COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 06 MARS 2023
N° 2023/ 295
RG 23/00295
N° Portalis DBVB-V-B7H-BK5BO
Copie conforme
délivrée le 06 Mars 2023 par courriel à :
-l'avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 03 Mars 2023 à 16h18.
APPELANT
Monsieur [E] [V] [S]
né le 14 Février 2004 à [Localité 1] (GUINÉE CONAKRY)
de nationalité Guinéenne
non comparant en personne, représenté par Me Ariane FONTANA, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, avocat commis d'office
INTIME
Monsieur le préfet des ALPES MARITIMES
Représenté par M. [G] [Y]
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L'affaire a été débattue en audience publique le 06 Mars 2023 devant Madame Laurence DEPARIS, Conseillère à la cour d'appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Pauline BILLO-BONIFAY, Greffier placé,
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2023 à 12 H 05,
Signée par Madame Laurence DEPARIS, Conseillère et Mme Pauline BILLO-BONIFAY, Greffier placé,
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ;
Vu l'arrêté portant détermination de l'Etat responsable en date du 2 janvier 2023 notifié le même jour à 17h51
Vu l'arrêté portant transfert dans le cadre de la procédure DUBLIN pris le 17 janvier 2023 par le préfet des ALPES MARITIMES , notifié le même jour à 10h40 ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 2 Janvier 2023 par le préfet des ALPES MARITIMES notifiée le même jour à 17h51;
Vu la décision de maintien en rétention prise le 17 Janvier 2023 par le préfet des ALPES MARITIMES notifiée le même jour à 10h40;
Vu l'ordonnance du 03 Mars 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant le maintien de Monsieur [E] [V] [S] dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
Vu l'appel interjeté le 4 Mars 2023 par Monsieur [E] [V] [S] ;
Monsieur [E] [V] [S] est non comparant.
Son avocat a été régulièrement entendu ; il conclut à l'absence de conditions pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention, les délais prévus par l'article 28 3° du règlement dit DUBLIN III n'étant pas respectés. En l'absence de respect des délais, il tombe sous la responsabilité de la France, il n'y a pas de dérogation à ce délai, peu importe le motif il n'est pas prévu par les accords de Dublin, il relève aujourd'hui de la France qui doit examiner sa demande d'asile, sa mesure de rétention doit être levée. Les conditions de la troisième prolongation ne sont pas réunies, il n'y a pas eu d'obstruction. Ce n'est pas le délai de 6 mois car il n'y a pas eu de contestation de l'arrêté de transfert.
Le représentant de la préfecture sollicite confirmation de la décision frappée d'appel. Le vol a été annulé à la demande des autorités italiennes qui n'acceptent plus de réadmission jusqu'au 15 mars 2023, un vol est prévu le 20 mars, il y a un laissez-passer délivré par la préfecture. Le transfert doit se faire pendant le délai de 6 mois et non 6 semaines au vu de l'article 29 du règlement Dublin III.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l'appel contre l'ordonnance du juge des libertés et de la détention n'est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d'irrégularité.
En application de l'article 28 du RÈGLEMENT (UE) N 604/2013 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte), Les États membres peuvent placer les personnes concernées en rétention en vue de garantir les procédures de transfert conformément au présent règlement lorsqu'il existe un risque non négligeable de fuite de ces personnes, sur la base d'une évaluation individuelle et uniquement dans la mesure où le placement en rétention est proportionnel et si d'autres mesures moins coercitives ne peuvent être effectivement appliquées.
Lorsqu'une personne est placée en rétention en vertu du présent article, son transfert de l'État membre requérant vers l'État membre responsable est effectué dès qu'il est matériellement possible et au plus tard dans un délai de six semaines à compter de l'acceptation implicite ou explicite par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou à compter du moment où le recours ou la révision n'a plus d'effet suspensif conformément à l'article 27, paragraphe 3.
Lorsque l'État membre requérant ne respecte pas les délais de présentation d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge ou lorsque le transfert n'intervient pas dans le délai de six semaines visé au troisième alinéa, la personne n'est plus placée en rétention. Les articles 21, 23, 24 et 29 continuent de s'appliquer en conséquence.
Il résulte de la jurisprudence européenne que le délai maximum de six semaines dans lequel le transfert d'une personne placée en rétention doit être effectué prévu par l'article 28, ne s'applique que dans le cas où la personne concernée est déjà placée en rétention lorsque se réalise l'un des deux événements visés par l'article 28, c'est-à-dire l'acceptation implicite ou explicite par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou la perte d'effet suspensif du recours.
En l'espèce, M. [S] a été placé en rétention le 2 janvier 2023 et une requête de prise en charge a été formée auprès des autorités italiennes le 2 janvier 2023. Un arrêté portant transfert vers l'Italie a été pris le 17 janvier 2023 suite à l'acceptation implicite des autorités italiennes constatée à cette date.
Il résulte de ces éléments que, l'acceptation explicite par L'ITALIE de M. [S] étant intervenue le 17 janvier 2023 pendant la mesure de rétention, la mesure de transfert de M. [S] devait intervenir dans un délai de six semaines à compter de cette date, ce délai expirant par conséquent le 23 février 2023.
Il importe de relever qu'aucune dérogation à ce délai n'est prévue par les accords de DUBLIN III sus-visés. L'annulation du vol initialement prévu le 23 février 2023 du fait du refus de L'ITALIE d'accepter pendant un temps des réadmis au titre de la procédure DUBLIN ne saurait constituer une exception justifiant la violation des délais sus-visés.
Par ailleurs, et s'agissant des conditions de la troisième prolongation, l'article L.742-5 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile dispose qu'avant l'expiration de la durée maximale de rétention prévue aux troisième et quatrième alinéas, le juge compétent peut, à titre exceptionnel, être à nouveau saisi lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ou présenté, dans le seul but de faire échec à la mesure d'éloignement, une demande de protection contre l'éloignement au titre du 9° de l'article L.611-3 ou du 5° de l'article L.631-3 ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L.754-1 et L.754-3 ou lorsque la mesure d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai. L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge des libertés et de la détention ait statué. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
En l'espèce, aucune condition n'est remplie pour accorder cette troisième prolongation, M [S], 'dubliné', n'ayant pas fait obstruction à la mesure d'éloignement dans les quinze jours de la requête formée le 2 mars 2023 et le laissez-passer ayant été délivré le 2 mars 2023.
Au vu de ces éléments, il convient d'infirmer la décision du premier juge et de mettre fin à la rétention de Monsieur [E] [V] [S].
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision Contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Infirmons l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 03 Mars 2023.
Mettons fin à la mesure de rétention de Monsieur [E] [V] [S].
Les parties sont avisées qu'elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d'Etat ou de la Cour de cassation.
Le greffier, La présidente,