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27/01/2023 | FRANCE | N°19/03524

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-2, 27 janvier 2023, 19/03524


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2



ARRÊT AU FOND

DU 27 JANVIER 2023



N° 2023/042













Rôle N° RG 19/03524 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD376







SAS CARREFOUR PROXIMITE FRANCE





C/



[T] [J]













Copie exécutoire délivrée

le : 27 janvier 2023

à :



Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 352)





Me Laurent CANTARINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 90)























Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 08 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 17/...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 27 JANVIER 2023

N° 2023/042

Rôle N° RG 19/03524 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD376

SAS CARREFOUR PROXIMITE FRANCE

C/

[T] [J]

Copie exécutoire délivrée

le : 27 janvier 2023

à :

Me Romain CHERFILS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 352)

Me Laurent CANTARINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 90)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 08 Janvier 2019 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F 17/00699.

APPELANTE

SAS CARREFOUR PROXIMITE FRANCE venant aux droits de la Société BLADIS SA, radiée le 05 décembre 2018 suite à la transmission

universelle de son patrimoine au profit de la Société CARREFOUR PROXIMITE FRANCE, prise en la personne de son Président en exercice domicilié en cette qualité au siège social, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Romain CHERFILS de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Jean-Jacques FOURNIER, avocat au barreau de LYON

INTIME

Monsieur [T] [J], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Laurent CANTARINI, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Janvier 2023

Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La société Bladis assure l'activité de commerce du rayon de fruits et légumes au sein des magasins Carrefour Proximité. Elle gère notamment le rayon fruits et légumes du magasin Carrefour Contact de [Localité 2].

Monsieur [T] [J] a été engagé par la SA Bladis suivant contrat de travail à durée indéterminée du 7 juin 1999 en qualité d'employé de libre-service catégorie employé, coefficient 115 à temps complet moyennant une rémunération brute mensuelle de 1.189,82 €.

La convention collective nationale applicable à la relation de travail est celle du commerce de détail et gros à prédominance alimentaire.

Au dernier état de la relation de travail, il occupait les fonctions d'employé commercial niveau III B au sein du rayon fruits et légumes du magasin carrefour contact de [Localité 2].

Par courrier du 20 avril 2017, la société Bladis a convoqué Monsieur [J] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 4 mai 2017 et lui a notifié une mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 mai 2017, la société Bladis a notifié à Monsieur [J] un licenciement pour faute grave dans les termes suivants:

'(....) Nous faisons suite à notre entretien préalable à votre éventuel licenciement le jeudi 4 mai dernier.

Par la présente lettre recommandée avec accusé de réception et après réflexion nous vous notifions votre licencement pour faute grave pour les motifs ci-après:

Le mercredi 12 avril 2017 à 9h30, le vigile du commerce Carrefour Contact a constaté que vous aviez quitté le magasin dans lequel vous travaillez pour transporter des cartons que vous avez déposés dans votre véhicule en stationnement non loin de la porte de sortie.

Lors de l'entretien préalable, vous avez répondu avoir seulement récupéré dans la poubelle des feuilles de salades, quelques pièces de radis ronds, 2 à 3 oignons, 2paquets de ciboulette pour vos animaux en accord avec Monsieur [N].

A la suite de cet entretien, nous avons interrogé Monsieur [N] qui a démenti cette affirmation car il vous avait autorisé seulement à récupérer des feuilles de salades et au surplus défraichies.

Ensuite le vigile a constaté dans le coffre de votre véhicule deux cartons contenant des fruits et légumes. Aussi le vol que vous avez commis est établi.

De plus et alors que le vigile ne faisait que son travail, vous l'avez d'abord bousculé et ensuite l'avez heurté avec votre véhicule.

L'argument tiré de ce que vous êtes travailleur handicapé et n'auriez pu de ce fait porter de coups est inopérant et ce d'autant plus que les bessures ont été occasionnées à cette personne au moyen de votre véhicule à bord duquel vous vous trouviez.

Ce salarié a été blessé au poignet et a déposé plainte.

Ce second fait est également établi.

Chacun de ces faits constitue la faute grave ci-dessus retenue (..)'

Contestant la légitimité de son licenciement et sollicitant la condamnation de l'employeur à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, d'indemnités et de dommages-intérêts, Monsieur [J] a saisi le 8 septembre 2017, le conseil de prud'hommes de Martigues lequel a:

- pris acte du paiement du salaire relatif à la période maladie en avril 2017,

- dit que Monsieur [J] est bien fondé en partie en son action,

- dit que la procédure de licenciement n'est pas conforme,

- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné en conséquence la société Bladis prise en la personne de son représentant légal à payer à Monsieur [J] les sommes suivantes:

- 1196,85 € à titre de salaire sur mise à pied,

- 119,68 € de congés payés afférents,

- 2.700 € à titre d'indemnité de préavis,

- 270 € de congés payés afférents,

- 6.038,05 € d'indemnité de licenciement,

- rappelé que ces montants bénéficient de l'exécution provisoire de plein droit en application des dispositions combinées des articles R.1454-14 et R 1454-28 du code du travail et fixé la moyenne à la somme de 1350 €,

- ordonné à la société Bladis de régulariser auprès des organismes sociaux les sommes fixées sur le bulletin de salaire,

- condamné en outre la SA Bladis à payer à Monsieur [J] les sommes suivantes:

- 15.780 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non respect de la procédure de licenciement,

- 1.500 € à titre d'indemnité pour frais de procédure,

- débouté Monsieur [J] du surplus de ses demandes,

- débouté la SA Bladis de sa demande,

- ordonné l'exécution provisoire sur l'intégralité de la décision en application de l'article 515 du code de procédure civile,

- dit les intérêts légaux calculés à compter du 8 septembre 2017 avec capitalisation en application des articles 1231-7 et 1343-2 du code civil.

Venant aux droits de la société Bladis, la SAS Carrefour Proximité a relevé appel de ce jugement le 28 février 2019 par déclaration adressée au greffe par voie électronique.

Aux termes de ses conclusions responsives d'appelante notifiées par voie électronique le 23 septembre 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus,

la SAS Carrefour Proximité a demandé à la cour de :

A titre principal:

- constater que le licenciement pour faute grave notifié à Monsieur [J] est parfaitement fondé,

En conséquence:

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Martigues en date du 8 janvier 2019,

- débouter Monsieur [J] de ses demandes,

- condamner Monsieur [J] à lui verser la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [J] aux dépens de la présente instance les dépens d'appel distraits au profit de Maître Romain Cherfils, membre de la SELARL Lexavoué Aix en Provence, avocats associés aux offres de droit.

A titre subsidiaire :

Si la cour jugeait que le licenciement de Monsieur [J] ne reposait pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse:

Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Martigues en date du 8 janvier 2019

- dire que le licenciement de Monsieur [J] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- débouter Monsieur [J] de ses demandes de dommages-intérêts,

A titre infiniment subsidiaire :

- réduire le montant des dommages-intérêts sollicités par Monsieur [J] au minimum légal, soit la somme de 7.181,10 € (6 mois de salaire),

En tout état de cause:

- débouter Monsieur [J] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SAS Carrefour Proximité France soutient qu'elle établit la matérialité des faits de vol comme de violences sur le vigile commis par Monsieur [J], lequel s'est vu notifier par le procureur de la république un rappel à la loi, chacun d'eux étant constitutif de la faute grave privative d'indemnités.

Par conclusions d'intimé et d'appelant incident notifiées par voie électronique le 2 juillet 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens soutenus, Monsieur [T] [J] a demandé à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamné en conséquence la société Bladis prise en la personne de son représentant légal à payer à Monsieur [J] les sommes suivantes:

- 1196,85 € à titre de salaire sur mise à pied,

- 119,68 € de congés payés afférents,

- 6.038,05 € d'indemnité de licenciement,

- 1.500 € au titre des frais irrépétibles

L'Infirmer pour le surplus et statuant à nouveau :

- condamner la SAS Carrefour Proximité France venant aux droits de la SA Bladis à payer à Monsieur [J] les sommes suivantes :

- 23.937 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.590,55 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 359,06 € de congés payés afférents,

- condamner la SAS Carrefour Proximité France venant aux droits de la SA Bladis à payer à Monsieur [J] la somme de 3.600 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SAS Carrefour Proximité France venant aux droits de la SA Bladis aux entiers dépens.

Monsieur [J] conteste formellement les faits de vol de fruits et légumes qui lui sont reprochés, affirmant avoir été autorisé par le manager du magasin à emporter des légumes défraichis, ainsi que les faits de violence commis à l'encontre du vigile de la société Carrefour faisant valoir que ce dernier ne s'est pas présenté à lui en tant que tel, s'est montré verbalement agressif et violent à son encontre, que ce dernierl'a bousculé entraînant sa chute et des blessures lui ayant valu une incapacité totale de travail personnel de deux jours, qu'il n'avait aucune volonté de blesser le vigile lequel s'est couché sur le capot de son véhicule et accroché à la portière de son véhicule pour l'empêcher de quitter les lieux, lui même étant parti avant de faire demi-tour et de revenir afin de s'assurer que celui-ci n'avait pas été blessé.

Par ordonnance du 23 septembre 2022, le magistrat de la mise en état a rejeté la demande de Monsieur [J] tendant à voir constater la péremption de l'instance d'appel.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 21 novembre 2022, l'audience de plaidoiries étant fixée au 5 décembre 2022.

SUR CE :

Sur le licenciement :

L'article L 1232-1 du code du travail dispose que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est à dire pour un motif existant, exact, objectif et revêtant une certaine gravité rendant impossible, sans dommages pour l'entreprise, la continuation du contrat de travail et nécessaire le licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant d'un contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant le temps du préavis.

En application des dispositions des articles L 1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 alinéa 1 du code du travail, la reconnaissance de la faute grave entraîne la perte du droit aux indemnités de préavis et de licenciement.

L'employeur doit rapporter la preuve de l'existence d'une telle faute et le doute profite au salarié.

Il est reproché à Monsieur [J] d'avoir le 12 avril 2017 à 10h30 dérobé des fruits et légumes au préjudice de la société Bladis et blessé avec son véhicule le vigile du magasin Carrefour qui avait procédé à son contrôle.

Sur le grief de vol :

L'employeur verse aux débats :

- le procès-verbal d'audition du vigile, Monsieur [U], entendu le 16 avril 2017 par la brigade de gendarmerie de [Localité 2] lequel indique qu'il avait été chargé par la société Carrefour de surveiller l'issue du secours du rayon fruits et légumes du magasin Carrefour Contact de [Localité 2] suite à une suspicion de vol ce qu'a confirmé Madame [I] [R], responsable de ce magasin dans son témoignage figurant en pièce n°11, qu'il a constaté dans le coffre de Monsieur [J] la présence de deux cartons contenant des fruits et légumes, tous deux de taille identique précisant qu'il y avait davantage de produits lors de son contrôle qu'au moment de celui de la gendarmerie intervenu après le départ suivi quelques minutes plus tard du retour du salarié,

- le témoignage de Monsieur [N] (pièce n°7) indiquant que le 12 avril 2017, Monsieur [J] lui a demandé 's'il pouvait récupérer quatre feuilles de salade pour les tortues dans la poubelle, je lui ai dit oui, je n'ai pas vu ce qu'il a pris exactement car j'étais en rayon et aux caisses',

- le témoignage de Monsieur [H] [O] (pièce n°10) indiquant 'qu'en sa qualité de manager de secteur j'atteste que je n'ai jamais autorisé le moindre salarié à retirer et à emporter de la marchandise provenant du magasin',

- une photo du contenu de deux cartons (pièce n°8) contenant pour l'un des feuilles de salade et pour le second des tomates cerises, de la ciboulette , des oignons.

Cependant, il est constant que le salarié avait effectivement été autorisé par son supérieur hiérarchique à emporter quelques feuilles de salade, qu'il ne lui a pas été demandé de restituer les légumes emportés la mauvaise qualité de la photo produite ne permettant pas de constater s'il s'agissait ou non de produits en bon état et vendables alors que la société Bladis n'a pas fait diligence en ne portant plainte pour le vol allégué que par un courrier reçu par la gendarmerie de [Localité 2] le 11 juillet 2017, non versé aux débats, soit postérieurement à la clôture de l'enquête préliminaire et que son responsable avait été invité à se présenter l'après midi même du 12 avril 2017 pour être entendu de sorte qu'à défaut de plainte, l'enquête n'a finalement été diligentée que pour les violences commises à l'encontre du vigile.

Dès lors, le doute devant profiter au salarié, la cour, à l'instar de la juridiction prud'homale considére que l'infraction de vol alléguée n'est pas caractérisée.

Sur le grief de violences commises à l'encontre du vigile du magasin Carrefour :

Il est établi que Monsieur [J] s'est vu notifier par le délégué du procureur de la république d'Aix en Provence le 8 septembre 2017 un rappel à la loi (pièce n°48) pour des faits délictuels de violences commis le 12 avril 2017 à l'encontre de Monsieur [U], vigile et qu'il a déclaré reconnaître les faits pour lesquels ce rappel à la loi lui était notifié tout en indiquant 'je n'avais pas compris que j'avais affaire à un vigile', que ne s'agissant pas d'une déclaration de culpabilité suivie du prononcé d'une peine, l'autorité de la chose jugée ne s'attache pas à cette décision.

De fait les déclarations de Monsieur [J] et de Monsieur [U] relatives au déroulement du contrôle du véhicule auxquelles ils ont tous deux procédé devant les services de gendarmerie, qui n'ont entendu durant l'enquête aucun témoin des faits, divergent, Monsieur [J] ayant indiqué ne pas avoir immédiatement compris que Monsieur [U], qui ne se serait pas présenté et aurait été agressif, était un vigile du magasin Carrefour alors que ce dernier a affirmé à l'inverse avoir décliné son identité immédiatement 'en se présentant au niveau de la portière conducteur, en lui présentant son badge et en lui demandant d'ouvrir le coffre étant agent de sécurité chargé par la direction de carrefour contact de procéder à ce contrôle', Monsieur [J], qui a été également blessé au cours de ce contrôle produisant cependant le témoignage de Monsieur [Y], (pièce n°38) qui est un commerçant qui se trouvait sur le parking et qui affirme avoir vu 'une personne allant en courant rapidement vers un véhicule pour quitter le parking, cette personne a rentré sa tête et le bras dans le véhicule qui s'apprêtait à partir. Le conducteur est descendu et parlait sur un ton élevé entre les deux hommes. J'avais ouvert mon coffre et quand je me suis retourné, j'ai vu une personne être bousculée et tombée au sol, je me suis rendu compte que c'était le maraîcher car je viens 7/7 matin et après midi en course, celui-ci est remonté dans son véhicule, il a essayé de partir mais l'autre personne a essayé de l'empêcher de partir en se mettant devant son véhicule puis en s'allongeant sur le capot' confortant ainsi la version du salarié quant à un déroulement bien moins calme du contrôle litigieux.

Cependant, il est établi que Monsieur [J] a eu connaissance de la qualité de Monsieur [U] au plus tard au moment de l'ouverture de son coffre puisqu'il indique dans son audition du 15 juin 2017 que celui-ci 'a vu ce qu'il contenait, lui demandant ce que c'était que ces fruits et légumes. Je lui ai confirmé qu'il s'agissait de produits invendus et défraichis. Il voulait que je le suive à la Direction de Carrefour contact. J'ai refusé' et ajoute qu'après avoir été bousculé par le vigile ce qui a provoqué sa chute et ses blessures médicalement constatées (pièce n°55) il a cependant décidé de le suivre dans le magasin, a tambouriné sur la porte d'accès pour faire sortir Monsieur [N] avant de finalement décider de s'enfuir, parvenant à remonter dans son véhicule et à démarrer sans plus tenir compte de la présence du vigile lequel s'est placé devant le véhicule, puis sur le capot d'où il a chuté avant de tenter vainement d'ouvrir la portière, de se coincer la main sans parvenir à stopper le véhicule qui a quitté les lieux, Monsieur [J], qui était tenu de demeurer sur place le temps de vérifier par la direction du magasin l'autorisation reçue d'emporter des légumes périmés ce qu'il avait intialement décidé de faire, étant ainsi incontestablement l'auteur des blessures présentées par Monsieur [U], contusion des paumes de mains, dermabrasions coude gauche, douleur cervicale et entorse du poignet droit (pièce n°32) commises avec son véhicule.

Cependant, en l'absence d'antécédents disciplinaires de même nature alors que l'un des griefs n'est pas établi, il doit être tenu compte pour apprécier la gravité du second des circonstances du déroulement du contrôle du véhicule de Monsieur [J] par un vigile qui l'a bousculé, de sorte qu'il y a lieu d'écarter la faute grave privative d'indemnités rendant impossible la poursuite du contrat de travail le temps du préavis mais de retenir le caractère réel et sérieux du licenciement, les dispositions contraires du jugement entrepris étant infirmées.

Sur les conséquences financières :

Sur la régularité de la procédure de licenciement :

L'article L.1232-2 du code du travail dispose que l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque avant toute décision à l'entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise de la lettre de convocation.

Par application de l'article L.1235-2 du code du travail, à l'égard d'un salarié ayant au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise de 11 salaries, si le licenciement d'un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée mais pour cause réelle et sérieuse, le juge impose à l'employeur d'accomplir la procédure prévue et accorde au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

Monsieur [J] soutient que la lettre de convocation à l'entretien préalable du 4 mai 2017 ne lui ayant été présentée que le 28 avril 2017, il n'a disposé que d'un délai de trois jours pour préparer celui-ci et n'a pas été en mesure de se faire assister.

S'il est exact que le délai légal n'a pas été respecté celui-ci incluant la présence d'un dimanche et d'un jour férié, en revanche Monsieur [J] ne démontre pas l'existence et l'étendue d'un préjudice en lien de causalité avec ce manquement n'ayant versé aux débats strictement aucun élément au soutien de ce chef de demande.

Les dispositions du jugement entrepris ayant fait droit à cette demande en condamnant l'employeur à payer au salarié, toutes causes de préjudices confondus des dommages-intérêts à la fois pour irrégularité de la procédure de licenciement et licenciement sans cause réelle et sérieuse sont infirmées, cette demande étant rejetée.

Sur les conséquences financières du licenciement pour cause réelle et sérieuse :

Si Monsieur [J] est bien fondé à solliciter la condamnation de la SAS Carrefour Proximité France à lui payer un rappel de salaire sur la période de mise à pied conservatoire, une indemnité de préavis et les congés payés ainsi qu'une indemnité de licenciement en revanche, sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est rejetée, les dispositions du jugement entrepris ayant fait droit à celle-ci étant infirmées.

En l'absence de toutes critiques relatives au montant allouées, les dispositions du jugement entrepris ayant condamné la SAS Carrefour Proximité France à payer à Monsieur [J] les sommes suivantes :

- 1196,85 € à titre de salaire sur mise à pied conservatoire,

- 119,68 € de congés payés afférents,

- 6.038,05 € d'indemnité de licenciement,

sont confirmées.

C'est à juste titre que Monsieur [J], qui justifie de ce qu'il a été reconnu travailleur handicapé le 17 septembre 2014 par la commission des droits et de l'autonomie, sollicite un préavis d'une durée égale au double de la durée de droit commun, la durée totale ne pouvant excéder trois mois soit une indemnité de 3.590,55 € outre 359,06 € de congés payés afférents, dont l'intimée ne conteste ni le principe ni le montant de sorte qu'il convient par infirmation partielle du jugement déféré, de faire droit à sa demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Les dispositions du jugement entrepris ayant condamné la SAS Carrefour Proximité venant aux droits de la société Bladis aux dépens et à payer à Monsieur [J] une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile sont confirmées.

Le demande de Monsieur [J] au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel est rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour:

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- dit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- dit que le licenciement est irrégulier,

- condamné la SAS Carrefour Proximité venant aux droits de la société Bladis à payer à Monsieur [J] :

- une somme de 2700 € à titre de préavis outre 270 € de congés payés afférents,

- une somme de 15.780 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non respect de la procédure de licenciement

Le confirme pour le surplus.

Statuant à nouveau et y ajoutant:

Dit que le licenciement de Monsieur [T] [J] repose sur une cause réelle et sérieuse.

Condamne la SAS Carrefour Proximité venant aux droits de la société Bladis à payer à Monsieur [J] une somme de 3.590,55 € à titre d'indemnité de préavis outre 359,06 € de congés payés afférents.

Rejette les demandes de Monsieur [J] de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse.

Condamne la SAS Carrefour Proximité venant aux droits de la société Bladis aux dépens d'appel et rejette la demande de Monsieur [J] d'indemnité au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-2
Numéro d'arrêt : 19/03524
Date de la décision : 27/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-27;19.03524 ?
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