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26/01/2023 | FRANCE | N°18/15304

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 26 janvier 2023, 18/15304


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 26 JANVIER 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/15304 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDDGV







[Z] [E]





C/



Syndicat des copropriétaires [Adresse 6]

SA AXA FRANCE IARD

Compagnie d'assurances PACIFICA











Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Benjamin DERSY



Me Françoise BOULAN





Me Emmanuelle BRICE-TREHIN



Me Pierre-emmanuel DEMARCHI





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 06 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 14/06643.





APPELANTE



Madame [Z] [E]

née le [D...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 26 JANVIER 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/15304 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDDGV

[Z] [E]

C/

Syndicat des copropriétaires [Adresse 6]

SA AXA FRANCE IARD

Compagnie d'assurances PACIFICA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Benjamin DERSY

Me Françoise BOULAN

Me Emmanuelle BRICE-TREHIN

Me Pierre-emmanuel DEMARCHI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de NICE en date du 06 Septembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 14/06643.

APPELANTE

Madame [Z] [E]

née le [Date naissance 2] 1988 à [Localité 8], demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Benjamin DERSY, avocat au barreau de NICE substitué à l'audience par Me Florence PAULUS, avocat au barreau de NICE

INTIMEES

Syndicat des copropriétaires [Adresse 6]

Représenté de son syndic en exercice, la SNC AGENCE DU PORT,

, demeurant [Adresse 6]

représentée par Me Emmanuelle BRICE-TREHIN, avocat au barreau de NICE

SA AXA FRANCE IARD

, demeurant [Adresse 5]

représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Frédéric VANZO, avocat au barreau de NICE

Compagnie d'assurances PACIFICA,

assureur de M. [W] [F]

, demeurant [Adresse 7]

représentée par Me Pierre-emmanuel DEMARCHI de la SELARL CABINET DEMARCHI AVOCATS, avocat au barreau de NICE substituée à l'audience par Me Marie-monique CASTELNAU, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Novembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Mme Sophie LEYDIER, Présidente-suppléante

Madame Angélique NAKHLEH, Conseiller

Monsieur Olivier ABRAM, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2023, puis avisé que la décision était prorogé au 26 Janvier 2023.

ARRÊT

FAITS. PROCÉDURE.PRÉTENTIONS DES PARTIES.

Selon acte du 12 mai 2010, dressé par Maître [P], notaire à [Localité 8], Madame [Z] [E] a fait l'acquisition d'un appartement situé au [Adresse 6].

Le syndic de l'immeuble est le Cabinet SNC AGENCE DU PORT. L'immeuble est assuré auprès de la société AXA France IARD.

Monsieur [W] [F] est propriétaire d'une maison contiguë à l'immeuble située au [Adresse 6]) assurée par la société PACIFICA .

Au cours de l'année 2011, l'appartement de Madame [E] a subi un important dégât des eaux l'empêchant de résider dans les lieux.

Par ordonnance du 7 janvier 2014, le juge des référés a désigné Monsieur [D] en qualité d'expert et a condamné la société AXA IARD à verser à Madame [E] une provision de 90% de 15.000 euros (soit 13.500 euros), et Monsieur [F] à lui verser une provision de 10% de 15.000 euros soit 1500 euros.

L'expert a déposé son rapport le 4 novembre 2014.

Par acte du 4 décembre 2014, Madame [Z] [E] a fait assigner devant le tribunal d'instance de Nice , le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], représenté par son syndic, la SNC AGENCE DU PORT et la société AXA FRANCE IARD.

Par jugement du 19 septembre 2017, le tribunal d'instance de NICE a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de NICE, compétent au regard du montant des demandes.

Par jugement en date du 6 Septembre 2018, le Tribunal de Grande Instance de Nice a :

Vu le rapport de l'expert judiciaire,

Reçu la société PACIFICA en son intervention volontaire

Dit que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], représenté par son syndic, la SNC AGENCE DU PORT est responsable du préjudice subi par Madame [Z] [E].

Condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], représenté par son syndic, la SNC AGENCE DU PORT, à payer à Madame [Z] [E] la somme de 20.385.40 € en réparation du préjudice subi

Dit que la société AXA est tenue de garantir le syndicat des copropriétaires des condamnations mises à sa charge dans le présent jugement

Condamné Madame [Z] [E] à payer à la société PACIFICA la somme de 1.040€ en remboursement du trop-perçu concernant la provision perçue

Débouté la société PACIFICA de sa demande en dommages-intérêts

Condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], représenté par son syndic, la SNC AGENCE DU PORT payer Madame [Z] [E] la somme de 3.000€ au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Débouté les autres parties de leur demande sur le même fondement

Débouté les parties du surplus de leurs demandes

Ordonné l'exécution provisoire du présent jugement

Condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], représenté par son syndic, la SNC AGENCE DU PORT aux dépens

Par déclaration enregistrée au greffe le 26 Septembre 2018, Madame [Z] [E] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a :

Condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6], représenté par son syndic, la SNC AGENCE DU PORT, à payer à Madame [Z] [E] la somme de 20.385,40 € en réparation du préjudice subi

Condamné Madame [Z] [E] à payer à la société PACIFICA la somme de 1.040 € en remboursement du trop-perçu concernant la provision perçue

Débouté Madame [E] du surplus de ses demandes

Les parties ont exposé leur demande ainsi qu'il suit, étant rappelé qu'au visa de l'article 455 du code de procédure civile, l'arrêt doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens :

Madame [Z] [E] (conclusions notifiées par RPVA en date du 12 Octobre 2022) demande à la cour de :

Vu le rapport d'expertise de Monsieur [D],

Vu les articles 14 et 15 de la Loi du 10 juillet 1965,

REFORMER le jugement de première instance en ce qu'il a :

Condamné le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] à payer à Madame [E] la somme de 20.385,40 € en réparation du préjudice subi

Condamné Madame [E] à payer à la société PACIFICA la somme de 1.040 € en remboursement du trop-perçu concernant la provision perçue

Et statuant à nouveau

DIRE ET JUGER que Monsieur [D] a identifié deux causes aux désordres rencontrés chez Madame [E], à savoir :

- les inondations nées de la défectuosité d'un collecteur d'eaux usées de la copropriété,

- les remontées par capillarité dans les murs de l'appartement [E] du fait de la nappe phréatique se trouvant sous le niveau du sol

« DIRE ET JUGER que le syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] est responsable de ces deux causes, »

DIRE ET JUGER qu'à ce jour l'appartement de Madame [E] demeure inhabitable,

En conséquence,

Concernant les demandes à l'encontre du syndicat des copropriétaires [Adresse 6] et de la société AXA,

REFORMER le jugement dont appel, mais uniquement sur le montant des sommes accordées à Madame [E],

CONDAMNER, in solidum le syndicat des copropriétaires 78 Bd [T] et son assureur la société AXA à régler à Madame [E] les sommes de :

54.780 € au titre du préjudice de jouissance (décompte arrêté à la cession du bien)

6.940 € au titre des travaux de remise en état de l'appartement

1.671 € au titre des travaux relatifs à la VMC

4.617 € au titre de la taxe foncière

570 € au titre de la taxe d'habitation

1.194,61 € au titre des factures EDF

5.996,36 € au titre des frais bancaires

25.000 € au titre du préjudice moral

Concernant les demandes à l'encontre de la société PACIFICA,

REFORMER le jugement dont appel,

A titre principal,

DIRE ET JUGER que l'expert judiciaire impute une part de responsabilité à Monsieur [F] de 10 %,

CONDAMNER la société d'assurances PACIFICA, in solidum avec le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] et la société AXA, à verser à Madame [E] la somme de 6.705,69 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, comptes arrêtés au mois de mai de 2017,

A titre subsidiaire,

DIRE ET JUGER que la part de 10 % de préjudice imputable à Monsieur [F] excède grandement la provision de 1.500 € versée par ce dernier,

CONDAMNER, in solidum le syndicat des copropriétaires 78 Bd [T], la société AXA et la société PACIFICA à régler à Madame [E] la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens.

Au soutien de ses conclusions, Mme [E] critique le fait que le tribunal a repris le rapport d'expertise sans répondre aux remarques portant notamment sur le fait que l'expert judiciaire considère que la cause de l'humidité affectant son appartement réside dans des remontées capillaires mais ne met pas en exergue la responsabilité du syndicat des copropriétaires, ce qui est surprenant.

L'analyse de Monsieur [D] doit donc être critiquée , selon l'appelante, pour les raisons suivantes :

En premier lieu, Madame [E] estime avoir acquis un lot à usage d'appartement et non une cave soumise à une humidité persistante.

Contrairement à ce qu'affirment les défendeurs, cet appartement était dans un bon état, conforme et ne nécessitait aucun travaux de mise aux normes, comme cela ressort du diagnostic établi le 29 janvier 2010 par la société DIAGNOSTICS EXPERTISES COTE D'AZUR.

En conséquence, Madame [E] est donc en droit d'attendre que son appartement ne soit pas l'objet de remontées capillaires provenant des parties communes, l'étanchéité de l'immeuble n'étant pas correctement assurée.

Il sera rappelé que l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que le syndicat des copropriétaires « a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires. »

Il s'agit d'une responsabilité objective, sans qu'il soit besoin de démontrer la faute du syndicat.

Sur la base de ce fondement juridique, il a ainsi été jugé que le syndicat des copropriétaires est responsable lorsque l'humidité constatée dans un appartement provient du défaut d'étanchéité des murs extérieurs (Cour de cassation, 3ème chambre civile, 6 décembre 2005, n°04-17.431).

En l'espèce, il est patent que les remontées capillaires ne sont que la conséquence d'une mauvaise étanchéité de l'immeuble, dues à un vice de construction dont la responsabilité incombe au syndicat des copropriétaires.

Les travaux envisagés par l'expert (création d'entrées d'air neuf et installation d'un extracteur), que ce dernier présente comme relevant d'une partie privative, ne doivent pas amener à conclure que le désordre est de nature privative.

En effet, ces travaux ' certes réalisés dans des parties privatives ' doivent permettre de mettre un terme à un désordre qui, lui, trouve sa cause dans les parties communes.

Dès lors, le syndicat des copropriétaires est responsable de plein droit de ce désordre et doit en supporter toutes les conséquences.

Mme [E] demande l'indemnisation de son préjudice se décomposant ainsi :

- préjudice de jouissance : calculé sur un avis de valeur établi par l'agence CENTURY 21 OPTIMMO qui estime le bien pourrait être loué pour un loyer mensuel de 415 €.

Le préjudice de jouissance s'établit donc comme suit (décompte arrêté à la vente du bien, soit le 29 mai 2022) : 415 € (valeur locative du bien) x 132 mois ( mai 2011 à mai 2022) : 54.780 euros

- au titre des travaux dans le bien : Madame [E] a donc fait établir par l'entreprise [R] un devis qui chiffre ces travaux à la somme de 6.940 € .

A cette somme il convient de rajouter le chiffrage des travaux relatifs à la réparation de la ventilation mécanique contrôlée (VMC) , soit la somme de 1.617 € .

- au titre de la taxe d'habitation et de la taxe foncière, rappelant que l'appartement est inhabitable depuis le 31 mai 2011, elle sollicite le remboursement de la taxe foncière depuis cette date, soit:

- 2011 : 330 € (8 mois sur 12, taxe foncière de 496 €)

- 2012 : 504 € (pièce n°37)

- 2013 : 514 € (pièce n°38)

- 2014 : 519 € (pièce n°39)

- 2015 : 523 € (pièce n°40)

- 2016 : 530 € (pièce n°41)

- 2017 : 532 € (pièce n°50)

- 2018 : 598 € (pièce n°51)

- 2019 : 567 € (pièce n°52)

Soit un total de 4.617 €.

- au titre de la taxe d'habitation : Madame [E] indique avoir payé en 2011 et 2012 une taxe d'habitation pour un appartement qu'elle ne pouvait plus occuper.

Elle doit donc être remboursée de ces sommes.

- 2011 : 211 € (8 mois sur 12, taxe d'habitation de 317 € )

- 2012 : 359 €

Soit un total de 570 €

- au titre des frais EDF : Madame a été contrainte de régler des factures d'électricité pour un appartement qu'elle ne pouvait pas occuper.

Le montant de ces factures, dont il est sollicité le remboursement s'élève à la somme de 1.194,61 € , étant précisé que la concluante indique ne pouvoir , pour l'instant, justifier de la période de février 2013 à avril 2015

- au titre des frais bancaires : Madame [E] avait souscrit un prêt auprès du CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE. Étant dans l'incapacité de rembourser les échéances mensuelles à partir du sinistre, les frais s'accumulant, la banque a constaté la déchéance du terme et sollicité le remboursement anticipé du prêt, appliquant une clause pénale à hauteur de 7 %, soit la somme de 5.996,36 € .

La banque a ensuite actionné la caution, la société CNP CAUTION, qui a initié une procédure devant le tribunal de grande instance de Nice aux fins de paiement de la somme de 120.412,80 € correspondant, d'une part, au prêt principal (105.768,74 €) et, d'autre part, au prêt à taux zéro (14.644,06 €) .

Cette procédure est actuellement pendante devant la 4ème chambre civile du tribunal judiciaire de Nice, sous le numéro de RG 15/6445.

Les frais engendrés par la déchéance du terme et le remboursement anticipé du prêt, d'un montant de 5.996,36 €, ne sont que la conséquence du sinistre objet de la présente procédure.

A ce titre, Mme [E] demande la condamnation des requis à lui verser la somme de 5.996,36€.

- au titre du préjudice moral : Mme [E] demande 25.000 euros . Elle indique que cela fait désormais plus de dix ans qu'elle a été contrainte de quitter, dans l'urgence, l'appartement qu'elle venait d'acquérir, allant vivre à l'hôtel, puis chez sa mère avant, enfin, de retrouver au mois de novembre 2012 un logement.

Cette situation était d'autant plus pénible qu'à l'époque des faits, Madame [E] était mère d'un jeune enfant ([J], né le [Date naissance 4] 2010) et qu'un second est né le [Date naissance 1] 2012 ([A]).

Elle estime que les déménagements, alors qu'elle était enceinte puis avec un enfant en bas âge, lui ont causé un préjudice moral.

Le Syndicat des copropriétaires du [Adresse 6] (conclusions notifiées par RPVA en date du 7 octobre 2022) demande à la cour  de :

Vu l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965,

Vu l'article 1353 du Code civil,

Vu les jurisprudences susvisées,

Réformer partiellement le jugement en ce qu'il a :

Retenu la seule responsabilité du syndicat des copropriétaires,

Indemnisé Madame [E] à hauteur de la somme de 20.385,40€,

Dire et juger que le préjudice dont se plaint aujourd'hui Madame [E] provient des seules parties privatives et de sa seule responsabilité,

Dire et juger que Madame [E] ne rapporte pas la preuve de la réalité de son préjudice, et qu'en toutes hypothèses, il ne saurait excéder la somme de 4.565€ en ce qui concerne le syndicat,

En conséquence,

Débouter Madame [Z] [E] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

La condamner à restituer toutes sommes perçues à titre de provision en exécution de l'ordonnance du 7 janvier 2014,

Condamner AXA à garantir le syndicat des copropriétaires de toute condamnation qui serait prononcée contre lui,

Condamner tout succombant à verser au syndicat des copropriétaires 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en tous les dépens de première instance et d'appel.

Le rapport d'expertise du 4 novembre 2014 révèle que le sinistre provient, d'une part d'une inondation ponctuelle par des eaux usées, ce sinistre ayant cessé, et d'autre part d'humidité par capillarité qui, elle, persiste (rapport, pages 18-19).

La cause de l'inondation ponctuelle par des eaux usées a été identifiée et il y a été apporté remède immédiatement, ce que n'a pas manqué de relever l'expert judiciaire.

Le collecteur mis en cause dans le sinistre a ainsi été remplacé en mars 2012 (pièce n°3), ce qui a mis un terme aux inondations.

En raison de l'humidité persistante dans l'appartement, le syndic a fait procéder à de nouvelles investigations et recherches de fuites.

Pour mettre hors d'eau l'appartement, il a alors été décidé lors d'une assemblée générale extraordinaire, d'effectuer des travaux de mise hors d'eau de l'appartement [E] (pièce n°4) consistant notamment en l'installation d'une pompe de relevage dans la salle de bains, la confection d'une rehausse type dos d'âne à l'entrée et à la sortie du porche afin d'éviter que les eaux pluviales ne s'infiltrent sous le porche et la réalisation d'une équerre d'étanchéité. Ces travaux ont pu être réalisés après appels de fonds nécessaires pour leur exécution et règlement par Madame [E] de ses charges (pièces n°5 et 6).

L'expert judiciaire a, lors de ses visites, pu constater l'exécution de ces travaux et n'en a préconisé aucun autre au syndicat, concluant ainsi que ce qui devait être fait par ce dernier avait été fait.

Ces inondations ont donc cessé. Il reste dans l'appartement [E] un problème d'humidité dont l'expert explique très clairement la cause (page 20 de son rapport) :

'Les locaux acquis par Mademoiselle [E] correspondent à un aménagement de locaux de hauteur sous plafond de 2 m et dont le sol est situé en moyenne au-dessous du sol extérieur.

L'acte de vente fait état d'un appartement au demi-sous-sol.

Dans les immeubles anciens les locaux en sous-sol sont soumis à des remontées d'humidité.

Lors de la visite de l'appartement il apparaît que l'appartement est semi enterré.'

Il faut ajouter que lors de ses investigations, l'expert a également constaté la présence d'un témoin ancien permettant de surveiller les remontées de nappe.

Autrement dit, l'humidité présente dans l'appartement a toujours existé : elle n'est que la conséquence de la configuration des lieux et d'une ventilation insuffisante.

Madame [E] avait parfaitement connaissance de tout cela au moment de l'acquisition de son bien et il lui appartenait d'équiper son bien afin de lui assurer une meilleure ventilation.

En achetant un local enterré, déjà humide lors de son achat, la demanderesse était parfaitement informée de la situation et a choisi de ne pas améliorer les choses en ne réparant pas sa ventilation privative.

sur la responsabilité : la responsabilité de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 suppose la preuve par le demandeur que les dommages ont pour origine les parties communes ([Localité 9] 8 septembre 1999, AJDI 99), preuve que n'apporte pas le demandeur. Bien au contraire il n'est même pas indiqué la nature des remontées capillaires, commune ou privative, d'une part, et d'autre part, le mauvais état de l'extraction d'air est expressément privatif.

La responsabilité du syndicat des copropriétaires suppose aussi l'absence de faute de la «victime'', laquelle faute dispense le syndicat des copropriétaires de toute responsabilité (Cass. 3° civ. 12 septembre 2012, 11 - 10.421).

En l'occurrence le demandeur est doublement fautif:

- d'avoir acheté en connaissance de cause,

- de n'avoir pas fait fonctionner son extracteur d'air, faute sans laquelle les désordres n'auraient pas existé.

sur l'indemnisation demandée : les inondations n'ont pas duré de mai 2011 à mai 2013.

Comme déjà démontré, il a été mis un terme aux inondations dès mars 2012 après reprise du collecteur à l'origine de ce sinistre .

Les autres travaux de mise hors d'eau n'ont été réalisés qu'afin de tenter de limiter les remontées de la nappe phréatique.

C'est donc très justement que l'expert a considéré que le préjudice subi en rapport avec les inondations suite à la rupture du collecteur d'eaux usées était constitué par les seuls frais de relogement de juin 2011 à mars 2012.

L'expert a clairement identifié cette carence en précisant dans son rapport que « la ventilation des locaux peut être améliorée par création d'entrées d'air neuf dans les menuiseries des pièces principales et installation d'un extracteur neuf dans la salle de bain. Cela relève d'une partie privative '' (page 20 du rapport).

De même, l'expert précise dans ses conclusions «le mauvais état de l'extracteur de ventilation des lieux relève d'une partie privative '' (page 25).

La société d'assurances PACIFICA (conclusions du 11 Septembre 2019) demande à la cour de :

Vu le jugement du TI de Nice du 19/09/2017,

Vu le rapport d'expertise du 4 novembre 2014,

Vu l'article 121-12 du Code des assurances,

Vu le jugement du TGI de Nice du 06/09/2018,

SUR LE PLAN DE LA PROCEDURE

CONSTATER qu'en cause d'appel, la société PACIFICA a régularisé sa Constitution le 11/01/2019

CONSTATER que Madame [E] et la société AXA ont répliqué aux écritures du syndicat des copropriétaires « [Adresse 6] »

CONSTATER que le syndicat des copropriétaires « [Adresse 6] » n'a pas signifié à la société PACIFICA, ses conclusions dont la date de communication n'est pas identifiable à la lecture de la "Fiche d'instruction" sur le RPVA.

En conséquence, DEBOUTER le syndicat des copropriétaires « [Adresse 6] » de toutes éventuelles demandes dirigées contre la société PACIFICA pour non-respect du principe du contradictoire par application des articles 6, 9 et 16 du code de procédure civile .

CONSTATER que par conclusions notifiées par RPVA le 09/03/2019, Madame [E] réplique aux conclusions du syndicat des copropriétaires sans formuler aucune demande à l'encontre de la société PACIFICA.

CONSTATER que par conclusions notifiées par RPVA le 12/03/2019, la société AXA réplique aux conclusions du syndicat des copropriétaires sans formuler aucune demande à l'encontre de la société PACIFICA.

CONSTATER que par conclusions notifiées par RPVA le 12/06/2019, le syndicat des copropriétaires réplique aux conclusions de Madame [E] et de la société AXA sans formuler aucune demande à l'encontre de la société PACIFICA

AU FOND

CONSTATER qu'en exécution de l'ordonnance de référé du 7 janvier 2014, Monsieur [F] a été condamné à payer la somme totale de 1.620 € (principal et article 700 du code de procédure civile ).

CONSTATER que le 22 janvier 2014, la société d'assurances PACIFICA a payé, par chèque, la somme de 1.620 €.

CONSTATER que Madame [E] n'a jamais contesté la réalité, la nature ou le montant de cette dette.

DIRE ET JUGER que les conclusions du rapport de M. [D] sont claires et précises et ne souffrent d'aucune ambigüité concernant la quote-part imputable à M. [F] concernant les faits qui le concerne.

DIRE ET JUGER que la société PACIFICA est subrogée dans les droits de son assuré par application de l'article 121-12 du Code des assurances.

En conséquence,

CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Madame [Z] [E] à payer à la société PACIFICA la somme de 1.040 € représentant le trop-perçu.

DEBOUTER Madame [E] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre la société PACIFICA.

REFORMER le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société PACIFICA de sa demande de dommages et intérêts et de condamnations au titre des frais répétibles et irrépétibles.

Et statuant de nouveau,

CONDAMNER Madame [Z] [E] à lui payer la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée.

CONDAMNER Madame [Z] [E] à lui payer la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile (1ère instance et appel) ainsi que les entiers frais et dépens de l'instance (première instance et appel) distraits au profit de Maître DEMARCHI, Avocat aux offres de droit.

La SA AXA France IARD (conclusions du 12 Mars 2019) demande à la cour de  :

DEBOUTER Mme [E] de son appel

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Axa à garantir le syndicat de copropriétaires

DEBOUTER le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 6] de sa demande de garantie à l'encontre de la société Axa

CONDAMNER Mme [E] à rembourser à la société Axa la somme de 23.385,40 €

STATUER en deniers ou quittances

CONDAMNER tout succombant à lui payer , la somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, avocats associés aux offres de droit.

AXA décline sa garantie dans la mesure où les désordres étaient anciens et actés aux procès-verbaux d'assemblées générales sans qu'aucun remède ne soit apporté. cela démontre l'absence totale d'entretien par le syndicat. En application de la police n°306900187 « Multirisque immeuble » dans ses conditions générales 460613c, AXA rappelle que le paragraphe 63 prévoit que « les exclusions communes à toutes les garanties » en caractères normaux et parfaitement lisibles : «Aux termes de l'article 1964 du code civil, le contrat d'assurances garantit un risque aléatoire et par conséquent la survenance d'un des risques assurés dépend par nature d'un évènement incertain.

Ainsi, n'entre ni dans l'objet ni dans la nature du contrat, l'assurance des dommages ou responsabilités ayant pour origine un défaut d'entretien ou de réparation incombant à l'assuré, caractérisé et connu de lui. »

Mme [E] a acheté le bien en connaissance de cause et ne peut réclamer l'indemnisation.

L'affaire a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 18 Octobre 2022.

L'affaire a été fixée et retenue à l'audience de plaidoiries du 08 Novembre 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, la SA PACIFICA, intimée, relève que les conclusions d'intimé et d'appelant incident du 08 janvier 2019 du syndicat ne lui ont pas été notifiées, mais il y a lieu de relever que la SA PACIFICA a constitué avocat le 11 janvier 2019.

Les conclusions d'intimé et d'appelant incident n°2 du syndicat ont été ensuite notifiées à toutes les parties constituées par RPVA le 12 juin 2019, tout comme ses conclusions d'intimé et d'appelant incident n°3 du 8 novembre 2022.

La cour étant liée par les dernières conclusions des parties, qui ont bien été notifiées par RPVA à chacune des parties constituées, la demande de la société PACIFICA consistant à "DEBOUTER le syndicat des copropriétaires « [Adresse 6] » de toutes éventuelles demandes dirigées contre la société PACIFICA pour non-respect du principe du contradictoire par application des articles 6, 9 et 16 du code de procédure civile " doit être déclarée sans objet.

Sur les responsabilités

L'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis , dans sa version applicable au moment du litige , prévoit que 'la collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile.

Le syndicat peut revêtir la forme d'un syndicat coopératif régi par les dispositions de la présente loi. Le règlement de copropriété doit expressément prévoir cette modalité de gestion.

Il établit, s'il y a lieu, et modifie le règlement de copropriété.

Il a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes.

Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toutes actions récursoires.'

L'article 15 de cette même loi dispose que « le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble.

Tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d'en informer le syndic ».

Le tribunal de grande instance de Nice a retenu le rapport de l'expert judiciaire, l'estimant précis et détaillé.

Mme [E] critique ce rapport, estimant que l'expert a considéré que la cause de l'humidité affectant son appartement réside dans les remontées capillaires mais n'a pas mis en exergue la responsabilité du syndicat des copropriétaires.

En l'espèce, il résulte du rapport d'expertise que les désordres sont les suivants:

«Dégâts des eaux en mai 2011 par inondation due à une rupture de collecteur d'eaux usées enterré, remontée de la nappe phréatique au sol des locaux semi enterrés. Ce désordre est ancien. ''

L'expert judiciaire précise:

- que "les travaux de remplacement d'un collecteur relèvent d'une intervention de la copropriété sur une partie commune"

- que le désordre a perduré de mai 2011 à mai 2013, soit 2 ans "lLes inondations du logement ont eu lieu de mai 2011 à mai 2013, fin des travaux de mise hors d'eau."

La cour retient du rapport que l'expert a précisé que l'appartement de Mme [E] a été affecté par un important dégât des eaux qui l'empêche de résider dans les lieux. Il précise que malgré des travaux en 2012 sur le collecteur d'eaux usées, source des désordres, il aura fallu de nouvelles interventions pour stopper les inondations en février 2013. Lors de sa visite du logement, l'expert a fait les constatations suivantes : 'il règne une atmosphère fortement humide. L'appartement est inoccupé. La ventilation du logement est assurée par un extracteur disposé dans un soupirail donnant dans la salle de bains. Cet extracteur ne fonctionne pas en permanence, l'électricité étant coupée. La grille d'extraction est encrassée. ('.) nous avons testé le taux d'humidité en pied des parois : séjour 30%, coin cuisine 40%, chambre 40 à 50 %'.

L'expert conclura en page 18 de son rapport que 'les désordres rendent les locaux impropres à leur destination. Les inondations par eaux de pluie ont cessé. Les remontées d'humidité par capillarité persistent. Les locaux relèvent de l'insalubrité en l'état. (') l'appartement reste affecté par des remontées d'humidité par capillarité qui compromettent l'habitabilité'.

L'expert conclut que les inondations accidentelles ont cessé suite à la réparation d'un collecteur par la copropriété. Ces travaux relevaient d'une intervention de la copropriété sur une partie commune. Les travaux de recherche de fuite et de mise hors d'eau sont des travaux de protection d'un des lots de la copropriété.

Contrairement à ce que soutient Madame [E], il résulte clairement du rapport de l'expert que les désordres sont imputables en très grande partie au syndicat, puisque les désordres sont principalement dûs à la rupture du collecteur et que l'expert conclut que 'les travaux de remplacement d'un collecteur relèvent d'une intervention de la copropriété sur une partie commune", et dans une moindre mesure à Monsieur [F], propriétaire de l'appartement voisin, pour lequel l'expert propose de retenir une part de 10% des frais de relogement de Madame [E], ce que Monsieur [F] ne conteste pas.

C'est donc à juste titre que le tribunal, se fondant sur les conclusions de l'expert, qui ne sont pas contredites par d'autres éléments émanant d'un professionnel de la construction, a retenu la responsabilité prépondérante incontestable du syndicat des copropriétaires dans les désordres susvisés.

Au demeurant, l'état préexistant du logement ou sa situation en demi sous-sol, attesté par les différents diagnostics antérieurs à la vente, n'a pas été une cause de diminution de l'indemnisation accordée à Mme [E]. L'expert a simplement noté dans son rapport que ' l'état du local enterré dans un immeuble ancien était visible lors de l'acquisition. Le mauvais état de l'extracteur de ventilation des lieux relève d'une partie privative.' Il n'en a tiré, pas plus que le tribunal, une quelconque causalité avec le dommage subi et une éventuelle diminution de son indemnisation.

La cour confirmera donc la responsabilité du syndicat des copropriétaires dans la survenance des désordres, à hauteur de 90 % et celle de Monsieur [F] à hauteur de 10 %.

Sur le préjudice

Mme [E] conteste l'appréciation de l'évaluation de son préjudice faite par le tribunal de grande instance de Nice. Elle demande de réformer le jugement sur le montant des sommes accordées, fixées comme suit:

'L'inondation de l'appartement de Melle [E] s'est produite le 31 mai 2011.

Le 13 juillet 2011, SARETEC informait l'assureur de Melle [E] de la nécessité de relogement de la famille.

La mise hors d'eau de l'appartement [E] a été réalisée le 16 mai 2013. Le préjudice invoqué par Melle [E] est constitué des éléments suivants :.

- Relogement

. Location auberge du port du 15/07 au 31/07/2011 ................................................. 600 euros

. Location auberge du port du 01/08 au 31/08/2011.............................................. ..1.200 euros

~ Participation au loyer chez la mère de Melle [E]

Du 1er septembre 2011 au 30 octobre 2012 14X400€ ................. .........................5. 600 euros

Frais d'agence et caution....................................................................................... .. 2.369 euros

- Frais et charges

EDF [Adresse 6] ................................................................................... ................. 364 euros

Charges 78 Bd [T] payée le 28/02/2012........................................ ................. 1. 637,15 euros

Charges 78 Bd [T] au 31/12/2013.................................................. .................1. 708,86 euros

EDF [Adresse 6] ................................................................................. ............... .. 247,39 euros

Taxe d'habitation 2013 [Adresse 10]................................ .........................814 Euros

TOTAL................... 20.385,40 Euros

Melle [E] fait état d'une dette sur emprunt au Crédit immobilier de France pour 12. 987,44 euros.

Cette somme n'est pas prise en compte dans le montant du préjudice, les frais de relogement ayant été comptés en totalité.

Le préjudice subi en rapport avec les inondations suite à la rupture d'un collecteur d'eaux usées est constitué par les frais de relogement de juin 2011 à mars 2012.

Soit location Auberge du port 1. 800 euros et participation au loyer chez la mère de Melle [E] de septembre 2011 à mars 2012, 7 mois à 400 euros = 2.800 euros.

Le total des frais de relogement est donc de 4. 600 euros jusqu'en mars 2012. La participation de M. [F] à hauteur de 10 % est donc de 460 euros"

Le tribunal a fixé le préjudice de Madame [E] à la somme 20.385,40 euros, somme 'retenue par l'expert.'

En ce qui concerne les préjudices subis, l'expert indique:

« Le préjudice subi par Mademoiselle [E] est constitué par l'impossibilité d'occuper les locaux depuis mai 2011. Il a été mis fin aux inondations par les eaux usées de l'immeuble par des travaux de remplacement d'un collecteur défectueux et divers travaux de mise hors d'eau payés par la copropriété.

Lors des inondations, Melle [E] a dû se reloger. Elle a fait état d'une somme versée de

2.721, 48 Euros pour frais de relogement.

Les inondations du logement ont eu lieu de mai 2011 à mai 2013, fin des travaux de mise hors d'eau.

Sur ce calcul, la cour relève que le total des sommes correspondant aux préjudices, tels que listés par l'expert et repris par le tribunal, n'est pas de 20.385, 40 euros mais de 14.540, 40 euros.

Aucune confirmation de la somme allouée n'est demandée par l'appelante, même à titre subsidiaire.

Mme [E] réclame au syndicat de copropriétaires, in solidum avec son assureur AXA:

- 54.780 € au titre du préjudice de jouissance (décompte arrêté à la cession du bien)

Le préjudice de jouissance est constitué par le fait de n'avoir pu occuper le bien dans son entier,ou en partie, celui-ci étant devenu insalubre et impropre à sa destination en raison de l'humidité, de mai 2011 à mai 2013, date à laquelle les travaux relatifs au collecteur d'eaux usées ont été réalisés et ont mis un terme au désordre. L'expert note dans son rapport qu'il a effectué deux visites sur les lieux le 30 juillet et le 9 septembre 2014, Il résulte de son rapport que "l'appartement a été affecté par les inondations. L'appartement reste affecté par des remontées d'humidité qui compromettent l'habitabilité".

Le préjudice de jouissance ne peut en revanche s'entendre comme une perte de chance d'avoir pu louer le bien ou d'en avoir tiré des revenus locatifs. Cela correspondrait à un préjudice locatif, non avéré et donc non certain.

Mme [E] appuie sa demande sur le fait qu'elle n'a pas pu occuper les lieux depuis mai 2011 et ce jusqu'à la cession du bien le 29 mai 2022. Elle justifie de frais de relogement du 15 juillet 2011 au 30 octobre 2012, frais qui figurent dans le rapport d'expertise, démontrant bien qu'elle n'a pu occuper le bien.

Mme [E] estime que l'appartement devait être mis en état avant un retour dans les lieux car inondé pendant deux ans par eaux usées, ce qui nécessite des travaux dont elle ne peut assurer le coût financier tant que la justice n'a pas fait droit à ses demandes indemnitaires. Or, une fois les opérations d'expertise terminées et une provision accordée, il appartenait à Mme [E] de procéder aux travaux de nature à rendre le logement habitable. Elle ne peut exiger l'indemnisation d'un préjudice qu'elle a laissé se poursuivre jusqu'à la vente du bien en mai 2022, soit une période de onze années, alors même qu'une provision de 15.000 euros lui a été accordée par le juge des référés le 07 janvier 2014, provision qui excède largement le devis de Monsieur [R] pour la remise en état de l'appartement. L'expert note d'ailleurs que l'extracteur d'air situé dans le soupirail de la salle de bain, destiné à ventiler les lieux, ne fonctionne pas, faute d'électricité.

Mme [E] justifie d'un bail locatif pris avec Monsieur [N] [I] en date du 24 octobre 2012 pour un bien situé au [Adresse 3] pour un loyer de 717 euros outre 118 euros de charges.

Le rapport d'expertise datant du 4 novembre 2014 et constatant que l'habitabilité des lieux est compromise, il y a lieu de considérer que le préjudice de jouissance s'est étalé de mai 2011 à novembre 2014 inclus, soit sur une période de 42 mois.

Mme [E] produit un avis de valeur de l'agence CENTURY 21 OPTIMMO en date du 31 janvier 2017 qui estime à 415 euros la valeur locative du bien.

Au regard de ces éléments, il convient d'indemniser le préjudice de jouissance, à hauteur de la valeur locative, l'impossibilité d'occuper le bien étant totale, sur une période de 42 mois.

Ce préjudice sera évalué à la somme de : 415 x42 = 17.430 euros.

- 6.940 € au titre des travaux de remise en état de l'appartement

Mme [E] réclame la somme de 6.940 euros au titre des frais de remise en état de l'appartement, et verse à ce titre un devis de Monsieur [O] [R], auto-entrepreneur en date du 25 janvier 2017 portant sur des travaux à effectuer dans une salle de bain, une chambre et la cuisine et le salon, suite à un dégât des eaux.

L'expert avait pour mission de « décrire les désordres allégués » et de « fournir tous éléments permettant à la juridiction saisie d'apprécier les préjudices subis ».

Il résulte du rapport d'expert qu'il a été constaté une humidité importante dans le logement (« séjour 30%, coin cuisine 40%, chambre 40 à 50 %'.

Monsieur [D] n'a pas décrit de désordres autres dans le logement, notamment dans la salle de bains, la cuisine, la chambre et le salon et il a estimé que le préjudice était constitué par le fait d'avoir dû reloger la famille. Il n'a pas ni décrit, ni chiffré de désordres ou de travaux nécessaires pour y remédier.

Le devis de Monsieur [R] date de 2017, soit quatre années après la réalisation des travaux de réparation du collecteur d'eaux usées par le syndicat des copropriétaires. Ce devis n'a pas été soumis à l'expert dans le cadre de l'expertise contradictoire. Aucun élément ne permet de relier les postes de ce devis aux désordres constatés dans l'appartement d'autant plus que Mme [E] a été indemnisée de la somme de 2.921, 42 euros par son assureur pour ses dommages immobiliers et aux embellissements, vétusté et franchise déduite.

En l'état et en l'absence de lien certain entre les travaux mentionnés au devis de Monsieur [R] et les désordres constatés dans le logement, la cour ne peut que rejeter cette demande.

- 1.671 € au titre des travaux relatifs à la VMC

Mme [E] réclame la somme de 1671 euros au titre des frais de remise en état de la VMC. Or, comme rappelé par l'expert, la VMC est une installation dans une partie privative, dont la réparation ne peut être mise à la charge du syndicat de copropriétaires, et ce d'autant plus qu'il n'est nullement démontré un lien de causalité entre la défectuosité de la VMC et les désordres liés à la rupture du collecteur d'eaux usées. Cette demande sera rejetée.

- 4.617 € au titre de la taxe foncière

Le paiement de la taxe foncière n'est aucunement lié aux désordres mais attaché à la qualité de propriétaire d'un bien, indépendamment de son occupation ou son état. Cette demande sera rejetée.

- 570 € au titre de la taxe d'habitation

Mme [E] réclame le remboursement de la taxe d'habitation à hauteur de 570 euros qu'elle a payée pour les années 2011 et 2012 pour un bien qu'elle ne pouvait plus occuper Bd [T]. Elle justifie par ailleurs de la taxe d'habitation pour 2013, pour le logement qu'elle occupait [Adresse 10] suite à l'impossibilité d'occuper le sien. Cette taxe d'habitation d'un montant de 814 euros avait été retenue par les premiers juges et incluse dans le préjudice.

Au regard de l'impossibilité d'occuper le bien suite au sinistre survenu en 2011 et la date d'achèvement des travaux de reprise en 2013, il sera fait droit à cette demande.

En conséquence, la somme de 570 euros sera allouée à Mme [E] au titre de la taxe d'habitation pour les années 2011 et 2012 pour le logement [Adresse 6].

- 1.194,61 € au titre des factures EDF

Mme [E] réclame la somme de 1.194, 61 euros au titre des factures EDF qu'elle a réglées pour un appartement qu'elle ne pouvait plus occuper. Cette dépense ne saurait être mise à la charge du syndicat de copropriétaires dans la mesure où cette somme a été établie d'après factures correspondant à un abonnement et à une consommation. Il n'est d'ailleurs pas démontré que la facture d'électricité est directement liée aux désordres. Cette demande sera rejetée.

- 5.996,36 € au titre des frais bancaires

Mme [E] réclame enfin l'indemnisation des frais bancaires. Il apparaît que ces frais ne sont pas en relation directe et certaine avec les désordres, mais en relation avec l'application d'une clause pénale de 7% du contrat de prêt conclu entre Mme [E] et sa banque, dont le syndicat de copropriétaires ne saurait être tenu responsable. Cette demande sera rejetée.

- 25.000 euros au titre du préjudice moral

Le tribunal a écarté le préjudice moral, estimant que Madame [Z] [E] ne le justifiait nullement. En appel, Mme [E] réclame une somme de 25.000 euros.

Sur ce point, la cour réformera partiellement le jugement entrepris, considérant que le déménagement de tous les occupants du bien, dans des solutions d'hébergement temporaires ou familiales a nécessairement entraîné un préjudice moral. En effet, Mme [E] a acquis le bien le 12 mai 2010, en contractant un emprunt. Dès le 31 mai 2011, elle a subi un important dégât des eaux qui l'a conduite à quitter le logement. Le 6 septembre 2011, la mairie de [Localité 8] a indiqué au syndicat de copropriétaires que le service communal d'hygiène et de santé a été amené à constater l'insalubrité de l'immeuble.

En l'état de l'ensemble de ces éléments, le préjudice moral sera justement indemnisé à hauteur de 5.000 euros.

En application de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 rappelé ci-dessus, le syndicat de copropriétaires sera tenu d'indemniser Mme [E] de ce préjudice moral .

Au regard de ce qui précède, le préjudice de Mme [E] doit donc être évalué comme suit:

- préjudice de jouissance de mai 2011 à mai 2013 :...........................................17.430 euros

- Taxe d'habitation bd [T] ...............................................................................570 euros

- Préjudice moral :................................................................................................5.000 euros

TOTAL : ...........................................................................................23.000 euros

et les autres demandes seront rejetées.

Sur les demandes à l'encontre de PACIFICA assureur de Monsieur [F]

Mme [E] réclame une condamnation de Monsieur [F] à payer 10% de la somme octroyée en réparation du préjudice.

Les premiers juges ont retenu l'analyse de l'expert fixant la quote-part de Monsieur [F], à 10 % pour les frais de relogement. Monsieur [F] et la société PACIFICA ne formulent aucune opposition à cette analyse, rappelant que la responsabilité de Monsieur est limitée aux frais de relogement. La société PACIFICA demande la confirmation de la décision. La décision avait condamné Mme [E] à rembourser le trop-perçu de l'indemnisation de PACIFICA soit une somme de 1 040 euros sur une provision de 1620 euros, ce qui laissait donc à la charge de Monsieur [F] une somme de 580 euros ( préjudice et article 700).

Mme [E] demande la réformation de la décision sur le montant de la somme due par Monsieur [F] afin qu'il soit tenu de lui payer 10% des sommes qu'elle demande en cause d'appel.

Monsieur [F] admet sa responsabilité, retenue par l'expert, en ce qui concerne les frais de relogement. Ces frais ne sont pas retenus comme tels par la cour mais analysés comme une fraction du préjudice de jouissance, l'un de ses éléments constitutifs. Monsieur [F] doit donc participer à hauteur de 10 % à la réparation du préjudice fixé.

La cour ayant fixé le préjudice de Mme [E] à la somme de 23.000 euros, Monsieur [F] sera tenu de 10 % , soit la somme de 2300 euros et le surplus sera laissé à la charge du syndicat des copropriétaires.

Sur la demande de la SA PACIFICA au titre de la résistance abusive

La SA société PACIFICA demande l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts et de condamnation à l'encontre de Mme [E] pour résistance abusive.

Elle expose qu'elle a versé pour le compte de son assuré Monsieur [F], les sommes fixées par décision judiciaire. Or, malgré ses demandes de remboursement, Mme [E] n'a jamais effectué le moindre versement.

La SA PACIFICA fixe au 04 novembre 2014, date du dépôt du rapport d'expertise, l'obligation qu'avait Mme [E] de rembourser le trop-perçu. Or, ce n'est que le jugement qui a fixé les comptes entre les parties qui faisait partir un éventuel délai. L'appel ayant été formé, nonobstant l'exécution provisoire qui avait été prononcée, la résistance abusive n'est pas établie et la demande sera rejetée.

Sur les demandes d'AXA

Axa soutient que sa garantie n'est pas acquise faisant valoir que les faits sont anciens et démontrent une grave carence dans l'administration de l'immeuble et le non-entretien des parties communes et que malgré plusieurs procès-verbaux d'assemblée générale, le syndicat des copropriétaires a attendu plus de deux ans avant de procéder aux travaux.

La police Axa n°306900187 « Multirisque immeuble » dans ses conditions générales 460613c, rappelle à l'assuré, au paragraphe 63 « Les exclusions communes à toutes les garanties » en caractères normaux et parfaitement lisibles : «Aux termes de l'article 1964 du code civil, le contrat d'assurances garantit un risque aléatoire et par conséquent la survenance d'un des risques assurés dépend par nature d'un évènement incertain. Ainsi, n'entre ni dans l'objet ni dans la nature du contrat, l'assurance des dommages ou responsabilités ayant pour origine un défaut d'entretien ou de réparation incombant à l'assuré, caractérisé et connu de lui. ».

Or, l'assureur AXA ne démontre pas la carence du syndicat des copropriétaires ni que les désordres proviennent d'un défaut d'entretien, étant rappelé que l'expert ne l'a pas caractérisé comme tel, d'autant que l'une des causes des désordres est la présence d'une nappe phréatique à 30 cm sous le niveau de l'immeuble.

Le désordre ayant pour origine la rupture d'un collecteur d'eaux usées enterré, le dommage est donc accidentel et ne peut résulter d'un défaut d'entretien ou de réparation par l'assuré.

En conséquence, la garantie d'AXA est mobilisable au profit du syndicat des copropriétaires et l'assureur sera tenu in solidum des sommes mises à la charge du syndicat.

En conséquence également, la demande de la SA AXA en remboursement par Mme [E] de la somme de 23.385,40 € sera rejetée

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le jugement entrepris doit être ici confirmé.

Le syndicat des copropriétaires succombant partiellement sera condamné à payer à Madame [E] une indemnité de 3 000 euros pour les frais qu'elle a dû exposer en d'appel, ainsi qu'aux dépens d'appel.

L'équité commande de ne pas faire droit aux autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, et après en avoir délibéré conformément à la loi,  

CONSTATE que la demande de la société PACIFICA consistant à "DEBOUTER le syndicat des copropriétaires « [Adresse 6] » de toutes éventuelles demandes dirigées contre la société PACIFICA pour non-respect du principe du contradictoire par application des articles 6, 9 et 16 du code de procédure civile " est sans objet,

CONFIRME partiellement le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nice le 06 septembre 2018 en ce que le premier juge a :

- reçu la société PACIFICA en son intervention volontaire,

- retenu la responsabilité du syndicat des copropriétaires [Adresse 6] à hauteur de 90 % et celle de Monsieur [F] à hauteur de10 % dans les désordres survenus dans le bien appartenant à [Z] [E] situé au [Adresse 6],

- dit que la SA AXA FRANCE IARD est tenue de garantir le syndicat des copropriétaires 78 Bd [T] des condamnations prononcées contre lui,

- débouté la société PACIFICA de sa demande de dommages et intérêts,

- condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] à payer à Madame [Z] [E] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les autres parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,

- condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] aux dépens,

L'INFIRME pour le surplus et STATUANT A NOUVEAU :

FIXE les préjudices subis par Madame [Z] [E] comme suit :

préjudice de jouissance de mai 2011 à mai 2013 :...........................................17.430 euros

Taxe d'habitation bd [T] ..............................................................................570 euros

- Préjudice moral :................................................................................................5.000 euros

TOTAL : ...........................................................................................23.000 euros

DEBOUTE Madame [Z] [E] de ses autres demandes,

FIXE à 20.700 euros le montant de la somme totale due par le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] à Madame [Z] [E] en réparation de ses préjudices,

FIXE à la somme de 2.300 euros le montant dû par Monsieur [W] [F] à Madame [Z] [E] en réparation de ses préjudices,

CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires 78 Bd [T] et la SA AXA France IARD à payer à Madame [Z] [E] la somme de 20.700 euros en réparation de ses préjudices,

CONDAMNE la société PACIFICA, en sa qualité d'assureur de Monsieur [C] [F] à payer à Madame [Z] [E] la somme de 2 300 euros en réparation de ses préjudices,

DIT que les provisions déjà versées devront s'imputer sur les sommes dues le cas échéant,

Y AJOUTANT

DEBOUTE la SA AXA FRANCE IARD de toutes ses demandes,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] à payer la somme de 3000 euros à Madame [Z] [E] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 

 

REJETTE toutes autres demandes au titre des frais irrépétibles,

CONDAMNE le syndicat des copropriétaires [Adresse 6] aux entiers dépens d'appel

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Janvier 2023,

Signé par Mme Sophie LEYDIER, Présidente-suppléante et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

LE GREFFIER                                                        LA PRESIDENTE-SUPPLEANTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/15304
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;18.15304 ?
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