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28/03/2023 | FRANCE | N°19/14857

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 28 mars 2023, 19/14857


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2023



N° 2023/ 119













Rôle N° RG 19/14857 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE5JX







[B] [N]





C/



[F] [P]

[G] [P]

S.C.P. EZAVIN-THOMAS

S.C.P. BTSG 2

SCI MOUGINS MAISONS

S.C.P. COLAS DOGLIANIGRETCHICHKINE-KURGANSKY





















Copie exécutoire délivrée

le

:

à :

Me Thimothée JOLY

Me Jean-Marc SZEPETOWSKI

Me Paul GUEDJ

Me Pasquale CAMINITI









Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Septembre 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le n° .





APPELANT



Monsieur [B] [...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 28 MARS 2023

N° 2023/ 119

Rôle N° RG 19/14857 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BE5JX

[B] [N]

C/

[F] [P]

[G] [P]

S.C.P. EZAVIN-THOMAS

S.C.P. BTSG 2

SCI MOUGINS MAISONS

S.C.P. COLAS DOGLIANIGRETCHICHKINE-KURGANSKY

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Thimothée JOLY

Me Jean-Marc SZEPETOWSKI

Me Paul GUEDJ

Me Pasquale CAMINITI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 12 Septembre 2019 enregistré (e) au répertoire général sous le n° .

APPELANT

Monsieur [B] [N],

né le 25 mars 1966 à [Localité 8]

demeurant [Adresse 6] (Royaume-Uni)

représenté par Me Thimothée JOLY de la SCP PIETRA & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Cyril SABATIE, avocat au barreau de NICE substitué par Me Krystel MALLET, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Monsieur [F] [P]

né le 27 Novembre 1941 à [Localité 9] (POLOGNE),

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Jean-Marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de NICE

Monsieur [G] [P]

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Jean-Marc SZEPETOWSKI, avocat au barreau de NICE

S.C.P. EZAVIN-THOMAS Administrateur judiciaire prise en la personne de Me Nathalie THOMAS en qualité d'administrateur judiciaire de la SCP GERARD COLAS-ALAIN DOGLIANI-ALEXANDRE GRETCHICHKINE-KURGANSKI, notaires associés

demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Hélène BERLINER, avocat au barreau de NICE substitué par Me Philippe DUTERTRE, avocat au barreau de NICE

S.C.P. BTSG prise en la personne de Me GASNIER Denis es qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la SCP GERARD COLAS-ALAIN DOGLIANI- ALEXANDRE GRETCHIKINE KURGANSKY

demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Hélène BERLINER, avocat au barreau de NICE substitué par Me Philippe DUTERTRE, avocat au barreau de NICE

S.C.P. COLAS DOGLIANI-KURGANSKY Notaires poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité au siège social

demeurant [Adresse 10]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, et ayant pour avocat plaidant Me Hélène BERLINER, avocat au barreau de NICE substitué par Me Philippe DUTERTRE, avocat au barreau de NICE

SCI MOUGINS MAISONS prise en la personne de son représetant légal domicilié es qualité audit siège

demeurant [Adresse 4]

représentée et assistée par Me Pasquale CAMINITI, avocat au barreau de NICE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 20 Février 2023 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur BRUE, président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

Madame Louise DE BECHILLON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Mars 2023,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Le 7 août 2014, M.[B] [N] a formulé une offre d'achat pour une propriété comprenant un cabanon et un terrain attenant situé [Adresse 7]), appartenant à M. [F] [P] et M. [G] [P], pour le prix de 420'000 €, porté par la suite à 500'000 €, acceptée par les vendeurs le 12 août 2014, sous réserve du versement de la somme de 10 % du prix de vente le jour de la signature du compromis devant intervenir au plus tard, le 13 août 2014.

Le 13 août 2014, un projet de compromis a été transmis au notaire, prévoyant la signature de l'acte au plus tard le 15 octobre 2014. Le 14 septembre 2014, le notaire des vendeurs a indiqué que l'offre était caduque à défaut de signature du compromis dans le délai prévu.

M. [F] [P] et M. [G] [P] ont vendu le bien à la SCI Mougins Maisons par acte authentique du 5 septembre 2014.

Vu les assignations des 21 et 25 août 2014, par lesquelles M.[B] [N] a fait citer M. [F] [P] et M. [G] [P], devant le tribunal de grande instance de Nice, en réalisation forcée de la vente.

Vu les assignations des 24 et 26 février 2015, par lesquelles M.[B] [N] a fait citer la SCI Mougins Maisons et la SCP Colas Dogliani Gretchichkine-Kurgansky, notaires, devant le même tribunal, pour obtenir leur condamnation à lui payer chacun la somme de 25'000 € à titre de dommages-intérêts.

Vu le jugement rendu le 12 septembre 2019, par cette juridiction ayant statué ainsi qu'il suit :

Déboute M.[B] [N] de l'ensemble de ses demandes visant à voir déclarer parfaite la vente résultant de la lettre d'intention d'achat contresignée en date du 12 août 2014 ;

Déboute M.[B] [N] de sa demande de condamnation de la SCI Maisons Mougins à des dommages et intérêts ;

Déboute M.[B] [N] de sa demande de dommages et intérêts dirigée contre la SCP Colas Dogliani Gretchichkine-Kurgansky

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

Condamne M.[B] [N] à payer à M. [G] [P] et à M. [F] [P] la somme de 1 500 euros, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne M.[B] [N] à payer à la la SCI Mougins Maisons la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne M.[B] [N] à payer à la la SCP Colas Dogliani Gretchichkine-Kurgansky la somme de 1.500 euros, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute M.[B] [N] de sa demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure

civile ;

Condamne M.[B] [N] aux entiers dépens de la présente instance, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats qui en font la demande.

Vu la déclaration d'appel du 23 septembre 2019, par M.[B] [N].

Vu l'assignation en intervention forcée, délivrée à l'égard de la SCP Ezavin Thomas, prise en la personne de Me Nathalie Thomas, administrateur judiciaire de la SCP Colas Dogliani Gretchichkine-Kurgansky et à l'égard de la SCP BTSG PACA, prise en la personne de Me Denis Gasnier, mandataire judiciaire de la SCP Colas Dogliani Gretchichkine-Kurgansky.

Vu l'intervention volontaire de la SCP BTSG, désignée comme administrateur judiciaire.

Vu les conclusions transmises le 6 janvier 2023, par l'appelant.

Il estime qu'en l'état de l'acceptation de la lettre d'intention d'achat, sans condition de prêt par les vendeurs représentés par l'un d'entre eux, la vente est parfaite en application de l'article 1583 du Code civil, alors que la somme représentant 10 % du prix avait été versée entre les mains du notaire et rappelle que la loi n'érige plus la publication en condition de validité de l'acte.

M.[B] [N] considère que la date de signature du compromis n'était pas une condition déterminante de la validité de l'acte.

Il invoque l'application de l'article 1599 du Code civil, selon lequel nul ne peut vendre la chose d'autrui, pour exercer une action en revendication, précisant que l'assignation en vente forcée a été publiée le 26 août 2014, conformément aux dispositions de l'article 30, 1° du décret du 4 janvier 1955, antérieurement à la signature de l'acte de vente au profit de la SCI Mougins Maisons. Il ajoute que l'acquéreur qui a poursuivi l'acquisition d'un bien qu'il savait déjà vendu à un tiers et revendiqué par ce dernier, ne peut se prévaloir à son profit des règles de la publicité foncière, alors qu'il a sciemment signé un acte en fraude de ses droits.

Selon M.[B] [N], la responsabilité civile du notaire est engagée, dès lors que l'assignation en vente forcée lui a été notifiée le 27 août 2014. Il souligne qu'il n'appartient pas au notaire de contester la recevabilité des demandes au regard de la publication de l'assignation en vente forcée qui ne concerne que les vendeurs et l'acquéreur et que celle-ci n'est que facultative par application de l'article 37 du décret du 4 janvier 1955. Il ajoute que le notaire aurait dû refuser d'instrumenter un acte qui lui paraît dressé en fraude des droits des tiers.

Vu les conclusions transmises le 19 janvier 2023, par M. [F] [P] et M. [G] [P].

Ils rappellent avoir expressément subordonné leur acceptation de l'offre d'achat à la signature d'un compromis de vente, au plus tard le 13 Août 2014 et que le caractère déterminant de cet élément pour leur consentement résulte du fait qu'il a été rajouté de façon manuscrite au moment de l'acceptation de l'offre et paraphé par les deux parties ce qui suffit à établir qu'il est entré dans le champ contractuel. Ils précisent qu'à défaut de signature dans ce délai, la convention est caduque du fait de l'acquéreur qui n'a donné son accord que le 14 août 2014, pour la signature de l'acte définitif au plus tard le 20 septembre 2014.

M. [F] [P] et M. [G] [P] font valoir que la publication d'une assignation en vente forcée et son défaut de renouvellement n'étaient pas de nature à rendre le bien indisponible et à permettre à l'appelant de se prévaloir d'une quelconque priorité de publication foncière.

Ils affirment que leur bonne foi ne peut être remise en cause, dès lors que les accords intervenus avec M.[B] [N] étaient caduques à la signature de l'acte authentique de vente au profit de la SCI Mougins Maisons.

Vu les conclusions transmises le 20 mars 2020, par la SCI Mougins Maisons.

Elle soutient que la vente ne peut être déclarée parfaite sans l'accord des parties et la réalisation des conditions sur les éléments essentiels et déterminants de leur consentement et qu'en l'espèce il avait été expressément convenu, non seulement le versement de la somme de 10 % du prix, mais surtout que le compromis devait être signé le 13 août 2014 au plus tard, ce qui n'a pas été le cas.

La SCI Mougins Maisons expose que sa bonne foi ne peut être remise en cause, dès lors qu'à la signature du compromis de vente le 14 août 2014, elle n'avait pas connaissance de l'existence des accords conclus entre le vendeur et M.[B] [N] et que la mauvaise foi du tiers acquéreur qui connaît l'existence de la première cession non publiée est sans conséquence sur son droit de propriété. Elle observe la publication de l'assignation en réalisation de vente est postérieure à la signature du compromis.

Vu les conclusions transmises le 22 mars 2022, par la SCP Colas Dogliani Gretchichkine-Kurgansky la SCP Ezavin Thomas et la SCP BTSG.

Elles font valoir qu'en application de l'article 30-1 du décret du 4 janvier 1955 , un avant-contrat non publié bénéficiant à un acquéreur ne fait pas obstacle à la publication d'une vente postérieure au profit d'un tiers et que la mauvaise foi du tiers acquéreur qui connait l'existence de la première cession non publiée est sans conséquence sur son droit de propriété. Elles ajoutent :

-qu'il n'apparait pas qu'ait été publiée avec cette assignation, l'offre d'achat émise par M. [N] portant la mention d'acceptation des vendeurs et que la publication n'apparait ainsi

pas régulière en application de l'article 37-2 du décret du 4 Janvier 1955.

-que la publication d'une assignation sur un bien immobilier a pour seul effet d'informer les tiers de l'existence de la revendication d'un droit sur ledit bien.

Les intimées soulignent que le notaire qui a connaissance d'une première vente non publiée ne peut refuser d'instrumenter une seconde vente lorsqu'il est requis pour ce faire, alors même que cette situation ferait courir des risques particuliers à l'une des parties, étant précisé que l'acte mentionne l'existence de l'assignation et des conseils donnés sur ce point aux parties.

Le notaire estime n'avoir ainsi commis aucun manquement en régularisant le 5 septembre 2014 la vente au profit de la SCI Mougins Maisons.

Il conclut subsidiairement à l'absence de lien de causalité entre la faute alléguée à son encontre qui relève en fait de la responsabilité des seuls vendeurs, ainsi qu'à l'absence de preuve de l'existence d'une perte de chance, l'acquéreur ne démontrant pas qu'il avait les moyens de régler le prix, ni que cette acquisition d'un cabanon pour un montant de 500'000 €constituait réellement une bonne affaire.

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 24 janvier 2023.

SUR CE

Il convient d'observer sur la recevabilité des demandes de M.[B] [N] :

Que celle-ci n'est pas remise en cause par les autres parties dans leurs écritures.

Qu'en application de l'article 37 du décret numéro 55-22 du 4 janvier 1955 la demande en déclaration de vente parfaite peut être publiée, mais qu'il ne s'agit pas d'une obligation.

Que la publication de l'assignation en déclaration de vente parfaite, ne comporte pas en annexe la lettre portant l'offre et de l'acceptation de la vente et ne reproduit pas littéralement ce document.

Que la publication de la demande en annulation de la vente intervenue entre M. [F] [P] et M. [G] [P] et la SCI Mougins Maisons, telle que prévue par l'article 28 n'est pas justifiée.

Aux termes de l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Si selon l'article 1583 du Code civil, la vente est parfaite entre les parties et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée, ni le prix payé, encore faut-il que les principales modalités définies par les parties, notamment ce qui concerne la date de la signature de l'avant-contrat de vente soient respectées.

La lettre d'intention d'achat de M.[B] [N] datée du 7 août 2014, acceptée le 12 août 2014 par le représentant des vendeurs porte le descriptif et les références cadastrales du bien immobilier concerné, ainsi que le prix de 500'000 €, incluant les honoraires de négociation de

20'000 €et précise que la vente sera notamment soumise à la condition suspensive du versement de la somme de 10 % du prix de vente le jour de la signature dudit compromis au plus tard le 13 août 2014.

La date de signature du compromis a été précisée par mention manuscrite paraphée par les parties, révélant ainsi son caractère déterminant.

Il doit être rappelé sur ce point que le seul versement entre les mains du notaire de la somme de 10 % du prix dans le délai requis qui n'est paer ailleurs pas justifié, ne peut être considéré comme suffisant.

Les échanges de courriers électroniques intervenus dans la journée du 13 août 2014 entre l'agent immobilier et l'étude notariale des vendeurs révèlent que les parties n'avaient pas encore trouvé un accord sur la date butoir de réitération de la vente par acte authentique devant être mentionnée dans le compromis;

Ainsi dans un message de leur notaire du 13 août 2014 17h45, il apparaît que les vendeurs ont refusé de reporter cette date au 15 octobre 2014, comme le proposait M.[B] [N] exigeant que la vente intervienne au plus tard le 12 septembre 2014.

Par message du 14 août 2014 à 10h20 la notaire des vendeurs a indiqué que l'offre d'achat était désormais caduque à défaut d'accord des parties.

Par message du 14 août 2014 à 10h43 le représentant de l'acquéreur proposait encore une signature au plus tard le 12 octobre 2014.

Dans son courrier électronique adressé à l'agence immobilière le 14 août 2014 à 13 heures 41, M. [F] [P] a indiqué ne pas accepter la date de signature de l'acte authentique proposée par l'acheteur, le 12 octobre 2014, au lieu de la date du 12 septembre 2014 et que l'offre d'achat était périmée depuis la veille et ne pourra trouver de suite à défaut d'accord entre les parties sur les modalités de la vente.

Par message du 14 août 2014 à 16h58, le représentant de l'agence, a transmis une proposition de signature par M.[B] [N] le 20 septembre 2014 et la signature d'un compromis sur cette base le lendemain, 15 août 2014.

Il convient de constater au vu de ces éléments que l'offre formée par M.[B] [N] est caduque depuis le 13 août 2014 à minuit, dès lors que le compromis de vente n'a pas été signé par les parties ce jour-là, à défaut d'accord des parties sur la fixation de la date de réitération par acte authentique.

La demande tendant à voir ordonner la perfection de la vente entre les consorts [P] et M.[B] [N] ne peut donc prospérer.

Il y a lieu de constater que la lettre d'intention d'achat, portant l'acceptation des vendeurs datée du 12 août 2014 n'a fait l'objet d'aucune publication auprès du service de la publicité immobilière territorialement compétent, dans les conditions prévues par l'article 37-2 2° du décret du 4 janvier 1955.

Elle n'était donc pas opposable aux tiers.

La publication d'une assignation en déclaration de vente parfaite n'est pas de nature à rendre le bien indisponible, d'autant plus qu'elle ne comportait pas la retranscription, ni la copie de la lettre d'intention d'achat accepté par les vendeurs et ne confère à son auteur aucune priorité sur le droit de propriété, tant que la question n'a pas été tranchée par l'autorité judiciaire.

Elle n'a par ailleurs pas été prorogée au-delà d'un délai de trois ans.

Par ailleurs la connaissance par l'acquéreur de l'existence d'une première cession non publiée est sans conséquence sur la validité de la publication de la seconde cession.

De même, la mauvaise foi du tiers acquéreur qui connaît l'existence de la première cession non publiée n'a pas d'incidence sur son droit de propriété.

Tel est le cas en l'espèce, l'acte de vente à la SCI Mougins Maisons mentionnant l'assignation

délivrée par M.[B] [N] en déclaration de vente forcée.

Dans ces conditions, il ne peut être fait droit à la demande d'annulation de la vente intervenue le 5 septembre 2014 entre M.[F] [P] et M.[G] [P] et la SCI Mougins Maisons.

La responsabilité civile délictuelle du notaire ne peut être engagée qu'à charge pour celui qui l'invoque d'apporter la preuve de l'existence d'une faute professionnelle.

Le notaire ne peut refuser d'instrumenter la vente, dès lors que la promesse synallagmatique consentie auparavant à un tiers n'a pas été publiée, quand bien même il en aurait eu connaissance, dès lors qu'elle était inopposable aux tiers.

Il ne peut refuser d'instrumenter une convention au seul motif qu'elle pourrait faire courir des risques particuliers à l'une des parties, étant rappelé que la connaissance d'une première promesse de vente non publiée et même la mauvaise foi du second acquéreur n'ont pas d'influence sur la validité de l'acte ultérieur régulièrement publié.

L'acte contesté évoque de manière explicite la publication d'une assignation tendant à voir déclarer la vente parfaite au profit de M.[B] [N];

Les parties ont par ailleurs signé un acte de reconnaissance de conseils donnés, en présence de leurs conseils respectifs et ainsi décidé de poursuivre l'opération à leurs risques et périls.

Il en résulte que la preuve de l'existence d'une faute professionnelle commise par le notaire n'est pas rapportée;

Pour les mêmes motifs, la faute de la SCI Mougins Maisons, acquéreur qui a signé un compromis valant vente parfaite le 14 août 2014, soit avant même la publication de l'assignation en déclaration de vente parfaite réalisée par M.[B] [N], n'est pas caractérisée.

Il n'y a pas lieu de faire application en l'espèce de l'article 1198 nouveau du Code civil, introduisant la notion de bonne foi, au regard des règles de la publication foncière, dès lors qu'au regard des considérations qui précèdent il n'apparaît pas que la mauvaise foi de l'acquéreur soit établie.

Aucune pièce ne permet de démontrer l'existence d'une collusion frauduleuse entre le vendeur et le second acquéreur dans le but d'évincer M.[B] [N].

M.[B] [N] ne justifie pas l'existence d'un préjudice direct réel et certain, lié à l'impossibilité de régulariser l'acquisition qu'il envisageait.

Les demandes en dommages-intérêts formées à l'encontre de la SCI Mougins Maisons et du notaire sont, en conséquence, rejetées.

Le jugement est confirmé.

Il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

La partie perdante est condamnée aux dépens, conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M.[B] [N] à payer à la SCI Mougins Maisons, la somme de 3 000 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne à payer à M. [F] [P] et M. [G] [P], ensemble, la somme de 3 000 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne M.[B] [N] à payer à la SCP Colas Dogliani Gretchichkine-Kurgansky, la SCP Ezavin Thomas et la SCP BTSG , ensemble, la somme de 3 000 €, en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne M.[B] [N] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-1
Numéro d'arrêt : 19/14857
Date de la décision : 28/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-28;19.14857 ?
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