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23/03/2023 | FRANCE | N°22/13758

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 23 mars 2023, 22/13758


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 22/13758 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKFNF







S.A.M.C.V. MATMUT





C/



[R] [Z]







Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Etienne DE VILLEPIN



Me Charles TOLLINCHI









Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NICE en date du 06 Octobre 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 22/00487.





APPELANTE



S.A.M.C.V. MATMUT

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Etienne DE VILLEPIN de la SELAS VILLEPIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 23 MARS 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 22/13758 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BKFNF

S.A.M.C.V. MATMUT

C/

[R] [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Etienne DE VILLEPIN

Me Charles TOLLINCHI

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NICE en date du 06 Octobre 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 22/00487.

APPELANTE

S.A.M.C.V. MATMUT

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Etienne DE VILLEPIN de la SELAS VILLEPIN & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée à l'audience par Me Laura PETITET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIME

Monsieur [R] [Z]

né le 29 Novembre 1951 à [Localité 5] (Italie), demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Charles TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Janvier 2023 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023.

ARRÊT

I. FAITS. PROCÉDURE.PRÉTENTIONS DES PARTIES.

[R] [Z] a été victime d'un accident de la circulation, survenu à [Localité 3] le 15 juin 2020. Alors qu'il conduisait son deux-roues assuré auprès de la compagnie d'assurances MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEURS MUTUALISTES MATMUT, il a glissé dans un rond-point. Blessé, il a été transporté au centre hospitalier de [Localité 3].

Par acte d'huissier de justice du 15 mars 2022, [R] [Z] a fait assigner la société d'assurances MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEURS MUTUALISTES MATMUT devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice, afin de voir ordonner, en application de l'article 145 du code de procédure civile, une expertise médicale et de la voir condamner, au visa de l'article 835 du même code et de la loi du 5 juillet 1985, au paiement de la somme de 8.000 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice patrimonial et extra patrimonial et d'une indemnité de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par ordonnance du 06 octobre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice a :

- Ordonné une expertise de [R] [Z] et commis pour y procéder le Docteur [Y] [H] ( mission nomenclature Dintilhac)

- Déclaré l'ordonnance commune à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES ALPES-MARITIMES

- Condamné la compagnie d'assurances MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEURS MUTUALISTES MATMUT à payer à [R] [Z] une indemnité provisionnelle de 5.000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice patrimonial et extra patrimonial

- Condamné la compagnie d'assurances MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEURS MUTUALISTES MATMUT à payer à [R] [Z] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamné la compagnie d'assurances MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEURS MUTUALISTES MATMUT aux dépens de l'instance.

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe le 17 octobre 2022 , la SAMCV MATMUT a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a :

- Ordonné une expertise avec mission de droit commun alors que l'indemnisation intervient dans un cadre contractuel

- Condamné la MATMUT à payer à [R] [Z] une indemnité provisionnelle de 5000 € à valoir sur la réparation du préjudice patrimonial et extra patrimonial

- Condamné la MATMUT à la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamné la MATMUT aux dépens de l'instance

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

Par conclusions notifiées au RPVA le 09 novembre 2022, la MATMUT MUTUELLE ASSURANCE DES TRAVAILLEURS MUTUALISTES demande à la cour de :

Vu les articles 834 et suivants du code de procédure civile

Vu l'article 1103 du Code civil

A titre principal Réformer l'ordonnance querellée en ce qu'elle a :

' Ordonné une expertise avec mission de droit commun alors que l'indemnisation intervient dans un cadre contractuel

' Condamné la MATMUT à payer à [R] [Z] une indemnité provisionnelle de 5000 € à valoir sur la réparation du préjudice patrimonial et extra patrimonial

' Condamné la MATMUT à la somme de 800 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

' Condamné la MATMUT aux dépens de l'instance

Subsidiairement

Cantonner la mission de l'expert aux postes de préjudice contractuellement indemnisables à savoir :

' Chiffrer les frais de soins en relation avec l'accident resté à charge sous déduction des versements des organismes sociaux, jusqu'à la date de consolidation

' Chiffrer les pertes de revenus professionnels pendant la durée de l'incapacité temporaire de travail

' Dire si les blessures subies entraînent une incapacité paiement partielle au moins égale à 10%.

Débouter Monsieur [Z] de ses plus amples demandes fins et conclusions.

Dans ses conclusions, la MATMUT expose qu'il ne suffit pas d'être victime d'un accident de la circulation pour bénéficier d'une indemnisation de la part de l'assureur du véhicule. Il est indispensable de pouvoir mettre en cause un conducteur ou un gardien de véhicule impliqué. (Civ. 2e, 24 juin 1992, n° 90-22.165, Bull. civ. II, n° 172). Ainsi, un conducteur qui perd le contrôle de son véhicule ne dispose d'aucun recours contre son propre assureur de responsabilité pour obtenir l'indemnisation de ses dommages matériels comme corporels, sauf garanties contractuelles spécifiques. En l'espèce, Monsieur [Z] qui indique avoir dérapé avec son deux-roues ne peut bénéficier des dispositions de la loi du 5 janvier 1985, mais seulement envisager d'obtenir la mobilisation des garanties contractuelles souscrites pour le véhicule et au titre de la garantie accidents de la vie.

Monsieur [Z] est couvert par deux contrats auprès de la société MATMUT : le contrat « multirisques 2 roues » et le contrat «  multirisques accident de la vie ». Dans le contrat « multirisques 2 roues », l'article 28 des conditions générales stipule une procédure d'arbitrage médical, prévoyant qu'en cas de désaccord entre l'assureur et l'assuré sur le pourcentage de l'incapacité permanente , leur différend est soumis à deux médecins choisis l'un par l'assuré et l'autre par l'assureur. Si ces deux médecins ne peuvent se mettre d'accord, les parties en choisissent un troisième pour les départager et si elles ne s'entendent pas, elles peuvent demander la désignation d'un expert par le président du tribunal judiciaire.

Selon la MATMUT, cette disposition contractuelle faisant loi entre les parties, elle fait obstacle à la demande d'expertise qui est manifestement irrecevable et prématurée.

A titre subsidiaire, il est demandé de cantonner la mission d'expertise aux garanties contractuelles afin que ne soient évalués que les postes de préjudices prévus contractuellement.

Dans ses conclusions d'intimés notifiées par RPVA le 06 décembre 2022, Monsieur [R] [Z] demande à la cour de :

Vu l'article 145 du Code de Procédure civile,

Vu l'article 835 du Code de Procédure Civile,

Vu l'ordonnance du Juge du référé de Nice du 6 octobre 2022

Vu les pièces versées au débat,

CONFIRMER l'ordonnance du Juge du référé du 6 octobre 2022 en toutes ses dispositions,

En conséquence,

- CONDAMNER la Compagnie d'Assurances MATMUT à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

- CONDAMNER la Compagnie d'Assurance MATMUT aux entiers dépens,

Monsieur [Z] rappelle que c'est à juste titre que la MATMUT soutient que le régime d'indemnisation n'est pas celui relatif aux accidents de la circulation, mais qu'il résulte des contrats qu'il a souscrits auprès de la société d'assurances, cette dernière ne contestant aucunement devoir garantir le préjudice qu'il a subi.

Il s'appuie sur les dispositions de l'article 145 du code de procédure civile et rappelle que la MATMUT a désigné un médecin, qu'elle paye, pour dresser un rapport. Il estime être en droit d'obtenir un rapport contradictoire par un médecin qui ne soit pas un expert d'assurance, d'autant que le rapport du médecin expert de l'assurance ne reflète pas l'étendue de ses séquelles.

Selon lui, est abusive pour le consommateur la clause qui prévoit qu'avant de saisir une juridiction, il devait faire désigner deux médecins et ce, à ses frais, pour faire établir un nouveau rapport. Il estime que cette clause est dissuasive pour tout consommateur souhaitant contester le rapport du médecin désigné par l'assureur.

Il estime qu'il était donc légitime à solliciter la désignation d'un médecin, expert judiciaire et s'oppose à la demande subsidiaire en limitation de la mesure d'expertise car elle ne permettrait pas d'éclairer la juridiction sur l'état de sa situation lors de l'examen des demandes au fond.

Sur la provision, il rappelle que l'assureur a proposé une indemnisation totale de ses préjudices à hauteur de 21.500 euros et que la provision de 5000 euros qui lui a été allouée est donc parfaitement justifiée.

Les débats étaient clos le 09 janvier 2023 et l'affaire fixée à l'audience du 18 janvier 2023, et l'affaire retenue.

II. MOTIVATION

Sur l'expertise

Il résulte de l'article 145 du code de procédure civile que « s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».

Le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice a estimé qu' «  en l'état des éléments médicaux produits, [R] [Z] justifie avoir subi un préjudice corporel consécutif à cet accident de la circulation, non indemnisé à ce stade, de sorte qu'il présente un intérêt manifeste à voir établir de façon contradictoire l'étendue du préjudice subi par un médecin expert, inscrit sur la liste de la cour d'appel, présentant toutes les garanties d'objectivité et d'impartialité. »

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application de cet article 145 du code de procédure civile , l'existence de dispositions contractuelles contraires ne fait pas obstacle au juge des référés d'ordonner, avant toute saisine de la juridiction compétente, les mesures d'instruction légalement admissibles s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir la preuve dont pourrait dépendre l'issue du litige ou qui ne se limitent pas aux simples constatations.

Le reproche fait par la MATMUT au juge des référés de ne pas avoir fait application des dispositions contractuelles liant les parties est infondé dans la mesure où l'examen des dispositions contenues dans les contrats ne relevant pas de la compétence du juge des référés, juge de l'évidence. Le juge des référés n'est pas compétent pour examiner ni les clauses contenues dans le contrat, ni le fondement juridique de l'action.

La MATMUT reconnaît dans ses conclusions qu'elle doit une garantie mais estime que cette garantie est limitée à ce qui est prévu dans les contrats multirisques 2 roues et multirisques accident de la vie et a également chiffré une provision. En concluant ainsi, l'assureur reconnaît que monsieur [R] [Z] a un intérêt légitime à obtenir une indemnisation du fait du sinistre survenu .

Sur l'intérêt légitime de monsieur [Z] de voir ordonner une expertise, la cour retient qu'il n'est pas contesté qu'il a été victime d'un accident de deux-roues, dont les modalités seront à définir par le juge du fond. Le 15 juin 2020, à la suite d'une chute alors qu'il était au guidon de son scooter 125 cm3, il a été transporté au Centre Hospitalier de [Localité 3], où un certificat initial était établi, mentionnant : « Allégations du patient et nature de l'accident : AVP deux roues à faible cinétique par glissade sur la chaussée : TC sans PDC ; aurait perdu son casque pendant l'AVP + traumatisme thoracique droit. Il a été constaté les lésions suivantes : - Fractures de la 2ème à la 5ème côtes droites + fracture d'une côte à gauche - Pneumothorax droit, drainé, drainé avec désaturation en 02 - Traumatisme crânien avec hématome sous dural droit, sans effet de masse. »

Il a ensuite été transféré au Centre Hospitalier Universitaire de [Localité 4] au service de Réanimation polyvalente. Un certificat initial du médecin réanimateur établi le 19 juin 2020 précisait : «Etage encéphalique : Hématome sous-dural aigu para-falcoriel frontal droit. Etage thoracique: Pneumothorax droit complet, non compressif. Lame d'hémothorax droit de faible abondance. Emphysème sous-cutané de l'hémithorax droit, en rapport avec de multiples fractures costales Condensation postérobascale droite Etage abdomino-pelvien : Infiltration modérée des loges périrénales, possiblement en rapport avec l'injection itérative de produit de contraste. Cadre osseux : Fracture de l'arc moyen de K2 droite, ainsi que des arcs postérieurs de K3, K4 (déplacée) et K5 droite. Ostéose du ligament longitudinal s'entendant de C2 à C6 (maladie des japonais). CONCLUSIONS : Hématome sous-dural aigu parafalcoriel frontal droit. Pneumothorax droit complet non compressif, avec drain non en place. Fractures costales de K2 à K5, sans volet. »

Monsieur [Z] était alors hospitalisé dans le service réanimation du 15 au 22 juin 2020 puis transféré au service chirurgie thoracique jusqu'à son retour à domicile le 23 juin 2020.

Le 24 juin 2020, le Docteur [B], médecin traitant, prescrivait à Monsieur [Z] 15 séances de rééducation respiratoire au rythme de 5 séances par semaine pendant 3 semaines. La prescription était renouvelée le 14 septembre 2020, en y rajoutant des séances de rééducation de l'épaule droite. Le 10 juillet 2020, des radiographies du thorax montrant une fracture déplacée des arcs postérieurs des 2ème, 3ème, 4ème, et 5ème côtes droites ; une fracture non déplacée de l'arc moyen de la 7ème gauche ; l'absence de pneumothorax ; l'absence d'épanchement pleural ; une atélectasie basale gauche. Le 13 juillet 2020, Monsieur [Z] était vu par le Docteur [G], pneumologue au CHU de [Localité 4], lequel indiquait réadapter le traitement antalgique avec l'arrêt de la morphine à libération prolongée, il ajoutait aux séances de kinésithérapie respiratoire des séances de kinésithérapie de réhabilitation à l'effort et de rééducation posturale.

Le 10 septembre 2020, une radiographie de l'épaule droite et du thorax était réalisée et le compte rendu conclut : « Conflit sous-acromial Enthésopathie avec nombreuses calcifications des insertions des tendons du supra et de l'infra-épineux. Diastasis acromio-claviculaire avec épanchement articulaire. »

Le 14 décembre 2020, une IRM de l'épaule droite était réalisée, le compte rendu conclut : « Discret aspect hérérogène au niveau de l'insertion du tendon supraépineux, pouvant être en rapport avec une fissuration partielle à ce niveau. Remaniement arthrosiques partiellement congestifs de l'articulation acromioclaviculaire. A confronter aux antécédents et aux données cliniques. » Le 10 février 2021, un bilan radiographie était réalisé et laissait apparaître une stabilité de l'état de Monsieur [Z].

Le 8 septembre 2021, des clichés radiographiques de contrôle de gril costal droit montrait :

- des foyers de fractures consolidés dégénératifs gléno-huméraux ; une importance sclérose du massif trochitérien avec réduction majeure de l'espace sous-acromial ; un diastasis acromio-claviculaire d'environ 1cm, non retrouvée du côté controlatéral.

- des remaniements dégénératifs gléno-huméraux ; une importante sclérose du massif trochitérien avec réduction majeure de l'espace sous-acromial ; un diastasis acromio-claviculaire d'environ 1 cm, non retrouvé du côté controlatéral.

Monsieur [Z] était également suivi par un orthoptiste jusqu'au mois de novembre 2021.

La date de consolidation était fixée au 16 novembre 2021 par le Docteur [B].

Enfin, monsieur [Z] estime que le taux d'AIPP retenu par l'expert désigné par l'assurance est manifestement sous-évalué et seul un expert judiciaire, neutre par principe permettra d'avoir une approche objective de cette question.

Tous ces éléments médicaux montrent l'intérêt légitime de monsieur [Z] à voir ordonner une mesure d'expertise judiciaire. L'expertise ainsi ordonnée permettra d'éclairer au mieux la juridiction du fond éventuellement saisie, sans empiéter sur l'appréciation de l'étendue de la garantie contractuelle qu'elle serait amenée à faire.

L'examen de la clause prévoyant les modalités d'intervention des experts médicaux de l'assurance ou de l'assuré contenue dans les contrats ne relevant pas de la compétence du juge des référés, la cour ne peut l'examiner pour déterminer si cette clause est abusive. En tout état de cause, cette clause ne peut faire obstacle à l'application de l'article 145 du code de procédure civile.

La décision sera confirmée en ce qu'elle a estimé que monsieur [Z] démontrait un intérêt légitime et ordonnait une mesure d'expertise judiciaire destinée à décrire et évaluer son préjudice corporel résultant de l'accident.

Sur la provision

L'article 835 du code de procédure civile prévoit que « le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. »

La MATMUT estime que la provision ne peut être versée car l'indemnisation est strictement circonscrite par les limites du contrat. Monsieur [Z] estime quant à lui que la provision est justifiée.

En l'espèce, il est justifié des éléments médicaux suivant :

Le Docteur [I], mandaté par la MATMUT aux fins d'établir une expertise médicale déposait son rapport le 17 novembre 2021 et concluait comme suit :

- Date de consolidation : 17 novembre 2021

- Taux AIPP : 10%

-Absence d'arrêt temporaire total des activités professionnelles

-Absence d'aide humaine post-consolidation

Le 5 janvier 2022, l'assureur proposait d'indemniser Monsieur [Z] comme suit au titre du contrat d'assurance automobile prévoyant la garantie « Dommages corporels du conducteur » :

- Indemnité de base : 250 € (valeur du point) x 10% (taux d'incapacité) = 2 500€

-Indemnité complémentaire : 1 500 € (valeur du point) x 10% (taux d'incapacité) = 15 000 €

Le 22 février 2022, l'assureur MATMUT adressait un courriel à Monsieur [Z] relatif à une offre d'indemnisation pour le contrat d'assurance multirisques Accidents de la vie. La MATMUT propose la somme de 6 000 euros au titre de l'incapacité permanente.

La MATMUT qui a proposé une prise en charge financière à son assuré s'oppose au principe d'une provision sans démontrer en quoi son obligation d'indemniser serait sérieusement contestable.

En acceptant sur le principe d'indemniser mais en s'opposant au quantum, l'assureur empiète sur les prérogatives du juge du fond, seul compétent pour examiner les dispositions contractuelles et les limites de la garantie.

Au stade du référé, l'indemnisation provisionnelle découlait d'une obligation non sérieusement contestable.

En conséquence, la décision sera confirmée.

Sur la demande subsidiaire en cantonnement de mission

Pour les mêmes motifs qu' indiqués ci-dessus, il ne peut être fait droit à la demande de cantonnement de mission, cela supposant une étude des clauses des contrats liant l'assureur à son assuré. Ces attributions n'entrent pas dans la compétence du juge des référés et relèvent des juges du fond, qui seront éventuellement saisis pour déterminer le montant de l'indemnisation de monsieur [Z].

En conséquence, la demande à titre subsidiaire de la société MATMUT au titre du cantonnement de la mission sera rejetée

Sur l'article 700

L'article 700 du code de procédure civile dispose que «  Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :

1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s'il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l'Etat. »

En l'espèce, la société MATMUT sera condamnée à payer à monsieur [R] [Z] la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Sur les dépens

Partie perdante, la société MATMUT sera condamnée aux entiers dépens

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME la décision dans toutes ses dispositions

Y AJOUTANT

DEBOUTE la société MATMUT de sa demande à titre subsidiaire en cantonnement de mission d'expertise

CONDAMNE la société MATMUT à payer à monsieur [R] [Z] la somme de 1.500 euros (mille cinq-cents euros )au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société MATMUT aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Mars 2023,

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 22/13758
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;22.13758 ?
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