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09/02/2023 | FRANCE | N°22/08371

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 09 février 2023, 22/08371


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9



ARRÊT AU FOND

DU 09 FÉVRIER 2023



N° 2023/142













Rôle N° RG 22/08371 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJROC







SARL ETUDES ET DEVELOPPEMENTIMMOBILIERS EDIM





C/



Syndic. de copro. RESIDENCE LE VERLAINE

BANQUE INTERNATIONALEA LUXEMBOURG BIL

AUCUNEETAT FRANCAIS

S.D.C. DE L'IMMEUBLE [Adresse 13]



Organisme FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS





C

opie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Isabelle FICI



Me Paul GUEDJ



Me Claure LAUGA



Me Romain CHERFILS













Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge de l'exécution de GRASSE en date du 23 Mai 2022 enregist...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 09 FÉVRIER 2023

N° 2023/142

Rôle N° RG 22/08371 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJROC

SARL ETUDES ET DEVELOPPEMENTIMMOBILIERS EDIM

C/

Syndic. de copro. RESIDENCE LE VERLAINE

BANQUE INTERNATIONALEA LUXEMBOURG BIL

AUCUNEETAT FRANCAIS

S.D.C. DE L'IMMEUBLE [Adresse 13]

Organisme FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Isabelle FICI

Me Paul GUEDJ

Me Claure LAUGA

Me Romain CHERFILS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l'exécution de GRASSE en date du 23 Mai 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 21/00073.

APPELANTE

SARL ETUDES ET DEVELOPPEMENT IMMOBILIERS EDIM,

inscrite au RCS de Cannes sous le n°485357180 prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 6]

représentée par Me Isabelle FICI de la SELARL LIBERAS FICI & ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Julien CHAMARRE de la SELARL NEVEU- CHARLES & ASSOCIES, avocat au barreau de NICE, substitué par Me Matthieu BOTTIN, avocat au barreau de NICE

INTIMES

Syndicat de copropriété de la RÉSIDENCE LE VERLAINE

[Adresse 8]

représenté par son syndic en exercice le Cabinet MARCELLIN dont le siège social est sis [Adresse 10]

assigné à jour fixe le 30 juin 2022 à personne habilitée

défaillante

BANQUE INTERNATIONALE A LUXEMBOURG BIL

anciennement dénommée DEIXA BIL, inscrite au RCS de LUXEMBOURG sous le n° 6307 poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 7]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Marlène LEROY de la SELARL ELOCA, avocat au barreau de PARIS

ETAT FIANÇAIS

représenté par le Pôle de recouvrement spécialisé des Alpes Maritimes dont le siège sis [Adresse 2]

assigné à jour fixe le 27 juin 2022 à personne habilitée,

défaillant

Syndicat des copropriétaires DE L'IMMEUBLE [Adresse 13]

représenté par son Syndic en exercice, la SAS FONCIA AD IMMOBILIER, elle-même agissant poursuites et diligences de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège [Adresse 1]

CANNES,

représenté par Me Claude LAUGA de la SELARL LAUGA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE

PARTIE INTERVENANTE

FONDS COMMUN DE TITRISATION CEDRUS ayant pour société de gestion la société EQUITIS GESTION, SAS immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro B 431 252 121, ayant son siège social [Adresse 11],

[Localité 9], et représenté par la société MCS ET ASSOCIES, SAS, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro B 334 537 206, ayant son siège social [Adresse 3], en qualité de recouvreur, et agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice y demeurant en cette qualité (venant aux droits de la SOCIETE GENERALE en vertu d'un bordereau de cession de créances en date du 29 novembre 2019 soumis aux dispositions du Code monétaire et financier)

Intervenant volontaire

représenté par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

assisté de Me Sébastien CAVALLO de la SELARL THEMA, avocat au barreau de PARIS

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 07 Décembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Pascale POCHIC, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Evelyne THOMASSIN, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Février 2023, puis prorogé au 09 Février 2023.

ARRÊT

Réputé Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 Février 2023,

Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Faits, procédure et prétentions des parties

Par acte reçu le 30 janvier 2007 par maître [K], notaire associé à [Localité 15], la société Dexia Banque Internationale à Luxembourg (Dexia Bil) a consenti à M. [D] [M] une ouverture de crédit en compte courant dans la limite de 5.000.000 euros destinée à la constitution d'un portefeuille de valeurs mobilières auprès de la banque d'une valeur minimum de 2 000 000 euros et à des besoins de trésorerie en vue d'investissements immobiliers pour un montant maximum de 3 000 000 euros.

Par le même acte, la SCI Des Roses et SARL Etudes et Développements Immobiliers ( Edim) ont consenti à la banque une garantie hypothécaire sur des biens leur appartenant, dans la limite s'agissant de la société Edim, de la somme de 2 100 000 euros.

Par jugement du 11 janvier 2009 , le tribunal de commerce de Cannes a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de cette société et arrêté le plan de redressement par jugement du 4 mai 2010.

La banque Dexia Bil a déclaré sa créance pour un montant de 3.798.793,15 euros. Sur contestation de maître [U], mandataire judiciaire, le juge-commissaire, par ordonnance du 16 juillet 2013, l'a admise à hauteur de 2 100 000 euros à titre hypothécaire échu, décision infirmée par un arrêt devenu irrévocable rendu le 25 juin 2020 par la cour de ce siège qui a rejeté la créance déclarée par la banque. L'expiration du plan de redressement a été constatée par ordonnance du président du tribunal de commerce de Cannes le 7 décembre 2020.

A la suite de la défaillance de l'emprunteur dans le remboursement du prêt, la société Banque Internationale à Luxembourg (Bil), anciennement dénommée Dexia Bil, a en vertu de la copie exécutoire de l'acte authentique du 30 janvier 2007, par exploit du 9 février 2021, fait délivrer à la société Edim un commandement de payer valant saisie immobilière pour avoir paiement de la somme totale de 2 100 000 euros, emportant saisie des droits et biens lui appartenant, affectés à sa garantie, situés sur les communes de [Localité 14] (Alpes Maritimes) et de [Localité 12] (Alpes Maritimes) plus amplement désignés au cahier des conditions de vente déposé au greffe du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nice le 7 mai 2021.

Ce commandement a été dénoncé à Me [U], ès qualités de mandataire judiciaire, et Me [C], ès qualités de commissaire à l'exécution du plan.

Cet acte publié le 19 mars 2021 étant demeuré infructueux, la banque a fait assigner la société Edim à l'audience d'orientation devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Grasse, lors de laquelle la partie saisie a contesté les poursuites et sollicité subsidiairement, l'autorisation de vendre amiablement les biens saisis.

Par jugement du 23 mai 2022, le juge de l'exécution a pour l'essentiel :

' rejeté les fins de non-recevoir opposées par la société Edim ;

' dit que la créance de la banque, soumise à la prescription quinquennale n'est pas prescrite ;

' dit en conséquence qu'elle est recevable et bien fondée en ses poursuites et à se prévaloir contre cette société de la garantie réelle qu'elle lui a consentie par acte notarié du 30 janvier 2007 ;

' dit que la société Edim est prescrite en sa demande d'annulation de son engagement ; la déboute de sa demande tendant à voir déclarer caduques les inscriptions hypothécaires prises par la banque ;

' dit que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L.311-6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies et que le créancier poursuivant a satisfait au respect des dispositions du code des procédures civiles d'exécution relatives à la saisie immobilière ;

' dit que la banque poursuit la saisie immobilière au préjudice de la société Edim pour une créance liquide et exigible, d'un montant de 2 100 000 euros arrêtée au 31 août 2020, montant de sa garantie ;

' autorisé la vente amiable sur autorisation de justice des biens et droits immobiliers saisis au préjudice, de la SARL Edim et fixé le prix en deçà duquel ces biens ne pourront pas être vendus eu égard aux conditions économiques du marché à la somme de :

- 720 000 euros pour les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] Section AE dépendant de la résidence [Adresse 16] ;

- 550 000 euros pour le lot 12,21,7 et 54 dépendant de la résidence [Adresse 13] ;

- 950 000 euros pour le lot 4 du Domaine des Lauriers Roses à [Localité 12] ;

' condamné la société Edim aux dépens de l'incident ;

' l'a condamnée à payer une indemnité de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Edim a relevé appel de ce jugement d'orientation par déclaration du 10 juin 2022 mentionnant l'ensemble des chefs du dispositif de la décision.

Par ordonnance en date du 21 juin 2022 elle a été autorisée à assigner à jour fixe et les assignations délivrées à cette fin par exploits des 27, 28 et 30 juin 2022 et du 5 juillet 2022 ont été remises au greffe le 8 juillet 2022.

Aux termes de ses écritures notifiées le 17 juin 2022 la société Edim demande à la cour, au visa des articles 5 et 7 de la convention de Rome du 19 juin 1980, des article 2243 du code civil, L.218-2 du code de la consommation et L.223-21 du code de commerce de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ,

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

- déclarer que le contrat de prêt du 22 janvier 2007 intégré dans l'acte du 30 janvier 2007 est soumis au droit de la consommation,

- déclarer que la prescription biennale est applicable,

- déclarer que la prescription est acquise depuis le 27 août 2011, en conséquence,

- prononcer la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l'action de la société Bil, par application de l'ancien article L. 137-2 du Code de la consommation, devenu l'article L.218-2 du code de la consommation,

- déclarer la société Bil irrecevable en son action de saisie immobilière diligentée à l'encontre de la société Edim,

- débouter la société Bil de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

Vu l'article 189 du code de commerce luxembourgeois,

- déclarer que le contrat de prêt du 22 janvier 2007 intégré dans l'acte du 30 janvier 2007 est soumis aux dispositions du code de commerce luxembourgeois,

- déclarer que la prescription décennale est applicable au contrat de prêt du 22 janvier 2007 intégré dans l'acte du 30 janvier 2007,

- déclarer que la prescription est acquise depuis le 27 août 2019, en conséquence,

- prononcer la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance et de l'action de la société Bil,

- déclarer la société Bil irrecevable en son action de saisie immobilière diligentée à l'encontre de la société Edim,

- débouter la société Bil de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre subsidiaire également,

Vu l'article L.110-4 du code de commerce français,

- déclarer, dans l'hypothèse où la cour retiendrait l'application du droit français, que le contrat de prêt du 22 janvier 2007 intégré dans l'acte du 30 janvier 2007 est soumis aux dispositions du code de commerce français,

- déclarer que la prescription quinquennale est applicable au contrat de prêt du 22 janvier 2007 intégré dans l'acte du 30 janvier 2007,

- déclarer que la prescription est acquise depuis le 27 août 2014, en conséquence,

- prononcer la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance et de l'action de la société Bil,

- déclarer la société Bil irrecevable en son action de saisie immobilière diligentée à l'encontre de la société Edim,

- débouter la société Bil de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre plus subsidiaire, pour le cas où le juge de céans estimerait par extraordinaire que la prescription n'est pas acquise,

Vu l'article L.223-21 du code de commerce,

- prononcer la nullité des engagements pris par la société Edim, notamment au regard de l'absence de représentation régulière de la société Edim,

- déclarer que les inscriptions hypothécaires sont caduques, en conséquence,

- débouter la société Bil de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre encore plus subsidiaire,

- déclarer que la créance revendiquée par la société Bil n'est ni certaine ni exigible en l'absence de tout décompte régulier et actualisé,

En conséquence,

- débouter la société Bil de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A titre infiniment subsidiaire,

Vu les mandats de vente,

- autoriser la société Edim à vendre amiablement les biens saisis pour un prix qui ne saurait être inférieur à :

- 550 000 euros pour les lots 12, 21, 7 et 154 de la résidence [Adresse 13],

- 950 000 euros pour le lot 4 du Domaine des Lauriers Roses,

- 720 000 euros pour les parcelles [Cadastre 4] et [Cadastre 5] de la Section AE du [Adresse 16].

Dans tous les cas,

- condamner la société Bil au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens.

A l'appui de ses demandes elle fait valoir pour l'essentiel que conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation (Civ. 3ème, 12 mai 2021 n°19-16.514), l'action hypothécaire ne survit pas à la prescription de l'action personnelle et soutient qu'il y a lieu d'appliquer la loi française concernant l'acte de prêt, a fortiori, à son engagement hypothécaire.

Elle énumère les éléments qui orientent les liens vers la France en indiquant notamment le contrat de prêt a été signé par un notaire français sur le territoire national par M.[M] ressortissant français résidant en France où il avait été démarché par les services de la banque, rappelant qu'elle même est une société de droit français et que son engagement hypothécaire a été pris sur des biens situés en France.

Elle relève par ailleurs que la banque a choisi le droit français pour délivrer à M.[M] un commandement de payer le 6 juin 2013.

Elle ajoute que si la banque revendiquait l'application de la loi luxembourgeoise, il ressort de l'article 5 § 2 de la convention de Rome 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles que, s'agissant des contrats conclus par les consommateurs, que « nonobstant les dispositions de l'article 3, le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle », ce point étant d'ailleurs repris dans l'acte d'engagement hypothécaire qui précise dans son article 18 que « le présent contrat est soumis au droit luxembourgeois pour tout ce qui n'est pas de la compétence exclusive de la loi française ». Elle invoque les dispositions de l'article 7 de la convention de Rome et soutient que le caractère impératif des dispositions de l'article L.218-2 du code de la consommation (anciennement L.137-2 du code de la consommation) relatif à la prescription biennale doit recevoir application en l'espèce, dès lors que le contrat de prêt octroyé par la banque Dexia Bil visait un besoin de trésorerie et non un contrat de prêt immobilier et qu'en tout état de cause la destination du prêt n'a pas d'incidence quant au rattachement du contrat aux règles protectrices du droit de la consommation ainsi qu'il ressort d'un arrêt de la 1ere chambre civile de la Cour de cassation en date du 11 février 2016 (n°14-22.938)

Elle conteste l'existence d'actes interruptifs de prescription en indiquant que la banque a dénoncé la convention de crédit d'un montant de 5 millions d euros par lettre recommandée avec avis de réception du 27 août 2009 et qu'elle n'a pas agi dans le délai de deux ans. Elle rappelle que la déclaration de créance de la banque à sa procédure collective, qui a été rejetée par arrêt du 25 juin 2020, n'a donc pas d'effet interruptif en application de l'article 2243 du code civil.

Subsidiairement, si la cour devait retenir l'application du droit luxembourgeois, elle se prévaut de la prescription décennale de l'article 189 du code de commerce luxembourgeois, applicable aux obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants, ainsi qu'il ressort des décisions de justice luxembourgeoises qu'elle cite.

Elle indique par ailleurs que si la cour devait reconnaître le caractère professionnel de l'emprunteur tout en admettant l'application du droit français, il lui appartiendra d'appliquer la prescription quinquennale.

Elle conteste tout effet interruptif de prescription aux actes diligentés par la banque à l'encontre de la SNC Hacienda et de M. [M], ces actes n'ayant pas été délivrés par un huissier luxembourgeois et ne visant pas les dispositions de la loi luxembourgeoise, alors que les commandements de droit luxembourgeois doivent obéir au formalisme et aux règles de signification tels que prévus pour tous les actes d'huissiers luxembourgeois, par application des articles 153 et suivants du nouveau code de procédure civile du Grand-Duché de Luxembourg.

S'agissant des actes de saisie immobilière délivrés à l'encontre de l'autre garant hypothécaire, à savoir 'la société Hacienda', ceux-ci ne peuvent avoir aucun effet interruptif de prescription tant à l'égard du débiteur principal qu'à l'égard des autres garants hypothécaires, puisqu'il résulte des articles 2245 et 2246 du code civil français, identiques aux articles 2249 et 2250 du code civil luxembourgeois, qu'exception faite du cas où le cautionnement est solidaire, l'interruption faite à l'égard de la caution n'opère pas à l'égard du débiteur ou d'une autre caution et que cela est d'autant plus vrai à l'égard du garant hypothécaire qui n'est pas un débiteur solidaire puisqu'il n'est pas tenu personnellement à la dette du débiteur principal.

Elle en déduit qu'en l'absence d'acte interruptif de prescription valable à l'emprunteur, le commandement de payer valant saisie immobilière délivré à l'encontre de' la SNC Hacienda' n'a eu aucun effet interruptif de prescription qui s'étendrait à elle.

Elle relève les contradictions de la banque qui prétend d'une part que l'article 156 du nouveau code de procédure civile luxembourgeois concerne uniquement les assignations et, qu'en conséquence, le commandement de payer doit obéir à la loi française, d'autre part qu'il faut appliquer la loi du lieu d'inexécution du contrat, conformément à l'article 10 §2 de la Convention de Rome, et, qu'en conséquence, le commandement de payer doit obéir à la loi française, mais qui affirme qu'en revanche, il faut appliquer la loi du contrat quant aux effets du contrat, c'est-à- dire en matière de prescription, et qu'en conséquence, il est nécessaire d'appliquer la loi luxembourgeoise.

Par ailleurs la société Edim réfute l'argument de la banque selon lequel la procédure de saisie immobilière poursuivie à l'encontre de 'la SNC Hacienda', tiers garant, aurait suffi à interrompre la prescription à l'égard de la société Edim tiers garant, au prétexte que le débiteur principal aurait été attrait à la procédure, alors que l'assignation du débiteur principal n'est pas requise par les textes lorsqu'il existe un tiers détenteur ou un tiers garant, qu'en outre dans cette procédure la banque n'a formé aucune demande en justice, interruptive de prescription, à l'encontre de M. [M].

A titre subsidiaire, elle invoque la nullité de son engagement en raison d'une part, de l'absence à l'acte notarié de l'annexe établissant sa présentation par le clerc de notaire et d'autre part, du caractère étranger à son objet social, M. [M] son ancien gérant ne pouvant régulièrement garantir un emprunt personnel en engageant les biens de la société dont il est le représentant.

Elle affirme que le moyen de défense tiré d'une exception de nullité est perpétuel et constitue une défense au fond qui peut être proposé en tout état de cause conformément à l'article 72 du code de procédure civile en sorte qu'aucune prescription ne peut lui être valablement opposée.

Elle soulève encore la caducité de l'inscription hypothécaire au motif qu'en l'absence de terme précis fixé dans l'acte d'affectation hypothécaire, la banque ne pouvait procéder au renouvellement de son hypothèque qui est arrivée à expiration le 31 janvier 2016.

Plus subsidiairement elle soutient l'absence de caractère certain et liquide de la créance commandée, la banque ayant bénéficié de nombreux remboursements et se montre taisante sur les autres garanties dont elle dispose notamment sur les portefeuilles de valeurs mobilières attachés aux contrats de prêts. La société Edim argue par ailleurs d'une absence de taux contractuel valide, le calcul du montant des intérêts, évalué au 18 août 2020 à 582 615,81 euros étant impossible, le décompte produit par la banque ne comportant aucune mention du taux d'intérêt, de sorte qu'il est impossible de vérifier le calcul des intérêts et que la banque ne peut prétendre qu'au taux légal.

Enfin, elle renouvelle sa demande d'autorisation de vente amiable des biens saisis, en se prévalant de deux mandats de vente.

Par écritures notifiées le 2 décembre 2022 la société Bil, conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, au rejet des demandes de l'appelante, à sa condamnation au paiement de la somme de 4500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens d'appel distraits au profit de son conseil, maître Paul Guedj.

A cet effet la banque rappelle que si la prescription applicable à la sûreté réelle est trentenaire conformément à l'article 2227 du code civil français, cette sûreté qui n'est que l'accessoire de la créance, n'est plus susceptible d'être mobilisée dans l'hypothèse où la créance principale est prescrite et elle soutient que tel n'est pas le cas en l'espèce.

Elle indique en effet que le contrat de prêt est soumis à la loi luxembourgeoise, ainsi qu'en ont décidé les parties, et ce conformément aux dispositions de l'article 3 de la convention de Rome et que les seules réserves à cette liberté de choix sont prévues aux articles 5 et 7 de la convention, qui ne remettent pas en cause l'applicabilité du droit choisi.

Et s'agissant de l'article 5 relatif aux contrats conclus avec les consommateurs, la banque conteste cette qualité à M. [M] alors que l'opération , dont la finalité est déterminante pour la détermination de cette qualité, portait sur une opération de crédit de 5 000 000 euros dont 3 000 000 euros à affecter à des investissements immobiliers témoignant de la nature professionnelle du prêt, soulignant en outre que la ligne de crédit mise à disposition de l'emprunteur était inscrite sur des comptes tenus au Luxembourg.

Elle prétend par ailleurs que les dispositions de l'article L.218-2 du code de la consommation ne constituent pas une loi de police au sens de l'article 7§2 de la convention de Rome.

Elle soutient en conséquence que la prescription applicable est fonction du droit luxembourgeois, soit la prescription trentenaire et que l'article 2262 du code civil et subsidiairement s'agissant de la prescription décennale prévue par l'article 189 du code de commerce luxembourgeois, elle note qu'il résulte de l'article 2244 code civil luxembourgeois qu'une demande en justice, un commandement ou une saisie signifié à celui que l'on veut empêcher de prescrire, interrompent la prescription, et que dans le cas présent la créance a été poursuivie concomitamment contre la SCI Les Roses et M. [M] en vertu d'un commandement valant saisie immobilière instrumenté contre la première le 28 juin 2013 précédé d'un commandement de payer délivré au second le 6 juin et elle rappelle qu'à l'issue du jugement d'orientation en date du 28 mai 2014 confirmé par arrêt de cette cour rendu le 17 octobre suivant, instances auxquelles était partie M.[M], l'adjudication a été requise en deux lots suivant jugements des 26 mars 2015 et 9 juillet 2015 et le projet de distribution a été rendu exécutoire par ordonnance du 22 novembre 2017, qu'ainsi la prescription qui a été interrompue, n'était pas acquise à la date de la délivrance du commandement valant saisie immobilière notifié à la société Edim le 9 février 2021.

Elle soutient que les dispositions de l'article 156 du nouveau code de procédure civile luxembourgeois invoqué par l'appelante, sont relatives uniquement aux assignations et que le commandement de payer délivré à M.[M] est conforme aux dispositions de l'article 10 §2 de la convention de Rome, et n'a pas fait l'objet de contestation, ces effets étant déterminés par la loi choisie par les parties à savoir le droit luxembourgeois, en sorte qu'il a valablement interrompu la prescription, ajoutant qu'il n'existe par de contradiction à conférer à un commandement instrumenté dans les formes imposées par l'Etat dans lequel est délivré les effets, au fond, attachés à cet acte par le droit étranger qui gouverne la loi régissant le contrat.

Enfin elle indique que si la prescription quinquennale de l'article L.110-4 du code de commerce devait s'appliquer elle a été interrompue par les poursuites en saisie immobilière engagées conjointement contre la société Des Roses et le débiteur.

Par ailleurs la banque soulève la prescription de la demande de nullité présentée par l'appelante, qui ne constitue pas une défense au fond, en signalant que l'engagement de la société Edim a reçu un début d'exécution par l'inscription des hypothèques prises le 16 et 27 mars 2007 en sorte que la prescription est acquise depuis le 19 juin 2013.

Elle conteste la caducité alléguée de la garanties hypothécaire, en indiquant que les inscriptions primitives ont fait l'objet d'un renouvellement, et que doit être distinguée la durée de validité de l'inscription d'hypothèque et le terme de l'engagement de la société, subordonné en l'espèce conformément aux stipulations contractuelles, au règlement total par M. [M] de son encours.

Sur la liquidité et l'exigibilité de la créance, l'intimée souligne que la société Edim ne démontre nullement que la banque aurait reçu des règlements autres que ceux qu'elle reconnaît avoir perçus. Elle ajoute que le gage de valeurs mobilières de 2 000 000 euros est sans incidence sur la garantie due par la société Edim et s'avère de plus inexacte, puisque le portefeuille gagé, abondé à raison des sommes prêtées le 30 janvier 2007 et de celles objets d'un concours distinct du 20 mars suivant, a été liquidé le 15 octobre 2008 pour la somme de 2.262.272,15 euros, qui a été viré sur le compte courant M.[M] dans les livres de la banque et à partir de ce compte les sommes de 1.300.000 euros et 73.342,30 euros ont été affectées le même jour au remboursement de la ligne de crédit en principal et intérêts, et qu'après ces imputations (pièce, l'encours au 25 septembre 2009 équivalait à 3.816.046,17 euros , montant correspondant au solde repris dans le décompte annexé au commandement de saisie immobilière.

Elle affirme que les modalités de calcul des intérêts, leur base, taux et leur périodicité ne sont pas contestables et que les critiques s'avèrent vaines dans la mesure ou depuis la clôture du compte documentant le concours de M.[M], intervenue le 25 septembre 2009, elle n'a comptabilisé aucun intérêt.

Par conclusions notifiées le 8 novembre 2022 le fonds commun de titrisation Cedrus , venant aux droits de la Société Générale, et ayant pour société de gestion la SAS Equitis Gestion représentée par la SAS MCS et Associés, demande à la cour de :

- le recevoir en ses présentes écritures, le déclarer bien fondé et y faisant droit ;

- le déclarer bien fondé à intervenir volontairement à la présente instance ;

- condamner la partie défaillante à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente.

Il rappelle en substance que la société Edim était titulaire d'un compte courant ouvert dans les livres de la Société générale et a conclu avec cette banque une convention cadre de cession de créances professionnelles permettant de garantir le découvert en compte consenti par la Société Générale et qu'en application de cette convention, la société Edim lui a cédé une créance sur la SPA d'un montant de 462 983,56 euros résultant d'une facture n°08/05/SPA, qui n'a pas été réglée. La Société Générale a donc fait assigner la société Edim et la SPA en paiement devant le tribunal de commerce de Cannes. Toutefois la société Edim a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire et la Société Générale a vu sa créance définitivement admise à la somme de 462 983,56 euros par arrêt de cette cour en date du 21 mars 2014 à l'encontre duquel le pourvoi formé par la société Edim a été rejeté par décision de la Cour de cassation rendue le 1er mars 2016.

Le FCT CEDRUS, ayant pour société de gestion, la société Equitis Gestion, représenté par la Société MCS et Associés, est venu aux droits de la Société Générale par suite de la cession de créances intervenue entre elles le 29 novembre 2019, comprenant notamment les créances détenues à l'encontre de la société Edim, cession dont elle a été informée de même que les organes de la procédure collective, par lettres recommandées du 15 et 20 janvier 2020, 11 février 2020 et 2 juillet 2020.

Le FCT précise qu'eu égard à la procédure de fixation de sa créance, il n'a pu bénéficier des règlements du plan de redressement mis en oeuvre et qui a pris fin au mois de mai 2020 et n'a pu obtenir aucun paiement. Il a ainsi été autorisé par ordonnance du président du tribunal de commerce de Cannes en date du 7 avril 2022, à inscrire des hypothèques sur les biens immeubles qui lui ont été dénoncées le 17 mai 2022.

Il indique avoir déclaré ses créances dans les procédures de saisies immobilières et les a dénoncées aux différents créanciers par actes du 9 juin 2022 et son intervention aux procédures de saisies immobilières a bien été acté par le juge de l'exécution comme en attestent les jugements rendus le 22 septembre 2022.

Créancier inscrit depuis le 9 juin 2022, soit postérieurement au jugement dont appel, il soutient

disposer d'un intérêt certain à intervenir à la présente procédure afin de faire valoir ses droits de créancier à l'encontre de la société Edim le cas échéant et signale qu'à la date de ses écritures, sans avoir communication des conclusions des parties dans la présente procédure, il ne formule aucune demande et s'en remet à justice sur les prétentions développées par l'appelante et les intimés.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 13] a constitué avocat mais n'a pas notifié d'écritures.

L'Etat français (Pole de recouvrement spécialisé des Alpes Maritimes) et le syndicat des copropriétaires de la Résidence Le Verlaine, cités par actes délivrés les 27 et 30 juin 2022 à personne se déclarant habilitée, n'ont pas constitué avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application de l'article 474 alinéa 1 du code de procédure civile l'arrêt sera réputé contradictoire ;

Sur l'intervention du FCT Cedrus :

Vu les dispositions de l'article 554 du code de procédure civile ;

L'intervention volontaire du FCT Cedrus ayant pour société de gestion la SAS Equitis Gestion représentée par la SAS MCS et Associés, venant aux droits de la Société Générale par suite de la cession de créances du 29 novembre 2019, comprenant celle détenue à l'encontre de la société Edim, autorisée par ordonnance du 7 avril 2002 à inscrire une hypothèque provisoire sur les immeubles de cette société, inscription dénoncée à celle-ci le 17 mai 2022, ne fait pas l'objet de critique et sera déclarée recevable ;

Sur la prescription de la créance et l'extinction de l'hypothèque :

La prescription discutée est celle prévue à l'article L.137-2, devenu L.218-2 du code de la consommation, qui dispose que l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans ;

En application de ce texte, la prescription biennale n'est applicable à la demande en paiement formée par un professionnel contre une personne physique que si cette dernière a eu recours à ses services à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;

La portée de la prescription en cause détermine le sort de l'hypothèque qui garantit la créance du professionnel, dès lors qu'il est pas discuté que si la garantie réelle consentie par la société Edim est soumise à la prescription trentenaire attachée aux actions réelles immobilière de l'article 2227, elle s'éteint en application de l'article 2248 du même code, par l'extinction de l'obligation principale ;

Il n'est pas discuté que pour le contrat de crédit souscrit par M. [M], de nationalité française, auprès de la banque luxembourgeoise Dexia BIL, et le cautionnement hypothécaire de la société Edim, dont l'emprunteur était le gérant, les parties ont fait le choix, comme les y autorise l'article 3 la Convention de Rome du 19 juin 1980, applicable audit contrat, de l'application du droit luxembourgeois 'pour tout ce qui n'est pas de la compétence exclusive de la loi française' ;

Pour prétendre à la prescription de la créance, la société Edim se prévaut de l'application du droit de la consommation français, le contrat ayant été signé en France par M. [M], ressortissant français résidant en France, elle même étant une société de droit français et les biens qu'elle a affectés à la garantie des prêts sont situés en France ;

Toutefois il s'agit là, ainsi que le relève la société Bil, de critères subsidiaires de rattachement prévus par l'article 4 de la Convention, applicable en l'absence de choix des parties sur la loi applicable au contrat, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, peu important que les actes aient été signés en France.

L'appelante invoque en second lieu les dispositions de l'article 5 paragraphe 2 et de l'article 7 de la Convention.

L'article 5 relatif au 'contrats conclus par les consommateurs' dispose :

'1. Le présent article s'applique aux contrats ayant pour objet la fourniture d'objets mobiliers corporels ou de services à une personne, le consommateur, pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, ainsi qu'aux contrats destinés au financement d'une telle fourniture.

2. Nonobstant les dispositions de l'article 3, le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le consommateur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi du pays dans lequel il a sa résidence habituelle :

- si la conclusion du contrat a été précédée dans ce pays d'une proposition spécialement faite ou d'une publicité, et si le consommateur a accompli dans ce pays les actes nécessaires à la conclusion du contrat

ou

- si le cocontractant du consommateur ou son représentant a reçu la commande du consommateur dans ce pays

ou

- si le contrat est une vente de marchandises et que le consommateur se soit rendu de ce pays dans un pays étranger et y ait passé la commande, à la condition que le voyage ait été organisé par le vendeur dans le but d'inciter le consommateur à conclure une vente.

3. Nonobstant les dispositions de l'article 4 et à défaut de choix exercé conformément à l'article 3, ces contrats sont régis par la loi du pays dans lequel le consommateur a sa résidence habituelle, s'ils sont intervenus dans les circonstances décrites au paragraphe 2 du présent article.

4. Le présent article ne s'applique pas :

a) au contrat de transport;

b) au contrat de fourniture de services lorsque les services dus au consommateur doivent être fournis exclusivement dans un pays autre que celui dans lequel il a sa résidence habituelle.

5. Nonobstant les dispositions du paragraphe 4, le présent article s'applique au contrat offrant pour un prix global des prestations combinées de transport et de logement.'

Selon l'article 7 de la convention :

'1. Lors de l'application, en vertu de la présente convention, de la loi d'un pays déterminé, il pourra être donné effet aux dispositions impératives de la loi d'un autre pays avec lequel la situation présente un lien étroit, si et dans la mesure où, selon le droit de ce dernier pays, ces dispositions sont applicables quelle que soit la loi régissant le contrat. Pour décider si effet doit être donné à ces dispositions impératives, il sera tenu compte de leur nature et de leur objet ainsi que des conséquences qui découleraient de leur application ou de leur non-application.

2. Les dispositions de la présente convention ne pourront porter atteinte à l'application des règles de la loi du pays du juge qui régissent impérativement la situation quelle que soit la loi applicable au contrat.'

Ainsi que l'objecte à juste titre la banque Bil l'article 5 relatif aux contrats conclus par les consommateurs ne peut recevoir application, dès lors que M. [M] n'avait pas cette qualité, définie par la convention comme celui qui agit « pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle », étant à l'époque de la souscription du prêt, directeur de société et gérant de la SARL Edim s'étant portée caution hypothécaire de cette opération de crédit portant sur une ouverture de compte courant de 5 000 000 euros ayant pour finalité , ainsi qu'il a expliqué dans le cadre de son audition par les services fiscaux, de financer les opérations de promotion immobilière de la société Edim, dont il était le gérant, ajoutant qu'il avait été contraint par la banque de contracter à titre personnel ;

Au surplus le texte ne s'applique qu'aux contrats ayant pour objet la fourniture 'd'objets mobiliers corporels ou de services à une personne' et aux contrats destinés à les obtenir, alors que l'ouverture de crédit consentie par la banque à M. [M] avait pour objet ,à concurrence de 3 000 000 d'euros, de financer des besoins de trésorerie en vue d'investissements immobiliers ;

Le caractère professionnel du prêt excluant l'application des dispositions de l'article L. 218-2 du code de la consommation, est en conséquence inopérant le moyen tiré des dispositions de l'article 7 de la Convention sur les lois de police ;

La prescription applicable est donc soumise au droit luxembourgeois ;

Mais c'est à tort que la société Bil, qui ne conteste pas sa qualité de commerçant, invoque la prescription civile trentenaire de l'article 2262 du code civil luxembourgeois, alors que le prêt en cause s'inscrivant dans son activité commerciale, relève de la prescription décennale édictée par l'article 189 du code de commerce luxembourgeois qui dispose que 'les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants se prescrivent par dix ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes'.

Et il n'est pas contesté qu'en vertu de l'article 2242 du code civil luxembourgeois cette prescription est interrompue par une citation en justice, un simple commandement ou une saisie, signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire ;

Vainement l'appelante conteste l'effet interruptif du commandement de payer délivré en France par la banque à M. [M] le 6 juin 2013 au motif qu'il n'a pas été délivré par un huissier luxembourgeois et ne vise pas les dispositions de la loi luxembourgeoise, conformément aux dispositions de l'article 156 du nouveau code de procédure civile du Grand-Duché du Luxembourg, alors que ce texte, ainsi qu'exactement retenu par le premier juge, est relatif aux assignations délivrées aux personnes résidant à l'étranger et que par ailleurs l'acte extra judiciaire, délivré le 6 juin 2013 à la personne de M. [M], concomitamment à une procédure de saisie immobilière mise en oeuvre par la banque à l'encontre de la société Des Roses, autre caution hypothécaire, n'a pas fait l'objet de contestation de celui-ci , seul habilité pour ce faire;

Cet acte a donc valablement interrompu la prescription décennale de la créance, qui en conséquence n'était pas acquise à la date de la délivrance le 9 février 2021 du commandement de payer valant saisie immobilière, le jugement étant confirmé sur ce point, excepté en ce qu'il mentionne sans s'en expliquer, que la créance de la société Bil est soumise à la 'prescription quinquennale'.

Sur la nullité des engagements pris par la société Edim :

Celle-ci argue de son absence de représentation régulière à l'acte authentique et d'un engagement étranger à son objet social ;

La société Bil lui oppose à bon droit, la fin de non recevoir tirée de la prescription, dont il n'est pas contesté qu'elle est régie par les dispositions législatives françaises ;

En effet, l'exception de nullité qui est perpétuelle ne peut être invoquée que pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté . Or ainsi que l'a retenu à bon droit le premier juge, l'acte notarié fondant les poursuites a reçu un commandement d'exécution par l'inscription les 16 et 27 mars 2007 des hypothèques sur les biens affectés à la garantie de la banque ;

L'irrecevabilité de la demande mérite en conséquence d'être approuvée.

Sur la caducité de la garantie hypothécaire :

L'appelante soulève cette exception au motif qu'en l'absence de terme précis fixé dans l'acte d'affectation hypothécaire, la société Bil ne pouvait procéder au renouvellement de son hypothèque arrivée à expiration le 31 janvier 2016, sans toutefois émettre de critiques sur la motivation du premier juge qui par des motifs complets et pertinents que la cour adopte, a retenu qu'il résultait de l'article 9 de l'acte notarié que l'engagement a été donné par la société Edim en garantie du prêt, c'est à dire jusqu'à son remboursement intégral, et que ce terme n'étant pas advenu, l'inscription avait été régulièrement renouvelée le18 janvier 2016 ;

Il s'ensuit la confirmation du jugement de ce chef.

Sur l'absence de caractère liquide et certain de la créance :

La société Edim fait à nouveau plaider que la banque a bénéficié de nombreux remboursements, mais pas plus qu'en première instance elle ne rapporte la preuve qui lui incombe, en vertu de l'article 1353 alinéa 2 du code civil, de versements autres que ceux déduits du montant de la créance en cause, en sorte que le moyen ne peut être accueilli ;

Par ailleurs c'est à l'issue d'une analyse exacte des extraits du compte ouvert dans les livres de la société Bil au nom de M. [M] que le premier juge, dont la motivation n'est pas critiquée, a écarté le moyen tiré de l'existence de gages de valeurs mobilières, encore détenus par la banque. Il s'ensuit par adoption de motifs, le rejet du moyen.

Enfin, l'illisibilité alléguée du taux d'intérêt dont la société Edim tire pour conséquence que la banque ne peut prétendre qu'au taux légal n'est pas repris au dispositif des écritures de l'appelante qui seul saisit la cour en vertu de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile;

Par ailleurs l'article 10.1 de la convention de crédit annexée à l'acte notarié de prêt qui stipule que « les intérêts débiteurs dus au titre de la ou des avance(s) à terme(s) fixe(s) seront calculés sur base du nombre de jours exacts/360 au taux EURIBOR (Euro InterBank Offered Rate)/IRS ou LIBOR (London InterBank Offered Rate) en CHF/IRS correspondant à la durée et à la devise du tirage sollicité plus une marge de 1,25% p.a. et seront payables trimestriellement, nets de toute retenue à la source. Pour les avances ne dépassant pas 3 mois, les intérêts seront payables à l'échéance de ces dernières, nets de toute retenue à la source », détermine sans ambiguïté le taux de référence, qui fait l'objet de publication, ses modalités de calcul sur une année et la marge appliquée ;

D'autre part, ainsi qu'exactement relevé par le premier juge, le décompte de la banque comporte le montant des intérêts courus qui n'ont pas été comptabilisés postérieurement au 30 septembre 2009, soit après la clôture du compte de M.[M], le 25 septembre 2009 et la créance est limitée au montant de la garantie donnée par la société Edim soit à la somme de 2 100 000 euros;

Les conditions de la mise en oeuvre de la saisie immobilière, réservée aux termes de l'article L311-2 code des procédures civiles d'exécution, au créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, sont donc réunies, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur la demande de vente amiable :

Il y a été fait droit par le jugement d'orientation dont la banque demande la confirmation intégrale, étant observé que par jugement du 22 septembre 2022, en l'absence de justification par la société Edim d'un engagement écrit d'acquisition le juge de l'exécution a ordonné la vente forcée des biens saisis.

Sur les autres demandes :

L'appelante qui succombe en son recours supportera les dépens d'appel et sera tenue d'indemniser la société Bil des nouveaux frais de défense exposés devant la cour à concurrence de la somme de 2500 euros et de payer au FCT Cedrus la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après en voir délibéré conformément à la loi, par arrêt réputé contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

REÇOIT l'intervention volontaire du fonds commun de titrisation Cedrus représenté par la société MCS et Associés, venant aux droits de la Société Générale ;

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions excepté, l'infirmant sur ce point, en ce qu'il a dit non prescrite la créance de la Banque Internationale à Luxembourg soumise à la prescription quinquennale;

STATUANT à nouveau de ce chef ;

DIT que la créance de la Banque Internationale à Luxembourg soumise à la prescription décennale, n'est pas prescrite ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la SARL Etudes et Développement Immobilier à payer à la société Banque Internationale à Luxembourg la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et au fonds commun de titrisation Cedrus représenté par la société MCS et Associés la somme de 1 000 euros en vertu des mêmes dispositions ;

CONDAMNE la SARL Etudes et Développement Immobilier aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-9
Numéro d'arrêt : 22/08371
Date de la décision : 09/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-09;22.08371 ?
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