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24/03/2023 | FRANCE | N°19/01046

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 24 mars 2023, 19/01046


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 24 MARS 2023



N°2023/ 47





RG 19/01046

N° Portalis DBVB-V-B7D-BDUVV







[P] [A]





C/



[L] [S]

Association AGS CGEA DE [Localité 4]























Copie exécutoire délivrée

le 24 Mars 2023 à :



-Me Géraldine LESTOURNELLE, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Laurence

OHAYON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE





- Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE











Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire gén...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 24 MARS 2023

N°2023/ 47

RG 19/01046

N° Portalis DBVB-V-B7D-BDUVV

[P] [A]

C/

[L] [S]

Association AGS CGEA DE [Localité 4]

Copie exécutoire délivrée

le 24 Mars 2023 à :

-Me Géraldine LESTOURNELLE, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Laurence OHAYON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

- Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/01995.

APPELANT

SCP [A] [X], prise en la personne de Maître [P] [A], Liquidateur judiciaire de la la Société SUD FER, demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Géraldine LESTOURNELLE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEES

Madame [L] [S], demeurant Chez Mme [E] [T] - [Adresse 2]

représentée par Me Laurence OHAYON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Association AGS CGEA DE [Localité 4], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Stéphanie BESSET-LE CESNE, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Julie GRIMA, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2023.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2023.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

La société Sud Fer est une société spécialisée dans la récupération des déchets ferreux et non ferreux triés, destinés à la revente, soumise à la convention collective nationale «récupération industries et commerce».

Mme [L] [S] a été embauchée par cette société selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 24 octobre 1996, en qualité de secrétaire comptable, puis à compter de l'année 1998 à temps complet.

Au dernier état de la relation contractuelle, elle occupait le poste d'assistante de direction, niveau V échelon 1 statut cadre.

Le contrat de travail a été suspendu suite à l'arrêt pour maladie de Mme [S] du 16 février 2012 jusqu'au 30 octobre 2013.

Placée en invalidité à compter du 1er novembre 2013, la salariée a été déclarée inapte à la reprise le 12 novembre 2013 par la médecine du travail et lors de la seconde visite du 3 décembre 2013, le médecin du travail indiquait «confirmation de l'avis du 12/11/2013 à savoir inapte au poste d'assistante de direction. L'avis spécialisé demandé contre-indique toute reprise d'activité professionnelle dans l'entreprise même avec reclassement, aménagement du poste et/ou des horaires».

Par courrier du 6 décembre 2013, la société a proposé à Mme [S] un poste de reclassement dans l'entreprise qu'elle a refusé par lettre du 14 décembre 2013.

Convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 26 décembre 2013, Mme [S] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre recommandée du 31 décembre 2013.

Contestant notamment la légitimité de son licenciement, Mme [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille le 1er juillet 2014 mais l'affaire a été radiée le 9 septembre 2015 pour défaut de diligences de la demanderesse.

Après remise au rôle de l'affaire le 6 septembre 2017, selon jugement du 21 décembre 2018, le conseil de prud'hommes a statué comme suit:

Dit que le licenciement de Mme [S] est nul du fait de son statut de déléguée du personnel et de l'absence d'autorisation préalable de licenciement auprès de l'inspection du travail.

Condamne la société Sud Fer au paiement des sommes suivantes :

- 7 871,26 euros : indemnité compensatrice de préavis

- 787,11 euros : congés payés afférents,

- 1 5413,84 euros : rappel sur indemnité légale de licenciement,

- 26 237,20 euros : indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur,

- 10 000 euros : dommages et intérêts pour licenciement irrégulier et nul,

- 1 500 euros : article 700 du code de procédure civile.

Ordonne la remise des documents légaux.

Déboute Mme [S] du surplus de ses demandes.

Condamne le défendeur aux dépens.

Le conseil de la société a interjeté appel par déclaration du 17 janvier 2019.

Par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 5 juillet 2021, la société a été placée en liquidation judiciaire et la SCP [A] [X] prise en la personne de Me [P] [A] nommée en qualité de liquidateur.

Cette dernière et l'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4] ont été appelés en intervention forcée par actes d'huissier des 29 et 30 décembre 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 18 mars 2022, la SCP [A] [X] demande à la cour de :

«Reformer le jugement dont appel, en ce qu'il a :

Dit que le licenciement de Madame [S] est nul du fait de son statut de déléguée du personnel et de l'absence de demande d'autorisation préalable de licenciement auprès de l'Inspection du Travail ;

Infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Marseille le 21 décembre 2018 en ce qu'il a condamné la Société SUD FER aux paiements de diverses sommes,

Et Statuant à nouveau,

Constater que Madame [S] n'était plus déléguée du personnel au moment de son licenciement et qu'elle ne bénéficiait plus de protection à cette date,

Dire et juger que la Société SUD FER a respecté ses obligations, et que Madame [S] a refusé la proposition de reclassement, ensuite de l'avis inaptitude rendu par le médecin du travail,

Dire et juger que Madame [S] ne rapporte pas la preuve de la réalité de faits qui seraient constitutifs de harcèlement dont elle excipe,

Dire et juger le licenciement de Madame [S] n'est pas entaché de nullité ou d'irrégularités, et qu'il repose donc sur une cause réelle et sérieuse

Débouter la salariée de toutes ses autres demandes comme infondées et non justifiées.

Condamner la salariée au paiement de la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.»

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 13 décembre 2022, Mme [S] demande à la cour de :

« Confirmer le jugement rendu le 21 décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes de Marseille, section encadrement, en ce qu'il a :

- Dit et jugé le licenciement de Madame [L] [S] nul du fait de son statut de déléguée du personnel et de l'absence d'autorisation préalable de licenciement auprès de l'inspection du travail

- Condamné la société SUD-FER SA au paiement des sommes suivantes :

' Indemnité compensatrice de préavis : 7871,16 € bruts

' Congés payés afférents : 787,11 € bruts

' Rappel sur indemnité légale de licenciement : 1543,84 €

' Indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur : 26237,20 €

' Article 700 du CPC : 1500 €

- Ordonné la remise des documents légaux

- Condamné la société SUD-FER SA aux dépens

Constater que la société SUD-FER SA a été placée en liquidation judiciaire, suite au jugement du Tribunal de Commerce de Marseille du 05 juillet 2021,

Constater que SCP [P] [A] & A. [X], en la personne de Maître [P] [A], a été désigné suite au jugement rendu le 05 juillet 2021 par le Tribunal de Commerce de Marseille, en qualité de liquidateur judiciaire,

Débouter la SCP [P] [A] & A. [X], en la personne de Maître [P] [A], de ses demandes, fins et conclusions

En l'état de la procédure de liquidation judiciaire, il conviendra en conséquence de FIXER les créances de Madame [L] [S], au passif de la société SUD-FER SA, de la façon suivante :

' Indemnité compensatrice de préavis : 7871,16 € bruts

' Congés payés afférents : 787,11 € bruts

' Rappel sur indemnité légale de licenciement : 1543,84 €

' Indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur : 26237,20 €

' Article 700 du CPC : 1500 €

Réformer le jugement rendu le 21 décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes de Marseille, section encadrement, en ce qu'il a :

- condamné la société SUD-FER SA au paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier et nul

- débouté Madame [S] du surplus de ses demandes

En conséquence, et statuant à nouveau, sur l'appel incident de Madame [L] [S] :

- A titre principal, Requalifier le licenciement pour inaptitude physique, en un licenciement irrégulier et nul et de nul effet, pour violation du statut protecteur, et/ou pour harcèlement moral subi

Et en conséquence,

- Fixer la créance de Madame [L] [S] au passif de la société SUD-FER SA à la somme de 60.000 €, net de CSG et CRDS, à titre des dommages et intérêts, en réparation de son entier préjudice, suite à son licenciement irrégulier, et nul consécutif à la violation du statut protecteur et/ou au harcèlement moral subi

Si par extraordinaire, la nullité du licenciement pour inaptitude physique consécutive à la violation du statut protecteur et/ou au harcèlement moral subi, n'est pas retenu, il conviendra en tout état de cause de: - A titre subsidiaire, Requalifier le licenciement pour inaptitude en un licenciement irrégulier et dépourvu d'une cause réelle et sérieuse, suite au manquement de la société SUD-FER SA de son obligation de sécurité de résultat, et/ou au non-respect par cette dernière de son obligation de reclassement,

Et en conséquence,

- Fixer la créance de Madame [L] [S] au passif de la société SUD-FER SA à la somme de 60.000 €, net de CSG et CRDS, à titre des dommages et intérêts, en réparation de son entier préjudice, suite à son licenciement irrégulier, et sans cause réelle et sérieuse

En toutes hypothèses,

Fixer les créances de Madame [L] [S] au passif de la société SUD-FER SA de la façon suivante :

* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information du DIF

* 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour absence de portabilité de la mutuelle/frais de santé

* 1.128,97 € bruts au titre du rappel de salaire pour la prime de vacances de juin 2010 à mai 2012

* 112,89 € bruts au titre des congés payés afférents

* 30.000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi, pour exécution fautive du contrat de travail par l'employeur

* 5.000 € à titre de dommages et intérêts, en réparation du préjudice subi, suite au retard de paiement du solde de tout compte, de mauvaise foi par l'employeur

Fixer le salaire de référence (salaire de base avant la maladie) à la somme de : 2.263,72 € bruts

Ordonner la remise des documents légaux rectifiés (reçu pour solde de tout compte, avec dernier bulletin de salaire, certificat de travail, attestation Pôle Emploi) sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document

Ordonner la production par l'employeur des justificatifs relatifs au calcul de l'intéressement/participation, sous astreinte de 50 € par jours de retard

Ordonner les intérêts de droit à compter de la demande

Ordonner la capitalisation des intérêts

Droit de recouvrement ou d'encaissement en application de l'article 10 du Décret du 12 décembre 1996

Fixer à la somme de 3000 € l'indemnité au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Déclarer que la décision à intervenir sera opposable à l'UNEDIC-AGS, CGEA de [Localité 4], laquelle est appelée à garantir l'ensemble des créances susmentionnées.

Les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.»

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 1er mars 2022, l'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4] demande à la cour de :

«INFIRMER le jugement déféré.

DEBOUTER Madame [S] de toutes ses demandes.

En tout état rejeter les demandes infondées et injustifiées et ramener à de plus juste proportions les indemnités susceptibles d'être allouées au salarié.

Débouter Madame [L] [S] de toute demande de condamnation sous astreinte, aux dépens ou au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en tout état déclarer le montant des sommes allouées inopposables à l'AGS CGEA.

En tout état constater et fixer en deniers ou quittances les créances de Madame [L] [S] selon les dispositions de articles L 3253 -6 à L 3253-21 et D 3253 -1 à D 3253-6 du Code du Travail.

Dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées à l'article L3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et L 3253-17 du Code du Travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail, plafonds qui inclus les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposée par la loi, ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204 A du code général des impôts,

Dire et juger que les créances fixées, seront payables sur présentation d'un relevé de créance par le mandataire judicaire en vertu de l'article L 3253-20 du Code du Travail.

Dire et juger que le jugement d'ouverture de la procédure collective a entraîné l'arrêt des intérêts légaux et conventionnels en vertu de l'article L.622-28 du Code de Commerce.»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur la nullité du licenciement

A- Sur le statut de salariée protégée

L'appelant indique que Mme [S] n'était plus titulaire d'un mandat depuis juin 2006 et précise qu'à supposer qu'elle ait été élue en juin 2008, la fin de la protection est intervenue en décembre 2010, de sorte que la salariée n'était plus protégée lors de son licenciement en 2013 et que la demande préalable d'autorisation de licenciement auprès de l'inspection du travail n'était pas nécessaire.

La salariée se prévaut d'un courrier adressé à l'inspection du travail démontrant selon elle qu'elle a été élue en 2008 pour deux ans, précisant que cela implique de nouvelles élections en 2010 aux termes desquelles elle a été réelue, considérant qu'il appartient à la société de produire un procès-verbal de carence.

Elle rappelle que la convention collective a été modifiée et que désormais les délégués du personnel sont élus pour quatre ans et qu'aucun accord d'entreprise n'a été établi pour réduire cette durée, de sorte que son mandat était en cours lorsqu'elle a été licenciée.

Selon avenant du 14 avril 2010 étendu par arrêté du 14 juin 2011, l'article 24 de la convention collective applicable a porté la durée des mandats des délégués du personnel à 4 ans, alors qu'auparavant elle était de deux ans.

La société, en l'état de son effectif supérieur à 11 salariés était tenue d'organiser des élections et établit par sa pièce n°14, le résultat du vote aux élections du 17 juin 2004, Mme [S] étant nommée déléguée du personnel titulaire pour deux ans.

Aucun élément n'est produit concernant le résultat des élections de 2006 mais l'intimée produit en pièce n°44, une lettre adressée le 16 juin 2008 par le PDG de la société à l'inspection du travail, lui transmettant un accord intervenu entre la société et les salariés sur une prime de 1 000 euros en exonération de charges, précisant «l'ensemble des salariés a ratifié la nomination de Mme [S] en tant que représentante du personnel».

La cour constate que le terme utilisé est inadéquat pour des élections et qu'en outre il n'est pas mentionné le nom du suppléant mais doit accorder une force probante à ce document pour dire que Mme [S] a été élue en juin 2008 pour deux ans.

En revanche, l'intimée qui revendique la qualité de salariée protégée et qui a la charge de la preuve, ne démontre par aucun document que lors des élections en juin 2010, elle s'est présentée et a été élue (pas de lettre de candidature, de liste, de procès-verbal d'élections ou convocation de la part de l'employeur à une réunion etc...); en outre, à supposer même un tel mandat, il avait une durée de deux ans par application de l'ancien article 24 de la convention collective, et de nouvelles élections auraient dû avoir lieu en 2012.

Dès lors, Mme [S] ne peut sérieusement revendiquer une protection au titre de l'article L.2411-5 du code du travail, la fin de la protection étant intervenue au plus tard le 16 décembre 2010.

En conséquence, la décision entreprise qui n'a sur ce point, procédé à aucun raisonnement, doit être infirmée en ce qu'elle a dit le licenciement nul pour ce motif.

En outre, en allouant à la salariée une indemnité au titre de la violation du statut protecteur, alors que l'action avait été introduite après l'expiration de la période de protection, les premiers juges ont enfreint le texte sus-visé.

B- Sur le non respect de l'article L.1226-2 du code du travail

C'est à tort que la décision a dit que l'employeur n'avait pas respecté les dispositions légales concernant la nécessité de consulter les délégués du personnel, puisque dans sa version applicable à l'espèce soit antérieur à la Loi du 8 août 2016 entrée en vigueur le 1er janvier 2017, l'avis des délégués du personnel n'était pas requis, pour une inaptitude d'origine non professionnelle.

C- Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du même code dans sa version applicable à l'espèce (avant le 10 août 2016) prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, Mme [S] invoque avoir subi régulièrement des violences verbales, insultes et menaces y compris physiques de la part du président M. [O] [F].

Elle évoque avoir été profondément choquée le 6 septembre 2010, pour avoir assisté à une rixe entre ce dernier et son épouse et avoir été arrêtée pour maladie le lendemain avec une ITT de 15 jours pour un choc émotionnel extrêmement important puis suivie par un psychiatre.

Elle relate l'attitude de son employeur lors d'une attaque à main armée ou lors d'un accident du travail dont avait été victime un salarié.

Elle fait état d'un incident grave, M. [F] ayant considéré qu'elle était trop payée, s'est mis à vociférer contre elle, a déchiré l'enveloppe contenant le bulletin de salaire et le chèque puis a tenté d'étrangler son épouse qui s'était interposée. Elle indique que les cris ayant alerté d'autres salariés, ceux-ci ont ramené à la raison leur patron mais que ce dernier est revenu à la charge contre elle, la laissant totalement traumatisée et dans l'incapacité de reprendre le travail.

Elle indique que ce climat de violence verbale et physique perpétuel exercé par l'employeur l'a détruite progressivement sur un plan psychologique et physique.

Elle produit à l'appui :

- une main courante (pièce n°8) effectuée le 7/09/2010 dans laquelle la salariée déclare notamment «ce n'est pas la première fois que j'assiste aux violences qu'il fait subir à son épouse (...). cette scène m'a profondément choqué. Je suis allée consulter mon médecin qui m'a délivré un certificat médical mentionnant 15 jours d'ITT. J'ai peur qu'un jour M. [F] s'en prenne physiquement à moi. J'ai également peur pour l'état de santé de son épouse.»

- le cerficat du Dr [Z], médecin traitant de Mme [S] de 2006 à 2010 lequel déclare « (') je la voyais régulièrement en consultation tous les trois mois. Elle présentait déjà à l'époque un syndrome anxio-depressif qu'elle mettait en rapport avec ses conditions de travail. Elle était sous traitement par anxiolytique et anti dépresseur ». (pièce n°10)

- le certificat du 09/07/2014, établi par le Dr [C], indiquant suivre la salariée depuis plus de trois ans, conçu en ces termes «(') Madame [S] m'a, à maintes reprises, confié qu'elle vivait une situation professionnelle très douloureuse, se plaignant d'une forme de harcèlement. Elle présentait un état anxio dépressif important, et son discours était systématiquement centré sur les difficultés qu'elle ressentait dans son travail. A tel point que je l'ai adressée il y a trois ans au Dr [R], psychiatre, pour l'accompagner et tenter de se protéger. (') » (pièce n°12)

- le certificat du Dr [R], psychiatre du 24/06/2014, indiquant donner ses soins à la salariée depuis octobre 2010, précisant : «Elle présentait à l'époque un état anxieux extrêmement sévère associé à un trouble de l'humeur type dépressif. Sa mère était décédée récemment et elle nous indiquait vivre difficilement ce deuil. Surtout, elle nous indiquait aussi avoir un vécu extrêmement pénible du contexte professionnel et c'est ce vécu qui a été le facteur déclenchant de la demande de soins. Je la suis donc en continu depuis plus de trois ans avec des consultations au minimum mensuelles. Elle prend un traitement psychotrope de manière permanente depuis la fin 2010, traitement actuellement constitué par un anti dépresseur (fluoxétine) et un anxiolytique (prazépam). Malgré nos soins, son état psychologique s'est aggravé durant ces trois dernières années (') », expliquant qu'en parallèle Mme [S] a dû faire face à de graves problèmes de dos ayant abouti à une intervention chirurgicale lourde (pièce n°11),

- la fiche de visite périodique du 16/02/2012 du médecin du travail déclarant la salariée inapte temporairement et l'orientant vers son médecin traitant (pièce n°4),

- le dossier médical (pièce n° 7) dans lequel le même médecin du travail a consigné lors de cette visite, outre les problèmes de dos : « sommeil OK avec traitement, a été arrêtée par son médecin pendant 6 semaines ; avait fait une main courante au commissariat. Des suites contrariées +++, céphalées pulsatiles +++ (') ; salariée très mal à ce jour. En pleurs +++ ; Proche du burn out (') ; tension artérielle 17/10 ; spasmophilie +++ ».

- l'attestation de Mme [T], amie, décrivant Mme [S] quelques années après son arrivée à [Localité 4], comme très angoissée et lui ayant «raconté les bureaux défoncés ou les portes enfoncées à l'occasion des crises de rage du patron», et avoir vue son amie «s'enfoncer dans cette longue descente aux enfers psychologiquement et physiquement sans pouvoir aider» (pièce n°13),

- l'attestation de Mme [D], amie de trente ans, indiquant : « Mais peu à peu son inquiétude grandissait sur le comportement de son patron envers sa femme et ses employés, et puis envers elle ; il devenait menaçant verbalement et violent dans sa façon d'être. Elle me téléphonait régulièrement, me racontait ce qui se passait, colères de son patron, menaces physiques sur sa femme, au sein même de l'entreprise. Les derniers temps, cela devenait insupportable et mon amie a été obligée d'arrêter son travail tant la pression devenait grave, tout cela sanctionné par des arrêts de travail ; en, effet son moral était au plus bas et son état de santé commençait à se dégrader ». (pièce n°15)

- l'attestation de sa soeur [J], employée dans la société entre 1998 et 2006 (pièce n°14) qui indique : « (') puis cela a commencé à se détériorer, ordres contradictoires, crises de colère, détérioration ou destruction de documents ou de matériel, insultes envers les employés, clients, fournisseurs même envers les membres de sa famille, coups sur les employés et sur son épouse. (') Je suis également très perturbée par cette façon de critiquer et considérer les gens comme des êtres nuisibles toujours trop rémunérés pour les tâches ou le travail accompli. (') Comment un dirigeant de société peut-il se permettre de pousser à bout son assistante de direction qui plus est déléguée du personnel autant physiquement que psychiquement. J'ai plusieurs fois recueilli ma s'ur dans un état lamentable, paniquée, en pleurs, choquée incapable de dire un mot, après de nombreuses disputes ou conflit de plus en plus violent, détruisant tout sur son passage, mettant à sac les bureaux et leur contenu, s'en prenant également physiquement à son épouse.»

- le témoignage de M. [Y] [SG] (pièce n°33), employé du 7 octobre 2010 au 4 janvier 2014, lequel atteste en ces termes « Au cours de ces années, j'ai constaté, et même subi si je peux dire, le management assez particulier de Monsieur [F], Président de l'entreprise SUD-FER, basé sur une autorité qui ne supportait pas la remise en question, ni le dialogue, et nous, salariés, nous devions faire attention à ne pas le contrarier, car sinon, Monsieur [F] s'énervait immédiatement, criait sur le personnel, et pas seulement ' Il n'était pas rare de voir des altercations au bureau ou sur le chantier avec des clients/fournisseurs/salariés ! Dans ses accès de colère, Monsieur [F] proférait des insultes et/ou rabaissait les gens ' tout y passait le banquier, l'administration, l'expert-comptable, qui est même parti par deux fois du bureau, étant sommé de ne plus remettre les pieds dans l'entreprise ; les fournisseurs, le personnel etc '

Monsieur [F] s'en prenait surtout aux femmes, notamment Madame [L] [S], sa femme ou bien sa fille.

Le climat était constamment électrique, et cela devenait de plus en plus insupportable. Je me souviens de Madame [S] qui souffrait énormément de cette situation, elle venait travailler avec la peur au ventre, la seule chose qui la rassurait plus ou moins, était la présence de salariés masculins à proximité pouvant intervenir en cas de problèmes avec Monsieur [F]. Je me souviens même que Madame [S] garait sa voiture sur le parking le plus proche de la sortie pour pouvoir partir rapidement en cas de crises de colère violentes du patron.

Je confirme avoir été présent lorsque Monsieur [F] s'en est pris à Madame [S], car il estimait qu'elle était trop payée, en pire qu'elle s'était augmentée toute seule alors qu'elle percevait le même salaire depuis des mois. Il a hurlé et déchiré son bulletin de paie avec son chèque. Son épouse, Madame [F], était également présente, et a pris la défense de Madame [S]. J'ai alors, et d'autres salariés aussi présents comme Monsieur [K] [M], [AV] [V], [B], entendu un énorme vacarme avec des cris et des appels au secours. Lorsque je suis arrivé dans le bureau, Monsieur [F] avait balancé les tiroirs, cassé le bureau de son épouse, tout était renversé par terre, et il était en train de donner des coups à son épouse et de l'étrangler !

Avec les autres salariés ([M], [V], [B]), nous sommes intervenus pour tenter de la maîtriser, ce qui n'a pas été chose facile. C'est seulement lorsque je lui ai dit qu'il était en train d'étrangler la mère de ses enfants qu'il a relâché son étreinte.

Madame [S] était en pleurs, totalement tétanisée et choquée. Elle tremblait et se sentait vraiment mal, nous lui avons conseillé de rentrer chez elle, car il n'était plus possible pour elle de reprendre son travail comme si rien ne s'était passé. Je peux attester que ce type de situation n'était pas isolé, et tout le personnel travaillait dans la crainte d'un nouvel esclandre de Monsieur [F].

Je peux confirmer qu'en juin 2012, Monsieur [F] s'en est pris à sa fille, en lui jetant une trouilloteuse (perforatrice) en fer (là encore ce n'était pas la première fois que Monsieur [F] prenait un objet, qui lui passait sous la main, et dans un geste d'énervement le balançait à la figure de la personne contre laquelle il voulait en découdre), il l'a manquée de peu. Il a saisi son téléphone portable et l'a écrasé par terre ; nous n'avons plus revu sa fille pendant des mois ensuite !

Le fait de supporter ces crises à longueur de journée aussi intempestives que cruelles, a rendu l'ambiance insupportable et a totalement déstabilisé psychologiquement Madame [S] qui s'est retrouvée dans l'incapacité de remettre un pied dans la société, compte tenu de son mal-être.

Je tiens à préciser que je suis moi-même en litige avec la société SUD-FER, et que j'ai été en accident de travail, justement à cause d'une crise de violence de Monsieur [F], qui m'a agressé physiquement le 12 octobre 2012. Ce type d'attitude pour un employeur est intolérable, Madame [S] a été très affectée, et je pense que cela l'a même complètement détruite. »

Les faits d'insultes ou de violences physiques sur la personne de Mme [S] ne peuvent être retenus mais la salariée établit de façon précise et concordante, des pratiques managériales récurrentes faites de scènes de violence ayant eu des répercussions importantes sur son état de santé, faits qui pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Le représentant légal de la société considère que Mme [S] procède par affirmations, rappelle que les dirigeants se sont occupés de la salariée à son arrivée, comme si elle était un membre de leur famille, la conviant à des événements festifs comme en témoignent les photos et attestations produites.

Il estime que les médecins ne font que rapporter les propos tenus par la salariée, laquelle n'a pas déposé la moindre plainte, n'a pas saisi l'inspection du travail ou le conseil de prud'hommes pendant toutes ces années.

Il produit notamment à l'appui, les pièces suivantes :

- l'attestation de Mme [H], belle-soeur du PDG, laquelle indique : « J'ai fait la connaissance de Madame [S] par l'intermédiaire de ma s'ur Madame [F]. Elle l'avait embauché dans son entreprise en tant que secrétaire comptable et très vite nous avons sympathisé, nous sommes souvent sortis tous ensemble, soit au restaurant, soit chez ma s'ur ou chez la sienne, Madame [J] [S]. Les années ont passé, ma s'ur très attachée à son employée lui faisait bénéficier de tous les avantages qu'elle pouvait (...).

Elle et sa s'ur avaient même pris le dessus sur la mienne qui ne voyait pas que par elles, toutes les 2 étaient de tous les anniversaires de mon beau-frère( pour ses 50 ans), pour les 45 ans de ma s'ur fête organisée dans les locaux de l'entreprise. Du mariage de mes nièces également. Le vendredi midi, il y avait souvent grillades sur le site avec l'ensemble du personnel. J'ai appris que mon beau-frère avait embauché le mari de [J] avec lequel elle était divorcée et son fils handicapé. (...)

Les choses ont commencé à se détériorer quand [I] a commencé à avoir des douleurs au dos et aux genoux, elle était en surpoids et très mal dans sa peau, elle n'avait pas de copain et son caractère état aigri. Elle buvait pas mal d'alcool, de plus (...) [I] a perdu sa nièce et à partir de là, d'après ma s'ur son travail en a souffert. Les s'urs [S] avaient tellement d'emprise sur la société que ma s'ur et ma nièce n'arrivaient plus à reprendre le contrôle de l'affaire. [I] avait pris en grippe mon beau-frère et n'arrêter pas de monter ma s'ur contre lui (...).» (pièce n°18)

- les attestations de Mme [W] (pièce n°19) et de Mme [U] (pièce n°20), décrivant une ambiance détendue et festive dans l'entreprise,

- l'attestation de M. [G] (pièce n°21 déclarant avoir travaillé 22 ans avec M. [F] et le considérer plus comme un ami que comme un patron.

- l'attestation de M. [N] indiquant : «Je travaille au sein de la société SUD FER depuis le 1 er mars 2002 et je n'ai jamais eu de problème, l'ambiance est très bonne, mon patron est sympathique et nous faisons d'ailleurs régulièrement des apéros, repas. je trouve que notre direction est à l'écoute des problèmes de ses employés, ils ont même hébergé à leur domicile un employé qui était malade.» (pièce n°22).

- des photos (pièce n°23).

La cour constate que Mme [S] a été exposée à plusieurs scènes de violence extrêmes à compter de 2010, en raison du comportement abusif du PDG ayant eu pour conséquence un climat délétère dans l'entreprise et pour effet d'entraîner une dégradation de ses conditions de travail, la déclaration faite en février 2012 à la médecine du travail par la salariée sur sa peur à retourner au travail étant réelle et justifiée par l'attestation de M. [SG], le tout ayant altéré sa santé mentale, comme le démontre le suivi psychiatrique.

Comme l'a souligné à juste titre le conseil de prud'hommes, les éléments produits par l'employeur n'infirment en rien la réalité et la gravité des griefs établis par Mme [S], étant précisé que pour les deux dernières attestations, les personnes ne travaillaient pas dans les bureaux et que les photos ne sont pas datées, et dès lors, il échoue à démontrer que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La rupture du contrat de travail résulte d'une situation d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise, laquelle est la conséquence au moins partielle des conditions de travail de Mme [S] et de la situation de harcèlement moral qu'elle a subie. Dès lors, par application des dispositions de l'article L.1152-3 du code du travail, le licenciement est nul.

Sur les conséquences financières du licenciement nul

Les indemnités de rupture dont le montant n'est pas autrement discuté par le liquidateur, doivent être fixées au passif de la société.

L'intimée invoque l'irrégularité du licenciement pour défaut de mention de l'adresse de sa mairie dans la convocation à l'entretien préalable au licenciement et le non respect du délai de 5 jours ouvrables, soulignant qu'elle ne sollicite qu'une seule et même indemnité globale.

La salariée avait 55 ans lors de la rupture, percevait une rémunération brute mensuelle de 2 623,72 euros, bénéficiait d'un ancienneté de plus de 17 ans et n'a plus exercé d'activité professionnelle du fait de son invalidité (sans relation apparente avec le harcèlement moral).

Eu égard aux éléments présentés, la cour fixe le préjudice subi du fait de la rupture et des circonstances dans lesquelles elle est intervenue, y compris l'irrégularité du licenciement, à la somme de 41 000 euros nets.

Il est reconnu par l'employeur l'absence de mention relative au DIF de sorte que le manquement est constitué, lequel a causé un préjudice à Mme [S] qui doit être fixé à 100 euros.

Il est reproché à l'employeur une absence d'information sur sa possibilité de renoncer ou pas au maintien des garanties, la salariée ayant été radiée de l'organisme Humanis prévoyance dès le 31 décembre 2013.

Il n'est pas démontré par l'appelant que l'état d'invalidité empêchait la poursuite de la garantie au titre des frais de santé et en tout état de cause, aucun élément n'est produit pour démontrer que la salariée a été informée par l'employeur de la possibilité du maintien.

Cependant, le préjudice de Mme [S] doit être limité à la somme de 100 euros.

Sur les autres demandes

1- Sur la prime annuelle de vacances

La salariée sollicite un reliquat sur la période de juin 2010 mai 2011 puis de juin 2011 à mai 2012.

Le calcul fait par Mme [S] est conforme à l'article 67 bis de la convention collective, comme ne prenant en compte que la période de travail effective soit jusqu'au mois de février 2012, contrairement à ce qu'invoque le liquidateur, et dès lors, il convient de faire droit à la demande.

2- Sur l'intéressement

L'intimée indique que lors du solde de tout compte, il lui a été versé la somme de 6 131 euros à ce titre mais sans justificatif.

La demande de production sous astreinte des justificatifs du calcul de cette somme, ne saurait prospérer en l'état de la procédure collective, étant précisé que la salariée n'invoque ni ne prouve qu'elle aurait dû percevoir une somme supérieure.

3- Sur l'exécution fautive du contrat de travail

L'intimée indique que l'employeur a méconnu ses obligations en ne lui versant pas intégralement la prime de vacances, en ayant effectué avec retard les démarches auprès de l'organisme de prévoyance pour le versement d'une pension d'invalidité complémentaire, alors qu'elle ne pouvait plus assumer ses charges courantes et ses remboursements de prêt immobilier notamment.

Le préjudice de la salariée ne saurait être supérieur à la somme de 500 euros.

4- Sur le retard du paiement du solde de tout compte

Il résulte des éléments présentés par Mme [S] (pièces n°20-21-22-24) que l'employeur lui a imposé de percevoir de façon fractionnée, les sommes résultant du solde de tout compte, en payant un acompte puis en lui adressant 8 chèques échelonnés, arguant de problèmes de trésorerie.

Outre le préjudice financier en résultant, la mauvaise foi de la société justifie de voir indemniser Mme [S] du préjudice subi à ce titre, par la somme de 2 500 euros.

5- Sur les intérêts

Les sommes allouées à titre de salaires porteront intérêts au taux légal à compter de la date de convocation de l'employeur (présentation de la lettre recommandée) à l'audience de tentative de conciliation valant mise en demeure.

  La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil .

Il y a lieu cependant de dire que le cours des intérêts a été interrompu le 5 juillet 2021.

6- Sur la remise de documents

Il n'est pas nécessaire de voir délivrer un nouveau certificat de travail mais le liquidateur devra remettre à Mme [S], un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées et une attestation Pôle Emploi conformes au présent arrêt, l'astreinte n'étant pas justifiée.

7- Sur la garantie de l'Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4]

La garantie est dûe sur les créances fixées, l'organisme ne devant procéder à l'avance des créances visées à l'article L.3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19 et L. 3253-17 du Code du Travail, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du Travail, plafonds qui inclus les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposée par la loi, ainsi que la retenue à la source prévue à l'article 204 A du code général des impôts.

Sur les frais et dépens

La société appelante qui succombe au principal doit supporter les dépens, être déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre, payer à Mme [S] la somme de 2 500 euros pour l'ensemble de la procédure.

S'agissant du droit d'encaissement de l'article 10 du décret du 12 décembre 1996, la demande a non seulement un caractère hypothétique mais est contraire à la loi.

En tout état de cause, l'article 11 du même texte a exclu le droit proportionnel de l'article 10 pour les créances résultant de l'exécution d'un contrat de travail.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et Y ajoutant,

Dit le licenciement nul en raison de faits de harcèlement moral,

Fixe les créances de Mme [L] [S] au passif de la liquidation judiciaire de la société Sud Fer représentée par la SCP [A] [X] prise en la personne de Me [P] [A], en qualité de liquidateur, aux sommes suivantes :

- 7 871,16 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 787,11 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 1 543,84 euros au titre du solde d'indemnité légale de licenciement,

- 41 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et irrégulier,

- 100 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information du DIF,

- 100 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information sur la portabilité de la mutuelle,

- 1 128,97 euros bruts au titre du rappel de salaire pour la prime de vacances,

- 112,89 euros au titre des congés payés afférents,

- 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

- 2 500 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement du solde de tout compte,

Dit que les sommes allouées de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter du 3 Juillet 2014 et ordonne la capitalisation de ces intérêts, à condition qu'ils soient dûs au moins pour une année entière,

Rappelle que le cours des intérêts a été interrompu à compter du 5 juillet 2021,

Déclare l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4] tenue à garantie pour les sommes sus-visées dans les termes des articles L.3253-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles ;

Ordonne à la société Sud Fer représentée par la SCP [A] [X] prise en la personne de Me [P] [A], en qualité de liquidateur, de délivrer à Mme [S], un bulletin de salaire récapitulatif et une attestation Pôle Emploi conformes aux dispositions du présent arrêt, mais dit n'y avoir lieu à astreinte,

Condamne la société Sud Fer représentée par la SCP [A] [X] prise en la personne de Me [P] [A], en qualité de liquidateur, à payer à Mme [S] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute Mme [S] du surplus de ses demandes,

Laisse les dépens de premiere instance et d'appel à la charge de la société Sud Fer représentée par la SCP [A] [X] prise en la personne de Me [P] [A], en qualité de liquidateur.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/01046
Date de la décision : 24/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-24;19.01046 ?
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