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16/02/2023 | FRANCE | N°18/12642

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 16 février 2023, 18/12642


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 16 FEVRIER 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/12642 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC3JI



SARL LA TONNELLE

SARL LERINA

SARL PLANARIA



C/



[E] [I]

SARL SOPAL AZUR

Compagnie d'assurances ALLIANZ

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF



Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Romain CHERFILS



Me Jose

ph MAGNAN



Me Pierre VIVIANI



Me Julie DE VALKENAERE



Me Françoise ASSUS-JUTTNER





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 05 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/0...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 16 FEVRIER 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/12642 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC3JI

SARL LA TONNELLE

SARL LERINA

SARL PLANARIA

C/

[E] [I]

SARL SOPAL AZUR

Compagnie d'assurances ALLIANZ

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Romain CHERFILS

Me Joseph MAGNAN

Me Pierre VIVIANI

Me Julie DE VALKENAERE

Me Françoise ASSUS-JUTTNER

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 05 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/00359.

APPELANTES

SARL LA TONNELLE

, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Michel ROUX, avocat au barreau de GRASSE

SARL LERINA

, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Michel ROUX, avocat au barreau de GRASSE

SARL PLANARIA

, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Michel ROUX, avocat au barreau de GRASSE

INTIMES

Monsieur [E] [I]

Ayant la qualité d'appelant dans le dossier joint RG 18/17052

, demeurant [Adresse 4]

représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Benjamin DERSY de la SARL CINERSY, avocat au barreau de NICE substituée à l'audience par Me Laure SAMMUT, avocat au barreau de NICE,

SARL SOPAL AZUR

, demeurant [Adresse 8]

représentée par Me Pierre VIVIANI de l'AARPI LASTELLE & DE VALKENAERE, avocat au barreau de NICE

Société ALLIANZ en sa qualité d'assureur de la SARL SOPAL AZUR et de la SAS FRIAZUR

Ayant la qualité d'intimé dans le dossier joint RG 18/17052

, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Julie DE VALKENAERE de l'AARPI LASTELLE & DE VALKENAERE, avocat au barreau de NICE

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF

Ayant la qualité d'appelant dans le dossier joint RG 18/17052

, demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Benjamin DERSY de la SARL CINERSY, avocat au barreau de NICE substituée à l'audience par Me Laure SAMMUT, avocat au barreau de NICE,

Compagnie d'assurances AXA

en qualité d'assureur de la société FRIAZUR

Ayant la qualité d'intimé dans le dossier joint RG 18/17052

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Françoise ASSUS-JUTTNER de la SCP ASSUS-JUTTNER, avocat au barreau de NICE substituée à l'audience par Me Lucas PANICUCCI, avocat au barreau de NICE

SARL SOCIETE ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE (exerçant sous l'enseigne HOSTELLERIE DE LERINS)

Ayant la qualité d'intimé dans le dossier joint RG 18/17052

, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Michel ROUX, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 29 Novembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Madame Angélique NAKHLEH, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Février 2023.

ARRÊT

EXPOSÉ DES FAITS

En 2008 afin de faire construire une extension de la tonnelle d'un restaurant situé aux [Localité 6] exploité par la SARL LA TONNELLE, la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE contracte des marchés de travaux faisant appel à :

Monsieur [I], architecte, (assuré auprès de la MAF) à qui a été confiée une mission de maîtrise d''uvre, à titre gracieux, et qui a établi le 2 novembre 2008 un marché de travaux pour l'ensemble des corps d'état concernés ;

La société SOPAL AZUR ((assurée auprès de la Compagnie ALLIANZ), spécialisée en menuiserie aluminium, missionnée pour la réalisation du lot « couverture » de la terrasse intégrée à un bâti existant

La société FRI AZUR (assurée auprès de la Compagnie AXA et de la Cie ALLIANZ) à qui a été attribué le lot « cuisine » et qui a indiqué dans un premier temps avoir assuré la découpe des panneaux autoporteurs et la mise en place des produits de calfeutrement afin de permettre de l'installation de conduits d'extraction des matériels de cuisine puis l'a contesté.

Le devis du lot couverture a été signé le 12 novembre 2008 avec la société SOPAL AZUR pour un montant de 37674€TTC.

Ont également été facturés des équipements électroménagers pour un montant de 42214,49€.

Des désordres ont été dénoncés, l'ouvrage s'avérant fuyard.

Selon décision du 31 Août 2011 le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire à l'initiative de la SARL LA TONNELLE ;

Le 6 décembre 2011, la SARL ABBAYE LERINS HOTELLERIE est intervenue volontairement dans la procédure aux côtés de la SARL LA TONNELLE.

Des désordres sont signalés à l'expert en cours d'expertise en mars et avril 2012.

Le 22 avril 2012 les opérations d'expertise sont déclarées communes à la société FRI AZUR.

Suivant ordonnance du 8 juin 2012 les opérations d'expertise ont été rendues communes à la société AKRAPLAST, fournisseur de la société SOPAL AZUR et Monsieur [I].

Puis suivant ordonnance de référé du 15 octobre 2012 les opérations d'expertise ont également été rendues communes à la compagnie ALLIANZ, assurance de SOPAL AZUR et la MAF, assureur de Monsieur [I]. Par la suite, les SARL LERINA et PLANARIA sont intervenues volontairement à la procédure.

L'expert a été informé de nouveaux désordres en novembre 2012.

Le domaine dans lequel l'ouvrage litigieux a été bâti accueille la SARL LERINA, commerçante et la société PLANARIA dont l'objet est le transport de visiteurs et de marchandises.

Le rapport d'expertise définitif a été déposée le 12 Août 2015.

Par assignation délivrée les 15,16,18 et 22 décembre 2015 par la SARL LA TONNELLE, la SARL Société Abbaye de Lerins hôtellerie, la SARL PLANARIA et la SARL LERINA à l'encontre de la SARL SOPAL AZUR et de son assureur la société ALLIANZ, de la SAS FRI AZUR et de ses assureurs la SA AXA et la compagnie ALLIANZ.

Par jugement en date du 5 Juin 2018, le Tribunal de Grande instance de Grasse a :

Débouté la SARL LA TONNELLE , la SARL PLANARIA et la SARL LERINE de l'intégralité de leurs demandes au motif qu'elles ne démontrent pas leur qualité de maître de l'ouvrage litigieux, et qu'elles n'ont pas contracté avec les constructeurs défendeurs.

Condamné in solidum la SARL SOPAL AZUR, son assureur la SA ALLIANZ, [E] [I], son assureur la MAF, à verser à la SARL ABBAYE LERINS HOTELLERIE la somme de 94.847 euros au titre du préjudice matériel sur le fondement des articles 1792 et suivants du Code civil, et la somme de 39.479 euros au titre d'un préjudice immatériel.

Débouté la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE du surplus de ses demandes.

Débouté [E] [I] et la MAF de leurs demandes en garantie;

Condamné la SARL SOPAL AZUR, son assureur la SA ALLIANZ, [E] [I], son assureur la MAF aux entiers dépens de l'espèce, en ce compris les frais d'expertise judiciaire ; ainsi qu'à verser à la SARL Abbaye de Lérins hôtellerie la somme de 15000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe le 26 Octobre 2018 (RG 18-17052) monsieur [E] [I] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

- Condamné la SARL SOPAL AZUR, son assureur la SA ALLIANZ, [E] [I], son assureur la MAF, à verser à la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE la somme de 94.847 euros au titre d'un préjudice matériel et la somme de 39.479 EUR au titre d'un préjudice immatériel ;

- Débouté [E] [I] et la MAF de leurs demandes en garantie ;

- Rejeté toute prétention plus ample ou contraire de [E] [I] et de la MAF notamment en garantie ou au titre des frais de procédure et article 700 du CPC

- Condamné la SARL SOPAL AZUR, son assureur la SA ALLIANZ, [E] [I], son assureur la MAF aux entiers dépens de l'espèce, en ce compris les frais d'expertise judiciaire ainsi qu'à verser à la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL Société Abbaye de Lerins hôtellerie (conclusions du 12 Avril 2019) sollicite voir :

- CONFIRMER le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Grasse en ce qu'il a retenu les responsabilités de la Société SOPAL AZUR et de Monsieur [I] sur le fondement de l'article 1792-1 du code civil en raison des manquements aux règles de l'art et des fautes commises tant d'exécution que de conception et de défaut surveillance et de direction de chantier.

- LE CONFIRMER sur le montant des préjudices subis par la Société ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE à savoir condamner in solidum la Société SOPAL AZUR et son assurance ALLIANZ, monsieur [I] et son assurance la MAF aux somme de 88.641,00 € et 6.206,00 € concernant le préjudice matériel et les travaux de sauvegarde, ainsi qu'à la somme de 39.479,00 € concernant le préjudice financier représentant la perte du chiffre d'affaires pondérée d'un taux de marge sur charges variables de 36,75 %

- REJETER toutes prétentions contraires des requis, tant de monsieur [I] et de la MAF, que de la société ALLIANZ et de la société SOPAL AZUR, le maître de l'ouvrage n'ayant commis aucune faute de nature à limiter leurs responsabilités.

- CONFIRMER la condamnation de monsieur [I] et la MAF, de la société SOPAL AZUR et de la société ALLIANZ in solidum aux frais d'expertise judiciaire et aux dépens de première instance ainsi qu'à la somme de 15.000,00 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. CONDAMNER les mêmes requis in solidum à la somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 pour la présente procédure d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.

- PRENDRE ACTE du règlement, sans réserve, par la compagnie d'assurance ALLIANZ, assurance de la Société SOPALAZUR de la somme de 74.663,00 € représentant 50 % des condamnations prononcées au titre des dommages matériels et immatériels.

La société Abbaye de Lerins hôtellerie s'appuie sur les conclusions du rapport d'expertise qui fait ressortir les responsabilités encourues, tant de la société SOPAL AZUR et de monsieur [I] à hauteur de la somme de 88.641 € HT, outre la somme de 6.206 € HT, estimation du préjudice consécutif à ces désordres, sur le fondement l'article 1792-1 du Code civil. D'une part, le rapport d'expertise constate que la société SOPAL AZUR, le constructeur de la toiture litigieuse, avait mené des opérations de mise en 'uvre en contradiction avec les conseils de pose du fabricant et les règles de l'art applicables aux ouvrages de toiture. D'autre part concernant l'architecte monsieur [I], l'expert judiciaire avance qu'il était chargé d'une mission complète de conception et d'exécution, l'expert pointe une insuffisance des études et une faute commise dans la conception de l'ouvrage, ainsi qu'une faute dans sa surveillance du chantier où il aurait dû détecter les manquements manifestes aux règles de l'art commis par le constructeur. Enfin la société abbaye de Lérins hôtellerie avance qu'aucune faute d'entretien de nature à exonérer le maître d''uvre de sa responsabilité ne peut lui être reprochée, le sinistre et son aggravation étant dus uniquement et exclusivement aux manquements constatés.

Concernant les montants de l'indemnisation, la société Abbaye de Lérins hôtellerie s'en rapporte à l'évaluation du rapport d'expertise, reprise par le jugement de première instance.

Monsieur [E] [I] et son assureur la Mutuelle des architectes français, intimés et appelants (conclusions du 3 Avril 2019) sollicitent voir :

A titre principal :

- Constater l'absence de faute de l'architecte dans l'exécution de sa mission et de lien de causalité entre ladite mission et les désordres allégués,

- Débouter les appelantes de leurs demandes à l'encontre de Monsieur [I] et de la MAF,

- Débouter la SARL ABBAYE DES LERINS, SA ALLIANZ, la SARL SOPAL AZUR et la compagnie AXA France, de leur appel incident et dès lors, de l'ensemble de leurs demandes formulées à l'encontre des concluants

A titre subsidiaire

- Ramener les demandes des requérantes à de plus justes proportions,

A titre infiniment subsidiaire

- Constatant la responsabilité des sociétés SOPAL AZUR et FRI AZUR dans la survenance des griefs allégués,

- Condamner in solidum ces dernières, et leurs assureurs, les sociétés ALLIANZ, et AXA FRANCE, à relever et garantir Monsieur [I] et la MAF, chacune pour les griefs qui les concernent, des éventuelles condamnations prononcées à l'encontre des concluants,

En tout état de cause

- Débouter les appelantes de toutes leurs demandes et condamner tout succombant au paiement de la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Concernant les griefs allégués par les requérants trouvant leur cause dans les défauts d'exécution de l'ouvrage, monsieur [I] avance qu'il n'était pas en charge de l'exécution technique de l'ouvrage et ne peut donc pas voir sa responsabilité engagée sur le fondement d'une prétendue erreur de conception de l'ouvrage dont les requérants, n'apportent d'ailleurs pas la preuve. Par ailleurs le maitre d''uvre soutient avoir respecté les prescriptions des Bâtiments de France pour l'inclinaison de la toiture.

De plus monsieur [I] avance encore avoir rempli son obligation de direction et de surveillance qui, en tant qu'obligation de moyen, ne lui imposait pas une présence constante sur le chantier, dès lors les désordres dans l'exécution des travaux ne pouvaient lui être imputés, et seules les entreprises SOPAL AZUR et FRI AZUR doivent être jugées responsables de ces désordres.

En outre monsieur [I] et son assurance MAF, avance qu'une part de responsabilité dans l'aggravation des désordres invoqués pèse sur le maître de l'ouvrage, la société ABBAYE DE LERINS HOTALLERIE qui n'aurait entrepris des travaux de sauvegarde et des mesures conservatoires qu'à partir du mois de novembre 2012 soit deux ans après le début des désordres, alors même que la société Lérins avait les moyens d'y remédier plus tôt. Par ailleurs face à l'inefficacité de ces premiers travaux, cette dernière aurait dû se retourner contre l'entreprise qui avait effectué ces travaux.

Ainsi, dans la présente affaire, tous les désordres ne relèvent pas de la mission confiée monsieur [I] mais résultent, au contraire, d'une faute de la maitrise d'ouvrage mais également de fautes des entreprises intervenues pour l'exécution de l'ouvrage. Monsieur [I] sera par conséquent mis hors de cause.

La Compagnie ALLIANZ, intimée et appelante (conclusions du 19 Mars 2019), appelée dans la cause en sa qualité d'assureur de la SARL SOPAL AZUR et la SARL FRI AZUR (contestée) sollicite voir :

Sur la garantie décennale

- En cas de condamnation in solidum au paiement de la somme de 88.641 € HT outre celle de 6.206,00 €, au bénéfice de la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE,

Constater, dire et juger qu'une part de responsabilité qui ne saurait être évaluée à moins de 10% devra rester à la charge du maître d'ouvrage, la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE, et qu'elle supportera une somme égale à 10 % de ces coûts, soit 10 074,30 Euros,

Constater, dire et juger que pour le surplus, et dans leurs rapports entre eux, la somme de 90.668,70 Euros sera mise à la charge de monsieur [I] et de la MAF à hauteur de 70% soit 63.468,09 Euros, et de 10% à la charge de la Compagnie ALLIANZ en sa qualité d'assureur en responsabilité civile dite décennale de la SARL SOPAL AZUR, soit 9 066,87 Euros, outre 10 % , soit 9.066,87 Euros à la charge de la société d'assurance AXA en sa qualité d'assureur en responsabilité civile de la Société FRI AZUR.

La société ALLIANZ avance que c'est à tort que le jugement de première instance a écarté la répartition de responsabilité qu'elle proposait en sa qualité d'assureur en responsabilité civile dite décennale de la SARL SOPAL AZUR, entre la maîtrise d''uvre de conception et d'exécution (Monsieur [I] assuré auprès de la MAF), le maître d'ouvrage, la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE. Le bien-fondé de cette répartition ressort des éléments constatés dans le rapport d'expertise judiciaire selon lequel :

- La première cause des infiltrations est l'absence de pente de 10%, exigée à 5% par la maitrise d''uvre et la conception générale de construction

- La seconde cause est l'intervention de la Société SOPAL qui a supprimé l'effet bilame indispensable au bon comportement du panneau SUN ISOL, générant un bridage, et a omis de positionner un profilé de rive périphérique occasionnant une dégradation de l'âme des panneaux,

- Par la suite une découpe anormale a été réalisée sur plusieurs panneaux SUN ISOL, après la prestation de la Société SOPAL AZUR, par le cuisiniste FRI AZUR pour mettre en place un système d'extraction des fumées, générant des infiltrations sur les équipements de cuisine,

- Le quatrième facteur d'infiltration est la présence de nombreux végétaux morts sur la couverture entrainant d'importantes rétentions d'humidité au droit de certaines liaisons d'ouvrages,

Sur les demandes articulées au titre des dommages immatériels.

- Sur l'intervention de la société ALLIANZ en tant qu'assureur de la SARL FRI AZUR: Constater, dire et juger que le contrat souscrit par la Société FRI AZUR auprès de la société d'assurance ALLIANZ a pris effet le 1 er janvier 2005 et fut résilié le I er juillet 2009, de sorte que celle-ci n'est pas débitrice de garantie au titre des dommages immatériels consécutifs aux dommages matériels éventuellement garantis, lesquels relèvent du champ d'application de la police souscrite ultérieurement par la SARL FRI AZUR auprès de la société d'assurance AXA, qui est donc l'assureur au titre des dommages immatériels au jour de la réclamation,

- En cas de condamnation in solidum au titre du préjudice financier au paiement de la somme de 39 479 Euros € au bénéfice de la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE,

Constater, dire et juger qu'une part de responsabilité qui ne saurait être évaluée à moins de 10% devra rester à la charge du maître d'ouvrage, la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE, et qu'elle supportera une somme égale à 10 % du montant des indemnisations qui sera alloué,

Constater, dire et juger que pour le surplus, et dans leurs rapports entre eux, celui-ci sera mis à la charge de monsieur [I] et de la MAF à hauteur de 70 %, de 10 % à la charge de la société FRI AZUR et de son assureur la société AXA, et de 10 % à la charge de la SA ALLIANZ en sa qualité d'assureur de la SARL SOPAL AZUR,

- Dire que les condamnations prononcées à l'encontre de la SA ALLIANZ en sa qualité d'assureur de la SARL SOPAL AZUR interviennent dans les limites de plafond et de garanties, lesquelles sont opposables à tous,

- Constater, dire et juger que préjudices d'image, esthétique, d'agrément ou de jouissance, dont la preuve de la réalité quantifiable en tant que tels n'est pas rapportée, se confondent et se superposent avec le préjudice financier, celui-ci étant la matérialisation chiffrée de l'impact que les infiltrations ont pu avoir sur la clientèle dans toutes ses composantes,

Le règlement des dépens

- Dire que le règlement des dépens et frais d'expertise interviendra entre la SARL LA TONNELLE, monsieur [I] et la MAF, la société FRI AZUR et son assureur la société AXA, la SARL SOPAL AZUR et la société ALLIANZ, sur les bases de répartition arrêtées dans le cadre des condamnations prononcées au principal.

La société AXA France, assureur de la SAS FRIAZUR, intimée (conclusions du 10 Janvier 2019) sollicite voir :

Sur la responsabilité décennale du constructeur :

- La SAS FRIAZUR soutient que c'est la SARL HOTELLERIE LA TONNELLE qui est le maître d'ouvrage, et qu'elle n'était pas liée à cette société par un contrat de louage d'ouvrage mais par un contrat de fourniture de matériel.

- La SAS FRIAZUR avance que les éléments établissant une réception tacite au 13 janvier 2009 ne sont pas établis dès lors qu'il n'est pas démontré que l'occupation qui pourrait être un critère de prise de possession par le maître de l'ouvrage est bien celle de la SARL HOTELLERIE de la Tonnelle. Aussi, la réception n'est pas établie et la garantie décennale ne peut être recherchée.

- Enfin, aucun titre de propriété n'est fourni aux débats pour que la responsabilité décennale des constructeurs soit retenue, la réparation des immatériels rattachables à la garantie décennale ne peut être aussi accordée qu'à ce propriétaire.

Sur la responsabilité de droit commun sur le fondement de l'article 1147 du Code civil : la SAS FRIAZUR soutient être intervenue dans le cadre d'un contrat de fourniture de matériel, or il lui est reproché par l'expert une faute d'exécution dans la pose des éléments de la cuisine laquelle ne lui a pas été confiée. FRIAZUR doit ainsi être mise hors de cause.

Subsidiairement sur l'évaluation des préjudices :

- Seuls les préjudices liés aux infiltrations qui ont endommagé certains éléments de cuisine peuvent être mis à charge de la SAS FRIAZUR pour autant qu'il soit établi une exécution et une pose des éléments qu'elle a livrés, ce qui n'est pas le cas. En effet pour rappel, la SAS FRIAZUR soutient n'avoir exécuté qu'un contrat de fourniture de matériel

- Seuls les préjudices immatériels rattachés à ces infiltrations peuvent relever de la garantie d'AXA France, assureur au moment de la réclamation.

- De surcroit, l'existence des préjudices immatériels allégués n'est pas établie de même que leur relation avec l'endommagement des installations de cuisine.

A titre très subsidiaire en cas de condamnation d'AXA France :

- Seuls les dommages immatériels mis à charge de la SAS FRIAZUR relèvent de la garantie d'AXA France, les dommages matériels relèvent de la société ALLIANZ.

- En cas de condamnation de FRIAZUR, un partage de responsabilité devra être établi avec l'architecte qui avait une mission complète et qui se devait de donner les instructions nécessaires à celui qui a posé des panneaux de toiture avec interface de conduit de cheminée.

- Il n'y a pas lieu à condamnation solidaire entre FRIAZUR et les autres constructeurs dès lors que l'expert décrit de manière autonome les dommages qu'il lui impute à tort.

En tout état de cause :

- DIRE ET JUGER opposable la franchise contractuelle stipulée dans la police d'assurances AXA FRANCE ;

- LIMITER la condamnation de la société AXA FRANCE au plafond de garantie contractuellement prévue par la police d'assurances ;

- CONDAMNER tout succombant à verser à la société AXA FRANCE, la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens.

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe, le 25 Juillet 2018, (RG 18-12642) la SARL LA TONNELLE, la SARL LERINA, la SARL PLANARIA ont interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

Débouté la SARL LA TONNELLE, la SARL PLANARIA et la SARL LERINE de l'intégralité de leurs demandes, au motif qu'elles ne démonteraient pas leur qualité de maitre de l'ouvrage litigieux réalisés par les constructeurs défendeurs.

Rejeté leurs demandes formées au titre de l'article 700 du CPC.

Par conclusions aux fins de désistement d'appel partiel en date 10 Octobre 2018, la SARL LERINA, la SARL PLANARIA donnent acte de leur désistement d'appel partiel à l'encontre de la SAS FRI AZUR, la SA AXA France IARD assureur de la SAS FRI AZUR, et la SA ALLIANZ assureur de la SAS FRI AZUR.

Par ordonnance de dessaisissement partiel du 20 Octobre 2018, le magistrat de la mise en état a retenu que l'instance ne se poursuivrait qu'entre les autres parties.

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

La SARL LA TONNELLE, la SARL LERINA et la SARL PLANARIA, appelantes (conclusions du 12 avril 2019) sollicitent voir :

DIRE et JUGER la Société SOPAL AZUR et Monsieur [I] responsables exclusivement des désordres subis, tels qu'analysés par l'expert [P], à l'égard des sociétés appelantes PLANARIA, LERINA et la SARL LA TONNELLE, au visa de l'article 1240 nouveau du Code Civil, (ancien article 1382 du Code Civil), en raison des différentes fautes commises par ceux-ci, tant des manquements aux règles de l'art et fautes d'exécution pour SOPAL AZUR, que fautes de conception et défaut de surveillance pour Monsieur [I].

EN CONSEQUENCE CONDAMNER la Société SOPAL AZUR et sa Cie d'assurances ALLIANZ, Monsieur [I] et sa Cie d'assurances la MAF aux sommes de :

à l'égard de de la Société LA TONNELLE la somme pour la perte financière de 85.560,00 €

à l'égard de la société PLANARIA, la somme de 47.578 ,00 €

à l'égard de la Société LERINA, la somme pour perte de chiffre d'affaires de 60.471,00€

DIRE et JUGER que l'ensemble des condamnations allouées aux appelantes, et pour chacune d'entre elles, seront productives d'intérêts capitalisés d'année en année jusqu'à parfait paiement, et ce à compter de l'assignation introductive d'instance.

Les trois sociétés appelantes ne sont pas, contrairement à la société ABBAYE DE LERINS, maitre de l'ouvrage de cette construction, il n'en demeure pas moins que ces trois sociétés, toutes unies d'intérêt avec l'ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE, ont été victimes directes, pour chacune d'entre elles, des différents désordres subis par cette dernière.

Sur le plan juridique, et par application des dispositions de l'article 1240 nouveau du Code Civil (ancien article 1382 du Code Civil), il est de jurisprudence constante que le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage. (Cour de cassation, Assemblée plénière, 6 octobre 2006, pourvoi n° 05-13.255).

Concernant la caractérisation des fautes, les sociétés appelantes s'appuient sur le jugement du 5 juin 2018 et sur le rapport d'expertise qui retiennent la mise en jeu de la responsabilité de la Société SOPAL AZUR s'agissant des désordres à l'ouvrage litigieux en raison des fautes d'exécution commises par celle-ci, ainsi que celle de monsieur [E] [I], architecte, pour les fautes de conception et de défaut de surveillance relevées, à l'égard de la société l'ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE sur le fondement de l'article 1792-1 du Code civil. Ces fautes commises dans le cadre de la relation contractuelle avec le maitre d'ouvrage, ont également causé un préjudice direct et certain aux sociétés appelantes qui exploitent des activités sur le domaine de l'abbaye.

CONDAMNER également Société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ, monsieur [I] architecte et son assureur la MAF à la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL CHERFILS IMPERATOR BOULAN, avocats

Monsieur [E] [I] et la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS (conclusions du 3 Avril 2019) sollicitent voir :

CONFIRMER le jugement rendu en première instance le 05 juin 2018 par le tribunal de grande instance de Grasse en ce qu'il a débouté les sociétés LA TONNELLE, PLANARIA et LERJNA de l'ensemble de leurs demandes.

Les concluants rappellent que les juges de première instance ont rejeté les demandes des sociétés La TONNELLE, PLANARIA et LERINA formées sur le fondement de l'article 1792-1 du Code civil, au motif qu'elles ne démontraient pas leur qualité de maitre de l'ouvrage litigieux. En cause d'appel, les sociétés LA TONNELLE, la SARL PLANARIA et la SARL LENNE invoquent un nouveau fondement juridique afin de tenter d'engager la responsabilité des concluants, le fondement de la responsabilité délictuelle. Néanmoins, les appelantes ne démontrent pas l'existence d'une faute des concluants, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux. Dès lors, leurs demandes ne pourront qu'être rejetées.

La SA ALLIANZ et la SARL SOPAL AZUR (conclusions du 9 Janvier 2019) sollicitent voir :

Confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 5 juin 2018, en ce qu'il a justement débouté la SARL LERINA, la SARL PLANARIA, et la SARL LA TONNELLE de leurs demandes fins et conclusions fondées sur les dispositions des articles 1792 et suivants qui prévoient et organisent le régime de la responsabilité civile dite décennale des constructeurs, tant au titre des dommages matériels qu'au titre des dommages immatériels.

Constater, dire et juger que les demandes d'indemnisation du préjudice financier qu'auraient subi la SARL LERINA, la SARL PLANARIA, et la SARL LA TONNELLE ne pourront être reçues qu'à hauteur de 80 % des montant sollicités, les intervenants à l'acte de construire n'ayant pas à supporter la part de responsabilité incombant au maître d'ouvrage, qui ne saurait être évaluée à moins de 20 %, en l'état de sa défaillance au titre de son obligation d'entretien, à charge pour la SARL LERINA, la SARL PLANARIA, et la SARL LA TONNELLE de se pourvoir sur le surplus ainsi qu'il leur appartiendra,

Constater, dire et juger que s'agissant des montants susceptibles d'être mis à la charge des intervenants à l'acte de construire et de leurs assureurs au titre du préjudice financier qu'auraient subi la SARL LERINA, la SARL PLANARIA, et la SARL LA TONNELLE, soit 80 % des sommes réclamées, une part prépondérante de responsabilité, qui ne saurait être évaluée à moins de 80 %, repose sur la maîtrise d''uvre de conception et d'exécution,

Par courrier du 07 octobre 2022, les appelantes ont demandé que soient jointes ou évoquées à la même audience les affaires 18/12642 et 18/17052, les deux appels étant relatifs au même jugement.

L'affaire n°RG : 18/17052 a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 31 octobre 2023 et fixée à l'audience du 29 novembre 2022.

L'affaire n°RG :18/12642 a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 2 Novembre 2022 et fixée à l'audience du 29 novembre 2022.

A l'audience des plaidoiries à laquelle elles ont été retenues, les deux affaires ont été évoquées concomitamment sans opposition des parties.

MOTIVATION

Sur la jonction des procédures :

Les appels n°RG :18/12642 et n°RG : 18/17052 portant sur le même jugement, il y lieu de joindre ces deux procédures sous le numéro le plus ancien et de rendre un seul arrêt pour les deux procédures.

Une demande avait été faite en ce sens alors qu'une des deux affaires était clôturée et fixée à plaider.

Sur le fond :

Selon acte enregistré le 26 mars 2010 à [Localité 6], l'EURL HOTELLERIE ABBAYE DE LERINS a créée le 24 juin 1992 en vue le fonds de commerce de restaurant de [Localité 7] au lieu-dit LA TONNELLE ;

Elle a donné le fonds de commerce en location gérance à la SARL LA TONNELLE pour une durée de huit années et quatre mois à compter du 10/03/2010.

La bailleresse est la congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception ;

Selon monsieur [I] qui n'est pas démenti sur ce point par les autres parties, la SARL LERINS HOTELLERIE a engagé des travaux d'extension du restaurant LA TONNELLE dont il lui a confié la maîtrise d''uvre. (Pièces 73 à 84 du rapport).

Les plans dressés pour réaliser ces travaux sont versés au dossier (pièces 40 à 46 du rapport) ainsi que la déclaration préalable (pièces 89 et suivantes).

Un marché de travaux a été établi le 02 novembre 2008 avec les entreprises SOPAL AZUR pour le lot couverture, monsieur [C] pour le lot charpente bois, FRI AZUR pour le lot cuisine, monsieur [X] pour le lot revêtement de sol.

Suivant devis en date du 12 novembre 2008 la SARL SOPAL AZUR et la SARL HOTELLERIE LA TONNELLE ont conclu un marché de travaux portant sur la fourniture et la pose d'une toiture en panneau SUN ISOL 52mm blanc Esterel sur charpente bois par recouvrement par tranches de 4 panneaux visserie tire fond avec rondelle d'étanchéité du fournisseur [W] [F] et profil PVC de jonction FAST.

Les comptes rendus de chantier n °1 et 2 des 17 et 20 novembre 2002 indiquent que l'architecte avait en outre une mission de direction de l'édification de l'ouvrage (pièce 87 et 88 du rapport).

Le 13 janvier 2009 la société SOPAL AZUR a facturé la mise en 'uvre et la pose de cette toiture en panneau SUN ISOL 52 mm blanc Esterel posée sur charpente bois par recouvrement par tranche de 4 panneaux.

Cette facture a été payée par la SARL HOTELLERIE DE L'ABBAYE (pièce 38 du rapport)

C'est ainsi à cette date que les travaux ont fait l'objet d'une réception tacite.

Le 20 mars 2009 la société FRIAZUR a facturé la livraison et l'extension de la hotte comprenant « l'agrandissement capteur, la structure inox en tube 50x50 démontable et vitrage (pièce 48 et 49 du rapport).

Cette facture a été payée par la SARL HOTELLERIE DE L'ABBAYE.

Il n'est pas contesté que le premier sinistre ayant fait l'objet d'un constat d'huissier est en date de février 2011.

Compte tenu de l'urgence de réaliser une mise hors d'eau du restaurant signalé par courriel du 25 septembre 2012 du co-gérant de la SARL LA TONNELLE, des travaux conservatoires ont été réalisés en cours d'expertise suivant devis de la société PRODALU adressé à l'EURL HOTELLERIE ABBAYE DE LERINS. (Pièces 174 et suivants du rapport)

Sur la responsabilité de monsieur [E] [I] et la SARL SOPAL AZUR et FRIAZUR:

Au visa des articles 1792 et suivants du code civil et après avoir constaté la réception tacite sans réserve de l'ouvrage le 13 janvier 2009, le juge de première instance a condamné in solidum la société SOPAL AZUR, entreprise en charge des travaux et son assureur ALLIANZ, monsieur [E] [I], architecte et son assurance LA MAF, à payer au maître d'ouvrage la somme de 94847 euros en réparation du préjudice matériel résultant du sinistre.

Il a en outre alloué à la SARL HOTELLERIE DE LERINS une somme de 39479 euros au titre du préjudice financier et rejeté ses demandes au titre des préjudices d'image et esthétique.

Monsieur [E] [I] conteste ces demandes en faisant valoir que l'architecte n'est présumé responsable sur le fondement de l'article 1792 du code civil que dans la limite de sa mission.

Il précise que les désordres résultent pour partie de fautes commises par le maître d'ouvrage et de fautes d'exécution.

Le constat d'huissier du 17 février 2011 réalisé à la requête de la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE par temps de pluie atteste que la toiture réalisée en application du marché de travaux que le maître d''uvre ne conteste pas avoir convenu le 02 novembre 2008 est fuyarde.

En effet l'huissier relève au niveau de la terrasse du restaurant LA TONNELLE des entrées d'eaux provenant de la toiture comme suit :

-à l'angle Sud /Est une large flaque d'eau au sol et des traces de coulures sur la hauteur d'une poutre sous toiture à l'aplomb

-en partie Sud à droite en entrant une flaque d'eau au sol et des coulées d'eau entre 2 panneaux laqués blanc au plafond

-en partie Sud face à l'entrée une flaque d'eau au sol et des entrées d'eau en sous-face de toiture entre les panneaux laqués blanc, des ruissellements depuis une poutre sous toiture

-en partie nord face à l'entrée une flaque d'eau au sol alimentée par des gouttes d'eau entre 2 panneaux laqués blanc au plafond

-à l'angle Nord/ouest une flaque d'eau au sol et des ruissellements depuis une poutre sous toiture

-en cuisine : ruissellements depuis la hotte aspirante

-une accélération du rythme de pénétration de l'eau par la toiture avec l'amplification de la pluie

Dans son rapport définitif déposé le 12 août 2015 l'expert désigné par le juge des référés mentionne :

-nombreuses zones d'infiltration qui proviennent en partie de la liaison des panneaux autoporteurs SUN ISOL 52mm entre eux et consécutivement à un soulèvement généralisé par un effet de bilame permettant une flèche négative de cette couverture.

- une zone de rétention d'humidité en violation avec les recommandations du fabricant.

-une exposition d'un ouvrage en essence résineuse à des sources d'humidité sans traitement préalable suffisant

-un ouvrage non adapté à une exposition à l'alternance de périodes d'humidification et de sécheresse

- le percement de la toiture pour le passage des conduits de cheminées et de l'extracteur d'air vicié ayant pour effet la section des profilés gouttières drainant des panneaux SUN ISOL et l'exposition du panneau sandwich à une chaleur pour laquelle il n'a pas été conçu (réunion d'expertise du 17 décembre 2012 pièces 170 et suivantes du rapport)

-l'utilisation d'éléments de fixation qui à terme des points d'infiltration exposant la couverture à une humidité permanente.

-Les nombreux assemblages de fixation sur les éléments d'ossature par les pannes intermédiaires contrariant et limitant le débattement naturel du panneau 52mm SUN ISOL autoporteur en violation avec les recommandations du fournisseur (pièces 104 à 119 guide de pose SUN ISOL)

- l'insuffisance de pente d'autolavabilité de cette toiture au regard des recommandations du fabricant qui indique une pente minimum de 10% (pièces 104 à 119 guide de pose SUN IS) et la présence de nombreux végétaux morts révélant un défaut d'entretien

Il précise que les malfaçons dans la mise en 'uvre et dans les travaux d'exécution de pose des panneaux sandwichs sont de nature à compromettre la pérennité de l'ouvrage dont la durée normale est estimée à environ 10 ans selon les conditions d'exploitation.

S'agissant d'infiltrations constatées après réception, il n'est pas contesté que ces désordres portent atteinte à la destination et à la conservation de l'ouvrage et que la garantie décennale a vocation à s'appliquer les désordres étant survenus après réception.

Les éléments susvisés établissent au moins un défaut de conception, le défaut de pente en violation des recommandations du fabricant pour lequel le maître d''uvre ne peut se prévaloir à titre exonératoire des directives des bâtiments de France ;

En sa qualité d'architecte il lui appartient de trouver les solutions permettant de concilier les règles d'urbanisme et la nécessité d'édifier un ouvrage en conformité avec les règles de l'art.

De plus l'expert relève un défaut d'adaptation du projet à la coexistence de techniques traditionnelles de charpente et couverture et de la technique innovante qu'est la pose de panneaux SUN ISOL ;

Ensuite, s'agissant des fautes d'exécution, si le maître d''uvre n'est pas en charge de la direction de chantier au même titre que l'entrepreneur, il entre dans ses obligations contractuelles de donner des directives suffisantes par l'intermédiaire du directeur de chantier afin que les matériaux choisis dont l'utilisation nécessite des précautions particulières soient mis en 'uvre dans le respect des instructions du fabricant , de donner les instructions nécessaires en terme d'organisation des travaux pour pouvoir s'assurer de l'effectivité d'une installation conforme.

Par voie de conséquence, la faute de l'architecte dont se prévalent les sociétés exploitant [Localité 7] est établie.

L'entreprise SOPAL AZUR indique dans ses dernières conclusions avoir réalisé les travaux de pose de la toiture en panneaux SUN ISOL acquis auprès de la société AKRAPLAST, le fabricant étant l'entreprise bien qu'il s'agisse du devis de novembre 2008.

Elle conteste en revanche être à l'origine du percement des panneaux afin d'installer un système d'extraction des fumées nécessairement réalisés postérieurement à la pose des panneaux SUN ISOL lors de l'installation de la cuisine facturé le 20 mars 2009 par la société FRIAZUR.

La société SOPAL AZUR et son assureur la société ALLIANZ conclut à la responsabilité du sinistre à hauteur de 10% de la société FRIAZUR.

L'architecte sollicite la garantie de cette société.

La société FRIAZUR conteste être à l'origine des percements des panneaux de toiture puis d'utilisation de mousse pour assurer l'étanchéité, travaux qu'elle n'a pas facturé étant uniquement le fournisseur du matériel de cuisine.

Les éléments du dossier et notamment le rapport d'expertise ne permettent pas de retenir la responsabilité de la société FRIAZUR faute d'établir qu'elle est à l'origine de la pose du système d'évacuation des fumées.

Une ordonnance de dessaisissement partiel du conseiller de la Mise en Etat du 20 Octobre 2018 constate le désistement des demandes des sociétés exploitantes de l'Ile Saint-Honorat dirigées contre cette société.

Si l'on se réfère au rapport d'expertise, il doit être imputé à la société SOPAL AZUR la fixation des panneaux sur les éléments d'ossature par les pannes intermédiaires contrariant l'effet bilame nécessaire au bon comportement des panneaux, avec des éléments de fixation inadaptés et sans mise en place de profilé de rive périphérique en violation des recommandations du fabricant.

En sa qualité de professionnel de la construction, il lui appartient d'édifier des ouvrages en conformité avec les instructions du fabricant des matériaux qu'elle met en 'uvre.

Elle ne peut ainsi minimiser sa responsabilité partagée avec l'architecte et la faute dont se prévalent les sociétés exploitant [Localité 7] est établie.

L'expert a constaté la présence de nombreux végétaux morts sur la couverture entrainant d'importantes rétentions d'humidité au droit de certaines liaisons d'ouvrages déjà infiltrantes.

Toutefois, l'impact de ce défaut d'entretien est nécessairement minime lors des épisodes pluvieux, manifestation principale du dommage.

Par voie de conséquence, c'est à juste titre que la juridiction de première instance a condamné in solidum monsieur [I] et la société SOPAL AZUR à réparer le préjudice subi par le maître de l'ouvrage au visa de l'article 1792 du code civil, l'action de chacun ayant concouru à la réalisation de l'entier dommage et l'impact du défaut d'entretien étant insignifiant au regard des fautes des constructeurs.

C'est également à juste titre qu'elle a rejeté la répartition des responsabilités proposée par ALLIANZ répartition qui ne correspond pas aux éléments du dossier.

En conclusion l'indemnisation du maître d'ouvrage sera partagée à parts égales entre monsieur [I] et la société SOPAL AZUR confirmant ainsi le premier juge sur ce point.

Sur le préjudice de la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE

La SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE ne conteste pas le montant des réparations proposées par l'expert soit 94 847€ en réparation du préjudice matériel et 39479€ en réparation du préjudice financier.

Monsieur [I] et son assureur conteste ce préjudice.

Il ne peut être reproché au maître d'ouvrage d'avoir laissé perdurer les désordres source du préjudice durant deux années alors que par courriel du 25 septembre 2012 du co-gérant de la SARL LA TONNELLE l'urgence d' une mise hors d'eau du restaurant a été signalée, que des travaux conservatoires ont été réalisés en décembre 2012 par l'entreprise PRODALU puis de réparation en février 2014 et que le maître d'ouvrage ne peut être tenu pour responsable de l'inefficacité prétendue des travaux conservatoires.

Ensuite le seul fait que le maître d'ouvrage n'ait pas souscrit une assurance dommage ouvrage est préjudiciable avant tout aux intérêts de ce dernier, l'assurance dommages ouvrage ayant un recours contre les constructeurs dont la responsabilité est susceptible d'être engagée et donc contre le maître d''uvre.

De plus, aucune disposition ne permet de sanctionner le défaut d'assurance dommage ouvrage du maître d'ouvrage par une déchéance du droit à réparation qu'il tient des articles 1792 et suivants du code civil ou une réduction du droit à l'indemnisation de son entier préjudice.

En ce qui concerne plus spécialement le préjudice financier, la société ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE est le titulaire du bail et perçoit, en vertu du contrat de location 'gérance conclu avec la SARL LA TONNELLE une redevance de 19% du chiffre d'affaire outre 12% de commissions sur les prestations de restauration de cette société.

La SARL HOTELLERIE DE LERINS, en sa qualité de loueur du contrat de location-gérance est recevable à solliciter réparation du dommage résultant d'un défaut de paiement de redevances payées en considération de l'impact du sinistre sur le chiffre d'affaires de l SARL LA TONNELLE.

Il convient donc de déterminer l'impact du sinistre sur le chiffre d'affaires de la société LA TONNELLE puis l'incidence sur les redevances perçues par la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE ;

Le rapport en date du 10 août 2015 de l'experte sapiteur, madame [U], indique que la référence à la marge sur charges variables valorise de manière plus juste le préjudice lié à une perte de chiffre d'affaires plutôt que l'excédent d'exploitation retenu par le conseil de la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE.

De plus les propositions de la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE afin de parvenir à une estimation de la perte de clientèle sont peu assises en fait.

Madame l'experte propose plusieurs estimations de la perte de chiffre d'affaires :

En considération des potentialités d'augmentation et de développement du chiffre d'affaire : 488 335€

En considération des potentialités d'augmentation et de développement du chiffre d'affaire hors saison :624 502€

En considération de la progression d'un autre restaurant situé à [Localité 6] sur la croisette 367 499€

La dernière estimation n'est pas satisfaisante dans la mesure où elle est fonction de l'évolution d'un seul restaurant et qui n'est pas îlien comme LA TONELLE.

La deuxième réalisée en considération des potentialités d'augmentation et de développement du chiffre d'affaire hors saison est discutable dans la mesure où est privilégié un critère basé sur une partie de l'activité.

Le recours à une moyenne entre les extrêmes n'est pas satisfaisant puisque réalisant un mélange de critères relevant de méthodes différentes.

La juridiction retiendra l'estimation première qui paraît la plus en adéquation avec les données du litige soit 488 335 euros.

Le commissionnement due à la société ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE représente selon l'expert 2,11% du chiffre d'affaire de la SARL LA TONNELLE.

Son préjudice financier s'évalue ainsi :

92 783,65 (19%x488 335) + 10 303,87(488 335 x 2,11%) x 36,75% correspondant au taux de marge sur les charges variables soit 37885 euros.

La SA ALLIANZ ne conteste pas être l'assureur responsabilité décennale de la société SOPAL AZUR.

La MAF ne conteste pas être l'assureur responsabilité décennale de monsieur [I].

Par voie de conséquence il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris de ce chef et de condamner in solidum monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ à payer à la société ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE la somme de 94 847 euros en réparation du préjudice matériel et la somme de 37885 euros en réparation du préjudice financier, précision faite que chaque constructeur assumera la moitié du préjudice.

Sur l'appel des sociétés SARL LA TONNELLE, PLANARIA, la SARL LERINA

Le juge de première instance a rejeté à juste titre les demandes de ces sociétés aux motifs qu'elles étaient fondées sur les dispositions des articles 1792 et 1147 alors qu'elles n'ont pas la qualité de maître d'ouvrage et qu'elles n'ont pas de liens contractuels avec les constructeurs.

Dans le cadre de la procédure d'appel ces sociétés invoquent un nouveau fondement juridique délictuel.

Elles font ainsi valoir que les fautes contractuelles commises par l'entreprise SOPALZUR et l'architecte [I] à l'égard de la SARL HOTELLERIE DE LERINS leur ont occasionné un préjudice réparable sur le fondement de l'article 1382 aujourd'hui 1240 du code civil qui dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il appartient aux sociétés précités de démontrer individuellement que le manquement à leurs obligations contractuelles par l'entreprise SOPALZUR et par le monsieur [I] leur a causé un dommage ;

En ce qui concerne la SARL LA TONNELLE elle demande aux termes de ses dernières conclusions une somme de 85 560 euros en réparation de la perte financière subie.

En sa qualité d'exploitante du restaurant, les fautes de conception et d'exécution commises par monsieur [I] et la société SOPAL AZUR ont eu pour conséquence des infiltrations d'eaux dans la salle du restaurant où sont accueillies les clients obligeant l'exploitant à organiser son activité de manière à impacter le moins possible les conditions de travail et l'agrément des clients.

Par ailleurs l'importance et le fait que les infiltrations sont intervenues à plusieurs reprises impactent la clientèle.

Les fautes de monsieur [I] et de la société SOPAL AZUR ont été sources de pertes financières pour la SARL LA TONNELLE.

L'évaluation du préjudice subi par le maître d'ouvrage a conduit à mesurer l'impact du sinistre sur le chiffre d'affaires de la SARL LA TONNELLE ;

Il a été ainsi retenu que l'impact du sinistre sur le chiffre d'affaires de la SARL LA TONNELLE sur l'ensemble de la période considérée est de 488 335 euros.

Le taux de marge sur charges variables retenu par l'expert n'étant pas contesté, le préjudice financier de la SARL LA TONNELLE sera évalué à 488 335 x 17,27% =84 237,79 euros arrondi à 84 238 euros.

Par voie de conséquence, la société SOPALZUR et la SA ALLIANZ, monsieur [E] [I] et LA MAF seront condamnés in solidum à payer à la SARL LA TONNELLE la somme de 84 238 euros en réparation de la perte financière occasionnée par leurs fautes ayant concourues à l'entier préjudice.

Cette créance de dommages intérêts en réparation d'un préjudice relevant de la responsabilité délictuelle ne peut produire d'intérêts à la date de l'assignation.

En ce qui concerne la SARL LERINA elle a pour objet la commercialisation des vins et la fabrication d'accessoires, toutes opérations ressortissant du commerce ou de l'industrie des vins, liqueurs, alcool. Elle demande la condamnation des constructeurs dont les fautes sont établies à lui payer une somme de 60471 euros correspondant au préjudice dont elle se prévaut évalué par l'expert.

En ce qui concerne la SARL PLANARIA elle a pour objet l'exploitation en monopole du transport des voyageurs et des marchandises entre [Localité 7] et la ville de [Localité 6].

Elle demande la condamnation des constructeurs dont les fautes sont établies à lui payer une somme de 47578 euros correspondant au préjudice dont elle se prévaut évalué par l'expert.

Débitrices de la charge de la preuve, il incombe à ces sociétés de démontrer que les fautes de monsieur [I], et de l'entreprise SOPALZUR dans la réalisation des travaux de couverture de la terrasse du restaurant de l'Ile sont effectivement à l'origine d'un dommage causé à l'exploitation de ces sociétés.

Les conclusions récapitulatives ne comportent aucun autre élément d'individualisation que la mention de l'objet social et le chiffrage des préjudices et renvoient pour le surplus aux analyses réalisées par l'expert et par son sapiteur.

L'experte sapiteur madame [U] met en évidence dans son rapport les liens d'évolution sur l'année des chiffres d'affaires mensuellement constatés de l'ensemble des sociétés exploitant [Localité 7] permettant de déduire les pertes des sociétés LERINA et PLANARIA sur la base de celles du restaurant LA TONNELLE d'abord en réalisant un graphique comparatif puis des calculs réalisés de mise en parallèle des chiffres d'affaires mensuels restaurant/boutique/bateau.

La corrélation de l'évolution des activités des sociétés exploitant [Localité 7] rapporte la preuve du lien de causalité entre les fautes des constructeurs et les préjudices dont il est demandé réparation.

S'agissant du préjudice financier occasionné à la société PLANARIA il est évalué par référence à la perte de chiffre d'affaires de la société LA TONNELLE, au nombre de repas (prix 55€) et de tickets de bateau aller-retour vendus (11,43€) , au ratio couverts /passagers (38%) et au taux de moyen sur charges variables (17,54%) .

Le calcul est le suivant :

[(488 335/55) / 0,38] x 11,43 =267 065,50

La perte financière est de 46 843,29 arrondi à 46 843 euros.

S'agissant du préjudice financier occasionné à la société LERINA, il est évalué par référence à la perte de chiffre d'affaires de la société LA TONNELLE, au ratio couverts /passagers (38%), au prix du panier moyen du passager (25,50 €) et au taux de marge moyen sur charges variables étant de 39,97%.

[(488 335/55) / 0,38]x 0,25x25,50 = 148 953,86

La perte financière est de 59 537,86 arrondi à 59 538 euros.

Par voie de conséquence il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris de ce chef et de condamner in solidum monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ à payer à la société PLANARIA la somme de 46 843 euros et à la société LERINA la somme de 59 538 euros en réparation du préjudice matériel qu'elles ont subi, précision faite que chaque constructeur assumera la moitié du préjudice.

Sur les autres demandes

L'article 1153-1 du code civil pose le principe selon lequel, en matière indemnitaire, les intérêts courent à compter de la décision à moins que le juge n'en décide autrement.

En l'espèce, le rapport d'expertise étant en date de 2015, il y a lieu de dire que les créances à la société HOTELLERIE DE LERINS, à la société LA TONNELLE, à la société PLANARIA et la société LERINA produiront intérêts à compter de la date de l'assignation avec capitalisation des intérêts échus pour une année entière.

Monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ étant les parties perdantes comme en première instance, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge s'agissant de la charge des dépens et de l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils seront en outre condamnés aux dépens de la procédure d'appel dont distraction au profit de la SELARL CHERFILS IMPERATOR BOULAN.

Enfin, l'équité commande d'allouer à la société HOTELLERIE DE LERINS, la société LA TONNELLE, la société PLANARIA et la société LERINA la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe :

PRONONCE la jonction des instances RG 18/17052 et 18/12642.

Infirme le jugement du tribunal de Grasse du 05 juin 2018 sauf en ce qu'il condamne monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire et à verser la somme de 15 000 euros à la SARL ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau :

Condamne in solidum monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ à payer à la société ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE la somme de 94 847 euros en réparation du préjudice matériel et la somme de 37885 euros en réparation du préjudice financier.

Dit que monsieur [E] [I] et son assureur la MAF d'une part et la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ d'autre part supporteront 50% de la charge de l'indemnisation des préjudices de la société ABBAYE DE LERINS HOTELLERIE.

Condamne in solidum monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ à payer à la société PLANARIA sur le fondement de la responsabilité délictuelle la somme de 46 843 euros en réparation du préjudice financier.

Dit que monsieur [E] [I] et son assureur la MAF d'une part et la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ d'autre part supporteront 50% de la charge de l'indemnisation des préjudices de la société PLANARIA.

Condamne in solidum monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ à payer à la société LERINA sur le fondement de la responsabilité délictuelle la somme de 59 538 euros en réparation du préjudice financier.

Dit que monsieur [E] [I] et son assureur la MAF d'une part et la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ d'autre part supporteront 50% de la charge de l'indemnisation des préjudices de la société LERINA.

Dit que les condamnations ci-dessus prononcées produiront intérêts à compter de la date de l'assignation avec capitalisation des intérêts échus pour une année entière.

Déboute monsieur [E] [I] et son assureur la MAF de leurs appels en garantie contre la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ et la société FRIAZUR et son assureur AXA ;

Déboute la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ de leur demande dirigée contre la société FRIAZUR et son assureur AXA ;

Condamne in solidum monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ à payer à la société HOTELLERIE DE LERINS, à la société LA TONNELLE, à la société PLANARIA et la société LERINA la somme de 2000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum monsieur [E] [I] et son assureur la MAF, la société SOPAL AZUR et son assureur ALLIANZ aux dépens de la procédure d'appel dont distraction au profit de la SELARL CHERFILS IMPERATOR BOULAN.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Février 2023,

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/12642
Date de la décision : 16/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-16;18.12642 ?
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