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08/12/2022 | FRANCE | N°22/05446

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 08 décembre 2022, 22/05446


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022



N° 2022/













Rôle N° RG 22/05446 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJG6X







[K] [J]





C/



S.A. BPCE ASSURANCES

Caisse CPAM DU PUY DE DOME





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Karine TOLLINCHI



Me Fabien BOUSQUET

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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULON en date du 24 Mars 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/06181.





APPELANT



Monsieur [K] [J]

né le 23 Mars 1963 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Karine TOL...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

N° 2022/

Rôle N° RG 22/05446 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJG6X

[K] [J]

C/

S.A. BPCE ASSURANCES

Caisse CPAM DU PUY DE DOME

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Karine TOLLINCHI

Me Fabien BOUSQUET

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOULON en date du 24 Mars 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/06181.

APPELANT

Monsieur [K] [J]

né le 23 Mars 1963 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Karine TOLLINCHI de la SCP TOLLINCHI PERRET VIGNERON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Philippe-youri BERNARDINI de la SELARL CABINET BERNARDINI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEES

S.A. BPCE ASSURANCES

, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Fabien BOUSQUET de la SARL ATORI AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE substituée à l'audience par Me Damien NOTO, avocat au barreau de MARSEILLE

Caisse CPAM DU PUY DE DOME

, demeurant [Adresse 2]

défaillante

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 11 Octobre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Monsieur Olivier ABRAM, Conseiller

Madame Angélique NAKHLEH, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

ARRÊT

EXPOSÉ DES FAITS

Monsieur [K] [J] a souscrit auprès de la SA BPCE Assurances le 1er septembre 2018 un contrat d'assurance dit "garantie des accidents de la vie" incluant « les accidents médicaux ».

Monsieur [J] avait également déjà souscrit un contrat de même nature le 26 novembre 2009 auprès de la compagnie ALLIANZ.

Monsieur [J] a été victime le 24 octobre 2019 d'un accident médical suite à une chirurgie à visée décompressive réalisée par le Docteur [N] à l'hôpital de [4] à [Localité 5], étant atteint depuis plusieurs années d'un lipome du cône (tumeur bénigne située sur le canal rachidien). Le 6 novembre 2019 il a déclaré cet accident médical à sa compagnie d'assurance afin d'obtenir l'indemnisation des préjudices visés au contrat.

Par ordonnance de référé du 18 septembre 2020 une expertise médicale a été confiée au Dr [Y], remplacé par le Dr [E], neuro chirurgien, lequel a rendu son rapport définitif le 25 octobre 2021.

Ayant vainement sollicité par courrier du 3 novembre 2021 le paiement par la compagnie d'assurance du plafond de garantie d'un million d'euros, monsieur [K] [J] a alors assigné à jour fixe le 24 décembre 2021 1a SA BPCE Assurances ainsi que la CPAM du Puy de Dôme aux fins d'obtenir, l'indemnisation du poste Aide en Tierce personne.

Par jugement du 24 Mars 2022, le Tribunal judiciaire de TOULON a :

DECLARE le présent jugement commun et opposable à la CPAM DU PUY DE DOME

DEBOUTE Monsieur [K] [J] de l'ensemble de ses demandes

CONDAMNE Monsieur [K] [J] aux entiers dépens

DIT n'y avoir lieu à maintenir l'exécution provisoire de droit au présent jugement

S'appuyant sur le rapport d'expertise du DR [E], le tribunal a considéré que la chirurgie réalisée par le Dr [N] ne peut être considérée comme un événement extérieur, imprévu et soudain dans le mesure où un tel geste a été pratiqué en raison de l'état de santé antérieur de Monsieur [J], atteint d'un lipome.

Il en résulte, qu'il a été victime d'un aléa thérapeutique, lequel ne peut être assimilé à un accident médical au sens du contrat d'assurance dit "garantie des accidents de la vie" souscrit auprès de la SA BPCE Assurances, de sorte qu'il devra être débouté de l'intégralité de ses demandes indemnitaires.

Par déclaration d'appel enregistrée au greffe le 12 Avril 2022, Monsieur [K] [J] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

DEBOUTE Monsieur [J] de toutes ses demandes

CONDAMNE Monsieur [J] aux dépens

Monsieur [K] [J], appelant (conclusions du 12 Septembre 2022) sollicite :

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile

Vu les articles 1103 et suivants du code civil

Vu le rapport de I 'expert [E] en date du 25 octobre 2021

Vu le contrat « Garantie accidents de la vie »

Vu I 'article 565 du code civil

INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de TOULON le 24 mars 2022 dans toutes ses dispositions

Statuant à nouveau

DEBOUTER la SA BPCE ASSURANCES de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

CONDAMNER la SA BPCE ASSURANCES à payer à Monsieur [K] [J] à la suite à l'aléa thérapeutique qu'il a subi dans les suites de l'intervention réalisée le 24 octobre 2019 à la Pitié-Salpêtrière au titre du contrat GAV, les sommes suivantes :

887.842,04 euros en réparation du préjudice Aide en tierce personne permanente,

45.480 euros en réparation du préjudice Aide en tierce personne temporaire,

15.000 euros en réparation du préjudice sexuel,

CONDAMNER la SA BPCE ASSURANCES à payer à Monsieur [K] [J] une somme de 500 € au titre des frais d'assistance à expertise par le Docteur [U]

CONDAMNER la SA BPCE ASSURANCES à payer à Monsieur [K] [J] une somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

CONDAMNER la SA BPCE ASSURANCES aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise médicale ainsi que les dépens liés à la procédure donnant lieu à l'ordonnance de référé du 18 septembre 2020, distraits au profit de la SCP TOLLINCHI VIGNERON BUJOLI TOLLINCHI, avocats, sur son offre de droit conformément aux termes des dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile ;

Il expose que le premier juge a violé les artic1es 4 et 5 du code de procédure civile en ce qu'il a débouté monsieur [J] de ses demandes au motif qu'i1 aurait été victime d'un aléa thérapeutique non garanti par le contrat alors que la SA BPCE ASSURANCES soutenait que le contrat ne devait pas s'appliquer car le préjudice de Monsieur [J] résulterait de son état antérieur.

Ensuite, le premier juge a dénaturé les termes du contrat en retenant que Monsieur [J] avait

été victime d'un aléa thérapeutique qui ne pouvait être assimilé à un accident médical alors que le contrat garantit les conséquences d'accidents médicaux causés à l'occasion d'actes chirurgicaux, de prévention, de diagnostic, d'exploration, de traitements pratiqués par des médecins et auxiliaires médicaux visés dans la quatrième partie du code de la Santé Publique et notamment l'article L. 1142-1 du code de la santé publique.

La Cour de Cassation a dans un arrêt de la 1ère Chambre civile du 6 avril 2022 (n°21-12.825) jugé que la condition d'anormalité du dommage doit être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entrainé des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie de manière suffisamment probable en l 'absence de traitement et que, dans le cas contraire, les conséquences dc l 'acte médical ne peuvent être considérées anormales sauf si, dans les conditions où l 'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible.

Les conséquences de l'acte médical peuvent être notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie de manière suffisamment probable en l'absence de traitement si les troubles présentés, bien qu'identiques à ceux auxquels il était exposé par l'évolution prévisible de la pathologie, sont survenus prématurément. Dans ce cas, une indemnisation ne peut être due que jusqu'à la date à laquelle les troubles seraient apparus en l'absence de survenance de l 'accident médical.

D'une part l'expertise démontre que l'intervention chirurgicale a bien eu sur monsieur [J] des conséquences dommageables pour sa santé anormales et indépendantes de l'évolution de l'affliction en cause et de l'état antérieur, qu'il s'agit bien d'un aléa thérapeutique et la faible probabilité du risque attestant également de son anormalité.

D'autre part le contrat a été souscrit sur proposition de la conseillère de Monsieur [J] pour l'ensemble de sa famille s'agissant d'une formule «  Intégrale Familiale » , et non exclusivement pour lui, encore moins en prévision de possibles complications liées a une intervention pour le lipome dont il n'aurait pas décidé s'il avait pensé être paraplégique après l'opération et la question de l'intervention du lipome n'a pu être sérieusement envisagée avant courant 2019 compte tenu de l'évolution de la pathologie puis retardé du fait de deux accidents successifs dont les conséquences étaient incompatibles avec cette intervention.

Enfin, la BPCE ASSURANCES n'a pas demandé qu'il lui soit adressé un questionnaire médical lors de la signature du contrat.

Le sursis à statuer n'a pas lieu d'être dans la mesure où la règle du non cumul des indemnités n'est pas applicable, le contrat souscrit auprès d'ALLIANZ garantissant d'autres préjudices et aucune instance au fond n'a été introduite.

De plus, un recours de la BPCE contre ALLIANZ, qui n'est pas un tiers responsable n'a aucun fondement légal, ni contractuel et monsieur [J] s'engage à ne pas demander à ALLIANZ l'indemnisation de mêmes postes de préjudice.

La SA BPCE ASSURANCES, intimée (conclusions du 24 Mai 2022) sollicite :

Vu le contrat d'assurances et les articles L131-1 et suivant du Code des Assurances, Vu l'article 1104 du Code Civil

A titre principal :

CONFIRMER la décision et JUGER que la garantie du contrat accident de la vie n'est pas applicable

DEBOUTER Monsieur [J] de toutes ses demandes.

A titre subsidiaire et en cas de réformation :

JUGER qu'en vertu du non-cumul, il est nécessaire que l'indemnisation et la liquidation du préjudice soit réalisée au contradictoire d'ALLIANZ et ce faisant :

Se dessaisir au profit du tribunal judiciaire de TOULON et inviter Monsieur [J] à saisir le tribunal judiciaire de TOULON afin qu'il soit statué sur l'indemnisation de son préjudice au contradictoire d'ALLIANZ et de BPCE.

A défaut, SURSOIR A STATUER dans l'attente de l'issue de la procédure opposant Monsieur [J] et ALLIANZ dans laquelle BPCE interviendra.

A titre infiniment subsidiaire, fixer le poste tierce personne ainsi :

Période échue : 24/04/2021 au 22/03/2023 : 37 692 euros

Période à échoir à compter du 23/03/2023 : 494 064 euros

Condamner Monsieur [J] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du CPC.

Réserver les dépens

L'assureur expose que le premier juge n'a pas statué Ultra Petita comme l'indique l'appelant mais a tranché le litige conformément aux règles de droit et comme l'article 12 du CPC le prescrit ,qu'à juste titre, le tribunal a estimé qu'il n'apparaît pas que la chirurgie à visée décompressive réalisée par le Docteur [N] le 24 octobre 2019 doit être considérée comme un aléa thérapeutique, lequel ne peut être assimilé à un accident médical au sens du contrat d'assurance dit 'garantie des accidents de la vie' souscrit auprès de la SA BPCE Assurances , que le contrat garantie l'accident médical lorsqu'un acte ou un ensemble d'actes à caractère médical a eu sur le bénéficiaire des conséquences dommageables pour sa santé, anormales et indépendantes de l'évolution de l'affection en cause et de l'état antérieur, que l'accident est causée par une opération risquée et liée à un état antérieur parfaitement connu et sans aléa, que monsieur [J] est susceptible d'être indemnisé par un contrat Garantie Accident de la Vie par la BPCE et par ALLIANZ, qu'il y a lieu en conséquence de surseoir à statuer, que monsieur [J] ne pouvant percevoir deux fois la même indemnisation , que l'indemnisation doit être partagée entre les assureurs , qu'il relève d'une bonne administration de la justice que la Cour puisse se dessaisir au profit de la juridiction de degré inférieur en invitant monsieur [J] à saisir le tribunal judiciaire afin qu'il soit statué sur l'indemnisation de son préjudice au contradictoire d'ALLIANZ et de BPCE , que dans l'hypothèse selon laquelle la Cour devait entrer en voie de condamnation, il conviendra d'observer à titre préliminaire que l'appelant ne réclame, comme en première instance, que le règlement de la tierce personne permanente, Toute autre demande étant irrecevable comme étant nouvelle,.

Ensuite, l'appelant ne fournit aucune information au sujet de sa situation professionnelle, ni même au titre de l'aménagement du véhicule que ce chiffrage était censé compenser.

L'assureur offre à titre infiniment subsidiaire pour la période échue du 24/04/2021 au 22/03/2023 37 692 euros et pour la période à échoir à compter du 23/03/2023 : 494 064 euros.

L'affaire a été fixée à l'audience du 11 Octobre 2022.

MOTIVATION

Les parties sont liées par un contrat d'assurance dit « garantie des accidents de la vie » souscrit par monsieur [J] le 13 septembre 2018 au bénéfice de lui-même et de sa famille.

Un avenant du 21/09/2018 mentionne finalement en qualité de bénéficiaires monsieur [J] et son épouse.

Les conditions particulières prévoient que la garantie couvre les préjudices consécutifs à des accidents de la vie privée, des accidents médicaux, des accidents dus à une agression ou un attentat, à une catastrophe naturelle ou technologique.

Le 06 novembre 2019, monsieur [J] a fait une déclaration de sinistre suite à un accident médical survenu le 24 octobre 2019 à l'occasion de l'exérèse d'un lipome compressif du cône médullaire dont l'existence était connue depuis des années. Il a ainsi sollicité la garantie « accident médical » de l'assureur en raison d'une paralysie complète au réveil de l'opération dont il garde des séquelles.

Le médecin expert désigné par ordonnance de référé du 18 septembre 2020, a déposé un rapport le 25 octobre 2021 précisant la part des symptômes qu'il impute à l'acte chirurgical.

La BPCE ASSURANCES refuse sa garantie, le préjudice ne résultant pas d'un accident médical mais de l'aléa thérapeutique comme l'a jugé la juridiction de première instance qui n'a pas statué ultra petita mais a fait application des dispositions de l'article 12 du code de procédure civile.

L'intimée reprend l'argumentation du premier juge qui a estimé que la chirurgie à visée décompressive réalisée en l'espèce ne peut être considéré comme un évènement extérieur, imprévu et soudain dans la mesure où le geste médical résulte de l'état de santé antérieur de l'appelant et l'aléa thérapeutique ne peut être assimilé à un accident médical au sens des conditions générales du contrat.

A l'inverse monsieur [J] fait valoir que le premier juge a violé les dispositions des articles 4 et 5 du code de procédure civile dans la mesure où il a retenu une argumentation ne figurant pas dans les conclusions des parties, a dénaturé le contrat qui garantit les conséquences des accidents médicaux, soit les conséquences dommageables anormales et indépendantes de l'évolution de l'affection qui a justifié l'acte médical et spécialement chirurgical , que le code de la santé publique définit l'aléa thérapeutique comme un accident médical , une affection iatrogène ou une infection nosocomiale directement imputables à un acte médical et ayant pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci.

Les interprétations du contrat exprimées par les parties étant différentes, il convient de se référer aux conditions générales du contrat d'assurance auxquelles renvoient les conditions particulières acceptées le 13 septembre 2018, celles-ci faisant la loi des parties en définissant les obligations de chacune.

Le contrat prévoit que sont garanties les conséquences des accidents médicaux dont le fait générateur n'est pas antérieur au 1er janvier 2000 causés à l'occasion d'actes chirurgicaux de prévention, de diagnostic, d'exploration, de traitement pratiqués par des médecins et auxiliaires médicaux visés dans la quatrième partie du code de la santé publique.

Il précise qu'il y a accident médical lorsqu'un acte ou un ensemble d'actes à caractère médical a eu sur le bénéficiaire des conséquences dommageables pour sa santé, anormales et indépendantes de l'évolution de l'affection en cause et de l'état antérieur.

Il en résulte que l'accident médical n'est établi que lorsque l'acte médical litigieux a eu des conséquences dommageables à la fois anormales et indépendantes de l'évolution de l'affection dont l'assuré était atteint et de son état antérieur.

Si l'opération subie par monsieur [J] le 24 octobre 2019 résulte d'un état de santé antérieur à la souscription du contrat d'assurance, l'aléa inhérent au contrat d'assurance n'est pas nécessairement exclu ,le fait générateur du dommage n'étant pas la pathologie antérieure, même si elle est nécessairement préexistante, mais l'acte chirurgical ayant eu pour conséquence une pathologie nouvelle ou une aggravation de la pathologie préexistante qui, pas plus que l'aléa thérapeutique ne fait l'objet d' une exclusion de garantie.

La définition de l'accident médical n'exclut pas l'aléa thérapeutique qui n'est pas mentionné dans les dommages non garantis et l'expert indique que les symptômes moteurs sensitifs et algiques dont souffre monsieur [J] depuis son opération sont en rapport avec la complication postopératoire à l'acte médical du 24 octobre 2019 à type de paraplégie, complication connue, décrite dans la littérature et rare (1 à 2%).

Il résulte de la définition du risque et des conclusions du docteur [E] exposées dans son rapport en date du 25 octobre 2021 que l'assureur soutient à tort que les conséquences dommageables subies par monsieur [J] sont liées à l'affection de lipome compressif du cône médullaire découvert à l'âge de 20ans avec une aggravation au fil des années et à son état antérieur, alors que l'évolution neurologique de la maladie est lente ce qui est confirmé par l'attente de 9 années entre l'indication opératoire et l'opération effective , que l'état clinique consécutif à l'opération litigieuse s'est nettement dégradé par rapport au préopératoire et qu'ainsi les lourdes séquelles de la paralysie post opératoire sont la résultante directe de l'intervention chirurgicale du 24 octobre 2019 qui en constitue le fait générateur .

Les conséquences dommageables pour la santé de monsieur [J], anormales et indépendantes de l'évolution de l'affection en cause et de l'état antérieur sont constituées par la paraplégie complète au réveil dont il persiste des conséquences anormales après la consolidation intervenue 18mois après la chirurgie soit des séquelles:

-motrices, sensitives, algiques.

-Génito-sphinctériennes : vessie neurologique nécessitant 6 auto-sondages /jour

Exonération digitale quotidienne

-Retentissement psychologique à type syndrome anxio-dépressif

L'expert précise que sont en rapport avec la complication post opératoire à type de paraplégie, 60% des symptômes moteurs, sensitifs et algiques, 100% des symptômes -Génito-sphinctériennes et du retentissement psychologique.

Par voie de conséquence la demande de monsieur [J] de réparation des séquelles résultant de l'opération du 24 octobre 2019 est bien fondée en son principe et il y a lieu de réformer le jugement de première instance sur ce point.

Sur la demande de dessaisissement et subsidiairement de sursis à statuer

L'assureur demande que la Cour se dessaisisse au profit du tribunal judiciaire de Toulon en vertu du principe du non-cumul de l'indemnisation du préjudice.

La Cour d'appel ne peut se dessaisir au bénéfice d'une juridiction de première instance et inviter un appelant à saisir ainsi le tribunal judiciaire de Toulon pour qu'il soit statué sur une demande d'indemnisation dont il a été déjà saisi.

Elle ne peut davantage surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure opposant monsieur [J] et la société Allianz et de l'intervention de la BPCE dans ce litige de première instance, la société Allianz n'étant partie ni au litige ni au contrat objet du présent litige.

De plus, le contrat prévoit un principe de non-cumul des prestations à caractère indemnitaires perçues et à percevoir d'autres organismes et notamment de tout autre contrat d'assurance afin d'éviter l'indemnisation du même préjudice par des organismes différents.

Par voie de conséquence, ces demandes de l'intimé seront rejetées.

Sur la demande d'indemnisation de monsieur [J]

*Aide d'une tierce personne :

Il n'est pas contesté que ce préjudice est garanti dans le contrat.

Monsieur [J] fait des demandes indemnitaires au titre du financement de l'aide d'une tierce personne :

Il indique qu'il a besoin au quotidien de l'aide de son épouse et de son fils mais souhaiterait bénéficier de l'intervention d'un tiers.

En application du principe de la réparation intégrale et quelles que soient les modalités choisies par la victime, le débiteur est tenu d'indemniser le recours à cette aide humaine indispensable qui ne peut être subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

L'expert retient une aide quotidienne de 3 heures non spécialisées et de deux heures spécialisées à titre professionnelle.

Eu égard à la nature de l'aide requise et du handicap qu'elle est destinée à compenser, des tarifs d'aide à domicile non spécialisée en vigueur, l'indemnisation sur la base d'un taux horaire moyen de 18 € sera retenue pour la première période jusqu'à la date de l'arrêt conformément à la demande monsieur [J],

Ainsi, pour la période à compter du 24/04/2021 au 08/12/2022 :33 696€

Ce même calcul doit être fait s'agissant de l'aide à la tierce personne temporaire du 01/02/2020 au 23/04/2021.

Il est ainsi dû de ce chef la somme de 24138 euros.

A compter du 09/12/2022, monsieur [J] souhaite avoir recours à une aide par des professionnels et demande de ce fait un tarif horaire plus important.

Les parties sont également en désaccord sur l'indice de capitalisation à retenir.

Au vu des justificatifs produits, il convient d'allouer à l'appelant de ce chef une somme de

605 968,78€ correspondant à un taux horaire à 21 euros x 412 (365 J + CP) x 23,346(valeur du point)

Monsieur [J] demande au titre de l'assistance tierce personne le financement des frais de l'intervention d'un jardinier à son domicile.

Monsieur [J] produit des factures d'une entreprise NET JARDIN d'un montant de 1050€ par trimestre soit 4200€ par an soit 99 582€ en procédant à la capitalisation comme précédemment.

Il convient de rappeler que le litige n'intervient pas dans le cadre d'une responsabilité délictuelle mais contractuelle.

Par voie de conséquence il convient de se référer au contrat.

Le contrat n'évoque ce type de prestation qu'au titre des garanties d'assistance et en terme de services ponctuels à domicile c'est-à-dire que sur simple appel téléphonique, l'assureur organise les services utiles au bénéficiaire et notamment le petit jardinage (tondre la pelouse, couper une haie ')

Il ne prévoit pas l'indemnisation de ce type de prestations dans le chapitre relatif aux garanties d'indemnisation des accidents de la vie.

Monsieur [J] demande l'indemnisation d'une assistance dans le cadre de l'exercice de son activité professionnelle.

L 'assistance d'une tierce personne ne peut s'appliquer à l'activité professionnelle dès lors qu'elle ne concerne que l'aide apportée à la victime dans l'accomplissement des actes ordinaires de la vie courante (Crim., 27 octobre 2015, n° 14-86.697) et que l'indemnisation a pour origine un contrat garantissant les accidents de la vie.

Cette demande de l'appelant sera rejetée.

*préjudice sexuel :

Cette demande n'est pas nouvelle mais additionnelle puisqu'elle constitue un complément de la demande initiale tendant à l'attribution d'une indemnité en application du même contrat d'assurance et du même sinistre objet du litige (Cour de cassation 10 juillet 2013 N° de pourvoi : 12-16.698)

Toutefois, elle n'a pas été présentée dans le respect des dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile puisqu'elle ne figure pas dans les premières conclusions de monsieur [J] en date du 18 avril 2022.

Elle est ainsi irrecevable.

*frais médicaux :

La prise en charge de ces frais n'est pas prévue par le contrat.

Par voie de conséquence, seuls les frais inclus dans les dépens seront retenus à ce titre.

Sur les autres demandes

Partie perdante, l'assureur paiera les dépens qui incluront les frais d'expertise judiciaire

L'équité commande en outre d'allouer à l'appelant une somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe

Infirme le jugement du 24 mars 2022 du tribunal judiciaire de Toulon

Statuant à nouveau,

Dit l'arrêt commun à la CPAM du Puy-de-Dôme

Dit que la BPCE Assurances doit à monsieur [K] [J] sa garantie au titre du contrat « accident de la vie » souscrit le 1er septembre 2018 pour le sinistre constitué par les conséquences dommageables de l'opération pratiquée le 24 octobre 2019

Déboute La BPCE de sa demande de dessaisissement de la Cour d'appel au profit du tribunal judiciaire de Toulon en raison de la connexité existante avec un litige pendant devant cette juridiction entre monsieur [K] [J] et la SA ALLIANZ

Déboute la BPCE de sa demande de sursis à statuer en raison de la connexité existante avec un litige pendant devant cette juridiction entre monsieur [K] [J] et la SA ALLIANZ

Condamne la BPCE à payer à monsieur [K] [J] en réparation du sinistre constituée par les conséquences dommageables de l'opération pratiquée le 24 octobre 2019 les sommes suivantes au titre de l'aide tierce personne :

- aide tierce personne à compter du 01/02/2020 au 23/04/2021: 24138 euros

-aide tierce personne du 24/04/2021 au jour du jugement:33696 euros

-aide tierce personne à compter du 09/12/2022: 605 968,78 euros

Dit irrecevable la demande de monsieur [K] [J] d'indemnisation du préjudice sexuel résultant de l'opération pratiquée le 24 octobre 2019 ;

Déboute monsieur [K] [J] de sa demande de remboursement des frais médicaux ;

Condamne la BPCE à payer à monsieur [K] [J] la somme de 4000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la BPCE à payer les entiers dépens d'appel et de première instance dont distraction au profit de la SCP TOLLINCHI VIGNERON BUJOLI TOLLINCHI qui en a fait l'avance.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022,

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 22/05446
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;22.05446 ?
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