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16/03/2023 | FRANCE | N°18/16833

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 16 mars 2023, 18/16833


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 16 MARS 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/16833 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDHO3







[A], [L] [E] épouse divorcée [M]

[U], [N], [J] [M]





C/



[Y] [C]

[B] [X] épouse [C]

SARL ARION PISCINES POLYESTER













Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Véronique DEMICHELIS



Me Frédéric DURAND



Me Jean baptiste GOBAILLE





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 04 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/01773.





APPELANTS



Madame [A], [L] [E] épouse divorcée ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 16 MARS 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/16833 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDHO3

[A], [L] [E] épouse divorcée [M]

[U], [N], [J] [M]

C/

[Y] [C]

[B] [X] épouse [C]

SARL ARION PISCINES POLYESTER

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Véronique DEMICHELIS

Me Frédéric DURAND

Me Jean baptiste GOBAILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 04 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/01773.

APPELANTS

Madame [A], [L] [E] épouse divorcée [M]

née le 08 Mai 1964 à BEAUVAIS (60000), demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Véronique DEMICHELIS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée à l'audience par Me Manon CHAMPEAUX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Monsieur [U], [N], [J] [M]

né le 05 Juillet 1961 à BEAUVAIS (60), demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Véronique DEMICHELIS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée à l'audience par Me Manon CHAMPEAUX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur [Y] [C]

né le 02 Septembre 1973 à CHALON SUR SAONE, demeurant [Adresse 7]

représenté à l'audience par Me Frédéric DURAND, avocat au barreau de TOULON

Madame [B] [X] épouse [C]

née le 16 Novembre 1974 à SAINT REMY (71100), demeurant [Adresse 7]

représentée à l'audience par Me Frédéric DURAND, avocat au barreau de TOULON

SARL ARION PISCINES POLYESTER, demeurant [Adresse 8]

représentée à l'audience par Me Jean baptiste GOBAILLE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Novembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Madame Angélique NAKHLEH, Conseillère

Monsieur Olivier ABRAM, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Février 2023, puis avisées par le Greffe le 16 Février 2023, que la décision était prorogée au 16 Mars 2023.

ARRÊT

FAITS. PROCÉDURE.PRÉTENTIONS DES PARTIES.

Par acte en date du 20 août 2012 de Maître [D] [H], notaire à [Localité 6], Monsieur [Y] [C] et Madame [B] [X] épouse [C] ont acquis une villa avec piscine située à [Adresse 9].

D'après le titre de propriété, les vendeurs, Monsieur et Madame [M], ont fait construire l'ensemble immobilier entre 2009 et 2012.

Concernant la piscine, Monsieur et Madame [M] ont remis à Monsieur et Madame [C] la facture du fabriquant/installateur de piscines, la société ARION PISCINES POLYESTER, en date du 30 juillet 2010.

Au cours de l'été 2015, la piscine a présenté des phénomènes de fissurations- plus précisément, la coque de la piscine s'est incurvée à environ un mètre de hauteur sur les parois verticales des deux longueurs du bassin.

Monsieur et Madame [C] ont pris contact avec le fabricant/installateur de la piscine, lequel, après une visite des lieux, a proposé dans un courrier du 4 novembre 2015, une intervention sur la coque par la pose d'une couche supplémentaire de tissus fibre de verre, de résine et reprise du gelcoat.

Par ordonnance de référé en date du 20 septembre 2016, Monsieur [S] [F] était désigné en qualité d'expert et il déposait son rapport le 10 janvier 2017.

Monsieur et Madame [C] ont fait citer en date du 22 juin 2017, devant le Tribunal d'Aix-en-Provence, la SARL Arion Piscines Polyester aux fins :

- de la voir déclarer responsable des désordres affectant la piscine;

- de la voir condamner à réparer le préjudice subi du fait de ces désordres ;

- de la voir condamner à leur verser la somme de 33.540,00 euros.

Monsieur et Madame [M] ont été également attraits dans la cause par acte du 18 juillet 2018 afin d'être condamnés in solidum avec ARION PISCINES POLYESTER, désormais représentée par Me [W] [K], ès qualité de commissaire à l'exécution du plan, assigné par acte du 22 juin 2028.

Par jugement du 04 Septembre 2018, le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence a :

DIT que la SARL Arion Piscines Polyester est responsable des désordres constatés ;

DIT que les désordres constatés sont de nature décennale ;

CONDAMNE in solidum Monsieur et Madame [M] à verser à Monsieur et Madame [C] la somme de 33.450 euros TTC au titre des travaux de reprise ;

FIXE au passif de la SARL Arion Piscines Polyester la créance de Monsieur et Madame [C] à la somme de 33.540.00 euros TTC;

CONDAMNE in solidum la SARL Arion Piscines Polyester et Maître [K] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SARL Arion Piscines Polyester et Monsieur et Madame [M] à payer la somme de 3.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

ORDONNE l'exécution provisoire du jugement ;

CONDAMNE in solidum la SARL Arion Piscines Polyester et Maître [K] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SARL Arion Piscines Polyester et Monsieur et Madame [M] à payer les dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise, au profit de Maître Paul DRAGON, Avocat

Par déclaration d'appel du 23 octobre 2018, Monsieur [U] [M] et Madame [A] [E] divorcée [M] ont interjeté appel de la décision rendue et demandent d'infirmer le jugement rendu le 4 septembre 2018 par le Tribunal de grande instance d'AIX EN PROVENCE en ce qu'il a :

Dit que la SARL ARION PISCINES POLYESTER est responsable des désordres constatés;

Dit que les désordres constatés sont de nature décennale ;

Condamné in solidum Monsieur et Madame [M] à verser à Monsieur et Madame [C] la somme de 33.540,00 € au titre des travaux de reprise.

Fixé au passif de la SARL ARION PISCINES la créance de Monsieur et Madame [C] à la somme de 33.540,00 euros TTC.

Condamné in solidum la SARL ARION PISCINES POLYESTER et Maître [K] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SARL ARION PISCINES POLYESTER et Monsieur et Madame [M] à verser à Monsieur et Madame [C] la somme de 3.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamné in solidum la SARL ARION PISCINES POLYESTER et Maître [K] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SARL ARION PISCINES POLYESTER et Monsieur et Madame [M] aux dépens en ce compris les frais d'expertise, distraits au profit de Maître Paul DRAGON, Avocat ;

Dans leurs dernières conclusions notifiées par RPVA en date du 12 juillet 2019 , au visa des articles 112 et suivants du Code de procédure civile et des articles 1792 et suivants du Code civil, Monsieur [M] et Madame [E] demandent à la cour :

In limine litis,

Dire et juger que les actes de signification de l'assignation au fond sont nuls et non avenus ;

En conséquence, dire et juger nul le Jugement rendu le 4 septembre 2018 par le Tribunal de grande instance ;

A titre principal, si le Jugement n'était pas déclaré nul,

Infirmer le jugement rendu en ce qu'il a condamné les consorts [E]-[M];

Dire et juger que le rapport d'expertise judiciaire est inopposable aux consorts [E]-[M] et qu'il ne peut donc justifier aucune condamnation à leur encontre ;

Rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions formées à l'encontre des consorts [E]-[M] ;

A titre subsidiaire,

Dire et juger que les désordres ne présentent pas de nature décennale ; En conséquence, dire et juger que les consorts [E]-[M] ne peuvent être déclarés responsables des désordres en leur qualité de constructeur ;

A titre infiniment subsidiaire,

Dire et juger que seule la société ARION PISCINES POLYESTER est responsable des désordres ;

Condamner la société ARION PISCINES POLYESTER à relever et garantir intégralement les consorts [E]-[M] des condamnations prononcées à leur encontre;

En tout état de cause

Condamner tout succombant à payer aux consorts [E]-[M] la somme de 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens

Par conclusions notifiées par RPVA le 31 octobre 2022 , Monsieur et Madame [C] demandent le rabat de la clôture et l'admission des présentes conclusions, ayant reçu notification de la part de la société ARION PISCINE POLYESTER de conclusions le vendredi 28 octobre 2022 auxquelles ils entendent répliquer.

Dans ce dernier jeu de conclusions, les époux [C] demandent :

Sur la nullité de l'assignation :

CONSTATER que l'assignation a régulièrement été notifiée à Monsieur [M] et à Madame [E].

EN CONSEQUENCE, DEBOUTER les consorts [E]-[M] de leurs demandes tendant à voir dire et juger nuls les actes de significations de l'assignation au fond ainsi que le jugement rendu le 4 septembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance.

Sur l'inopposabilité du rapport d'expertise :

CONSTATER que le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [F] a été versé aux débats et soumis à la libre discussion des parties.

EN CONSEQUENCE, DIRE ET JUGER que le principe de contradiction a été respecté et déclarer le rapport d'expertise opposable aux consorts [E]-[M].

Sur la responsabilité des vendeurs :

CONSTATER que les désordres affectant la piscine affectent la solidité de l'ouvrage.

EN CONSEQUENCE, DECLARER les consorts [E]-[M] responsables des désordres affectant la piscine en leur qualité de vendeur.

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

- DEBOUTER les consorts [E]-[M] et la société ARION PISCINES POLYESTER de toutes leurs demandes, fins et conclusions et confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les consorts [E]-[M] et la société ARION PISCINES POLYESTER à indemniser les époux [C].

CONDAMNER les consorts [E]-[M] et la société ARION PISCINES POLYESTER à payer aux époux [C] la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.

CONDAMNER tous succombants aux dépens distraits au profit de Maître Frédéric DURAND, avocat sur son affirmation de droit.

Par CONCLUSIONS n°2 D'INTIME & D'APPEL INCIDENT - Notifiées le 28 octobre 2022 - la société ARION PISCINES POLYESTER, au visa de l'ordonnance de référé du Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE en date du 20/09/2016 , du rapport d'expertise de Monsieur [F], Expert judiciaire demande de :

DIRE ET JUGER recevable l'appel incident de la Sarl ARION PISCINES POLYESTER, et DIRE ET JUGER ses demandes, fins et prétentions bien-fondées.

SUR LA DEMANDE in limine litis DES CONSORTS [M]-[E] DANS LEUR APPEL PRINCIPAL TIREE DE LA NULLITE DE L'ASSIGNATION AU FOND ET LA NULLITE DU JUGEMENT

CONSTATER que la Sarl ARION PISCINES POLYESTER s'en rapporte et DIRE ET JUGER que si la nullité du jugement devait être prononcée, elle le serait pour tous les chefs du dispositif et à l'endroit de l'ensemble des parties.

TIRER toutes les conséquences de la nullité du jugement,

et CONDAMNER tout succombant à payer à la Sarl ARION PISCINES une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens.

Au fond :

REFORMER le jugement rendu le 4 septembre 2018 par le Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE ,

REJETER toutes demandes, fins et prétentions tant à titre principal qu'à titre incident ou reconventionnel et subsidiaire des consorts [M]-[E] et des époux [C] à l'encontre de la Sarl ARION PISCINES POLYESTER. et STATUANT à nouveau : Vu les articles 122 & 123 du CPP

A titre principal :

- ACCUEILLIR la fin de non-recevoir tirée de la prescription quinquennale de l'obligation du vendeur, à l'endroit de l'action de Monsieur et Madame [C], au visa de l'article L.110-4 du Code de commerce ;

DÉBOUTER Monsieur et Madame [C] et Monsieur et Madame [M] de toutes demandes formulées à l'encontre de la SARL ARION PISCINES POLYESTER eu égard tant à la prescription de l'action qu'à l'absence de caractère décennal des désordres constatés ;

JUGER que Me [K], commissaire à l'exécution du plan dont la mission a cessé par Jugement du Tribunal de Commerce de SALON-DE-PROVENCE du 16 avril 2021, est hors de cause.

A titre subsidiaire :

DIRE ET JUGER que la coque de la piscine peut être reprise et les désordres sur la coque réglés sans enlèvement ni construction et pose d'un bassin neuf.

REJETER en l'état les conclusions du rapport d'expertise de Monsieur [F]

DIRE ET JUGER que la Sarl ARION PISCINES ne saurait être condamnée à régler une somme de 33.540 euros.

A titre très subsidiaire

REDUIRE à de plus justes proportions le montant du coût des réparations et/ou reprise du sinistre,

ACCUEILLIR reconventionnellement sa demande de voir ORDONNER un partage de responsabilité avec les époux [C] responsables de leur propre préjudice en ayant refusé les réparations proposées à l'été 2015 par la Sarl ARION PISCINES et en ayant attendu 2 mois pour faire une réclamation officielle le 26/10/2015 et encore 8 mois pour assigner en référé aux fins d'expertise, retard qui a concouru à leur préjudice.

A titre infiniment subsidiaire :

REDUIRE à de plus justes proportions le montant des condamnations de tous chefs qui seraient mises à la charge de la Sarl ARION PISCINES POLYESTER à titre principal, subsidiaire et/ou dans le cadre d'une condamnation à relever et garantir tout autre succombant.

- En toute hypothèse CONDAMNER tout succombant à payer à la Sarl ARION PISCINES une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC et aux entiers dépens

L'ordonnance de clôture intervenait le 21 novembre 2022 pour l'affaire être plaidée le 29 novembre 2022 .

MOTIVATION

Sur la nullité du jugement

Monsieur [M] et Madame [E] soulèvent la nullité des actes de procédure, à savoir les assignations délivrées à leur encontre, et en conséquence, la nullité du jugement se prévalant d'une fin de non-recevoir.

Ils estiment qu'en faisant délivrer les assignations à une adresse où ils ne résidaient pas et alors qu'ils avaient divorcés, les significations sont nulles.

Si l'acte introductif d'instance peut être entaché de nullité et faire grief aux défendeurs en les mettant dans l'impossibilité d'organiser et présenter leur défense, il est toutefois nécessaire de démontrer la carence des demandeurs et la non-communication à l'huissier de justice instrumentaire des éléments lui permettant de délivrer de façon régulière les assignations.

En l'espèce, Monsieur [U] [M] et Madame [A] [M] ont été assignés devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, le 18 juillet 2017 par acte remis à étude. L'adresse figurant sur et acte est le [Adresse 4]. L'huissier a pris soin de noter que le domicile était certain car l'adresse a été conformé par le voisinage.

En ce qui concerne Monsieur [M], c'est également l'adresse qui figure sur sa déclaration d'appel du 23 octobre 2018.

Mme [E], divorcée [M] indique le [Adresse 1] sur sa déclaration d'appel.

L'attestation de vente notariée du 28 août 2012 entre les consorts [M] et les [C] indique le [Adresse 2] pour Monsieur et Madame [M].

Le jugement de divorce rendue le 20 février 2017 par le tribunal de grande instance de BEAUVAIS mentionne les adresses suivantes : [Adresse 1] pour Madame [A] [E] épouse [M] et [Adresse 3] chez Monsieur [I] [O] [Localité 5] pour Monsieur [U] [M]. Il n'est toutefois pas justifié de la transcription sur les actes d'état civil de ce jugement.

Une pluralité d'adresse concernant les défendeurs apparaît donc à la lecture des pièces.

En délivrant les assignations au [Adresse 4], adresse confirmée par le voisinage pour Monsieur et Madame [M], l'huissier instrumentaire a procédé régulièrement aux significations.

Aucune nullité ne peut donc en être tirée et la demande en nullité du jugement sera rejetée.

Sur le rapport d'expertise

Il est exact que Monsieur [M] et Madame [E] n'ont pu assister aux opérations d'expertise et que le rapport déposé par Monsieur [F] n'a pas été porté à leur connaissance avant la présente procédure devant la cour d'appel.

Il est admis que le juge ne peut écarter un rapport d'expertise judiciaire ou amiable, établi de façon non contradictoire , dans la mesure où il a été régulièrement versé au débat et soumis à la libre discussion des parties. Si tel ne fut pas le cas devant les premiers juges, il en est autrement en cause d'appel où les parties ont pu discuter du rapport d'expertise, figurant au bordereau des pièces de Monsieur et Madame [C] et en pièce n° 3 du dossier du conseil de Monsieur [M] et Madame [E].

En conséquence, la demande tendant à l'inopposabilité du rapport d'expertise sera rejetée.

Sur la responsabilité et les désordres

L'article 1792 «  tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs, ou l'un de ses éléments d'équipement , le rendent impropre à sa destination .

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère».

L'article 1792-1 2° un code civil au terme duquel «  est réputé constructeur de l'ouvrage : toute personne qui vend après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ».

En l'espèce, après avoir précisé que les désordres affectaient la solidité de l'ouvrage et présentaient donc un caractère décennal engageant la garantie des constructeurs, le tribunal a justement constaté que la société ARION PISCINES POLYESTER était responsable des désordres en sa qualité de constructeur et installateur de la piscine, responsabilité à laquelle sont tenus Monsieur [M] et Madame [E] en leur qualité de vendeurs d'un ouvrage qu'ils avaient fait construire ; que la société ARION PISCINES POLYESTER n'avait pas respecté les règles de l'art, en retenant que l'expert indique en page 4 de son rapport que la solution envisagée par la SARL ARION PISCINES POLYESTER consistant à appliquer une couche supplémentaire de fibre de verre n'était pas satisfaisante que la seule solution envisageable pour garantir la pérennité de l'ouvrage serait de rajouter des renforts structurels, ce qui serait techniquement difficile à réaliser et très coûteux, le tout avec un résultat aléatoire avant de préconiser le « remplacement à neuf du bassin comprenant l'enlèvement de la coque après démolition partielle des plages en périphérie , des travaux de remise à niveau du sol d'assiette, la fourniture et la pose d'une nouvelle coque , son raccordement hydrauliques aux réseaux laissés en place, et la reconstitution des plages carrelées en périphérie. » pour un prix évalué à 33.540,00 euros , le premier juge a fait une juste analyse des faits de la cause, appliqué à l'espèce les règles de droit qui s'imposaient et pertinemment répondu aux moyens des parties pour la plupart repris en appel.

À ces justes motifs que la cour adopte, il convient seulement d'ajouter que la responsabilité décennale prévue par l'article 1792 du code civil se prescrit par dix ans ; que la prescription pour les actions entre commerçants prévue par l'article L110-4 du code de commerce n'a pas vocation à s'appliquer dans le cadre de la responsabilité pour construction d'ouvrages, qu'aucun partage de responsabilité ne peut être ordonnée, s'agissant d'une responsabilité légale pour les constructeurs et les vendeurs réputés constructeurs, que dès lors, Monsieur [M] et Madame [E] sont également responsables des désordres de nature décennale, ayant fait édifier la piscine et ce, en application de l'article 1792-1 2° ; que la responsabilité des époux [C] dans l'aggravation du dommage ne peut être retenue du simple fait qu'ils auraient tardé à agir en justice, qu'en effet, l'expert décrit bien dans son rapport un ouvrage qui aurait dû être renforcée lors de sa construction avec l'insertion de renforts longitudinaux et verticaux destinés à assurer la rigidité de l'ensemble, que la solution consistant à passer du gelcoat était insuffisante et qu'ainsi le délai écoulé entre l'apparition des dommages et l'action en justice n'a pas pu être une cause d'aggravation du dommage.

La cour rappelle qu'il résulte du rapport d'expertise que « la piscine est affectée d'un défaut de fabrication , qui a induit un plissement horizontal de la coque polyester , sur ses deux longueurs; ce désordre n'était certainement pas visible le jour de la réception et a pu se déclarer ou s'aggraver au fil du temps ». L'expert ajoute que « ces défauts proviennent d'une fabrication ne répondant pas aux règles de l'art » et que les « plissements constatés affectent la structure même de la paroi en polyester et sont très certainement le résultat d'une mauvaise construction qui n'a pas tenu compte des efforts subis par lesdites parois; ainsi que les renforts dans ces zones ont été sous-dimensionnés ».

La cour ajoutera que dès les conclusions de l'expert, rapport déposé le 10 janvier 2017, aucune proposition n'a été formulée par ARION PISCINES POLYESTER et que cela a nécessité une nouvelle action en justice; enfin, la somme fixée par l'expert ne peut être réduite à de plus justes proportions, celle-ci consistant en une estimation des travaux par un homme de l'art.

En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé sur la responsabilité de la SARL ARION PISCINES POLYESTER, qu'il conviendra d'y ajouter la responsabilité de Monsieur [M] et Madame [E] en application de l'article 1792-1 2° du code civil.

La mission de Me [K], commissaire à l'exécution du plan , a cessé et la société ARION PISCINE POLYESTER n' étant plus sous mesure de sauvegarde de justice, elle sera condamnée à relever et garantir Monsieur [M] et Mme [E] du paiement de la somme de 33450 euros, justement appréciée par l'expert.

Aucun justification tirée de l'équité ou de la situation des parties ne justifient l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Monsieur [M], Madame [E] et la société ARION PISCINES POLYESTER seront condamnés aux dépens in solidum et en ordonne la distraction au profit de Me Frédéric DURAND.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement du Tribunal de Grande Instance d'Aix-en Provence du 04 septembre 2018 en ce qu'il a dit que la SARL ARION PISCINES POLYESTER est responsable des désordres de nature décennale constatés

STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT

DEBOUTE Monsieur [M] et Madame [E] de leurs demandes en nullité du jugement et en inopposabilité du rapport d'expertise

DECLARE Monsieur [U] [M], Madame [A] [E] responsables des désordres de nature décennale affectant la piscine du fait de leur qualité de constructeurs en application de l'article 1792-1 2 ° du code civil

CONDAMNE Monsieur [U] [M], Madame [A] [E] , in solidum avec la société ARION PISCINES POLYESTER à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 33.450 euros TTC (trente trois mille quatre-cent-cinquante euros ) au titre des travaux de reprise.

DONNE acte à la société ARION PISCINES POLYESTER que la mission de Me [K], commissaire à l'exécution du plan , a cessé

CONDAMNE la société ARION PISCINES POLYESTER à relever et garantir Monsieur [U] [M] et Madame [A] [E]

DEBOUTE la SARL ARION PISCINES de sa demande en prescription quinquennale de l'action en responsabilité des commerçants

DEBOUTE la SARL ARION PISCINES en partage de responsabilité

REJETTE les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société ARION PISCINE POLYESTER et Monsieur [U] [M] et Madame [A] [E] , in solidum, aux entiers dépens de première instance et d'appel et en ordonne la distraction au profit de Me Frédéric DURAND .

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Mars 2023,

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/16833
Date de la décision : 16/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-16;18.16833 ?
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