La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/01/2023 | FRANCE | N°18/18532

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 11 janvier 2023, 18/18532


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 11 JANVIER 2023



N° 2023/













Rôle N° RG 18/18532 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMLD







Syndicat des copropriétaires JEANNE D'ARC





C/



Etablissement Public DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES

SCI AMADOR

SCI STELLA























Copie exécutoire délivrée

le :

à :
<

br>

Me Philippe DAN



Me Françoise BOULAN



Me Agnès ERMENEUX

















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 03 Septembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n°14/3618.





APPELANTE



Syndicat des copropriéta...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 11 JANVIER 2023

N° 2023/

Rôle N° RG 18/18532 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BDMLD

Syndicat des copropriétaires JEANNE D'ARC

C/

Etablissement Public DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES

SCI AMADOR

SCI STELLA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Philippe DAN

Me Françoise BOULAN

Me Agnès ERMENEUX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 03 Septembre 2018 enregistrée au répertoire général sous le n°14/3618.

APPELANTE

Syndicat des copropriétaires JEANNE D'ARC Pris en la personne de son syndic de copropriété en exercice, le CABINET SYNDIC AZUR,

, demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Philippe DAN de la SCP DELAGE - DAN - LARRIBEAU - RENAUDOT, avocat au barreau de GRASSE

INTIMEES

Etablissement Public DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES pris en la personne de Président du Conseil Départemental,

, demeurant [Adresse 6]

représentée à l'audience par Me Françoise BOULAN de la SELARL LEXAVOUE BOULAN CHERFILS IMPERATORE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Antoine PONCHARDIER, avocat au barreau de NICE

SCI AMADOR

, demeurant [Adresse 2] / FRANCE

défaillante

SCI STELLA

, demeurant [Adresse 3]

représentée à l'audience par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidnt à l'audience Me Patrick GAYETTI, avocat au barreau de NICE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sophie LEYDIER, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Monsieur Olivier ABRAM, Conseiller

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2023.

ARRÊT

Le Département des Alpes Maritimes a procédé à la construction d'un collège sur le territoire de la commune d'[Localité 5] ;

Les parcelles sur lesquelles a été réalisé ce collège sont surplombées par diverses parcelles appartenant respectivement à la SCI Stella, la SCI Amador et la copropriété Jeanne d'Arc

Se plaignant que l'évacuation des eaux pluviales de ces dernières propriétés s'effectuait sans aucune précaution sur les parcelles lui appartenant, le Département des Alpes Maritimes, a obtenu par ordonnance du juge des référés en date du 23 janvier 2012 la désignation d'un expert judiciaire.

Par ordonnances du juge des référés les opérations d'expertise ont été rendues communes à la copropriété Jeanne d'Arc et à l'encontre d'une société qui paraissait être l'actuel propriétaire de la parcelle qui était la propriété de la SCI Stella ;

L'expert judiciaire, Monsieur [L] a déposé son rapport en date du 2 décembre 2013

Par acte en date des 28 mai et 3 juin 2014, le Département des Alpes-Maritimes a fait citer le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Jeanne d'Arc, la SCI Amador et la SCI Stella afin de solliciter leur condamnation à entreprendre des travaux nécessaires pour mettre un terme à la survenance des eaux pluviales provenant de leurs fonds sur la propriété du département des Alpes maritimes sous astreintes, leur condamnation au remboursement du montant des travaux provisoires réalisés pour faire cesser les dommages ainsi qu'au paiement de dommage et intérêts pour préjudice de jouissance.

Par jugement du 3 Septembre 2018, le Tribunal de Grande Instance de Grasse a considéré que les désordres constatés par l'expert constituaient des troubles anormaux de voisinage imputables aux propriétés JEANNE d'ARC, AMADOR et STELLA et a par conséquent rendu la décision suivante:

Vu l'article 472 du code de procédure civile,

Vu la théorie des troubles du voisinage,

CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, et la SCI STELLA à verser au département des Alpes Maritimes, une somme de 122 510, 77 euros ;

CONDAMNE à défaut de justificatif le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, la SCI STELLA, à entreprendre les travaux nécessaires pour mettre un terme à la survenance des eaux pluviales provenant de leur fond sur la propriété départementale, à savoir :

créer un bassin de rétention des eaux pluviales dans leur propriété respective et de remonter les eaux vers l[Adresse 4] par des pompes de relevage pour les propriétés JEANNE D'ARC et AMADOR,

de respecter les préconisations du permis de construire pour la propriété STELLA, c'est-à-dire mettre en place un bassin de rétention des eaux pluviales et le mettre en fonctionnement (page 25 du rapport) ;

REJETTE toute autre ou plus ample demande

CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, et la SCI STELLA à verser au Département des Alpes Maritimes une somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, et la SCI STELLA aux entiers dépens de la présente procédure en ce compris les frais d'expertise avec distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Helena SAPIRA ;

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe le 26 Novembre 2018, le Syndicat des copropriétaires JEANNE d'ARC a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Jeanne d'ARC et l'a débouté de ses demandes.

Un jugement rectificatif de la décision du 3 Septembre 2018 est intervenu le 17 janvier 2019 précisant que l'exécution provisoire avait été octroyée et que devait être corrigée l'erreur matérielle constatée dans le dispositif de la première décision. Le jugement rectification a été signifiée le 12 Mars 2019.

Par conclusions notifiées le 20 mai 2019, le Département des Alpes maritimes a demandé au conseiller de la mise en état la radiation de l'appel au visa de l'article 526 du Code de procédure civile à défaut pour l'appelante de justifier avoir exécuté les condamnations mises à charge.

Par ordonnance d'incident en date du 8 Octobre 2020, le conseiller de la mise en état de la chambre 1-4 de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a prononcé la nullité de l'acte de signification en date du 12 mars 2019 de la décision rectificative du tribunal de grande instance de Grasse en date du 17 janvier 2019, à l'égard du syndicat des copropriétaires Jeanne d'Arc et a par conséquent déclaré irrecevable la demande de radiation de l'affaire du rôle des affaires en cours présentée par le Département des Alpes maritimes.

L'ordonnance d'incident en date du 8 Octobre 2020 a été confirmée par un arrêt de déféré du 1 Avril 2021 de la chambre 1-3 de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 21 Février 2019 le Syndicat des copropriétaires JEANNE d'ARC conclut à l'infirmation du jugement du 03 septembre 2018.

Il conteste avoir causé un trouble anormal de voisinage au Département des Alpes Maritimes, estimant que les prétendus troubles allégués par le demandeur ne sont pas établis alors que l'immeuble dépendant de la copropriété a été édifié en 1963 conformément aux règles de construction alors applicables et n'a été jusqu'alors source d'aucun préjudice pour les propriété voisines , que la situation dont se plaint le département est la conséquence du défaut de prise en compte par le projet de construction du collège de la totalité des travaux nécessaires à la gestion des eaux de ruissellement et des eaux pluviales provenant des fonds en amont constitutif d'une faute du maître d'ouvrage exonératoire de responsabilité pour le Syndicat des copropriétaires LE JEANNE D'ARC.

Il fait ensuite valoir que l'absence de prise en charge par le Département des Alpes Maritimes des travaux nécessaires crée à son avantage un enrichissement sans cause au détriment la copropriétaire Jeanne d'Arc, que la réalisation d'un bassin de rétention provisoire au Nord de la construction du collège a permis de faire cesser les désordres de manière pérenne, que les travaux mis à la charge des parties succombantes dans le jugement du 3 septembre 2018 sont parfaitement superfétatoires.

Le Syndicat des copropriétaires Jeanne d'ARC demande à titre subsidiaire et reconventionnel que si les travaux de canalisation et de rétention sur les terrains des SCI AMADOR, STELLA et du Syndicat des copropriétaires sont jugés comme indispensables, le Département des Alpes Maritime doit en supporter le coût pour être à l'origine de son propre préjudice.

Le Syndicat des copropriétaire Jeanne d'ARC sollicite à titre très subsidiaire, de voir dire et juger que le syndicat des copropriétaires JEANNE D'ARC, et les SCI STELLA et AMADOR ont été condamnés à régler au Département les ouvrages qui étaient prévus initialement dans le projet de construction du collège pour la somme de 122.510 euros en plus de leur condamnation à réaliser travaux de canalisation sur leur propre parcelle, et que de ce fait le jugement du 3 décembre 2018 a condamné doublement les parties succombantes pour un seul et même préjudice .

En tout état de cause il demande la condamnation in solidum de tous succombant à lui verser au la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de Maître Philippe Philippe DAN, membre de la SCP DELAGE ' DAN - LARRIBEAU sous sa due affirmation de droit.

Le département des Alpes Maritimes, intimé, dans ses dernières conclusions en date du 05 août 2019 sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité in solidum du syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR et la SCI STELLA et a condamné ces personnes morales à :

- lui payer une somme de 122 510,77 euros

-à entreprendre les travaux nécessaires pour mettre fin aux troubles à savoir créer des bassins de rétention des eaux pluviales dans leur propriété respective et faire remonter les eaux vers l'[Adresse 4] par des pompes de relevage pour les propriétés JEANNE D'ARC et AMADOR,

A titre d'appel incident, le Département des Alpes Maritimes demande :

-la condamnation de la copropriété JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR et la SCI STELLA à lui payer la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- la réformation du jugement entrepris en ce qu'il n'a fixé ni d'astreinte ni de délai pour l'exécution des travaux et ouvrages que doivent entreprendre la copropriété JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR et la SCI STELLA et dire en conséquence que ces travaux à défaut d'avoir été exécutés dans les trois mois de la signification de la décision à intervenir, ladite copropriété JEANNE D'ARC, les SCI AMADOR et STELLA seront redevables d'une astreinte journalière de 5 000 euros pendant une période de trois mois, à l'expiration de laquelle il sera à nouveau statué.

- rejeter les appels du SDC JEANNE D'ARC et de la SCI STELLA.

En tout état cause il demande la condamnation de la copropriété JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR et la SCI STELLA aux entiers dépens et à la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC outre les frais irrépétibles d'appel distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, Avocats associés aux offres de droit.

Il expose que les propriétaires des fonds inférieurs ne sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés que de recevoir les eaux qui en découlent naturellement « sans que la main de l'homme n'y ait contribué », qu'il ressort de l'expertise que les fonds supérieurs construits sans que les eaux pluviales soient canalisées et maîtrisées sont à l'origine des désordres constatés sur la propriété de la concluante qui sert ainsi de « bassin de rétention » des eaux pluviales de tous les fonds dominants amont, que ces arrivées d'eaux intempestives en provenance des fonds supérieurs ont engendré des coûts supplémentaires dans la construction du collège afin de les enrayer et ont retardé la livraison des bâtiments ,qu'il a ainsi fallu réaliser un bassin de rétention provisoire afin de permettre « la collecte des eaux pluviales en provenance des parcelles contiguës pendant la durée des travaux », que ce n'est pas l'absence de cet ouvrage qui a généré les désordres, qu'il s'agit d'un palliatif mis en place dans l'urgence pour permettre la réalisation de cette opération d'intérêt public, qu'il convient pour l'avenir que les propriétés en amont crée des bassins de rétention de leurs eaux pluviales et renvoient celles-ci vers l'[Adresse 4].

La SCI STELLA dans ses dernières conclusions en date du 27 Mai 2019 sollicite la réformation du jugement entrepris en qu'il a :

Condamné IN SOLIDUM le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE I'IMMEUBLE JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, la SCI STELLA, à verser au DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES une somme de : 122 510, 77 €

Condamné à défaut de justificatifs le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L'IMMEUBLE JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, la SCI STELLA, à entreprendre les travaux nécessaires pour mettre un terme à la survenance des eaux pluviales provenant de leur fond sur la propriété départementale à savoir de respecter les préconisations du permis de construire pour la propriété STELLA, c'est-à-dire mettre en place un bassin de rétention des eaux pluviales et le mettre en fonctionnement.

Condamné IN SOLIDUM le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE I'IMMEUBLE JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, la SCI STELLA à verser au DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES une somme de 5000 € sur le fondement de l'Article 700 du code de procédure civile

Condamné IN SOLIDUM le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE I'IMMEUBLE JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR, la SCI STELLA, aux entiers dépens de la présente procédure, en ce compris les frais d'expertise.

En tout état de cause :

-REFORMER le jugement entrepris et débouter le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES de toutes ses demandes, le jugement constituant un enrichissement sans cause au bénéfice du DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES et au détriment des propriétaires des fonds voisins.

-VOIR CONDAMNER le département des Alpes-Maritimes à payer la somme de 5000 € à titre de l'art. 700 du C.P.C. ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Agnès ERMENEUX et ce sous sa due affirmation de droit.

-DIRE IRRECEVABLE la demande de condamnation de la SCI STELLA à mettre en place un bassin de rétention des eaux pluviales , celle-ci n'étant plus propriétaire de cet immeuble , que le bassin de rétention prescrit par le permis de construire sur la propriété désormais de la SCI VILLA STELLA a été réalisé et fait parfaitement son office, que le département ne rapporte pas la preuve du préjudice dont il demande réparation à l'appui de da demande de dommages intérêts comme il ne rapporte pas la preuve le lien de causalité entre le fait prétendument reproché à la société SCI STELLA et les dommages subis.

Elle expose faire toutes réserves sur le caractère contradictoire du rapport d'expertise en l'absence de son représentant, que ceci lui fait grief dans la mesure où elle n'a pu faire part de certaines informations concernant notamment la nappe phréatique et l'historique de la zone, que l'expert en l'absence de contradictoire de la part de la SCI STELLA a été amené à en déduire des interprétations erronées puisqu'il n'avait pas toutes les informations.

Sur le fond, elle soutient que les conditions du trouble anormal de voisinage ne sont pas réunies et que le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES a commis une faute exonératoire de responsabilité pour le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE "IMMEUBLE JEANNE D'ARC et les deux SCI, qu'il appartenait en effet au DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES de prendre en compte l'existant et les avoisinants pour réaliser un ouvrage en conformité avec l'environnement , qu'en ne tenant pas compte de l'environnement général, géologique et hydrogéologique pourtant connu il s'est créé son propre trouble, que le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES tente de faire supporter aux propriétaires des fonds voisins son imprévoyance et son insuffisance dans les travaux commandés aux entreprises , que dispenser le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES de supporter lui-même les travaux de canalisation et de drainage constituerait un enrichissement sans cause, lui permettant de faire une économie substantielle au détriment des propriétaires des fonds voisins.

En outre le DEPARTEMENT DES ALPES MARITIMES est irrecevable à solliciter de la SCI STELLA la condamnation à mettre en place un bassin de rétention des eaux pluviales , celle-ci n'étant plus propriétaire de cet immeuble ; le bassin de rétention prescrit par le permis de construire sur la propriété désormais de la SCI VILLA STELLA a été réalisé et fait parfaitement son office et le département ne rapporte pas la preuve du préjudice dont il demande réparation à l'appui de da demande de dommages intérêts comme il ne rapporte pas la preuve le lien de causalité entre le fait prétendument reproché à la société SCI STELLA et les dommages subis.

La SCI AMADOR n'a pas constitué avocat, la déclaration d'appel et les conclusions d'appelant lui ont été signifiés par acte en date du 25 Février 2019.

L'affaire a été clôturée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 24 Octobre 2022 et fixée à l'audience du 9 Novembre 2022.

MOTIVATION

Sur le trouble de voisinage :

L'article 640 du code civil dispose que les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué.

Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement.

Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur.

L'article 544 du code civil prévoit que la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements.

Toutefois, le droit pour un propriétaire de jouir de sa chose de la manière la plus absolue et notamment d'y faire édifier un ouvrage est limité par l'obligation de ne causer à la propriété d'autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage.

Il résulte de la combinaison de ces deux textes que si les propriétaires des fonds inférieurs sont tenus de recevoir les eaux qui découlent des fonds supérieurs encore faut-il qu'il s'agisse d'un écoulement non aggravé par la main de l'homme ; dans le cas contraire les désordres qui en résultent constituent des troubles du voisinage pourvu qu'ils présentent un caractère anormal.

En l'espèce, il ressort du plan cadastral de la commune d'Antibes versé aux débats que les parcelles de la section CV n°[Cadastre 1] (sci stella) supportant un immeuble inachevé, n°285 (sci amador) supportant des constructions industrielles et n° 46 (copropriété Jeanne d'Arc) supportant un immeuble collectif, sont voisines des parcelles appartenant au Département sur lesquelles celui-ci a entrepris d'édifier un collège en décembre 2010 .

Les procès-verbaux de constat spécialement en date des 24 mars 2011 et 27 juillet 2011 mettent en évidence que les propriétés JEANNE D'ARC, SCI AMADOR et SCI STELLA surplombent les parcelles appartenant au département assiettes du futur collège, que deux canalisations en pvc et les eaux pluviales de voies de circulation de la copropriété JEANNE D'ARC, des descentes d'eaux pluviales de la propriété de la SCI AMADOR s'écoulent sur la propriété du département.

Concernant la SCI STELLA, sont versés aux débats le permis de construire délivré le 20 mars 2006 et les annexes dont les plans afférents à un bassin de rétention puis deux , un document du 03/02/2011 indiquant : « chantier arrêté. Bassin de rétention prévu avec relevage sur [Adresse 4] non réalisé.

L'expert désigné par ordonnances de référé des 23 janvier et 30 mai 2012, mentionne :

- que les eaux pluviales en provenance du parking, de la voie d'accès et d'une partie des toitures et terrasses de l'immeuble JEANNE D'ARC située en amont du terrain d'assiette du chantier du collège se déversent sur ce terrain.

-que les descentes d'eaux pluviales des toitures des bâtiments industriels implantés sur la parcelle appartenant à la SCI AMADOR se déversent sur les accès extérieurs et s'écoulent sur le terrain d'assiette du chantier du collège.

-que sur la parcelle de la SCI STELLA le chantier d'édification d'un immeuble semble à l'abandon.

Cette société qui se prévaut de la vente du bien ne produit aucune pièce en ce sens, ce qui ne permet pas de vérifier la pertinence de son argument et ne conteste pas qu'elle était propriétaire au moment de la construction du collège.

L'expert note que la réalisation d'un bassin de rétention sur le terrain d'implantation du collège qui a tardé par rapport aux recommandations du rapport d'étude géotechnique G12 a permis de faire diminuer sensiblement les désordres.

Toutefois, ce bassin de rétention est essentiellement provisoire, résulte d'une convention en date du 18 février 2011 portant autorisation temporaire de rejet des eaux de drainage dans le réseau public d'eaux pluviales et la cessation des désordres nécessite que les propriétaires JEANNE D'ARC et AMADOR créent des bassins de rétention des eaux pluviales sur leur fonds respectif, remontent les eaux vers l'[Adresse 4] par des pompes de relevages et que la SCI STELLA respecte les préconisations de son permis de construire prévoyant la création d'un bassin de rétention des eaux pluviales.

L'édification d'ouvrage et la minéralisation d'une propriété sans dispositif de recueillement et de canalisation des eaux a pour effet d'aggraver la servitude naturelle d'écoulement des eaux du fonds supérieur sur le fonds inférieur indépendamment de la nature des sols, des remontées de la nappe phréatique et de trottoirs équipés d'avaloirs mais peu surélevés. Cette aggravation, se traduisant par une arrivée d'eau indue de nature à pour le moins amplifier le risque d'inondation du fonds inférieur faisant obstacle au droit de construire du propriétaire du dit fond au point de l'obliger à réaliser un bassin de rétention des eaux pluviales en lieu et place des propriétaires des fonds supérieurs caractérise un trouble anormal de voisinage, peu importe que le fonds supérieur ait été aménagé antérieurement au fonds inférieur, que les ouvrages édifiés sur le fonds supérieur soient conformes au permis de construire, que le propriétaire du fonds inférieur n'ait formulé aucune contestation jusqu'à ce qu'il édifie un ouvrage sur sa propriété.

Le caractère anormal du trouble de voisinage est confirmé par sa réduction considérable après réalisation du bassin de rétention provisoire par le département.

Il y a donc lieu de retenir la responsabilité des propriétaires des fonds supérieurs des désagréments et charges anormales occasionnés par la carence de leur réseau d'évacuation des eaux pluviales respectif et de les condamner à réaliser les travaux nécessaires pour faire cesser le trouble.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les préjudices

L'expert indique que l'édification d'un bassin supplémentaire de rétention afin de recueillir les eaux pluviales déversées anormalement sur la propriété du département, terrain d'assiette du collège, représente un surcoût de travaux d'un montant de 68650,20 euros HT

A cette dépense, l'expert ajoute la somme de 13801,60 euros HT correspondant à des travaux supplémentaires rendus nécessaires du fait de l'inondation du chantier (pompage, traitement du sol).

Il est également demandé une somme de 16976,96 euros HT versée par le département à la société CAMPENO Bernard au titre de l'indemnisation du préjudice résultant du retard pris dans la planification des travaux.

Toutefois, concernant cette dernière somme, il résulte du rapport du CEBTP du 16 septembre 2009 que la difficulté relative à l'évacuation des eaux pluviales des propriétés voisines aurait dû être anticipée comme connue plus d'un an avant le démarrage du chantier comme en atteste les pièces produites.

En effet, l'expert reprend un extrait de ce rapport qui précise ceci :

Drainage (page 25 du rapport CEBTP)

Les eaux de ruissellements seront soigneusement recueillies et évacuées vers l'aval.

Un drainage des eaux captées de l'amont devra être prévu en phase chantier.

L'expert précise que ces préconisations n'ont pas été parfaitement mises en 'uvre lors du démarrage des travaux du collège.

Par voie de conséquence, ce chef de préjudice sera rejeté et le jugement infirmé sur ce point.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR et la SCI STELLA seront condamnés in solidum à verser au département des Alpes Maritimes la somme de 82 451,80 euros HT au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait du trouble de voisinage objet du litige.

En ce qui concerne la demande au titre des travaux de nature à faire cesser le trouble, la SCI STELLA produit une attestation de non contestation de la DAACT en date du 20 janvier 2016 délivrée par la commune d'[Localité 5] à la SCCV VILLA STELLA concernant la parcelle CV [Cadastre 1] et le PC 06004 11 A0071 M03 accordé le 20/11/2011 rectifié le 17/12/2015.

Le permis de référence prévoit les caractéristiques à respecter pour l'évacuation des eaux pluviales et spécialement du bassin de rétention.

Dès lors, outre que la SCCV VILLA- K&M IMMOBILIER qui paraît être le nouveau propriétaire de la parcelle [Cadastre 1] n'a pas été appelée au litige, il n'est pas démontré la nécessité d'enjoindre sous astreinte le propriétaire du bien à réaliser des travaux pour faire cesser le trouble.

En revanche, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC et la SCI AMADOR qui est défaillante, ne justifient par la production d'aucune pièce de la réalisation des travaux préconisés par l'expert de canalisation des eaux pluviales et spécialement de mise en 'uvre de bassins de rétention à cet effet.

Par voie de conséquence, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC et la SCI AMADOR seront condamnés à entreprendre les travaux nécessaires à la canalisation des eaux pluviales issues de leur propriété suivant les recommandations de l'expert sous astreinte de 750€ par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt et ce pendant une durée de trois mois.

Le jugement de première instance sera ainsi infirmé sur la réparation des préjudices résultant du trouble de voisinage.

Sur les autres demandes

Parties succombantes le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC et la SCI AMADOR seront condamnées aux dépens de la procédure d'appel.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC et la SCI AMADOR seront condamnées à payer au Département la somme de 3000 euros en application de l'article 7010 du CPC.

Las autres demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas justifiées.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe :

Infirme partiellement le jugement du 03 septembre 2018 du tribunal judiciaire de Grasse en ce qui concerne la réparation des préjudices résultant du trouble de voisinage,

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC, la SCI AMADOR et la SCI STELLA à payer au Département des Alpes maritimes la somme de

Maritimes la somme de 82 451,80 euros HT.

Condamne, à défaut d'en justifier, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC et la SCI AMADOR à réaliser sous astreinte de 750€ par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt et ce pendant une durée de trois mois à entreprendre les travaux nécessaires pour mettre un terme à la survenance des eaux pluviales provenant de leur fond sur la propriété départementale, à savoir :

-créer un bassin de rétention des eaux pluviales dans leur propriété respective et de remonter les eaux vers l[Adresse 4] par des pompes de relevage pour les propriétés JEANNE D'ARC et AMADOR,

Dit irrecevable et mal fondée la demande de condamnation sous astreinte de la SCI STELLA à réaliser des travaux de mise en place d'un bassin de rétention des eaux pluviales et de le mettre en fonctionnement, conformément au permis de construire qu'elle a obtenu pour la parcelle sise commune d'Antibes section CV n°[Cadastre 1].

Y ajoutant,

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC et la SCI AMADOR à payer au Département des Alpes Maritimes la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du CPC.

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires de l'immeuble JEANNE D'ARC et la SCI AMADOR à payer les dépens dont distraction au profit de maître Agnès ERMENEUX, maître Philippe DAN et la SELARL LEXAVOUE Aix-en-Provence.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Janvier 2023

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/18532
Date de la décision : 11/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-11;18.18532 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award