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24/03/2023 | FRANCE | N°19/00408

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 24 mars 2023, 19/00408


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 24 MARS 2023



N°2023/ 46





RG 19/00408

N° Portalis DBVB-V-B7D-BDTBE







[Y] [K]





C/



SAS BPD MARIGNAN



























Copie exécutoire délivrée

le 24 Mars 2023 à :



-Me Jean-marie LAFRAN, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Isabelle REYMANN GLASER, avocat au

barreau de PARIS







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 17/02220.







APPELANT



Monsieur [Y] [K], demeurant [Adresse 1]



comparant en p...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 24 MARS 2023

N°2023/ 46

RG 19/00408

N° Portalis DBVB-V-B7D-BDTBE

[Y] [K]

C/

SAS BPD MARIGNAN

Copie exécutoire délivrée

le 24 Mars 2023 à :

-Me Jean-marie LAFRAN, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Isabelle REYMANN GLASER, avocat au barreau de PARIS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 21 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° F 17/02220.

APPELANT

Monsieur [Y] [K], demeurant [Adresse 1]

comparant en personne, assisté de Me Jean-marie LAFRAN de la SCP LAFRAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

S.A.S MARIGNAN, anciennement Société BPD MARIGNAN, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Isabelle REYMANN GLASER, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Jawahir BSAIRI, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Janvier 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargées du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2023.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2023.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

La société BPD Marignan devenue la société Marignan a pour activité la promotion immobilière (acquisition, réhabilitation, construction et vente de terrains, logements etc...) pour son compte ou comme prestataire de sociétés immobilières et développe son activité à travers plusieurs agences en France.

M. [Y] [K] a été embauché par cette société, par contrat de travail à durée indéterminée à effet du 15 novembre 2016, en qualité de responsable du développement de l'agence de [Localité 3], cadre niveau 5 échelon 1 coefficient 457 de la convention collective des promoteurs immobiliers de France.

Sa rémunération brute forfaitaire annuelle était fixée à 49 000 euros versée sur 13 mois.

Après un entretien du 8 février 2017, les parties ont entendu renouveler la période d'essai de quatre mois dont l'échéance était le 14 mars 2017, pour la même durée, selon écrit signé le 9 février 2017.

Un avenant a été signé le 14 février 2017 concernant la rémunération variable du salarié, mais sa portée est en litige entre les parties.

Par lettre recommandée du 3 mai 2017, la société a entendu mettre fin à la période d'essai, précisant que pendant le délai de prévenance d'un mois, le salarié était dispensé de travailler et serait payé.

M.[K] a saisi le conseil de prud'hommes de Marseille le 25 septembre 2017, aux fins d'obtenir notamment le paiement de salaires et de frais professionnels, invoquant une rupture abusive.

Selon jugement du 21 décembre 2018, le conseil de prud'hommes a statué comme suit:

Dit et juge que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Condamne la société BPD MARIGNAN à payer :

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- 825,92 euros à titre de remboursement de frais professionnels,

- 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Rejette toutes les autres demandes des parties.

Condamne la société aux entiers dépens.

Le conseil de M.[K] a interjeté appel par déclaration du 9 janvier 2019.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 8 décembre 2022, M.[K] demande à la cour de :

« SUR LA DEMANDE DE RAPPEL DE SALAIRES

INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a rejeté la demande de Monsieur [K] tendant à voir condamner la société BPD MARIGNAN à lui payer les

rappels de salaires pour l'année 2017

En conséquence, statuant à nouveau

- CONDAMNER la société BPD MARIGNAN à verser à Monsieur [K] la somme de 49.000 euros brut au titre des salaires lui restant dus au titre de l'année 2017;

- CONDAMNER sous-astreinte de 100 euros par jour de retard la société BPD MARIGNAN à remettre à Monsieur [K] un nouveau bulletin de paie, faisant apparaitre les primes d'activités susvisées

- CONDAMNER sous-astreinte de 100 euros par jour de retard la société BPD MARIGNAN à remettre à Monsieur [K] une nouvelle attestation ASSEDIC comprenant les modifications afférentes au paiement des primes d'activité;

CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société BPD MARIGNAN à verser à Monsieur [K] la somme de 825.92 euros au titre du remboursement des frais avancés par le salarié au mois d'avril 2017.

SUR LA RUPTURE DE LA RELATION CONTRACTUELLE

A TITRE PRINCIPAL :

CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a jugé que la rupture du contrat de travail de Monsieur [K] constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

A TITRE SUBSIDAIRE :

DIRE ET JUGER que la rupture du contrat de travail de Monsieur [K] est fautive;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

INFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Monsieur [K] de ses demandes indemnitaires à hauteur de 60 000 euros ;

En conséquence, statuant à nouveau

CONDAMNER la société BPD MARIGNAN à verser à Monsieur [K] la somme 60.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu'il a subi du fait de la rupture de son contrat de travail ;

SUR LES FRAIS IRREPETIBLES ET LES DEPENS

CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société BPD MARIGNAN à payer à Monsieur [K] la somme de 1 000€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

DEBOUTER la société BPD MARIGNAN de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

CONDAMNER la société BPD MARIGNAN à verser à Monsieur [K] une somme de 6500 euros au titre des frais irrépétibles d'appel

CONDAMNER la société BPD MARIGNAN aux entiers dépens d'appel.»

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 13 décembre 2022, la société BPD Marignan devenue la société Marignan demande à la cour de :

«In limine litis,

JUGER que le dispositif des conclusions de l'Appelant prises dans le délai prévu à l'article 908 du code de procédure civile ne sollicite pas l'infirmation du jugement prononcé le 21 décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes de Marseille en ce qu'il l'a débouté de ses demandes indemnitaires ;

JUGER que l'Appelant n'a pas régularisé son dispositif dans le délai de trois mois, prévu à l'article 908 du code de procédure civile ;

JUGER qu'en application de l'effet dévolutif de l'appel, la Cour d'appel de céans n'a donc pas été valablement saisie d'une demande d'infirmation du jugement prononcé le 21 décembre 2018 par le Conseil de Prud'hommes de Marseille en ce qu'il a débouté Monsieur [K] de ses demandes indemnitaires;

JUGER qu'en outre Monsieur [K] n'a pas formulé l'ensemble de ses prétentions sur le fond dans le délai de trois mois prévu à l'article 910-4 du code de procédure civile ;

Par conséquent,

PRONONCER l'irrecevabilité de la demande de frais irrépétibles formulée par Monsieur [K] pour un montant de 6.000 Euros ;

CONFIRMER le jugement prononcé par le Conseil de Prud'hommes de Marseille le 21 décembre 2018 en ce qu'il a débouté Monsieur [K] de ses demandes indemnitaires ;

DEBOUTER Monsieur [K] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Sur le fond :

INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de Marseille en ce qu'il a dit et jugé que la rupture du contrat de travail produit les eff ets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse et condamné la société Marignan à payer :

- 5000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- 1.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure civile :

CONFIRMER le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Marseille en ce qu'il a constaté qu'il a rejeté toutes les autres demandes de Monsieur [K] à savoir ;

- 49.000 euros à titre de rappel de rémunération variable concernant l'année 2017

CONSTATER que Monsieur [K] était en période d'essai lorsque son contrat de travail a été rompu

CONSTATER que la rupture de la période d'essai de Monsieur [K] n'est pas abusive.

En conséquence :

DEBOUTER Monsieur [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

CONDAMNER Monsieur [K] à verser 3.000 euros à la société Marignan sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CONDAMNER Monsieur [K] aux entiers dépens d'instance.»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur l'effet dévolutif de l'appel

Au visa des articles 542, 910-4, 908 et 954 du code de procédure civile, la société indique que dans ses conclusions d'appelant du 9 janvier 2019, M.[K] ne sollicitant pas l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes indemnitaires, la cour d'appel n'est pas saisie, précisant que les conclusions du 8 décembre 2022 notifiées bien au-delà du délai de trois mois prescrit par l'article 908, n'ont pu régulariser la carence du plaideur.

M.[K] considère que la décision de la Cour de cassation du 31 janvier 2019 citée par la société n'est pas transposable et rappelle que la solution dégagée par l'arrêt de la Cour de cassation du 17 septembre 2020 n'est pas applicable à l'espèce, l'instance ayant été introduite par une déclaration d'appel antérieure à ce dernier arrêt.

La cour constate que si effectivement les premières conclusions de l'appelant sont dénuées d'une demande d'infirmation de la décision de 1ère instance quant aux créances indemnitaires, seule la caducité de la déclaration d'appel était éventuellement encourue mais l'intimée n'a pas saisi le conseiller de la mise en état ni la cour sur ce point .

En tout état de cause, la règle édictée pour la première fois par l'arrêt publié du 17 septembre 2020, telle qu'invoquée par la société, a conduit la Haute Cour à différer son application immédiate, considérant qu'elle aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable.

Dès lors que la présente instance a été introduite par une déclaration d'appel du 9 janvier 2019, soit à une date antérieure à la date de cet arrêt, il ne peut être reproché à M.[K], une carence et en l'état de ses dernières conclusions, la présente cour se déclare saisie de la demande visant à infirmer la décision déférée quant aux demandes indemnitaires du salarié.

En revanche, la cour constate que la société n'a pas sollicité de demande d'infirmation de la même décision, quant à sa condamnation à rembourser les frais professionnels, de sorte qu'elle est réputée s'être appropriée les motifs de la décision sur ce point.

Sur la rupture du contrat de travail

La société maintient que le contrat a été rompu en période d'essai, le renouvellement de celle-ci démontrant un doute sur les capacités de M.[K].

Elle invoque la théorie de l'estoppel, soit la contradiction d'un plaideur au cours d'un procès au détriment d'autrui, pour dénoncer une interprétation fallacieuse de l'article 5 du contrat, alors que M.[K] avait signé le renouvellement de la période d'essai.

Elle critique le jugement pour avoir retenu une version erronée de cet article 5.

Le salarié soutient au principal que la période d'essai était révolue au moment de la rupture signifiée par l'employeur, l'intégration dans l'entreprise étant encadrée par les articles 2 et 5 du contrat de travail.

A titre subsidiaire, il invoque le caractère abusif et déloyal de la rupture en période d'essai.

L'estoppel est une notion issue du droit anglais, consacrée par la Cour de cassation. Elle tend à sanctionner le comportement contradictoire d'une partie ayant fait naître une fausse représentation chez son adversaire. Cela correspond à une exigence de loyauté procédurale.

L'interdiction de se contredire ne peut être sanctionnée qu'à la condition que la contradiction soit constitutive d'une faute caractérisée par un manquement à la bonne foi ou un abus de droit. Il faut une véritable contradiction entre deux positions adoptées successivement et un avantage effectif retiré du changement de position.

La cour constate que la société n'a pas soulevé de fin de non recevoir à l'appui du moyen de l'estoppel tant devant le conseil de prud'hommes que devant la cour.

En tout état de cause, le changement de position procédurale de M.[K] intervenu dès la première instance, quant à la rupture, n'est pas incohérent ni de nature à induire en erreur la partie adverse ne constituant pas une faute ou un abus et dès lors ne saurait être sanctionné.

L'article 2 du contrat de travail consacré à la durée du contrat et à la période d'essai prévoit :« Le présent contrat est conclu pour une durée indéterminée, à compter de l'intégration de M.[K] qui interviendra à l'expiration d'une période d'essai de 4 mois éventuellement renouvelable une fois pour une durée maximale de 8 mois, renouvellement inclus. (...).

Après intégration, le contrat pourra prendre fin à la volonté de l'une ou l'autre des parties moyennant le respect des dispositions légales et conventionnelles en vigueur, et hormis le cas de cas de faute grave ou lourde, l'observation d'un préavis prévu par la convention collective en vigueur.»

L'article 5 relatif à la rémunération et au temps de travail, après avoir fixé la rémunération brute forfaitaire annuelle, indique dans son alinéa 3 : « Un avenant contractuel fixant les objectifs annuels de M.[K] lui sera adressé lors de son intégration».

Par un courrier du 14 février 2017 dont l'objet est «Avenant à votre rémunération 2017», le directeur des ressources humaines indiquait à M.[K] : «Je vous confirme que pour l'année 2017, vous pourrez prétendre au versement d'une prime variable et d'un bonus en relation avec les résultats que vous aurez obtenus» et fixait au salarié ses objectifs. Ce document a été renvoyé par le salarié avec un bon pour accord.

Par un courrier du 24 avril 2017, le même directeur des ressources humaines annonçait à M.[K] notamment le versement d'une prime exceptionnelle et lui confirmait «que pour l'année 2017 et conformément à votre avenant, le bonus auquel vous pouvez prétendre en cas de dépassement de votre objectif annuel vous est d'ores et déjà garanti à 100%, soit à hauteur de 7 000 euros bruts. Ce dernier vous sera versé dans les conditions prévues à votre avenant.»

Ainsi que l'a relevé le conseil de prud'hommes, le terme «intégration» souligné par la cour dans les clauses du contrat de travail est présent à trois reprises et ne peut avoir d'autre sens que celui d'un engagement définitif, lequel a été consacré par la proposition d'avenant portant sur la rémunération variable mettant ainsi fin à la période d'essai, et s'est concrétisée par la lettre sus-visée.

En conséquence, les premiers juges n'ont pas opéré une interprétation erronée des clauses ci-dessus rappelées du contrat de travail, la contradiction apparente ne résultant manifestement que d'une mauvaise coordination de la direction générale avec le directeur des ressources humaines, peu important la signature par le salarié d'un renouvellement de la période d'essai imposé par l'employeur.

Dès lors que la rupture du contrat de travail devenu définitif n'a pas été opérée selon les formes et conditions du licenciement, elle est dépourvue de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières de la rupture

Compte tenu du peu d'ancienneté du salarié, de son âge et du fait qu'il a manifestement retrouvé un emploi immédiatement après la rupture, ne produisant aucun document quant à son inscription à Pôle Emploi, et M.[K] ne pouvant se baser sur des éléments hypothétiques, la cour dit que la somme allouée par les premiers juges correspond à l'indemnisation adéquate en lien avec la rupture.

Sur le rappel de rémunération variable

L'appelant indique que l'opération Terlat/Rethome devait assurer à la société la réalisation de 1000 lots, soit un dépassement de 200% de ses objectifs.

Il considère que l'avenant est applicable à cette opération comme un acte assimilé à une promesse de vente, étant apporteur de l'affaire par son réseau personnel ; il soutient que la somme de 30 000 euros ne peut être déduite, s'agissant d'une libéralité.

Il indique comptabiliser un rappel de rémunération variable de 59 000 euros représentés par :

- 12 300 euros au titre de la présentation du dossier Panoramique,

- 21 700 euros au titre de la présentation du dossier Roquilles

- 18 000 euros de la présentation du dossier [U],

- 7 000 euros au titre du bonus de dépassement annoncé dans la lettre du 24 avril 2017,

mais avoir plafonné sa demande à la somme de 49 000 euros.

La société indique que seule la signature des promesses de vente fait naître le droit à obtention de primes variables et que l'opération citée par l'appelant a fait l'objet de promesses de vente avant son embauche, M.[K] n'ayant titré aucune de celles-ci.

Elle ajoute que M. [V], apporteur de l'affaire, a choisi la société pour sa capacité financière à racheter les parts des trois sociétés civiles de M. [F], précisant que son contact avant l'embauche du salarié était Mme [T].

Elle explique qu'elle a entendu récompenser le travail de M.[K] par une prime exceptionnelle hors avenant, somme figurant sur le bulletin de salaire du mois d'avril 2017.

En tout état de cause, elle estime que le salarié réclame une rémunération distincte pour des mêmes diligences et ne pourrait recevoir une somme supérieure à 19 000 euros compte tenu du plafond fixé dans l'avenant.

La cour constate au vu des pièces produites par la société que l'opération visée par les parties a concerné le rachat de parts de SCI et de société de construction, les promesses unilatérales de vente ayant été signées en 2015 (pièces n°22 à 25) et le travail effectué ensuite par M.[K] sur ces dossiers n'était pas de la prospection immobilière, de sorte que l'avenant sur la prime variable ne pouvait pas s'appliquer, l'annexe étant très précise quant au fait générateur de déclenchement des primes et au processus de validation de celles-ci.

C'est d'ailleurs pour cette raison qu'il n'a pas été donné une suite favorable aux demandes de primes remplies par M.[K] en mars et début avril 2017 et non validées par les personnes habilitées.

En revanche, la société a entendu pallier cette impossibilité de versement d'une rémunération variable calculée aux nombre de lots comme prévu à l'avenant, en versant une prime exceptionnelle de 30 000 euros à M.[K], à la fin avril 2017, récompensant ainsi le travail fourni.

Par ailleurs, le courrier du 24 avril 2017 lui précisait qu'ayant atteint son objectif annuel, il bénéficierait outre d'un bonus de 7 000 euros, d'une augmentation de sa rémunération variable par lot pour toute future promesse signée en 2017 et d'une prime exceptionnelle sur tout futur partenariat avec Terlat/Rethome.

Dès lors, M.[K] n'est pas en droit de solliciter le paiement d'une rémunération variable sur l'opération précitée mais compte tenu des éléments visés ci-dessus, la société reste redevable du bonus promis et non payé et du complément de rémunération variable pour atteinte des objectifs.

L'avenant signé le 14 février 2017 prévoyant que «par application d'une application d'une règle de gestion interne, l'ensemble (en montant brut) des primes diverses, bonus et autres rémunérations annexes versés dans une année est plafonné au montant du salaire annuel (brut) fixé de base», M.[K] ne peut solliciter en complément de la prime de 30 000 euros que la somme de 19 000 euros.

En conséquence, par voie d'infirmation, il convient de condamner la société à payer cette somme et à délivrer à l'appelant un bulletin de salaire conforme au présent arrêt mais il est inutile de prévoir une nouvelle attestation Pôle Emploi et une astreinte.

Sur les frais et dépens

Au visa des articles 908 et 910-4 du code de procédure civile, la société indique que l'appelant est irrecevable à formuler une demande de frais irrépétibles portée dans ses dernières conclusions à un montant de 6 000 euros, alors que celles-ci ne sont pas intervenues dans le délai de trois mois, la cour n'étant valablement saisie que de la demande initiale formulée pour un montant de 3 000 euros.

Comme l'indique à juste titre l'appelant, s'agissant de l'augmentation d'une demande déjà contenue dans ses premières écritures, il ne s'agit pas d'une prétention nouvelle et dès lors aucune irrecevabilité n'est encourue.

La société qui succombe même partiellement doit s'acquitter des dépens d'appel, être déboutée de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre payer à M.[K] la somme de 2 000 euros en sus de celle déjà allouée par les premiers juges.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Déboute la société Marignan de sa demande relative à l'absence d'effet dévolutif de l'appel quant au rejet de la demande indemnitaire de M.[K],

Rejette la fin de non recevoir soulevée par la société concernant les frais irrépétibles,

Confirme, dans ses dispositions soumises à la cour, le jugement déféré, SAUF en ce qu'il a débouté M. [Y] [K] de sa demande au titre du rappel de salaire,

Statuant du seul chef infirmé et Y ajoutant,

Condamne la société Marignan à payer à M.[K] les sommes suivantes :

- 19 000 euros bruts au titre des salaires lui restant dus au titre de l'année 2017,

- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ,

Condamne la société Marignan à délivrer à M.[K] un bulletin de paie conforme au présent arrêt,

Dit n'y avoir lieu à astreinte,

Condamne la société Marignan aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/00408
Date de la décision : 24/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-24;19.00408 ?
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