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27/03/2023 | FRANCE | N°22/00605

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 référés, 27 mars 2023, 22/00605


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés





ORDONNANCE DE REFERE

du 27 Mars 2023



N° 2023/ 147





Rôle N° RG 22/00605 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKIKL







S.A.S. LE CHASTELLARES





C/



[R] [H]





























Copie exécutoire délivrée





le :





à :



- Me Laure PERRET



- Me Elie

MUSACCHIA





Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 25 Octobre 2022.





DEMANDERESSE



S.A.S. LE CHASTELLARES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social, demeurant [Adresse 3]



représentée par Me Laure PERRET, avocat au barreau de GRASSE substi...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés

ORDONNANCE DE REFERE

du 27 Mars 2023

N° 2023/ 147

Rôle N° RG 22/00605 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKIKL

S.A.S. LE CHASTELLARES

C/

[R] [H]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Laure PERRET

- Me Elie MUSACCHIA

Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 25 Octobre 2022.

DEMANDERESSE

S.A.S. LE CHASTELLARES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Laure PERRET, avocat au barreau de GRASSE substituée par Me Alexandre DE VITA, avocat au barreau de NICE

DEFENDERESSE

Madame [R] [H], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Emmanuel PARDO, avocat au barreau de NICE substitué par Me Baptiste BERMONDY, avocat au barreau de NICE, Me Elie MUSACCHIA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

* * * *

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 02 Janvier 2023 en audience publique devant

Véronique NOCLAIN, Président,

déléguée par ordonnance du premier président.

En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile

Greffier lors des débats : Manon BOURDARIAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2023.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 27 Mars 2023.

Signée par Véronique NOCLAIN, Président et Manon BOURDARIAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par acte notarié du 12 novembre 1987, les époux [E] et [W], aux droits desquels est venue madame [R] [H] en qualité d'usufruitière, ont consenti à la SAS LE CHASTELLARES un bail commercial sur des locaux dépendant d'une copropriété sise à [Localité 2] sur la commune de [Localité 4], et ce, pour une durée de deux années à compter du 12 novembre 1987, reconduit à deux reprises avec avenants modifiant le loyer.

Par acte d'huissier signifié le 11 septembre 2021, madame [R] [H] a fait délivrer à la société LE CHASTELLARES un commandement de payer les loyers et charges impayés pour la somme de 18.628 euros; ce commandement porte clause résolutoire.

La SAS LE CHASTELLARES a réglé une partie des sommes dues.

Au motif que le solde dû n'a pas été réglé dans les délais requis et que la clause résolutoire du contrat de bail est acquise, madame [R] [H] a fait assigner la SAS LE CHASTELLARES devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice par acte du 17 novembre 2021 aux fins d'expulsion et paiement du solde locatif dû.

Par ordonnance contradictoire du 6 octobre 2022, le juge des référés a notamment

-constaté la résiliation du bail au 11 octobre 2021;

-ordonné l'expulsion de la SAS LE CHASTELLARES à compter de la signification de la décision et après délivrance d'un commandement d'avoir à quitter les lieux;

-condamné la SAS LE CHASTELLARES à payer à madame [R] [H] la somme de 4.635,33 euros à titre d'indemnité mensuelle d'occupation jusqu'à libération des lieux;

-condamné la SAS LE CHASTELLARES à payer à madame [R] [H] la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.

Par déclaration du 19 octobre 2022, la SAS LE CHASTELLARES a interjeté appel de la décision sus-dite.

Par acte d'huissier du 25 octobre 2022 reçu et enregistré le 3 novembre 2022, l'appelante a fait assigner madame [R] [H] devant le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile aux fins d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance de référé déférée et condamner la défenderesse à lui verser une indemnité de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.

La demanderesse a soutenu ses prétentions et moyens repris dans des écritures signifiées le 28 décembre 2022 à la partie défenderesse. Elle a confirmé ses demandes initiales.

Par écritures précédemment notifiées à la demanderesse le 22 novembre 2022 et maintenues lors des débats, madame [R] [H] a demandé de rejeter les prétentions de la SAS LE CHASTELLLARES et de condamner cette dernière à lui verser une indemnité de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles et aux dépens.

Il sera renvoyé aux écritures des parties pour un examen complet des moyens soutenus.

MOTIFS DE LA DECISION

En application de l'article 514-3 du code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de droit de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

La recevabilité de la demande

Pour la recevabilité de leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire, les demandeurs doivent faire la preuve qu'ils ont présenté en 1ère instance des observations sur l'exécution provisoire ou que l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

En l'espèce, la décision est une ordonnance de référé, or, le juge des référés ne peut écarter l'exécution provisoire de sa décision, même si cela lui est demandé; la condition de recevabilité de l'article 514-3 précité obligeant le demandeur à l'arrêt de l'exécution provisoire à faire au préalable des observations en 1ère instance sur l'exécution provisoire n'est donc pas opérante; la demande d'arrêt de l'exécution provisoire est donc recevable, même si la demanderesse n'a présenté aucune observation en 1ère instance sur l'exécution de la décision.

Le bien-fondé de la demande

Pour le bien-fondé de leur demande, la demanderesse doit faire la démonstration qu'il existe des moyen sérieux d'annulation ou de réformation du jugement déféré et que l'exécution immédiate du jugement risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives, ces deux conditions étant cumulatives.

Au titre de l'existence de moyens sérieux de réformation ou d'annulation de la décision déférée, la SAS LE CHASTELLARES expose que :

- la bailleresse poursuit le paiement de loyers et charges dûs en période de fermeture administrative et de restrictions liées à la crise sanitaire ; pendant cette période, elle a subi une baisse colossale de 50% de son chiffre d'affaires; le commandement de payer délivré au titre de ces impayés encourt la nullité au regard des dispositions de l'article 14 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 qui tend à protéger les preneurs de locaux commerciaux ou professionnels affectés par une décision de fermeture administrative ou par des restrictions sanitaires ;

-elle conteste l'exigibilité du montant des sommes dues en période crise sanitaire; au surplus, au jour où le juge des référés a statué, elle avait réglé l'intégralité de l'arriéré réclamé ; elle souhaite invoquer la perte de la chose louée, la force majeure et l'exécution de ses obligations contractuelles de bonne foi dans ce contexte de crise sanitaire ;

-elle a réalisé récemment des investissements d'un montant de 49.000 euros pour obtenir un nouveau classement hôtelier, ce qui va accroitre son attractivité et sa rentabilité ;

-au jour du présent référé, elle est à jour de ses loyers au titre du 3éme et du 4éme trimestre 2022 et a réglé la taxe d'ordures ménagères le 10 novembre 2022 ;

-la perte du droit au bail serait une sanction disproportionnée eu égard au montant de la dette repris dans le commandement de payer ;

-il existait donc des contestations sérieuses, que le juge des référés a, à tort, écartées.

En réplique, madame [R] [H] expose que :

-le commandement de payer n'encourt pas la nullité au regard des dispositions de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 car la SAS LE CHASTELLARES ne démontre pas remplir les critères d'exigibilité définis par le décret n° 2020-1766 du 30 décembre 2020 qui détermine les bénéficiaires de la loi sus-dite ;

-les loyers restent dûs même en période de crise sanitaire; l'imprévisibilité de l'article 1195 du code civil ne s'applique pas au cas d'espèce; le moyen tiré de la perte de la chose louée n'est pas opérant ; le moyen tiré de la force majeure ne saurait être retenu ; le preneur ne peut faire état de sa bonne foi alors qu'il a été défaillant à de très nombreuses reprises dans le paiement des loyers et charges depuis 2017, ce qui a nécessité délivrance de nombreux commandements de payer et mises en demeure ;

-le juge des référés n'a commis aucune erreur d'appréciation en fait et droit.

Le moyen tiré de l'application conjuguée de l'article l'article 14 de la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 et du décret n° 2020-1766 du 30 décembre 2020, qui détermine les bénéficiaires de la loi sus-dite, constitue un moyen sérieux de réformation qu'il y a lieu de retenir dans le présent référé.

Au titre de l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives, la SAS LE CHASTELLARES expose que :

-elle emploie des salariés et a pour seule activité celle de ce fonds de commerce ;

-elle a fait des investissements à hauteur de 49.000 euros pour améliorer l'hôtel en activité; elle a obtenu une troisième étoile suite à ceux-ci ;

-la saison 2022-2023 s'annonce sous les meilleurs auspices ;

-elle perdrait son fonds de commerce, sa clientèle et tous ses investissements ;

-elle serait privée de ressources et dans l'obligation de subir une liquidation judiciaire.

Madame [R] [H] ne présente pas de moyens au titre du risque de conséquences manifestement excessives.

Il ne peut être sérieusement contesté que l'exécution immédiate de la décision, en ce qu'elle porte résiliation du bail commercial et expulsion de la SAS LE CHASTELLARES, va mettre un terme à l'activité de cette dernière alors qu'elle exploite depuis 1987 une activité d'hôtellerie-restaurant-bar dans la commune d'[Localité 2] -[Localité 4] ; la cessation de cette seule activité pour la SAS LE CHASTELLARES pourrait être définitive, avec licenciement des salariés et perte des investissements de la société; cette perte d'activité avec risque de liquidation représente à l'évidence un risque d'une particulière gravité, d'autant que ce risque pourrait ne pas être restauré par une infirmation de la décision.

Les deux conditions de l'article 514-3 précité étant remplies, il y a lieu d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision déférée toutefois limité à la résiliation du bail liant les parties et à l'expulsion de la SAS LE CHASTELLARES, les condamnations pécuniaires de la décision devant être exécutées.

L'équité commande de ne pas faire application au cas d'espèce de l'article 700 du code de procédure civile. Les demandes à ce titre seront rejetées.

Les dépens de l'instance seront supportés par la SAS LE CHASTELLARES.

PAR CES MOTIFS,

Statuant en référés, après débats en audience publique, par décision contradictoire

-Disons recevable la demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

-Ordonnons l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance déférée mais de façon limitée à la résiliation du bail liant les parties et à l'expulsion de la SAS LE CHASTELLARES ;

-Ecartons la demande d'arrêt de l'exécution provisoire pour le surplus ;

- Ecartons les demandes des parties au titre des frais de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Mettons les dépens du référé à la charge de la SAS LE CHASTELLARES.

Ainsi prononcé par la mise à disposition de la présente décision au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 27 mars 2023, date dont les parties comparantes ont été avisées à l'issue des débats.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 référés
Numéro d'arrêt : 22/00605
Date de la décision : 27/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-27;22.00605 ?
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