes mises en demeure à [G] [L] exerçant sous l'enseigne MCM.

Se plaignant de ce que [G] [L] n'avait pas tenu ses engagements et ne se présentait plus sur le chantier, ainsi que de divers désordres affectant les travaux réalisés, [W] [K] l'a fait assigner devant le juge des référés, avec son assureur de responsabilité civile décennale, AGF IART, devenue ALLIANZ IARD, afin d'obtenir une expertise et une provision.

Par ordonnance de référé du 30 septembre 2011, le président du tribunal de grande instance de MARSEILLE a ordonné une expertise confiée à [C] [D].

L'expert a déposé son 'rapport en l'état' le 27 juin 2013.

Par actes d'huissier des 09 et 18 juin 2015, [W] [K] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de MARSEILLE [G] [L] et ALLIANZ, au visa des articles 1134, 1147, 1792-6,1792 alinéa 1er du code civil, aux fins principalement de voir prononcer la réception judiciaire des travaux, assortie des réserves émises par Madame [K] aux termes de ses courriers recommandés du 8 juin 2009 et du 6 juillet 2009, et d'obtenir la condamnation in solidum de Monsieur [G] [L] et de la société ALLIANZ à l'indemniser de ses préjudices.

Par jugement réputé contradictoire du 27 février 2018, le tribunal de grande instance de MARSEILLE a:

- condamné in solidum [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], et ALLIANZ IARD à payer à [W] [K] les sommes suivantes:

- 23 065,69 euros au titre des travaux de reprise des désordres de nature décennale,

- 9 664,76 euros au titre des travaux de reprise des désordres réservés de nature contractuelle,

- 7 077,42 euros en réparation de la perte de revenus locatifs pour les périodes du 11 mai au 13 juillet 2009 et du 1er mai 2010 au 1er octobre 2011,

- 2000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

- rappelé que ces sommes produiront, de droit, intérêts au taux légal à compter du jugement,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,

- condamné solidairement [G] [L], artisan exerçant sous

l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], et ALLIANZ IARD à payer à [W] [K] 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné in solidum [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], et ALLIANZ IARD au paiement des dépens de l'instance, qui comprennent les frais d'expertise, avec distraction.

Par déclaration reçue au greffe le 28 mai 2018, la société ALLIANZ a formé un appel partiel à l'encontre de ce jugement en ce:

- qu'il l'a condamnée in solidum avec [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], à payer à [W] [K] les sommes suivantes:

* 23 065,59 euros au titre des travaux de reprise des désordres de nature décennale,

* 9 664,76 euros au titre des travaux de reprise des désordres réservés de nature contractuelle,

* 7 077,42 euros en réparation de la perte de revenus locatifs pour les périodes du 11 mai au 13 juillet 2009 et du 1er mai 2010 au 1er octobre 2011,

* 2 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

outre intérêts au taux légal à compter du jugement,

- qu'il l'a condamnée solidairement avec [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5] à payer à [W] [K] 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- qu'il a ordonné l'exécution provisoire,

- qu'il l'a condamnée in solidum avec [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], au paiement des dépens de l'instance, comprenant les frais d'expertise.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 04 janvier 2019 (resignifiées à l'intimé défaillant le 02 juillet 2019), la société ALLIANZ, appelante, demande à la cour:

Vu les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile,

Vu celles de l'article 1315 du code civil,

Vu les dispositions de l'article L 241-1 du code des assurances,

Vu encore les dispositions des articles 1792 et suivant du code civil,

DIRE ET JUGER recevable et bien fondé l'appel interjeté par ALLIANZ,

REFORMANT le jugement entrepris sur les points querellés dans la déclaration d'appel et les présentes écritures:

Dire et juger que la compagnie ALLIANZ, en tant qu'assureur de responsabilité civile décennale, n'a vocation à intervenir en garantie que pour la réparation de désordres qui, découverts après réception, et issus de vices cachés, rendent l'ouvrage impropre à sa destination ou portent atteinte à sa solidité,

Dire et juger que les pièces produites par la requérante et le rapport d'expertise judiciaire de Madame [D] ne permettent pas de considérer que ces conditions d'application sont remplies,

Rejeter les demandes de condamnation formées contre la compagnie ALLIANZ, comme injustifiées et infondées,

Rejeter la demande de fixation d'une réception judiciaire au 13 juillet 2009, en l'absence de volonté manifeste du maître d'ouvrage, de recevoir l'ouvrage,

A défaut, considérer que la réception est faite avec réserves, excluant ainsi, de faire application de la garantie décennale,

Dire et juger que la compagnie ALLIANZ n'a pas vocation à garantir la responsabilité contractuelle de Monsieur [L],

Rejeter ainsi, toute demande de condamnation formée à ce titre,

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné ALLIANZ solidairement avec Monsieur [L], à verser à Madame [K] 3 000 euros au titre des frais irrépétibles et à prendre en charge les entiers dépens,

Prononcer la mise hors de cause de la compagnie ALLIANZ,

A TITRE SUBSIDIAIRE

Rejeter les demandes indemnitaires formées tant pour la reprise des dommages matériels qu'immatériels, comme injustifiées et infondées,

En cas d'impossible condamnation au titre des dommages matériels:

- Limiter le montant de la condamnation au montant retenu par la cour au titre de la reprise des dommages qui auront été jugés comme étant de nature décennale, seule garantie mobilisable,

- Condamner Monsieur [L] à verser à la compagnie ALLIANZ, le montant de sa franchise contractuelle de 10 % du montant de l'indemnité qui aura été fixée au titre de ces dommages, avec un montant minimum de 600 euros et un maximum de 2 400 euros,

En cas d'impossible condamnation au titre des dommages immatériels:

- Dire et juger que la compagnie ALLIANZ n'a vocation à garantir un dommage immatériel que s'il est la conséquence directe d'un dommage matériel garanti,

- Dire et juger que tel n'est pas le cas du préjudice locatif allégué, ni du préjudice moral,

- Dire et juger en cas d'impossible condamnation, que celle-ci interviendra sous déduction à opérer du montant de la franchise contractuelle de Monsieur [L], qui relevant d'une garantie facultative est opposable aux tiers,

EN TOUTE HYPOTHESE

REJETER toutes demandes, fins ou conclusions contraires,

CONDAMNER Madame [K] ou tout autre succombant, à lui verser la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER Madame [K] ou tout autre succombant aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées par le RPVA le 06 novembre 2018, [W] [K], intimée, demande à la cour:

Vu les articles 1134, 1231-6, 1147, 1792-6 et 1792 alinéa 1 du code civil,

Vu les articles 699, 700, 909 et suivants du code de procédure civile,

Vu la jurisprudence,

CONFIRMER le jugement entrepris et ainsi:

Dire et juger que Monsieur [G] [L] exerçant sous l'enseigne MCM a manqué à ses obligations contractuelles,

Dire et juger Madame [K] recevable et bien fondée en son action,

Fixer à la date du 13 juillet 2009 la réception judiciaire des travaux, assortie de réserves telles qu'émises par Madame [K] aux termes des courriers recommandés qu'elle a adressés à MCM, en date du 8 juin 2009 et du 6 juillet 2009,

En conséquence,

Condamner in solidum Monsieur [G] [L] et la société ALLIANZ à lui payer au titre du préjudice matériel subi, les sommes suivantes:

- 23 065,59 euros au titre des dommages relevant de la garantie décennale,

- 9 664,76 euros au titre de la responsabilité contractuelle de Monsieur [L],

- 7 077,42 euros au titre de la perte des revenus locatifs,

REFORMER le jugement entrepris et condamner in solidum Monsieur [G] [L] et la société ALLIANZ à lui payer la somme de 30 000 euros à titre de préjudice moral,

ORDONNER la production d'intérêts de ces sommes au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 juin 2009, avec anatocisme,

Condamner in solidum Monsieur [G] [L] et la société ALLIANZ à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et

3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

Condamner in solidum Monsieur [G] [L] et la société ALLIANZ aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Julien BLOT en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante ont été régulièrement signifiées à Monsieur [G] [L], intimé défaillant, par actes des 11 juillet 2018, 08 août 2018 et 04 février 2019, transformés en procès-verbaux de recherches infructueuses (PV 659 du code de procédure civile).

L'ordonnance de clôture est intervenue le 16 décembre 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, il y a lieu de constater:

- d'une part, que dans la mesure où l'un des intimés est défaillant et n'a pas été cité à sa personne, le présent arrêt sera rendu par défaut en application des dispositions de l'article 474 alinéa 2 du code de procédure civile,

- d'autre part, qu'aucune demande de réformation des dispositions du jugement entrepris concernant [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], n'est formée, excepté sur le montant de la somme allouée à Madame [K] au titre de son préjudice moral, cette dernière réclamant désormais devant la cour la somme de 30 000 euros au titre de son préjudice moral, et sur le point de départ des intérêts assortissant l'ensemble des condamnations prononcées par le premier juge que Madame [K] demande de voir fixer à compter de la date de la mise en demeure du 8 juin 2009 (et non à compter du jugement comme l'a décidé le premier juge).

Il s'ensuit que la cour n'est saisie concernant [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], que des dispositions du jugement entrepris relatives à l'indemnisation du préjudice moral subi par Madame [K] et au point de départ des intérêts assortissant l'ensemble des condamnations prononcées par le premier juge à l'encontre de cet intimé.

Sur la demande tendant à voir prononcer la réception judiciaire

Dans les motifs du jugement entrepris, le premier juge a estimé que la réception judiciaire des travaux devait être fixée au 13 juillet 2009 (date à laquelle ses locataires ont pu rentrer dans les appartements loués par elle dans sa maison) avec les réserves contenues dans les courriers de mise en demeure adressés par elle à [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5] les 08 juin et 06 juillet 2009, mais aucune disposition relative à la réception des travaux ne figure dans le dispositif du jugement entrepris.

L'appelante critique le jugement entrepris, faisant principalement valoir qu'en l'espèce le maître d'ouvrage a clairement manifesté son refus de prendre possession des lieux, même postérieurement au 13 juillet 2009, que Monsieur [L] n'a pas été convoqué à la réception des travaux et que les courriers de mise en demeure qui lui ont été adressés visaient à lui demander d'intervenir pour finir le chantier.

Le maître d'ouvrage demande à la cour de confirmer le jugement et de fixer à la date du 13 juillet 2009 la réception judiciaire des travaux, assortie de réserves telles qu'émises par elle dans les courriers de mise en demeure adressés à MCM les 08 juin et 06 juillet 2009.

En vertu de l'article 1792-6 alinéa 1er du code civil: 'la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement.'

Pour que la réception judiciaire soit prononcée, il faut que l'ouvrage soit en état d'être reçu.

L'absence d'achèvement des travaux ne fait pas obstacle au prononcé d'une réception judiciaire dès lors que le maître de l'ouvrage a pris possession d'un immeuble en état d'être habité ou d'un ouvrage pouvant être utilisé, et l'existence de travaux de reprise n'est pas de nature à empêcher une réception avec réserves.

En l'espèce, il résulte des pièces régulièrement produites et des explications des parties:

- que par LRAR du 08 juin 2009 adressée à [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], Madame [K] lui rappelle que le lundi 1er juin, il était présent avec elle et Madame [F] (cabinet [Z] s'occupant de la location des appartements) pour une réception de ses travaux qui n'avait pu avoir lieu en raison de divers inachèvements et malfaçons affectant les deux appartements et de l'absence de l'attestation de conformité de l'installation électrique délivrée par le Consuel (pièce 8 de l'intimée),

- que par LRAR du 06 juillet 2009 adressé à [G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], Madame [K] lui rappelle la réunion du 26 juin 2009 au cours de laquelle ont encore été relevés divers inachèvements et malfaçons affectant les deux appartements et l'absence d'alimentation électrique des logements (pièce 9 de l'intimée),

- que les locataires sont rentrés dans les appartements pour y habiter conformément aux baux signés les 24 et 25 avril 2009 le 13 juillet 2009 (pièce 35 de l'intimée).

Comme l'a exactement estimé le premier juge, il se déduit de l'ensemble des éléments versés aux débats que l'ouvrage était en état d'être reçu le 13 juillet 2009, dès lors que les locataires ont pu rentrer dans les lieux et y habiter, les réserves formulées par le maître d'ouvrage étant relatives à des inachèvements, à des défauts de conformité et à des désordres ne mettant pas en péril la solidité de l'immeuble et n'empêchant pas son utilisation.

Contrairement à ce que soutient l'assureur, il résulte des LRAR susvisées que

[G] [L], artisan exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], avait été précédemment convoqué en vue de lister les travaux restant à effectuer pour terminer le chantier et permettre une réception, laquelle n'a pas pu avoir lieu de manière expresse, seulement en raison de l'abandon du chantier par Monsieur [L], le maître d'ouvrage n'ayant cessé de l'inciter à terminer les travaux pour permettre à ses locataires d'entrer dans les lieux devant initialement être loués à compter du 11 mai 2009.

Il s'ensuit qu'il y a lieu de faire droit à la demande du maître d'ouvrage tendant à voir fixer la réception judiciaire des travaux au 13 juillet 2009 assortie des réserves figurant dans les courriers de mise en demeure adressés à MCM les 08 juin et 06 juillet 2009, soit:

Pour le T3 du RDC:

Reprendre le plan de travail de la cuisine car de nombreux coups y sont visibles

Le plan de travail a été peint mais non traité

Les portes du sous-évier sont mal fixées

La porte palière de l'appartement a, au niveau du vitrail, un défaut

Le cumulus situé dans le cellier (sous escalier) est mal fixé

Dans la salle de bain il manque le sèche-serviette

Les coupes de la faïence de la salle de bain n'ont pas été réalisées dans les règles de l'art

Le compteur électrique chantier est toujours présent dans une des chambres

Manque clés de chaque porte du logement

Le dessous de la fenêtre (côté extérieur) de la cuisine non fini (manque perement)

Le coin de la cheminée refaite mais non teintée

Pour le T3 du 1er étage:

Reprendre le plan de travail de la cuisine car de nombreux coups y sont visibles

Le plan de travail a été peint mais non traité

Fuite relevée sous le plan de travail de la cuisine

Le meuble haut de la cuisine abîmé sur le côté lors de la pose

Ancien conduit de hotte directement ouvert en toiture

Dans la salle de bain il manque le sèche-serviette

Les coupes de la faïence de la salle de bain n'ont pas été réalisées dans les règles de l'art

La porte palière de l'appartement a, au niveau du vitrail, un défaut

Le compteur électrique chantier est toujours présent dans une des chambres

Manque les clés de chaque porte du logement

Fil antenne TV accroché dans le conduit de cheminée

Manque auvent extérieur au-dessus de la porte d'entrée

Le robinet extérieur d'eau présente une fuite importante [...]

Les séparations en bois dans les jardins ne sont pas terminées et non traitées

Le portillon d'entrée pour le RDC n'a pas été changé [...]

problème d'évacuation des WC du 1er étage dans l'évier du RDC et pour chaque appartement

Raccorder les appartements au réseau téléphonique

Changer les portes d'entrée qui présentent un défaut sur la partie vitrée,

Celle du premier étage est voilée en partie haute et force à la fermeture

Les fenêtres sont à régler car certaines ont du jeu

Dans la cuisine du premier étage vous avez fixé une grille très peu esthétique et vous nous avez confirmé que la sortie en toiture n'était pas à boucher car conforme en cas de forte pluie

Pour chaque cuisine vous devez étanchéifier les plans de travail et jointer les éviers

Faire les caches pour chaque compteur

Dans les salles de bains, les portes sont voilées, manque des serrures de fermeture, les lavabos ne sont pas fixés sur les meubles, les sèches serviettes sont à installer

La fuite d'eau (déjà signalée) est à réparer dans la salle de bain du premier étage (nous vous rappelons que l'étagère du meuble lavabo est gondolée car elle a pris l'eau)

Et, concernant l'appartement du premier étage:

Installer la sonnette au portail

installer la main courante à la montée d'escalier

Réparer les marches cassées de cette montée d'escalier

Réparer la fuite d'eau au compteur extérieur

Reprendre les fixations de la porte de garage et mettre les fixations plus longues de chaque côté de cette dernière

Peindre le portail

Reprendre les fixations du portail car ne se ferme pas correctement et il sera impossible d'y installer l'automatisme

installer l'automatisation du portail

Revoir l'électricité du garage.

En conséquence, le jugement entrepris doit être ici confirmé, sauf à ajouter que la réception judiciaire est prononcée à la date du 13 juillet 2009 assortie des réserves figurant dans les courriers de mise en demeure adressés à MCM les 08 juin et 06 juillet 2009 dont la liste est reprise ci-dessus.

Sur les désordres et la garantie de l'assureur

L'assureur fait exactement valoir:

- que les désordres réservés à la réception ne peuvent être qualifiés de décennaux, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge,

- que l'expert judiciaire n'a pas pu constater la réalité des désordres dénoncés par le maître d'ouvrage puisqu'il a indiqué en page 4 de son rapport 'à ce jour (visite du 28 juin 2012) tous les griefs ont été purgés par le demandeur, nous précisions qu'à ce jour aucun désordre n'est visible',

- que l'expert a seulement constaté les inachèvements suivants:

absence de main-courante sur le mur de façade de l'escalier d'accès au logement du 1er étage,

manque une porte du sous-évier dans le T3 du RDC

le cumulus placé dans le cellier est mal fixé

il manque 4 butées de porte,

ainsi qu'un choc sur le meuble haut de la cuisine (abîmé lors de la pose),

- que l'expert n'a pas pu confirmer que les désordres allégués par le maître d'ouvrage provenaient effectivement des travaux réalisés par Monsieur [L] et qu'ils étaient effectivement apparus après la réception.

Contrairement à ce que soutient Madame [K], il ne résulte pas des pièces produites, dont le rapport d'expertise de protection juridique établi le 18 juin 2010 (pièce 35), que les dégâts des eaux sont apparus postérieurement à la réception judiciaire des travaux exécutés par Monsieur [L] et que les infiltrations par les menuiseries et la couverture lui sont effectivement imputables, puisque ce rapport fait état d'une date d'apparition des désordres au 1er juin 2009 (page 5), soit antérieurement à la date de la réception fixée au 13 juillet 2009, et mentionne l'intervention de plusieurs professionnels sur l'ouvrage en se contentant de relater leurs dires (Monsieur [I] plombier, Monsieur [S] électricien), tout en faisant état de divers dégâts des eaux sans aucune précision sur les circonstances et sur les périodes au cours desquelles ils se seraient produits, étant en outre relevé que les causes de ces désordres ne sont pas précisément déterminées et qu'il n'est fourni aucune indication sur le montant des travaux réparatoires à envisager.

Or, en l'espèce Madame [K] a fait effectuer les travaux de reprise des désordres avant que l'expert judiciaire, pourtant désigné à sa demande, puisse mener ses investigations destinées précisément à caractériser la nature des désordres, à en déterminer l'origine et à fournir tous éléments permettant de déterminer les responsabilités, ainsi qu'à préciser le coût des travaux de nature à y remédier (pièce 5 de l'appelante).

En l'état, l'assureur est fondé à soutenir que sa garantie décennale n'est pas mobilisable puisque les conditions d'application de la garantie décennale ne sont pas réunies dans la mesure où une partie des désordres dont il est sollicité réparation ont été réservés à la réception, qu'il n'est pas démontré que les dégâts des eaux et les infiltrations sont survenus postérieurement à la réception judiciaire fixée au 13 juillet 2009 comme l'affirme le maître d'ouvrage, ni que ces désordres sont effectivement imputables à son assuré.

En outre, c'est à tort que le premier juge a estimé que l'assureur devait être condamné in solidum avec son assuré à régler les travaux de reprise des désordres réservés de nature contractuelle, les pertes de revenus locatifs et les dommages et intérêts alloués au maître d'ouvrage en réparation de son préjudice moral puisqu'il résulte des conditions générales applicables à la police souscrite par Monsieur [L]:

- que la garantie B responsabilité civile de l'entreprise s'applique s'agissant des conséquences pécuniaires de la responsabilité civile que l'entrepreneur encourt en raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés à autrui, y compris à ses clients, sous réserves des cas d'exclusion prévus aux points 3.4 et 3.5, l'assureur ne garantissant pas les dommages (ou les indemnités compensant ces dommages) aux ouvrages ou aux travaux exécutés par l'assuré, ainsi que les dommages immatériels qui leur sont consécutifs (point 3.5.1 page 17),

- que la garantie E 'garanties complémentaires à la responsabilité décennale' s'applique seulement pour les travaux réalisés en tant que sous-traitant (point 6.1), pour la garantie de bon fonctionnement des éléments d'équipement de l'ouvrage (point 6.2), pour les dommages intermédiaires (point 6.3), et pour les dommages consécutifs à ces trois garanties outre la garantie décennale (page 29).

Il se déduit de l'ensemble de ces stipulations qu'aucune des garanties souscrites par Monsieur [L] n'est mobilisable en l'espèce, de sorte que le jugement entrepris doit être réformé et la SA ALLIANZ IARD mise hors de cause.

Sur l'appel incident du maître d'ouvrage

Le premier juge a exactement apprécié le préjudice moral subi par Madame [K], de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a condamné Monsieur [L] à lui régler la somme de 2 000 euros, étant observé que les certificats médicaux émanant du docteur [X], médecin généraliste, concernant la prescription de divers médicaments entre 2011 et 2015, sont insuffisants à établir que celle-ci est directement consécutive à l'intervention de Monsieur [L], de sorte que le surplus de la demande à ce titre doit être rejeté.

En revanche, Madame [K] est fondée à obtenir la condamnation de Monsieur [L] à régler l'ensemble des sommes mises à sa charge, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 juin 2009, avec anatocisme, et non à compter du jugement entrepris comme l'a décidé le premier juge.

En conséquence, le jugement entrepris doit être ici partiellement infirmé.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement entrepris doit être partiellement infirmé en ce que l'assureur ALLIANZ a été condamné aux dépens et à régler à Madame [K] une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant principalement, [G] [L], exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], doit être condamné aux dépens d'appel.

Aucune considération d'équité ne justifie d'allouer à l'assureur une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais qu'il a dû exposer en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par défaut, par arrêt mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Dans les limites de l'appel,

INFIRME partiellement le jugement entrepris en ce que le premier juge a condamné la SA ALLIANZ IARD à payer à [W] [K] les sommes suivantes:

- 23 065,69 euros au titre des travaux de reprise des désordres de nature décennale,

- 9 664,76 euros au titre des travaux de reprise des désordres réservés de nature contractuelle,

- 7 077,42 euros en réparation de la perte de revenus locatifs pour les périodes du 11 mai au 13 juillet 2009 et du 1er mai 2010 au 1er octobre 2011,

- 2 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

- rappelé que ces sommes produiront, de droit, intérêts au taux légal à compter du jugement,

- 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

ainsi qu'aux dépens comprenant les frais d'expertise,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Et, y ajoutant,

FIXE la réception judiciaire des travaux au 13 juillet 2009 assortie des réserves figurant dans les courriers de mise en demeure adressés à MCM les 08 juin et 06 juillet 2009, reprises en pages 9 et 10 du présent arrêt (ATTENTION VERIFIER NUMEROTATION DES PAGES EN FONCTION PAGINATION DEFINITIVE)

DIT que les garanties souscrites auprès de la SA ALLIANZ IARD par [G] [L], exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], ne sont pas mobilisables,

En conséquence,

MET HORS DE CAUSE la SA ALLIANZ IARD,

REJETTE le surplus de la demande formée par [W] [K] au titre de son préjudice moral,

DIT que les condamnations prononcées à l'encontre de [G] [L], exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], soit:

- 23 065,69 euros au titre des travaux de reprise des désordres de nature décennale,

- 9 664,76 euros au titre des travaux de reprise des désordres réservés de nature contractuelle,

- 7 077,42 euros en réparation de la perte de revenus locatifs pour les périodes du 11 mai au 13 juillet 2009 et du 1er mai 2010 au 1er octobre 2011,

- 2000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral,

- 3 000 euros au titre des frais irrépétibles

seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 8 juin 2009, avec anatocisme,

REJETTE les autres demandes au titre des frais irrépétibles,

CONDAMNE [G] [L], exerçant sous l'enseigne MILLENIUM CONCEPT [Localité 5], aux dépens d'appel et en ordonne la distraction.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Mars 2023,

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/08898
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;18.08898 ?
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