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19/01/2023 | FRANCE | N°18/12932

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 19 janvier 2023, 18/12932


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 19 JANVIER 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/12932 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC4B7







SARL GDMA





C/



SCI SCI [Adresse 4]





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Roselyne SIMON-THIBAUD



Me Constance DRUJON D'ASTROS






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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 25 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 6357/2018.





APPELANTE



SARL GDMA

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 19 JANVIER 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/12932 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BC4B7

SARL GDMA

C/

SCI SCI [Adresse 4]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Roselyne SIMON-THIBAUD

Me Constance DRUJON D'ASTROS

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d'AIX-EN-PROVENCE en date du 25 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 6357/2018.

APPELANTE

SARL GDMA

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée à l'audience par Me Sébastien BADIE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Fabrice SROGOSZ, avocat au barreau d'AVIGNON

INTIMEE

SCI SCI [Adresse 4]

, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Constance DRUJON D'ASTROS de la SCP DRUJON D'ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée à l'audience par Me Naz ekin BAYKAL, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 15 Novembre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Monsieur Olivier ABRAM, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2023.

ARRÊT

EXPOSE DU LITIGE

La SCI du [Adresse 4] a signé un devis de la société GDMA en date du 2 mars 2012 pour réaliser un ensemble de travaux évalué à la somme de 3 185 160 € HT sous la réserve de 1'obtention des financements;

Par exploit d'huissier en date du 16 août 2016, la société GDMA a fait assigner la SCI du [Adresse 4] devant le Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE, afin d'obtenir, notamment, sa condamnation à lui payer la somme de 254 812 € en réparation du préjudice commercial subi;

Par Jugement en date du 25 juin 2018, le Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE, notamment, rejetait cette demande;

Par déclaration en date du 31 juillet 2018, la société GDMA interjetait appel de cette décision.

Par ordonnance d'incident en date du 5 août 2021, la société GDMA était notamment débouté de sa demande de communication de pièces sous astreinte;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 octobre 2022, la société GDMA sollicite de :

Déclarer la société GDMA tant recevable que bien fondée en son appel;

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'AIX EN PROVENCE le 25 juin 2018,

Statuant à nouveau,

Vu l'article 1134 du code civil,

Vu les pièces jointes,

Condamner la SCI du [Adresse 4] à payer à la société GDMA la somme de 254 812 euros en réparation du préjudice commercial subi;

Débouter la SCI du [Adresse 4] de l'ensemble de ses demandes, plus amples et contraires;

A titre subsidiaire sur le montant du préjudice,

Condamner la SCI du [Adresse 4] à payer à la société GDMA la somme de 44 410 euros en réparation du préjudice commercial subi;

Condamner la SCI du [Adresse 4] à payer à la société GDMA la somme de 4 000 euros en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile outre les dépens d'instance;

Elle expose que le devis souscrit a le caractère d'un contrat engageant chacun des contractants, la condition de financement étant remplie, alors par ailleurs qu'elle se trouvait en capacité d'exécuter le contrat, ce qu'elle avait commencé à faire;

Elle développe son préjudice;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 janvier 2019, la SCI du [Adresse 4] sollicite de:

Vu l'article 1134 du Code Civil applicable à la date de l'assignation,

Vu les pièces produites aux débats,

Confirmer le Jugement en toutes ses dispositions ;

Dire et juger que le devis du 17 février 2012 ne constitue pas un marché de travaux au profit de la société GDMA;

Dire et juger en tout état de cause que GDMA a renoncé à l'exécution de ce prétendu contrat d'une part en n'en sollicitant pas l'exécution et d'autre part en acceptant postérieurement d'en conclure un autre avec la SCI qui a été pleinement exécuté;

Débouter GDMA de toutes ses demandes, fins et conclusions;

A titre subsidiaire,

Vu les articles 1271 et suivants du Code Civil,

Dire et juger que par novation, le contrat confié à la société GDMA pour le pilotage et la coordination des villas 10, 11, 12, 13 et la fourniture des matériaux pour ces mêmes villas, s'est substitué au prétendu marché de travaux;

Débouter en conséquence la société GDMA de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions;

A titre infiniment subsidiaire,

Dire et juger que le bénéfice escompté sur l'opération ne pouvait être que de 1,5 % sur le gros 'uvre et 1,3 % sur le second 'uvre;

Dire et juger dans cette hypothèse que seule une somme de 44.410,00 € pourrait revenir à la société GDMA;

En tout état de cause,

Condamner la société GDMA à payer à la SCI du [Adresse 4] la somme de 5.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens;

Elle expose que la société GDMA ne base son action que sur le devis qu'elle a établi le 17 février 2012 et qui a été signé par la SCI du [Adresse 4], mais qu'il ne s'agit pas d'un marché de travaux engageant les parties, car il a été signé sous réserve de l'obtention des financements nécessaires, qui n'ont été obtenus que par la vente des parts d'une des associés, par ailleurs associée de la société GDMA;

Elle précise en outre que c'est à bon droit que le premier juge a retenu que la société GDMA ne pouvait pas directement procéder à l'exécution du devis, en relevant qu'elle n'est pas une entreprise de travaux et n'a pas pour objet la construction de villas ou d'immeubles ;

Elle ajoute qu'après la cession des parts de cette associée, la société GDMA n'a pas sollicité l'exécution de son prétendu contrat, mais a accepté de passer avec la SCI du [Adresse 4] un contrat de pilotage et de coordination de la construction de quatre villas, et a également accepté d'assurer la fourniture des matériaux;

Elle souligne que l'acceptation de ces mission a constitué une novation du contrat initial, et conteste les préjudices avancés, largement surestimés;

L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 octobre 2022;

SUR CE

Il résulte de l'alinéa premier de l'article 1134 ancien du Code civil que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites;

La société GDMA se prévaut d'un devis en date du 2 mars 2012 signé de la SCI à laquelle il est adressé, et portant la mention manuscrite suivante « Bon pour accord sous réserve de l'obtention des financements » pour réclamer à l'intimée la somme de 254 812 €, ou, subsidiairement, la somme de 44 410 €, en réparation de son préjudice commercial;

Elle soutient que l'inexécution de ce contrat malgré l'obtention des financements nécessaires à la réalisation de l'opération lui a en effet causé le préjudice dont elle sollicite réparation;

Il apparaît acquis que ce contrat n'a jamais été exécuté par la société appelante en ce qu'il porte sur la réalisation de 6 villas de type 3, de 12 villas de type 4, de 6 villas de type 5, et d'un immeuble collectif sis [Adresse 1] (84 150);

Cette adresse correspond à un bien objet d'un compromis conclu le 12 octobre 2010 par [Z] [Y] en qualité d'acquéreur avec faculté de substitution au profit de la SCI, sans qu'il y soit mentionné une condition suspensive d'obtention d'un prêt, expressément écartée;

Ce bien a en outre été acquis par la SCI le 27 juillet 2012 au moyen de ses fonds personnels;

Il apparaît d'autre part que par un contrat souscrit entre la SCI et l'appelante le 10 janvier 2011, il avait été confié à cette dernière mandat de rechercher de terrains à bâtir d'un montant compris entre 100 000 € et 1 000 000 € sur la commune de [Localité 5], compte tenu, est-il indiqué, de la bonne connaissance par la représentante de la société GDMA, [D] [H] [B] épouse [Y], alors associée de la SCI, du « tissu économique et politique local »;

Ce contrat précisait que la rémunération de la société GDMA était fixée à 50 000 €, dont 30 000 € payable au jour de la revente de l'opération à réaliser et 20 000 € dans les 10 jours suivant la fin des recours administratifs sur le permis de construire;

Il n'y était pas non plus mentionné que les acquisitions de la SCI seront financées par un prêt;

Il ne ressort par ailleurs pas de l'acte de cession de parts sociales de la SCI convenue les 17 et 18 juillet 2012 par [D] [H] [B] épouse [Y] au profit de deux sociétés que cette cession succède à un refus de prêt indispensable à la réalisation de l'opération projetée;

Dans ces conditions, il n'apparait pas que la condition figurant dans le devis en cause relative à l'obtention des financements doive s'interpréter exclusivement comme l'octroi d'un prêt, rien ne permettant de le déduire au regard des pièces produites, de sorte que cette mention s'analyse simplement et conformément à son libellé comme une réserve liée à la capacité pour la SCI de financer cette acquisition, quelque soit le moyen ;

En conséquence, le fait que par un courrier en date du 21 février 2014 la société Caisse d'Epargne Provence Alpes Corse ait indiqué avoir refusé son intervention dans le financement de l'opération en cause est indifférent, cela n'induisant pas que du seul fait de ce refus le devis signé par la SCI soit devenu sans effet;

Il est en outre indifférent qu'aucun contrat n'ait succédé à la signature du devis en cause, cette circonstance n'étant pas de nature à justifier l'inexécution reprochée à l'intimée, étant ajouté que ce devis détaille sur 17 pages l'ensemble des prestations à réaliser, de la mise en place du chantier à la réalisation des constructions suscitées, poste par poste;

Il est également sans incidence que la société GDMA aurait été incapable de réaliser le chantier en cause, à supposer cette circonstance acquise, et n'ait pas les certifications nécessaires, dès lors que si tel était le cas, il appartenait à la SCI de ne pas conclure le devis suscité, par lequel elle a librement accepté de confier les prestations en cause, parfaitement identifiées, à l'appelante, alors même qu'elle a agi dans le cadre de cette opération comme un vendeur en l'état futur d'achèvement ainsi que le mentionne l'acte de vente intervenue entre elle et la société dénommée Société Nationale Immobilière le 27 juillet 2012, par nature au fait de ses droits et de ses devoirs, et des risques pris en toute connaissance de cause par la signature du devis querellé;

Il ressort de cet ensemble que dans la mesure où le financement de l'opération en cause a été réalisée, et qu'ainsi la condition figurant dans le devis a été réalisée, les parties se sont trouvées liées par un contrat générateur des obligations réciproques mentionnées au devis;

Il est clair en revanche qu'il ne résulte d'aucune des pièces produites que la société GDMA se soit prévalue de l'inexécution de cette convention avant l'introduction de la présente cause le 16 août 2016, alors même qu'elle ne pouvait ignorer l'état d'avancement du chantier et le fait que le contrat souscrit n'avait pas été exécuté puisqu'elle a été mandatée afin de réaliser plusieurs prestations dans le cadre de de celui-ci;

En effet, il apparaît qu'elle a proposé le 30 septembre 2012 aux entreprises en charge de certains lots (villas 10, 11, 12, 13) de fournir les matériaux pour la construction de certaines villas, ce qu'ils ont accepté, et qui signe sa connaissance du fait qu'elle n'était pas en charge des travaux;

Par ailleurs, sa connaissance de l'inexécution du contrat ressort également de la mention figurant dans l'appel de cotisation de son assureur en date du 3 juillet 2012, qui tenait compte de l'opération en cause, sur lequel il est écrit : « Appel de cotisation annulé car contrat passé sans effet »;

Il s'en déduit qu'il s'est écoulé près de 4 ans et demi entre la signature de son devis et sa première réclamation relative à son inexécution;

D'autre part, il résulte des factures de la société GDMA adressées à la SCI en date des 2 octobre 2012, 19 novembre 2012 et 18 décembre 2012 que l'appelante a été en charge du pilotage et de la coordination de certains lots du chantier qu'elle a proposé de faire par un devis en date du 30 septembre 2012;

Or, par application des articles 1271 et suivants du code suscité, la novation s'opère notamment lorsque le débiteur contracte envers son créancier une nouvelle dette qui est substituée à l'ancienne, laquelle est éteinte, et, si elle ne se présume pas, il n'est pas nécessaire qu'elle soit exprimée en termes formels, dès lors qu'elle est certaine et résulte des faits de la cause ;

Tel est bien ici le cas d'espèce, dans la mesure où il résulte parfaitement de l'émission du nouveau devis le 30 septembre 2012 par la société GDMA et de son acceptation par la SCI la volonté manifeste des parties de renoncer à l'exécution des obligations initialement souscrites pour y substituer une mission de pilotage et de la coordination de la construction des villas 10, 11, 12 et 13;

Il importe peu que les montants en cause ne soient pas de la même ampleur, cela n'étant pas de nature à remettre en cause que par l'émission de ce nouveau contrat et son acceptation les parties ont effectivement renoncé à se prévaloir de l'ancien;

D'autre part, cela est d'autant moins contestable que cette nouvelle mission est bien plus conforme à l'objet social de l'appelante que la précédente, celui-ci mentionnant que la société GDMA a notamment pour objet de réaliser des activités de pilotage, d'assistance et de coordination dans le domaine du bâtiment, non la réalisation de travaux en qualité d'entreprise générale;

En conséquence, compte tenu tout à la fois de l'absence de réclamation de l'appelante pendant plus de 4 ans après la signature du devis, et de la conclusion d'un nouveau contrat par lequel elle s'est vue confier de nouvelles responsabilités sur le chantier, il apparaît qu'il s'est opéré une novation des obligations initialement souscrites, auxquelles d'autres se sont substituées, éteignant les premières;

Il s'en déduit que les demandes de la société GDMA tendant à obtenir l'allocation de dommages et intérêts compte tenu de l'inexécution du contrat initial ne peuvent qu'être rejetées, les obligations qu'il a fait naître étant éteintes;

Le jugement entrepris sera donc confirmé, par substitution de motifs;

La société GDMA, qui succombe, supportera les dépens d'appel;

L'équité et la situation économique des parties justifient qu'elle soit condamnée à payer à la SCI du [Adresse 4] la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions;

CONDAMNE la société GDMA à payer à la SCI du [Adresse 4] la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

CONDAMNE la société GDMA aux dépens d'appel;

Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Janvier 2023,

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/12932
Date de la décision : 19/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-19;18.12932 ?
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