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10/02/2023 | FRANCE | N°19/08171

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 10 février 2023, 19/08171


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 10 FEVRIER 2023



N° 2023/ 23



RG 19/08171

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEJUH







[K] [A]





C/



EPIC SNCF II

























Copie exécutoire délivrée le 10 Février 2023 à :



- Me Christine IMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE



- Me Michel KUHN, avocat au barreau de MARSEILLE

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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 23 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F18/00277.





APPELANT



Monsieur [K] [A], demeurant [Adresse 3] - [Localité ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 10 FEVRIER 2023

N° 2023/ 23

RG 19/08171

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEJUH

[K] [A]

C/

EPIC SNCF II

Copie exécutoire délivrée le 10 Février 2023 à :

- Me Christine IMBERT, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Michel KUHN, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 23 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F18/00277.

APPELANT

Monsieur [K] [A], demeurant [Adresse 3] - [Localité 2]

représenté par Me Christine IMBERT de la SELARL ARCOLIA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Société nationale SNCF, venant aux lieu et place de l'EPIC SNCF, demeurant [Adresse 1] - [Localité 12]

représentée par Me Michel KUHN, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Janvier 2023, délibéré prorogé en raison de la survenance d'une difficulté dans la mise en oeuvre de la décision au 10 Février 2023.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Février 2023

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

M. [K] [A] a été engagé à compter du 29 décembre 2014 par la société SNCF en qualité en qualité d'infirmier, qualification D, position 13 et échelon 0, par contrat à durée indéterminée à temps partiel, dans les services médicaux de [Localité 9] [Adresse 10] avec clause de mobilité suivant les nécessités de service.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises aux dispositions du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel.

Le 27 septembre 2016, un avenant au contrat de travail, accepté par le salarié, modifiait le lieu d'exécution de son travail et ce dernier était muté au 1er octobre 2016 au cabinet médical SNCF régional de PACA sur un emploi d'infirmier polyvalent au service médical de [Localité 6] SNCF.

M. [A] était placé en arrêt maladie à compter 20 mars 2017 pour syndrome anxiodépressif réactionnel.

A l'issue de la visite médicale de reprise du 31 octobre 2017, M. [A] était déclaré inapte à son poste.

M. [A] saisissait le 9 février 2018 en référé le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins d'obtenir le paiement de ses salaires depuis le 29 novembre 2017 et dans le même temps le conseil au fond, aux fins d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur et en paiement d'indemnités.

Le 29 mars 2018, le conseil des prud'hommes a dit n'y avoir lieu à référé au vu de l'existence d'une contestation sérieuse et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Par jugement du 23 avril 2019 le conseil de prud'hommes a statué au fond comme suit:

«Dit que la prise d'acte de Monsieur [K] [A] doit être requalifiée en une démission.

Déboute Monsieur [K] [A] de l'ensemble de ses demandes.

Déboute la société SNCF de ses demandes plus amples ou contraires.

Condamne Monsieur [K] [A] aux entiers dépens.»

Le salarié saisissait le 30 avril 2019 le conseil de prud'hommes de Marseille d'une requête en rectification d'erreur matérielle.

Par acte du 20 mai 2019 le conseil de M. [A] a interjeté appel de cette décision.

Par jugement du 26 juin 2019, le conseil de prud'hommes a statué comme suit :

« Reçoit la requête en rectification d'erreur matérielle, la déclare bien fondée, y fait droit;

Ordonne la rectification de l' erreur matérielle de la décision prononcée par jugement en date du 23 avril 2019 sous le numéro RG 18/00277 par le conseil de Marseille, en ce qu'il a par erreur analyser la demande de résiliation judiciaire de M. [A] en une prise d'acte et lui a fait porter les effets d'une démission ;

Rétablit M. [A] dans sa situation contractuelle initiale ;

Ordonne qu'il soit fait mention du présent jugement en marge de la minute n° 19/00394 du jugement prononcé le 23 avril 2019 et sur les expéditions du jugement. »

Le 20 novembre 2019, le salarié adressait à la société un courrier de prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 29 juillet 2019, M. [A] demande à la cour de :

« Réformer le jugement du Conseil de prud'hommes de MARSEILLE rendu le 23 avril 2019 en ce qu'il a :

Dit que la prise d'acte de Monsieur [A] doit être requalifiée en une démission ;

Débouté Monsieur [A] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamné Monsieur [A] aux entiers dépens.

En conséquence,

Constater que l'employeur n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail du salarié ;

Constater que l'employeur n'a pas respecté son obligation de protection contre les risques psychosociaux,

Constater que l'inaptitude de Monsieur [A] est due au comportement de l'employeur

Dire et juger que Monsieur [A] a été victime d'actes de harcèlement moral imputables à son employeur

Constater que l'employeur ne rémunère plus le salarié depuis février 2018 ;

Constater que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement à l'égard du salarié;

Ainsi :

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié au torts de l'employeur et lui faire produire les effets d'un licenciement nul ;

Condamner l'employeur à payer au salarié la somme de 22.788,50 euros, soit 10 mois de salaire, à titre d'indemnité pour licenciement nul ;

A titre subsidiaire, et si par extraordinaire la Cour ne constatait pas l'existence de harcèlement moral en l'espèce :

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié au torts de l'employeur et lui faire produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamner l'employeur à payer au salarié la somme de 9.115,40 euros, soit 4 mois de salaire à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause :

Condamner l'employeur à payer au salarié les sommes de :

' 6.836,55 euros, soit 3 mois de salaire, à titre de rappel de traitement depuis février 2018 et 683,65 euros de congés payés y afférents ;

' 6.836,55 euros, soit 3 mois de salaire, à titre de Dommages et Intérêts pour le non-paiement des traitements par l'employeur ;

' 13.673,10 euros, soit 6 mois de salaire, à titre de Dommages et Intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

' 22.788,50 euros, soit 10 mois de salaire, à titre de Dommages et Intérêts pour harcèlement moral ;

' 13.673,10 euros, soit 6 mois de salaire, à titre de Dommages et Intérêts pour manquement à l'obligation de protection contre les risques psychosociaux ;

' 13.673,10 euros, soit 6 mois de salaire, à titre de Dommages et Intérêts en réparation du préjudice subi du fait du non-respect de l'obligation de reclassement par l'employeur depuis novembre 2017 ;

' 6.171,88 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

' 4.557,70 euros, soit 2 mois de salaire, à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

' 2.734,62 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés.

Condamner l'employeur au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Ordonner la délivrance des documents de fin de contrat et des bulletins de salaire rectifiés depuis novembre 2017 dans les 15 jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

Se réserver la possibilité de liquider l'astreinte ;

Ordonner l'exécution provisoire ;

Assortir le paiement de ces sommes aux intérêts au taux légal ;

Condamner l'employeur aux entiers dépens.»

Dans ses dernières écritures communiquées par voie électronique le 20 octobre 2022, la société SNCF venant aux droits de Epic SNCF demande à la cour de :

'A titre liminaire et principal :

Constater que la demande de résiliation judiciaire est devenue sans objet du fait de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Monsieur [A],

Constater ainsi qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire,

En conséquence :

Débouter nécessairement le salarié de ses demandes, fins et prétentions inhérentes à la résiliation judiciaire. Confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Constater que la société SNCF n'a commis aucun manquement dans l'exécution du contrat de travail empêchant la poursuite du contrat de travail de Monsieur [A] ;

En conséquence,

Débouter Monsieur [A] de l'intégralité de ses demandes ;

Débouter Monsieur [A] de sa demande relative à la condamnation de la société au paiement de dommages et intérêts au titre de l'article 700 code de procédure civile ;

Y ajoutant :

Condamner Monsieur [A] au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile '.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs écritures susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les « dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

I) Sur les manquements invoqués

A) Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

Le salarié soutient que :

- ses conditions de travail ainsi que ses missions ont été modifiées entraînant une surcharge de travail, étant le seul infirmier d'un service comptant plus de 950 salariés rattachés aux deux médecins

- il n'a été payé que sur la base d'un 80 % et non sur la base d'un temps complet

- il lui a été confié de nombreuses tâches diverses et variées alors qu'il ne disposait d'aucune formation préalable

- il aurait dû, conformément aux statuts de la SNCF, se voir attribuer un grade supérieur au regard de son ancienneté de plus de deux ans au sein de la SNCF ce qui n'a pas été le cas

- un administrateur RH a déposé pour lui une demande d'absence pour les journées du 3 et 7 avril 2017, lui soustrayant ainsi deux jours de congés.

La société réplique qu'elle a mis en place toutes les actions pour répondre à la demande de son agent qui souhaitait rejoindre sa compagne dans le sud-Est de la France, et qu'il a bénéficié pour sa mutation de [Localité 6] de deux allocations pour défaut de logement et changement de résidence, et même d'une avance sur son salaire du mois de novembre 2016.

La société explique concernant la division de son temps de travail sur deux secteurs, que le salarié avait été informé au moment où il a postulé sur le poste à la Caisse de Prévoyance et de Retraite qu'il était susceptible de passer en temps partiel.

Concernant le déroulement de carrière, la société indique que, régi par le chapitre 6 du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel, outre l'attribution d'un échelon se faisant à l'ancienneté et au classement, la carrière des agents se fait au choix et les périodes d'absence continue au delà du 91 ème jour retardent l'accès à la qualification ou au niveau supérieur.

Tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l'employeur d'exécuter le contrat de travail de bonne foi.

La réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d'une part la réalité du manquement et d'autre part l'existence et l'étendue du préjudice en résultant.

La société justifie pour le bulletin de paie à 80 % qu'il s'agissait d'une erreur qui a été rectifiée le mois suivant en novembre 2016.

Par ailleurs, il est démontré et que le salarié a bénéficié de formations y compris concernant ses activités (formation ESTI pièce 13 de l'appelant et historique des actions de formation pièce 33 de la société).

La pièce 12 dont se prévaut l'appelant pour dire que des jours de congés lui auraient été supprimés est un accusé de réception d'une demande d'absence du salarié pour la seule journée du 3 avril 2017 et correspond manifestement à une régularisation, un administrateur RH ayant déposé à sa demande cette journée, ce qui ne permet pas d'en déduire la perte de deux jours de congés. Les arguments du salarié doivent être rejetés.

Le déroulement de la carrière de la SNCF pour le personnel médical prévoit que les infirmiers sont nommés sans tableau d'aptitude au grade INFP à l'expiration d'un séjour de deux ans dans leur grade (pièce 30 de la société).

Toutefois en vertu de l'article 13 du règlement interne de la SNCF RH 00271 le délai de séjour est prolongé de la durée des absences continues, quel qu'en soit le type, à partir du 91e jour. L'accès à la qualification au niveau supérieur est retardé d'un nombre de mois égal au quotient par 30 du nombre de jours d'absence pris en compte, le résultat obtenu étant arrondi au nombre entier le plus voisin ou au nombre entier inférieur en cas d'équidistance (avancement en grade pièces n° 29 et 30 de l'intimée).

En l'espèce, le salarié a été engagé par la SNCF le 29 décembre 2014 et aurait dû changer de grade à l'issue d'une période de deux ans soit le 29 décembre 2016.

Cependant, la mise à jour des absence du salarié entre le 21 janvier 2015 et le 7 mai 2018 (pièce 28 de la société ) atteste néanmoins que ce dernier a été absent au delà de 90 jours sur plusieurs mois, retardant ainsi l'accès à la qualification. Le grief doit être rejeté.

Le contrat de travail de M. [A] mentionne en son article 5 que « les fonctions pourront évoluer et être modifiées par l'entreprise en fonction des possibilités et des besoins de celle-ci conformément à la réglementation en vigueur. Le salarié s'engage de ce fait à accomplir toutes formations que lui demanderait l'entreprise ».

En novembre 2016, il a été proposé au salarié, qui l'a accepté, un poste d'infirmier qui se libérait à la Caisse de Prévoyance et de Retraite avec à partir du 1er janvier 2017 une répartition de 70 % à la Caisse de Prévoyance et de Retraite et 30 % au cabinet médical de [Localité 6] [11]. Le salarié a été informé par Mme [Y] [M], RH, présidente du CHSCT des conditions de ce poste par mail du 17 avril 2017 adressé par cette dernière à [C] [X]. (pièce appelant n°13 et n°7 de la société intimée).

Les modifications invoquées par l'appelant, conformes au contrat de travail, n'ont donc pas été imposées brutalement comme allégué par le salarié. Le grief ne sera pas retenu.

S'agissant de la surcharge de travail en raison de la préparation avec les deux médecins des deux secteurs des visites d'information et de prévention (VIP) dont le salarié fait état dans son mail du 29 juin 2017 adressé à Mme [J] Pages (pièce 5 de l'appelant ), la cour constate à la lecture du mail du 17 avril 2017 de Mme [Y] [M] qu'à aucun moment le salarié ne lui a fait part de ses difficultés ni même « d'un quelconque désaccord quant à des objectifs irréalisables » et qu'à la date du 16 mars 2016« la procédure des VIP, du protocole, du nombre d'agents pouvant être vu par mois » n'était pas encore mise en place.

En l'absence de tout autre élément relatif à la surcharge de travail invoqué par le salarié, ce surcroît d'activité ne pourrait dès lors concerner qu'une période minime du fait de des absences du salarié pour maladie au cours du mois de février 2017 et de son arrêt maladie prolongé à compter du 28 mars 2017 jusqu'au 29 octobre 2017. Le grief doit en conséquence être rejeté.

Quant au fait que le salarié aurait été le seul infirmier, cet élément n'est étayé par aucune pièce alors que la dirigeante paramédicale régionale Paca [M] précise dans son mail du 30 mars 2017 qu'une procédure lui avait été demandé pour le transfert d'appel vers un autre infirmier en cas d'absence. Cet argument doit donc être également rejeté.

Il s'ensuit que M. [A] n'établit pas une exécution déloyale du contrat de travail de la part de la SNCF et la demande d'indemnité à ce titre doit être rejetée.

Le jugement entrepris doit être confirmé sur ces points.

B) Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l'article L1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Le salarié fait valoir que :

- il n'a obtenu une aide qu'à la suite de nombreuses relances de sa part et plus d'un mois après son arrivée à [Localité 6]

- ses missions ont été modifiées par l'employeur qui n'a pas hésité à lui confier de nombreux tâches diverses et variées telles que la gestion des rendez-vous avec le médecin, l'accueil du personnel dans le cadre des visites de santé au travail et qu'il s'est senti dévalorisé en étant réduit à espionner les médecins avec lesquels il travaillait

- que deux jours de congés lui ont été supprimés

- pour seule réponse à la surcharge de travail et à son incapacité physique et matérielle de mener de front les missions confiées, son employeur lui a proposer de découvrir d'autres postes basés à [Localité 7], [Localité 4] et [Localité 13]

- il lui a été demandé de travailler de chez lui et de « faire le nécessaire pour aviser l'établissement de la fermeture du cabinet médical » alors qu'il venait d'avertir de son absence en raison de la maladie de sa fille

- Mme [X] a adressé un mail à Mme [M] le 30 mars 2017 afin de l'alerter sur les mauvaises conditions de travail et sur un risque psychosocial multifactoriel mais aucune solution ne lui a été proposée pour alléger sa charge de travail

- Mme [M] lui a reproché de s'être approché d'un syndicat

- Mme [E], infirmière de santé au travail référente réseau prévention paramédicale, de la SNCF a fait clairement état dans un de ces mails de dysfonctionnements irritants dans le service, ce qui confirme que la direction était parfaitement au courant de la situation de M. [A] mais qu'elle n'a pas souhaité réagir

- suite à l'avis d'inaptitude l'employeur a reproché au salarié à travers plusieurs courriers, des absences injustifiées inexistantes.

Il produit notamment les pièces suivantes :

- un mail du 29 juin 2017 adressé par le salarié à Mme [J] Pages expliquant sa situation (pièce n°5)

- plusieurs mails entre Mme [M] et M. [A] des 26 et 27 octobre 2016 concernant la demande d'octroi d'indemnités suite au déménagement du salarié sur [Localité 6] et un mail du 4 novembre 2016 de Mme [V] relatif au virement d'un mandat d'un montant de 2.645,25 € comprenant l'indemnité de changement de résidence avec l'indication que la somme de 1697 € nets d'impôts lui serait versé sur la paie du mois de novembre au titre du complément de la location de changement de résidence. (pièce 11)

- un e-mail du 18 avril 2017 de [B] [O] accusant réception d'une demande de congé à sa demande pour la journée du 3 avril 2017 (pièce 12)

- le mail de Mme [Y] [M], RH, présidente du CHSCT du 17 avril 2017 adressé à [C] [X] indiquant notamment « [K] m'a fait part à plusieurs reprises de sa satisfaction d'avoir eu un poste aussi rapidement juste après sa mutation et d'avoir accédé à des formations telles que ESTI, formateur SST. Je trouve fort dommage qu'un agent interpelle ainsi un syndicat en première intention et à plusieurs reprises comme tu me l'as dit, alors qu'il ne s'est à jamais rapprocher des encadrants, ni des médecins avec lesquels il travaille (..)

Depuis janvier 2017 [K] n'a été que deux demi-journées en double avec [Y] [L] [E] (le lundi 30 janvier après-midi et le jeudi 2 mars matin) et une journée sur [Localité 7] le 27 mars 2017(en double avec [N] [S]) ceci répondant à la découverte des postes de la région PACA suite à sa mutation sur Paca donc 2 jours en trois mois. » (pièce 13)

- un e-mail du salarié à [U] [T] prévenant qu'il ne pourra être présent, sa fille étant malade et la réponse de cette dernière « d'accord [K]. Merci de faire le nécessaire pour aviser l'établissement de la fermeture du CM » (pièce 14)

- un e-mail du 28 avril 2017 de [Y] [E]-[L], infirmière de santé au travail, référente réseau prévention paramédicale concernant une réunion « permettant de faire le point sur les objectifs du jour, les dysfonctionnements irritants ( ..). »

- plusieurs courriers en particulier :

du 7 novembre 2017 de la directrice des services médicaux Mme [J] Pages en réponse au conseil du salarié expliquant l'historique de la situation de M. [A] (pièce 18)

du 15 novembre 2015 de la responsable des ressources humaines Mme [G] adressé au salarié pour rappeler les dispositions de l'article 8 du référentiel GRH035 et lui demander de fournir des justificatifs d'absence dans les meilleurs délais ou de se présenter au cabinet médical afin d'organiser une mission transitoire dans l'attente du reclassement. (pièce 20)

du 15 décembre 2017 de Mme [G] adressé a conseil du salarié lui rappelant que « l'agent qui est en raison de son état de santé dans l'impossibilité d'assurer son service doit sous peine d'être considéré comme étant situation irrégulière avertir ou faire avertir le jour même son directeur d'établissement et dans les 48 heure, adresser au service du contrôle médical de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF les volets numéro 1 et numéro 2 de l'avis médical d'arrêt de travail ou de prolongation d'arrêt travail et à son établissement le volet numéro 3 » et précisant que « la déclaration d'inaptitude ne dispense pas l'agent dans l'impossibilité d'assurer son service du respect des formalités de l'article8 du référentiel GRH0359 », lui indiquant qu'un courrier était adressé au salarié le jour même l'invitant à se présenter le 18 décembre 2017 au cabinet médical de [Localité 14] Triage ou des missions temporaires lui seront proposées en accord avec ses capacités mobilisables puis le 19 décembre 2017 à [Localité 5] à [Localité 12] pour un entretien afin d'échanger sur la procédure de reclassement (pièce 22)

une convocation adressée le 15 décembre 2017 au salarié par Mme [G] l'invitant à se présenter le 20 décembre 2017 au cabinet médical de [Localité 14] triage (pièce 10)

- le référentiel sur l'inaptitude et le reclassement RH00360.

Ces faits pris dans leur ensemble pourraient permettre de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

L'employeur estime que le comportement du salarié doit être pris en compte pour apprécier l'ensemble des éléments de fait, qu'il existe une forte part de subjectivité de sa part et que toutes les difficultés relationnelles ne caractérisent pas une situation de harcèlement et qu'aucune des conditions exigées par les textes pour caractériser l'existence d'un harcèlement moral n'est remplie.

L'employeur se réfère à l'ensemble des pièces produites et détaillées dans le cadre de l'exécution du contrat de travail ainsi à la newsletter médicale PACA parue en décembre 2016 (...) Cette mutation est donc un nouveau cap avec beaucoup de changements, notamment la présence du soleil et de l'air marin. Cette prise de poste me permet de découvrir une autre facette de ma profession et surtout j'ai le plaisir d'avoir été très bien accueilli par mes collègues déjà en poste. Chacun de mes nouveaux et nouvelles collègues, quel que soit leur fonction m'aide à m'intégrer et à me repérer. Au final, je note que le soleil méditerranéen se ressent dans les sourires de chacun et je suis ravi d'avoir choisi de venir à [Localité 6] et que [Localité 6] m'ait choisi.(Pièce n°32) »

L'employeur démontre que le retard invoqué par le salarié concernant le règlement des indemnités ne peut lui être imputé dans la mesure où les échanges de mails entre M. [A] et Mme [M] attestent que le salarié n'a envoyé les documents demandés que le 21 octobre 2016 par mail, les documents originaux n'ayant pas encore été reçus à cette date par le service devant traiter la demande et qu'un virement du montant des indemnités a été effectué dès le 4 novembre 2016, soit 15 jours après la demande.

Le contrat de travail prévoyait que les fonctions du salarié pouvaient évoluer et être modifiées par l'entreprise en fonction des possibilités et des besoins de celle-ci conformément à la réglementation en vigueur et les tâches prétendument exercées telles que la gestion des rendez-vous avec le médecin et l'accueil du personnel dans le cadre des visites de santé au travail ou même de l'espionnage ne sont pas établis au dossier.

La cour relève également que les mails dont se prévaut le salarié répondent à une situation évoquée par le salarié sans que cela puisse être considéré comme une demande de travail, un reproche ou des faits de harcèlement. En effet,

- le mail du 17 janvier 2017 fait suite à l'absence du salarié du fait de la maladie de sa fille et l'employeur demande légitimement à ce dernier qu'il avise l'établissement de la fermeture du cabinet médical.

-le mail 17 avril 2017 de Mme [M] RH, présidente du CHSCT, répond aux points soulevés par Mme [C] [X] l'alertant sur les difficultés rencontrées par le salarié s'étonnant de ce que ce dernier ne se soit pas rapproché en priorité des encadrants et des médecins, précisant le planning du salarié dans le cadre ses interventions sur la région PACA en tant qu'infirmier polyvalent et proposant de formaliser les objectifs sur un support RVPA pour les présenter au salarié et relevant enfin qu'« à aucun moment le salarié n'a évoqué un quelconque désaccord quant à des objectifs irréalisables » .

- le mail du 18 avril 2017 répond à sa demande d'absence pour le 3 avril 2017 sans que soit mentionnée la suppression de deux jours de congés.

- le mail de Mme [E] fait état de « dysfonctionnements irritants » à aborder, sans pour autant que ceux ci soient précisément en lien avec la situation de M. [A].

L'employeur a adressé des courriers au salarié après l'avis d'inaptitude du 31 octobre 2017 afin de respecter la procédure de reclassement prévu par le règlement interne RH00360 de la SNCF sur l'inaptitude et le reclassement.

Ainsi, le règlement prévoit en son article 2.3 la procédure qui doit être suivie en cas d'inaptitude et qui indique pendant «toute la procédure en vertu des obligations qui découlent du contrat de travail, l'employeur a l'obligation de fournir du travail à l'agent qui reste soumis au pouvoir de direction de l'employeur et doit se tenir à sa disposition».

Les dispositions de l'article 2.3. 1 et 2.3.2 prévoient le reclassement au sein de l'établissement et hors établissement et en particulier la nécessité de recevoir l'agent dès réception de la déclaration d'inaptitude pour l'informer du processus engagé et de conduire un entretien approfondi avec ce dernier portant sur les pistes envisagées les conditions de son maintien dans l'emploi.

Les courriers adressés au salarié sont conformes au règlement intérieur de la société et le salarié se devait de répondre aux demandes d'entretien de l'employeur et de justifier de ses arrêts de travail.

Il s'ensuit que l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le jugement entrepris doit être donc confirmé sur ces points et par voie de conséquence la demande d'indemnité doit être rejetée.

C) Sur l'obligation de prévention des risques psychosociaux

L'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l'article L. 4121-1 du Code du travail est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du Code du travail et ne se confond pas avec elle.

Le salarié ne rapporte pas la preuve du manquement à son obligation de prévention, le mail de Mme [C] [X] adressé à Mme [M] indiquant « nous sommes devant un risque psychosocial multifactoriel qui mérite toute son attention » est insuffisant pour en établir l'existence et surtout suite à ce courrier la directrice du CHSCT a invité le salarié à venir à plusieurs entretiens pour s'entretenir avec lui sur les éventuelles difficultés et y remédier en proposant « de formaliser les objectifs sur un support RVPA et de les présenter au salarié lors d'un entretien reprogrammé au 24 avril après-midi au cours duquel il pourrait s'exprimer » ce qui constitue une prévention avérée mais cette dernière n'a jamais obtenu de réponse du salarié (pièce 13 appelant).

D) Sur le reclassement

Le salarié fait valoir que la SNCF n'a jamais reçu de propositions concrètes de reclassement, ni de propositions de formation.

La SNCF indique que des propositions sérieuses de poste ont été formulées en particulier concernant un poste d'infirmier en santé au travail au cabinet régional de [Localité 9]-Nord correspondant aux compétences professionnelles de l'agent et aux préconisations du médecin du travail, que le salarié n'a pas cru utile de prendre attache avec son employeur ou de se présenter aux entretiens, préférant charger son conseil d'adresser des courriers l'enjoignant de le reclasser ou de reprendre le versement de ses salaires qui pourtant à l'époque n'avaient pas été suspendus.

Aux termes de l'article L.1226-2 du code du travail lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail en application de l'article L. 4624-4 à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à sa capacité au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant situé sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assure la permutation de tout ou partie du personnel.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Le règlement interne de la SNCF RH00360 sur l'inaptitude et le reclassement prévoit en ses dispositions 2 et suivantes la procédure requise pour le reclassement avec le principe du maintien dans l'emploi et la mise en 'uvre des moyens nécessaires pour répondre à l'obligation de recherche de reclassement.

Le 31 octobre 2017 médecin du travail a déclaré M. [A] inapte à son poste en ces termes « Après examen du salarié, échange avec l'employeur, étude du poste et des conditions de travail (30 octobre 2017), selon l'article R.4624-42 du Code du travail, le salarié est définitivement inapte à son poste. Pourrait être reclassé sur un poste similaire ou un autre dans un site hors PACA. L'état de santé du salarié permet le suivi d'une formation ».

La société justifie conformément au règlement susvisé avoir établi le 13 novembre 2017 un relevé des capacités mobilisables du salarié en vue de son reclassement après inaptitude mentionnant la liste des aménagements préconisés par le médecin du travail, à savoir un changement de lieu de travail et plus d'autonomie et des contre-indications au port de charges lourdes et aux postures trop contraignantes pour le dos et les chevilles. Il a été prévu une formation sur un poste mobile de référent prévention (Imprimé 1034 pièce 3 intimée).

L'employeur a envisagé pour le salarié une mission temporaire d'infirmier en santé au travail sur [Localité 14] dans l'attente du reclassement. Le salarié en a été averti le 15 décembre 2017 mais n'y a pas répondu.(pièces 12 intimée)

La cellule de maintien dans l'emploi a été organisée pour le 15 janvier 2018 à [Localité 6] et le salarié a été invité à s'y rendre pour participer avec tous les acteurs à la recherche de son reclassement. (pièce 13 intimée). Le salarié n'a pas répondu à la sollicitation.

Le poste d'infirmier au cabinet régional de [Localité 9]-Nord a été proposé au titre du reclassement et soumis le 29 janvier 2018 à l'avis des délégués du personnel, le Dr [Z] médecin du travail n'ayant fait aucune opposition à la proposition. (pièce 18 intimée). Le 14 février 2018 le Dr [H] indiquait n'y avoir de contre-indication médicale à ce poste « tant qu'il n'est pas sur le site parisien sur lequel le salarié a eu des difficultés antérieurement » (pièce 19 intimée).

Le 15 février 2018 le poste d'infirmier en santé au travail à [Localité 9]-Nord assortie du maintien des éléments fixes de sa rémunération a donc été validé.

La visite de reprise a été fixée au 21 février 2018 à [Localité 9] et un entretien fixé au 28 février 2018 à [Localité 12] afin de faire le point sur la procédure de reclassement, le salarié ne s'y est pas rendu arguant d'un épisode neigeux sur [Localité 8]. Toutefois, ce dernier n'a pas pris ultérieurement contact avec l'employeur.

En conséquence, l'obligation de reclassement a été respectée par la SNCF et seul le comportement du salarié qui ne s'est jamais manifesté auprès de l'employeur n'a pas permis de la rendre effective.

La décision sera donc confirmée sur ce point et par voie de conséquence le rejet de l'indemnité réclamée à ce titre.

E) Sur le rappel de salaire

Le salarié explique que les dispositions de l'article L.1226-11 du code du travail sont d'ordre public et que selon l'article 2.3.4 du référentiel ressource humaine « inaptitude reclassement », l'employeur aurait dû reprendre le paiement des traitements de manière normale à compter du 30 novembre 2017 en l'absence de tout reclassement passé un délai d'un mois, que l'article 8 du référentiel sur lequel s'appuie l'employeur pour estimer que le salarié est en absence injustifiée ne s'applique qu'aux absences pour maladie et que le référentiel spécialement dédié à l'inaptitude n'impose nullement à ce dernier de justifier son absence après un avis d'inaptitude.

Le salarié indique qu'à compter du mois de février 2018, la SNCF s'est abstenue de verser la moindre rémunération le laissant dans une situation dramatique, avec deux enfants à charge.

La société réplique que la demande du salarié n'est pas fondée juridiquement dans la mesure où ce dernier, agent du cadre permanent, est soumis aux dispositions du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel, que les dispositions de l'article 8 du RH 000359 doivent s'appliquer, l'inaptitude ne le dispensant pas d'adresser ses arrêts maladie à la direction et qu'à partir du moment où ce dernier n'adresse plus les arrêts de travail, quand bien même il se trouverait en inaptitude, il est considéré en absence irrégulière et ses traitements cessent.

Elle souligne qu'à la fin de l'année 2017 le régime de longue maladie lui a été attribué conformément à l'article 15 du GR0359 lui ouvrant droit au versement de prestations mais que le salarié devait impérativement adresser ses arrêts de travail préalable indispensable pour percevoir le traitement prévu aux articles 12 et 17.

Elle précise avoir réglé les salaires du salarié à compter du 30 novembre 2017 jusqu'au mois de février 2018, mais qu'à partir de cette date dans la mesure où M. [A] ne s'est pas présenté sur le poste sur lequel il a été reclassé à [Localité 9]-Nord et en l'absence de production d'un arrêt maladie il a été considéré en absence injustifiée. La société précise que M. [A] ayant adressé des justificatifs d'absences pour le mois d'avril 2018, il avait à nouveau perçu son traitement

La société produit notamment les bulletins de salaire de M. [A] du mois de janvier au mois de juin 2018 et le référentiel RH 00359 sur le règlement d'assurance-maladie, longue maladie, maternité, réforme des agents du cadre permanent (pièce 1 et 4 intimée).

Il s'avère que M. [A] est cadre permanent de la SNCF et non agent contractuel et il est soumis aux dispositions du statut particulier de la SNCF élaboré dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ayant valeur réglementaire. En effet, il résulte de l'arrêt de l'assemblée du Conseil d'Etat du 29 juin 2001 que les dispositions du code du travail s'appliquent aux entreprises sous statut si la loi l'a prévu de façon suffisamment précise.

Dans le silence du code du travail sur son application aux entreprises sous statut, seule la règle statutaire s'applique, sous réserve des éventuels principes généraux du droit et de leur compatibilité avec les nécessités du service public.

Les dispositions de l'article L.1211-1 du code du travail prévoient que les dispositions du livre relatif au contrat de travail sont applicables au personnel des personnes publiques employées dans les conditions du droit privé, sous réserve des dispositions particulières ayant le même objet résultant du statut qui régit ce personnel.

Ainsi, si l'agent contractuel est employé dans les conditions de droit privé, l'agent du cadre permanent ne l'est pas, de sorte que la règle statutaire doit s'appliquer.

Le RH 00360 relative à « l'inaptitude et le reclassement » pris en son article 2.3 prévoit que « l'employeur a l'obligation de fournir du travail pendant toute la procédure de reclassement à l'agent qui reste attaché administrativement et budgétairement à son établissement ou à l'entité dont il dépend ».

Il résulte de ces dispositions, l'obligation pour l'employeur de verser une rémunération pendant la durée du reclassement en contrepartie du travail du salarié, les dispositions de l'article 2.3.4 prévoyants le non-versement du salaire en cas d'impossibilité de fournir du travail à l'occasion d'une mission.

Les dispositions 2.3.3 indiquent également qu'« en cas d'échec des démarches de recherche de reclassement ou de refus par l'agent des propositions qui lui sont faites le directeur des ressources humaines peut ensuite engager la procédure de réforme pour les agents de cadre permanent (RH 00001 chapitre 12 et RH 00359), de licenciement pour les agents contractuels en contrat à durée indéterminée ou de rupture anticipée du contrat de travail pour les agents en contrat de travail à durée déterminée ».

En l'espèce la cour constate que pendant la procédure de reclassement l'employeur a fourni un poste temporaire au salarié dans l'attente du reclassement conformément à l'article 2.3 du RH 00360 et qu'il lui a versé sa rémunération jusqu'en février 2018, date où le poste de reclassement lui a été proposé, et ce bien, que ce dernier n'ait fourni aucun travail en contrepartie.

Suite à l'échec du reclassement en raison de l'absence du salarié aux entretiens et à son poste de travail adapté au reclassement, la société qui n'a pas entamé la procédure de réforme à l'encontre de M. [A] a légitimement demandé au salarié de produire ses arrêts de travail conformément à l'article 8 du RH 00359, et à défaut, a suspendu sa rémunération du fait de son absence au poste de travail.

Le relevé des absences du salarié mises à jour atteste que l'employeur a pris en compte les périodes justifiées par un arrêt de travail et ce jusqu'au mois de juin 2018. À compter de cette date le salarié et ne s'est pas manifesté auprès de son employeur et il a été considéré en absence irrégulière ininterrompue.

Dès lors, le salarié n'est pas fondé à invoquer le rappel de salaire doit donc être débouté de ce chef et de l'indemnité sollicitée à titre de dommages-intérêts.

II) Sur la rupture du contrat de travail

Le salarié sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur.

La société oppose qu'elle a reçu un courrier du salarié du 19 novembre 2019 produit aux débats ( pièce 36 ) prenant acte de la rupture du contrat de travail à ses torts exclusifs, et demande qu'il soit constaté qu'il n'y a plus lieu à statuer sur la demande de résiliation judiciaire devenue sans objet.

La cour constate que la prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à l'employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite initialement par ce dernier, le salarié n'ayant pas pris de conclusions ampliatives tendant à voir constater les effets de la prise d'acte.

En tout état de cause, la cour n'ayant pas retenu les manquements invoqués, les demandes subséquentes liées à la rupture doivent être rejetées.

III) Sur les frais et dépens

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le salarié qui succombe doit s'acquitter des dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Confirme le jugement déféré SAUF s'agissant de la résiliation judiciaire ;

Statuant à nouveau de ce chef et Y ajoutant,

Dit qu'en raison de la prise d'acte du salarié par lettre du 19 novembre 2019, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est devenue sans objet,

Déboute M. [A] de l'ensemble de ses demandes,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [K] [A] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 19/08171
Date de la décision : 10/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-10;19.08171 ?
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