COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 08 DECEMBRE 2022
N° 2022/821
Rôle N° RG 21/13629 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIED2
S.A.S. NOVELLIPSE
C/
SARL HELP
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Paul GUEDJ
Me Roselyne SIMON-THIBAUD
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du TJ de NICE en date du 16 Septembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/00339.
APPELANTE
S.A.S. NOVELLIPSE
dont le siège social est [Adresse 1]
représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE,
assistée par Me Nathalie BARBIER, avocat au barreau de TOULON
INTIMEE
SARL HELP
dont le siège social est [Adresse 2]
représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
assistée par Me Célia SUSINI, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 31 Octobre 2022 en audience publique devant la cour composée de :
M. Gilles PACAUD, Président
Mme Catherine OUVREL, Conseillère rapporteur
Mme Angélique NETO, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Caroline BURON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022,
Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Caroline BURON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
La SARL Help exerce une activité de transports routiers de fret interurbains sur la commune de [Localité 5]. Dans le cadre de son activité de remorquage, la SARL Help a été mandatée par le commissariat de [Localité 5] le 28 janvier 2020 aux fins d'enlèvement d'un véhicule de marque Renault immatriculé [Immatriculation 4].
La SARL Help a ensuite réclamé à la SAS Novellipse, dont elle indique qu'elle est la propriétaire du véhicule litigieux, le paiement des frais relatifs à cet enlèvement et au gardiennage du véhicule ainsi qu'à son retrait de ses locaux, soit 13 285,90 € TTC.
Par ordonnance en date du 16 septembre 2021, sur saisine de la SARL Help, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice a :
retenu sa compétence et rejeté l'exception d'incompétence formée par la SAS Novellipse,
rejeté la fin de non recevoir formée par la SAS Novellipse concernant le manque de qualité à agir de celle-ci,
rejeté la demande de réouverture des débats, celle-ci ne se justifiant pas à ce stade de la procédure,
dit qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de déclarer abandonné un véhicule,
autorisé la SARL Help à faire procéder à l'enlèvement du véhicule appartenant à la SAS Novellipse, de marque Renault, immatriculé [Immatriculation 4], afin de le faire stationner dans un lieu autre aux frais, risques et périls de la SAS Novellipse,
condamné la SAS Novellipse à payer à la SARL Help la somme provisionnelle de 13 285,90 €,
condamné la SAS Novellipse à payer à la SARL Help la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Selon déclaration reçue au greffe le 24 septembre 2021, la SAS Novellipse a interjeté appel de la décision, l'appel portant sur l'annulation de la décision et la réformation de toutes les dispositions de l'ordonnance déférée dûment reprises.
Par dernières conclusions transmises le 13 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SAS Novellipse demande à la cour :
d'annuler l'ordonnance entreprise pour violation des règles de compétence d'attribution et violation du principe du contradictoire,
à défaut, de réformer l'ordonnance entreprise du chef d'erreur sur la personne de la défenderesse et de juger irrecevables les demandes de la SARL Help envers elle,
de débouter la SARL Help de toute demande contre elle,
En tout état de cause :
de condamner la SARL Help à lui payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
de juger qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées, le montant des sommes retenues par l'huissier de justice en application de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 sera porté à la charge de la SARL Help en plus de l'article 700 du code de procédure civile,
de condamner la SARL Help au paiement des dépens de première instance et d'appel, avec distraction.
La SAS Novellipse sollicite, en premier lieu, l'annulation de l'ordonnance entreprise. Elle dénonce, d'une part, la violation des règles de compétence d'attribution, au regard des articles 33 du code de procédure civile, et L 721-3 du code de commerce, dans la mesure où seul le tribunal de commerce est compétent pour connaître du litige qui oppose deux sociétés commerciales dans le cadre des actions relatives à la vie sociale. Elle ajoute que les actes faits par une société à forme commerciale, même s'ils sont de nature civile, sont à son égard des actes de commerce. En l'occurrence, elle soutient que le remorquage et le gardiennage d'un véhicule relèvent précisément de l'objet de la SARL Help et constitue donc une activité commerciale, le litige opposant en outre ici deux sociétés à caractère commercial. Elle indique encore que l'activité de transport est une activité de commerce par nature. Elle en déduit que seul le tribunal de commerce est compétent et que le premier juge a violé cette compétence exclusive, de sorte que l'ordonnance doit être annulée.
D'autre part, la SAS Novellipse entend que l'ordonnance soit annulée pour violation manifeste du principe du contradictoire, sur le fondement de l'article 78 du code de procédure civile. Elle fait valoir que le juge qui entend rejeter une exception d'incompétence et statuer au fond dans une même décision, doit, préalablement, mettre les parties en demeure de conclure sur le fond si elles ne l'ont déjà fait. Or, elle dénonce le refus de réouverture des débats sollicité auprès du premier juge qui n'a pas retenu l'exception d'incompétence, seule développée par elle dans ses écritures, ne lui permettant dès lors pas de se défendre au fond, violant le principe de la contradiction.
En deuxième lieu, la SAS Novellipse soulève l'irrecevabilité de la demande de la SARL Help à son encontre pour défaut de qualité et d'intérêt à agir, sur le fondement des articles 32 et 122 du code de procédure civile. En effet, elle fait valoir qu'elle a cédé le véhicule en cause dès le 30 septembre 2019 à la société DB Auto, et produit la déclaration de cession et le certificat de vente, de sorte qu'elle n'était plus, même lors de l'enlèvement du véhicule, la propriétaire de celle-ci. Elle fournit le bon de commande de ce véhicule d'occasion au sein d'un lot de véhicules en date du 28 septembre 2019, la facture du 30 septembre 2019 et le mail du 4 octobre 2019 de bonne réception du prix de vente du lot, comprenant le véhicule litigieux. De même, elle verse au dossier la fiche d'identification du véhicule. Elle en déduit qu'elle ne peut en rien être mise en cause dans ce litige, ni condamnée.
À titre subsidiaire, la SAS Novellipse entend que l'ordonnance entreprise soit réformée, faute de trouble manifestement illicite constitué et en l'état des contestations manifestement sérieuses qui s'opposent à tout octroi de provision.
Par dernières conclusions transmises le 6 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SARL Help sollicite de la cour qu'elle :
confirme l'ordonnance entreprise,
juge que le tribunal judiciaire de Nice statuant en référé était compétent pour connaître du litige,
juge que la SAS Novellipse ne rapporte pas la preuve de la cession du véhicule litigieux,
juge que la SAS Novellipse était le propriétaire officiel du véhicule au moment de son remorquage,
déboute la SAS Novellipse de ses demandes,
Sur le trouble manifestement illicite :
prononce que le gardiennage prolongé du véhicule de la SAS Novellipse lui cause un trouble de jouissance,
dise que ce trouble de jouissance constitue un trouble manifestement illicite,
ordonne à la SAS Novellipse de procéder à l'enlèvement du véhicule de marque Renault, immatriculé [Immatriculation 4] aux frais, risque et périls de la SAS Novellipse,
à défaut, déclare le véhicule abandonné,
l'autorise à faire procéder à l'enlèvement du véhicule appartenant à la SAS Novellipse aux frais, risques et périls de cette dernière,
Sur le paiement d'une provision :
déclare non sérieusement contestable l'obligation de la SAS Novellipse,
condamne la SAS Novellipse à lui verser une somme provisionnelle de 13 285,90 € TTC arrêtée au 16 décembre 2020, et à valoir sur sa créance décomposée comme suit :
- frais de remorquage : 248,75 € HT,
- frais de mise à disposition : 80,83 € HT,
- frais de gardiennage : 33 € HT par jour, soit 10 692 € HT depuis le 28 janvier 2020 (324 jours),
- courrier recommandé et simple : 50 € HT,
En tout état de cause :
déboute la SAS Novellipse de ses demandes,
renvoie au fond en cas de contestation sur le fondement de l'article 837 du code de procédure civile,
condamne la SAS Novellipse à lui payer 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
La SARL Help soutient que son intervention sur réquisition de la force publique a conduit à un dépôt nécessaire, au sens de l'article 1948 du code civil, de sorte que les frais de gardiennages sont dus par le déposant, même en l'absence de tout contrat. Elle explique avoir obtenu des condamnations à paiement contre les propriétaires des véhicules dans une trentaine de dossiers, dans le même cadre qu'ici.
S'agissant de la compétence matérielle du juge des référés de Nice, la SARL Help soutient que les présents frais de gardiennage du véhicule, sur réquisition des forces de l'ordre, ne constitue pas un acte de commerce, et ne répondent pas à un acte de commerce au sens de l'article L 110-1 du code de commerce, les deux sociétés n'ayant pas agi dans le cadre d'une activité commerciale commune. Elle en déduit l'absence de compétence exclusive du tribunal de commerce, et donc la compétence générale du tribunal judiciaire.
La SARL Help conteste toute violation du principe de la contradiction alors que la SAS Novellipse a bénéficié de trois renvois pour conclure, notamment au fond, et s'en est abstenue. En tout état de cause, l'intimée fait valoir que l'appelante a pu faire entendre ses arguments devant la cour, de sorte qu'elle ne subit aucun préjudice.
S'agissant de la fin de non recevoir invoquée par la SAS Novellipse, la SARL Help se fonde sur l'article R 322-4 du code de la route pour soutenir que les documents produits par l'appelante (bon de commande, facture et certificat de cession) sont insuffisants pour rapporter la preuve de ce que la SAS Novellipse ne serait pas propriétaire du véhicule en cause, faute de preuve de la réalisation des formalités administratives obligatoires, et notamment faute de déclaration de cession auprès de la préfecture, et faute de production de la carte grise barrée, ainsi que de réalisation du contrôle technique du véhicule. Lors de l'enlèvement du véhicule, il est apparu que la SAS Novellipse était toujours enregistrée comme propriétaire du véhicule au système d'immatriculation des véhicules, consultés par les services de police.
La SARL Help invoque un trouble manifestement illicite dans la mesure où le véhicule en cause encombre ses locaux depuis le 28 janvier 2020, ce qui constitue un trouble de jouissance.
La SARL Help soutient par ailleurs détenir une créance non sérieusement contestable à l'endroit de la SAS Novellipse au titre des frais engagés. Actualisés au 10 novembre 2021, elle invoque des frais à hauteur de 26 314,30 € TTC.
L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 17 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour d'appel précise, à titre liminaire, qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de 'constatations', de 'prise d'acte' ou de 'dire et juger' qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu'elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques.
Sur les demandes d'annulation de l'ordonnance entreprise
Au titre de la violation de la compétence d'attribution du tribunal de commerce
En vertu de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.
La SAS Novellipse sollicite ici tout d'abord l'annulation de la décision entreprise pour violation de la compétence exclusive du tribunal de commerce, soutenant que le présent litige en relève.
En effet, l'incompétence du tribunal judiciaire de Nice statuant en référé avait été soulevée devant le premier juge qui a écarté cette exception de procédure pour se déclarer compétent, retenant que le contentieux ne relevait pas ici du domaine de la compétence exclusive du tribunal de commerce, les actes en cause ne constituant pas des actes de commerce au sens des articles L 211-3 du code de l'organisation judiciaire et L 721-3 du code de commerce.
Au lieu de critiquer la décision entreprise en sollicitant l'infirmation quant à l'appréciation de cette exception de procédure, la SAS Novellipse en sollicite l'annulation pour ce motif. Or, il ne s'agit ici ni d'une irrégularité formelle de la décision, ni d'une critique des conditions dans lesquelles le procès s'est déroulé, ni d'une violation d'un principe fondamental du droit, cette prétention étant la critique d'une exception de procédure et non une cause d'annulation de la décision entreprise.
Ainsi, en l'état de la prétention formulée par la SAS Novellipse et limitant la question de la compétence dans le cadre d'une demande d'annulation de la décision, elle ne peut prospérer et la demande d'annulation de la décision entreprise pour ce motif ne peut qu'être rejetée.
Au titre de la violation du contradictoire
En vertu de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.
Par application de l'article 78 du code de procédure civile, le juge peut, dans un même jugement, mais par des dispositions distinctes, se déclarer compétent et statuer sur le fond du litige, après avoir, le cas échéant, mis préalablement les parties en demeure de conclure sur le fond.
En l'occurrence, il résulte de la décision entreprise que la SARL Help a assigné la SAS Novellipse devant le juge des référés par acte du 11 février 2021, l'affaire étant évoquée lors de l'audience de plaidoiries du 2 septembre 2021, et mise en délibéré au 16 septembre 2021. Le premier juge a repris les prétentions des parties aux termes desquelles il apparaît clairement que la SAS Novellipse a soulevé l'incompétence du juge des référés du tribunal judiciaire de Nice, argué d'une fin de non recevoir à titre subsidiaire, et à titre plus subsidiaire, a demandé la réouverture des débats afin de pouvoir conclure au fond. Après avoir rejeté l'exception d'incompétence et écarté la fin de non recevoir, le premier juge a estimé qu'il n'apparaissait 'pas opportun, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice et du respect d'un délai raisonnable d'obtention d'un jugement, de rouvrir les débats, la SAS Novellipse ayant eu plusieurs fois le temps de faire valoir ses arguments au fond, que ce soit suite aux lettres recommandées avec accusé de réception qui lui furent adressées par la SARL Help mais également au cours de la procédure devant le juge des référés, de sorte qu'une réouverture des débats ne ferait qu'allonger inutilement une procédure par le seul fait de la mauvaise foi de la SAS Novellipse'.
Le temps écoulé préalablement à l'introduction de la procédure, dans le cadre de potentiels échanges entre les parties, ne peut être pris en compte dans l'appréciation du respect du contradictoire par le juge.
Ce faisant, par sa motivation, et malgré le caractère dilatoire du positionnement de la SAS Novellipse qui aurait pu conclure au fond en même temps que sur la compétence, le premier juge qui n'a fait état d'aucun renvoi de ce chef, n'a pas caractérisé la mauvaise foi prêtée à l'appelante et ne lui a pas permis de présenter sa défense au fond dès lors qu'il retenait la compétence de la juridiction saisie, a violé le principe de la contradiction et les articles sus-visés, ce d'autant qu'une demande de réouverture des débats lui était présentée. Dès lors, l'annulation de l'ordonnance entreprise s'impose.
Cependant, en application de l'article 562 du code de procédure civile, la dévolution du litige devant la cour s'opère pour le tout lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. Dès lors, en l'espèce, à raison de l'effet dévolutif du litige, la cour apprécie à son tour les prétentions émises par les parties.
Sur la demande d'enlèvement du véhicule litigieux
Par application de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le trouble manifestement illicite se caractérise par toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. En outre, aucune condition d'urgence ou d'absence de contestation sérieuse n'est requise pour l'application de l'article susvisé.
Recevabilité
En vertu de l'article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.
En application de l'article 122 du Code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
En l'espèce, la SAS Novellipse soulève le défaut d'intérêt à agir de la SARL Help à son encontre et son défaut d'intérêt à défendre, comme n'étant plus propriétaire du véhicule dont l'enlèvement et les frais de gardiennage sont sollicités.
Or, l'appréciation de cette qualité de propriétaire ou non du véhicule rejoint le bien fondé de la demande et s'apprécie donc dans ce cadre, sans qu'aucune irrecevabilité à proprement parler ne puisse perdurer.
Bien fondé
Il résulte des dispositions de l'article 1915 du code civil que le dépôt, en général est un acte par lequel on reçoit la chose d'autrui, à la charge de la garder et de la restituer en nature. Ce dépôt peut être initié par un tiers pour le compte du propriétaire de la chose.
Aux termes de l'article 1917 du même code, le dépôt proprement dit est un acte essentiellement gratuit. Aux termes de l'article 1920 de ce code, le dépôt est volontaire ou nécessaire.
L'article 1949 du même code dispose que le dépôt nécessaire est celui qui a été forcé par quelque accident, tel qu'un incendie, une ruine, un pillage, un naufrage ou autre événement imprévu. L'article 1947 du même code prévoit que la personne qui a fait le dépôt est tenue de rembourser au dépositaire les dépenses qu'il a faites pour la conservation de la chose déposée, et de l'indemniser de toutes les pertes que le dépôt peut lui avoir occasionnées.
Aux termes de l'article 2286 du code civil, peut se prévaloir d'un droit de rétention (...) celui dont la créance impayée est née à l'occasion de la détention de la chose (...).
Le contrat de dépôt auprès d'un garagiste, accessoire à un contrat d'entreprise, est présumé fait à titre onéreux de sorte qu'il appartient au déposant de rapporter la preuve de son caractère gratuit. Toutefois, en l'absence de contrat d'entreprise accessoire à ce dépôt, ce dernier est présumé fait à titre gratuit. Il appartient alors au dépositaire de rapporter la preuve de son caractère onéreux.
Aucune des parties n'invoque, ni ne revendique l'existence d'un contrat d'entreprise (ex : contrat de réparation du véhicule) qui serait l'accessoire du dépôt de sorte qu'il appartient à la SARL Help, dépositaire, de rapporter la preuve de l'existence du caractère onéreux du dépôt.
En l'espèce, la SARL Help a procédé à l'enlèvement du véhicule de marque Renault, blanc, immatriculé [Immatriculation 4] et l'a reçu en dépôt sur la demande des services de police de [Localité 5], le véhicule apparaissant dégradé sur la voie publique sans qu'il soit spécifié qu'il s'agisse d'un véhicule volé, accidenté ou détruit par incendie. Dès lors, il importe peu que le propriétaire du véhicule n'ait pas expressément consenti au dépôt de ce véhicule, celui-ci s'analysant en un dépôt nécessaire au sens de l'article 1949 du code civil, et, en vertu de l'article 1951 du même code, étant régi par les mêmes règles que le dépôt volontaire.
La SARL Help justifie avoir adressé à la SAS Novellipse, apparaissant en qualité de propriétaire du véhicule en cause sur l'ordre de mise en garage délivré par les services de police le 28 janvier 2020, des mises en demeure, par lettres recommandées avec accusé de réception, les 28 janvier et 1er décembre 2020, aux fins de venir retirer le dit véhicule et l'informant du caractère onéreux du gardiennage, avec indication des tarifs pratiqués. Ainsi, à tout le moins à compter de ces mises en demeure, le caractère onéreux du dépôt apparaît acquis.
La SARL Help se prévaut du trouble que lui cause la présence du véhicule concerné encombrant son parc et immobilisant indûment une place de stationnement, l'empêchant d'exploiter pleinement son bien.
De son côté, la SAS Novellipse ne remet pas en cause la prise en charge du véhicule de marque Renault, blanc, immatriculé [Immatriculation 4] par la SARL Help, mais conteste sa qualité de propriétaire du véhicule lors même du remorquage de celui-ci.
En effet, la SAS Novellipse produit une déclaration de cession portant sur ce véhicule, datée du 30 septembre 2019 à 12 heures au bénéfice d'une société DB Auto, située [Adresse 3], cette déclaration et le certificat de vente étant signés des deux sociétés, venderesse et acheteuse. L'appelante justifie également d'un bon de commande de véhicules d'occasion, établi le 28 septembre 2019, au bénéfice de la société DB Auto auprès de la SAS Novellipse, concernant 5 véhicules, dont le véhicule ici en cause, pour un prix total de 11 801 €, le véhicule litigieux étant cédé pour l'euro symbolique puisque destiné à la destruction. L'appelante verse au dossier la facture acquittée par la société DB Auto au titre de ce même véhicule, en date du 30 septembre 2019, et justifie également de la perception du virement de la somme de 11 801 € correspondant au bon de commande précité.
La SARL Help prétend que cette cession ne peut en aucun cas valoir transfert de propriété en ce que les formalités administratives de cession, et notamment la déclaration en préfecture, n'ont pas été réalisées puisque le propriétaire du véhicule a été identifié par les services de police, sur consultation du service d'immatriculation des véhicules, comme étant la SAS Novellipse. L'intimée invoque la violation de l'article R 322-4 du code de la route qui, certes, rend obligatoire une telle obligation, mais ne la sanctionne que dans le cadre d'une contravention de quatrième classe.
En tout état de cause, il appert qu'au jour de l'enlèvement du véhicule, soit le 28 janvier 2020, une contestation réelle existe quant au véritable propriétaire du véhicule de marque Renault, blanc, immatriculé [Immatriculation 4], de sorte que le trouble manifestement illicite dont se prévaut la SARL Help envers la SAS Novellipse n'est pas établi avec l'évidence requise en référé.
Dans ces conditions, il ne peut être fait droit à la demande de la SARL Help tendant à l'enlèvement du véhicule litigieux.
De même, la prétention tendant à ce que le véhicule soit déclaré abandonné, présentant un caractère définitif, excède manifestement les pouvoirs du juge des référés.
Sur la demande de provision au titre des frais d'enlèvement et de gardiennage
Par application de l'article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Il convient de rappeler qu'il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant, qui n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.
En l'occurrence, force est de retenir le doute suscité sur le fait que la SAS Novellipse soit le véritable propriétaire du véhicule en cause lors de son remorquage et de sa réception dans les locaux de la SARL Help le 28 janvier 2020, à raison de la production ci-dessus visée de la déclaration de cession du 30 septembre 2019, du certificat de vente du même jour, en conformité avec le bon de commande émis deux jours auparavant au bénéfice du même vendeur, la société DB Auto, et au vu du paiement du prix de vente. Dès lors, il s'en déduit l'existence d'une contestation sérieuse faisant obstacle à la demande en paiement provisionnel présentée par la SARL Help au titre des frais d'enlèvement et de gardiennage du véhicule de marque Renault, blanc, immatriculé [Immatriculation 4], en exécution d'un contrat de dépôt nécessaire à titre onéreux.
Cette prétention ne peut donc qu'être rejetée en référé.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
La SARL Help qui succombe au litige sera déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de la SAS Novellipse les frais, non compris dans les dépens, qu'elle a exposés pour sa défense.
Une indemnité de 1 500 € se trouve justifiée à son profit en appel au titre des frais irrépétibles.
L'intimée supportera en outre les dépens de première instance et d'appel.
En revanche, la demande de l'appelante tendant à ce que le montant des sommes retenues par l'huissier de justice, en cas d'exécution forcée, en application de l'article 10 du décret n°16-1080 du 12 décembre 1996, modifié par le décret du 8 mars 2001 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale, ne saurait prospérer, d'une part en ce que ce texte a été abrogé par le décret n°2016-230 du 26 février 2016 et repris à l'article A 444-32 du code de commerce, et, d'autre part, en ce que ces frais ne constituent pas des dépens mais sont compris dans les frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Rejette tout demande d'annulation de l'ordonnance entreprise pour violation des règles de compétence,
Annule l'ordonnance entreprise rendue le 16 septembre 2021 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice sous le n°RG 21 / 339,
Statuant à nouveau, par l'effet dévolutif de l'appel :
Ecarte toute fin de non recevoir,
Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de la SARL Help tendant à faire procéder à l'enlèvement du véhicule de marque Renault, blanc, immatriculé [Immatriculation 4], afin de le faire stationner en un autre lieu aux frais, risques et périls de la SAS Novellipse,
Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande tendant à déclarer abandonné le véhicule de marque Renault, blanc, immatriculé [Immatriculation 4],
Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de la SARL Help tendant au paiement par la SAS Novellipse d'une somme provisionnelle de 13 285,90 € au titre des frais d'enlèvement et de gardiennage du véhicule de marque Renault, blanc, immatriculé [Immatriculation 4],
Condamne la SARL Help à payer à la SAS Novellipse la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute la SARL Help de sa demande sur ce même fondement,
Condamne la SARL Help au paiement des dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Dit que les dépens ne comprennent pas les prestations de recouvrement ou d'encaissement par l'huissier de justice en cas d'exécution forcée.
La Greffière Le Président