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08/12/2022 | FRANCE | N°21/03696

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-2, 08 décembre 2022, 21/03696


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2



ARRÊT DE JONCTION ET AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022



N° 2022/538













Rôle N° RG 21/03696 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHC5X



Jonction avec le RG 21/04280





SCP BR & ASSOCIES





C/



[J] [P]















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Sandra JUSTON



Me Maud DAVAL-GUEDJ



Me F

rédéric DURAND









Décision déférée à la Cour :



Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Toulon en date du 18 Février 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 18/00659.





APPELANTE (dans le RG 21/03696)

ET INTIMEE (dans le RG 21/04280)



SCP BR & ASSOCI...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-2

ARRÊT DE JONCTION ET AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

N° 2022/538

Rôle N° RG 21/03696 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHC5X

Jonction avec le RG 21/04280

SCP BR & ASSOCIES

C/

[J] [P]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Sandra JUSTON

Me Maud DAVAL-GUEDJ

Me Frédéric DURAND

Décision déférée à la Cour :

Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Toulon en date du 18 Février 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 18/00659.

APPELANTE (dans le RG 21/03696)

ET INTIMEE (dans le RG 21/04280)

SCP BR & ASSOCIES

Prise en la personne de Monsieur [X] [F], agissant en s a qualité de mandataire ad'hoc de Monsieur [R] [P] né l e [Date naissance 1] 1947 à [Localité 10] (ALGERIE)

dont le siège est sis [Adresse 4]

représentée par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me Corinne BONVINO-ORDIONI de l'ASSOCIATION C.BONVINO ORDIONI V.ORDIONI, avocat au barreau de TOULON, plaidant

INTIMEE (dans le RG 21/03696)

ET APPELANT (dans le RG 21/04280)

Maître [E] [W]

demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Maud DAVAL-GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Maria DA SILVA du Cabinet GARRY et Associés, avocat au barreau de TOULON, plaidant

INTIMEE (dans le RG 21/03696 et RG 21/04280)

Madame [J] [P]

née le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 10] (Algérie), demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Frédéric DURAND, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 12 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Madame Muriel VASSAIL, Conseiller a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Michèle LIS-SCHAAL, Président de chambre

Madame Muriel VASSAIL, Conseiller

Madame Agnès VADROT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022,

Signé par Madame Michèle LIS-SCHAAL, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS PROCEDURES ET PRETENTIONS DES PARTIES

M.[R] [P], exploitant agricole, a fait l'objet d'une liquidation judiciaire prononcée par jugement rendu le 4 octobre 1990 par le tribunal de grande instance de TOULON.

M.[K] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

M.[P] était propriétaire d'une parcelle de terre située sur la commune de [Localité 7], lieudit[Localité 8]n cadastrée section [Cadastre 6].

Par ordonnance du 2 juillet 2014, le juge commissaire du tribunal de grande instance de TOULON a autorisé la SCP BR & ASSOCIES, venant aux droits de M. [K], à vendre de gré à gré cette parcelle de terre à Mme [J] [P], s'ur de M. [P], pour le prix de 50 316 euros.

Au regard du passif véritablement admis le mandataire liquidateur a formé opposition à cette ordonnance pour faire constater que le prix de vente ne couvrirait pas le passif.

Le juge commissaire a fait droit à sa demande par ordonnance du 2 avril 2015 de sorte qu'à compter de cette date la vente pouvait intervenir.

Or, à la suite d'un compromis de vente du 20 septembre 2013, la vente avait été régularisée par acte authentique reçu le 25 mars 2014 en l'étude de maître [E] [W], notaire au [Localité 9], soit avant l'autorisation donnée par le juge commissaire dans sa décision du 2 juillet 2014.

Sur assignation délivrée à la requête de la SCP BR & ASSOCIES, prise en la personne de M. [F], venant aux droits de M. [K], par jugement du 18 février 2021, le tribunal judiciaire de TOULON a :

-reçu la SCP BR & ASSOCIES, prise en la personne de M. [F], en son intervention volontaire en qualité de mandataire ad hoc de M. [P],

-déclaré inopposable à la SCP BR & ASSOCIES ès qualités la vente de la parcelle située [Localité 7], lieudit [Localité 8], cadastrée section [Cadastre 6] intervenue le 25 mars 2014,

-condamné maître [E] [W] à payer à la SCP BR & ASSOCIES, prise en la personne de M. [F], ès qualités de mandataire ad hoc de M. [P], la somme de 50 316 euros,

-débouté la SCP BR & ASSOCIES de sa demande à l'encontre de Mme [P],

-débouté Mme [P] de ses demandes de dommages et intérêts,

-dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

-condamné maître [W] aux dépens et à payer à la SCP BR & ASSOCIES ès qualités et à Mme [P] 1 500 euros du chef de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour prendre leur décision les premiers juges ont retenu que :

-alors que le notaire est tenu de procéder aux vérifications des déclarations du vendeur afin d'assurer la validité ou l'efficacité de l'acte, maître [W] n'a rien fait,

-il n'a pas pris attache avec les greffes du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance de TOULON pour obtenir un certificat de non-faillite, il ne s'est pas rapproché du BODACC par courrier à défaut d'avoir accès aux renseignements en ligne s'agissant d'une faillite ouverte en 1990,

-la vente est inopposable à la procédure collective en application de l'article 152 de la loi du 25 janvier 1985,

-cette inopposabilité est directement liée à la négligence de maître [W] qui engage sa responsabilité et lui impose réparation,

-maître [W] doit donc être condamné à verser à la SCP BR & ASSOCIES ès qualités le prix de la vente, soit la somme de 50 316 euros, qu'elle était seule habilitée à recevoir et qui a échappé à l'actif de la procédure collective de M. [P],

-la SCP BR & ASSOCIES ès qualités ne rapporte pas la preuve d'une faute qui aurait pu être commise par Mme [P] dans la mesure où elle :

-n'est pas une professionnelle du droit,

-n'était pas censée connaître les conséquences juridiques d'une liquidation judiciaire ouverte en 1990 par rapport à la vente objet du litige conclue le 25 mars 2014,

-en qualité d'acheteuse de bonne foi aucune faute ne peut être reprochée à Mme [P],

-Mme [P] qui ne rapporte pas la preuve des préjudices de jouissance, économique et moral qu'elle allègue, sera déboutée de ses demandes de dommages et intérêts.

La SCP BR & ASSOCIES, agissant en qualité de mandataire ad hoc de M. [R] [P], a fait appel de cette décision le 11 mars 2021, intimant seulement Mme [P], elle a limité son appel aux chefs du jugement qui l'ont déboutée de sa demande tendant à voir Mme [P] condamnée avec maître [W] à lui payer 50 316 euros.

Cet appel a été enrôlé sous le numéro de RG 21-3696.

Le 22 mars 2021, maître [E] [W] a également fait appel du jugement du 18 février 2021, intimant la SCP BR & ASSOCIES et Mme [P], il a limité son appel aux dispositions du jugement qui :

-ont déclaré la vente inopposable à la procédure collective de M. [P],

-l'ont condamné aux dépens et à payer :

-à la SCP BR & ASSOCIES ès qualités, la somme de 50 316 euros correspondant aux prix de vente, et la somme de 1 500 euros du chef de l'article 700 du code de procédure civile,

-à Mme [P] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Cet appel a été enrôlé sous le numéro de RG 21-4280.

Par ordonnances d'incident du 5 mai 2022, le magistrat délégué a, dans chacun des deux dossiers :

-déclaré irrecevables les conclusions déposées au RPVA le 10 août 2021 par Mme [P] ainsi que toutes les pièces et conclusions ultérieures,

-renvoyé la cause et les parties à l'audience du fond du 12 octobre 2022,

-précisé que la procédure serait clôturée le 15 septembre 2022,

-débouté maître [W] et la SCP BR & ASSOCIES ès qualités de leur demande au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Mme [P] aux dépens de l'incident avec application de l'article 699 du code de procédure civile au bénéfice du conseil de la SCP BR & ASSOCIES.

Dans ses dernières conclusions, notifiées au RPVA le 9 juin 2022, maître [W] demande à la cour de dire et juger un certain nombre de choses qui sont autant de moyens et de :

-réformer le jugement attaqué en ce qu'il a retenu sa responsabilité et en ce qu'il l'a condamné à payer 50 316 euros correspondant aux prix de vente,

-débouter la SCP BR & ASSOCIES, prise en la personne de M. [F], en qualité de liquidateur de M. [P], de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées contre lui,

-débouter Mme [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions dirigées contre lui,

-le mettre hors de cause,

-condamner tout succombant aux dépens avec distraction et à lui payer 3 000 euros du chef de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, déposées au RPVA le 6 juillet 2022, la SCP BR & ASSOCIES ès qualités de mandataire ad hoc de M. [P] demande à la cour de ;

-joindre son appel enrôlé sous le numéro RG 21-3696 et l'appel de maître [W], enrôlé sous le numéro de RG 21-4280,

-débouter maître [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-confirmer le jugement frappé d'appel en ce qu'il a retenu la responsabilité de maître [W],

-condamner maître [W] à lui payer :

-2 000 euros de dommages et intérêts pour appel abusif,

-3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-infirmer le jugement rendu le 18 février 2021 par le tribunal judiciaire de TOULON en ce qu'il l'a déboutée de sa demande dirigée contre Mme [P],

-condamner Mme [P] à lui payer 50 316 euros correspondant aux prix de vente de la parcelle située à [Localité 7], lieudit [Localité 8] cadastrée section [Cadastre 6],

-débouter Mme [P] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-condamner Mme [P] aux dépens et à lui payer 2 000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

Les procédures ont été clôturées le 15 septembre 2022 avec rappel de la date de fixation.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il conviendra de se référer aux écritures des parties pour l'exposé de leurs moyens de fait et de droit.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la jonction des procédures

Considérant l'identité de cause et de parties, il procède d'une bonne administration de la justice d'ordonner la jonction des procédures RG 21-03696 et RG 21-04280 sous le numéro de RG 21-03696.

Sur les limites des appels

Eu égard aux appels formés par maître [W] et la SCP BR & ASSOCIES et à l'irrecevabilité des conclusions de Mme [P], la cour n'est pas saisie d'une contestation du jugement frappé d'appel en ce qu'il a débouté Mme [P] de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les mérites des appels

Il n'est pas remis en cause que, conformément à l'article 152 de la loi du 25 janvier 1985, applicable aux faits de l'espèce :

-le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement du débiteur quant à l'administration et la disposition de ses biens tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée,

-les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés par le liquidateur pendant toute la durée de la liquidation judiciaire.

Il résulte de l'application de ce texte que :

-les actes passés par le débiteur seul ne sont pas nuls mais inopposables à sa procédure collective,

-les effets du dessaisissement se produisent même à l'égard des tiers de bonne foi,

-au regard du dessaisissement, le liquidateur peut poursuivre l'inopposabilité de la vente tant à l'encontre de l'acquéreur que du notaire.

S'agissant de l'appel formé par maître [W]

Maître [W] considère que les premiers juges n'ont pas pu valablement retenir de faute à son encontre et que sa responsabilité ne saurait être engagée aux motifs que :

-le vendeur a expressément déclaré dans l'acte n'avoir jamais été en redressement ou liquidation judiciaire,

-aucun élément objectif du dossier ne lui a permis de douter de cette déclaration et de procéder à des investigations supplémentaires,

-l'analyse des documents en sa possession n'a pas révélé l'existence d'une quelconque procédure à l'encontre de M. [P], l'acte de partage intervenu le 7 juin 2005 entre M. [P] et sa s'ur ne portant pas mention d'une procédure collective,

-les documents qu'il a requis lui ont permis de vérifier que les divers jugements et arrêts rendus préalablement à la signature de l'acte de vente n'ont fait l'objet d'aucune publicité auprès du fichier immobilier,

-la jurisprudence intervenue trois mois après la signature de l'acte ne saurait rétroagir à son détriment,

-les moyens d'investigation de l'époque étaient malaisés s'agissant d'une procédure collective ouverte en 1990 puisque :

-le site BODACC publie les actes enregistrés au RCS depuis le 1er janvier 2008,

-le site INFOGREFFE ne renseigne que sur la situation des commerçants et des sociétés alors que M. [P] était agriculteur.

Il poursuit en relevant qu'il ne peut être tenu des négligences commises par le mandataire liquidateur à qui l'on peut reprocher de ne pas avoir tenu compte du compromis de vente régularisé entre M. [P] et sa s'ur alors qu'il en a eu connaissance et que ce compromis de vente stipule que :

-M. [P] dispose de sa pleine capacité,

-l'acte authentique doit être réitéré au plus tard le 15 novembre 2013.

Il précise que l'abstention du mandataire liquidateur est d'autant plus condamnable que :

-le compromis de vente précisait le nom et les coordonnées du notaire et qu'il ne s'est jamais rapproché de lui pour l'informer de la situation dont il a eu connaissance seulement en 2017,

-s'il l'avait contacté la vente n'aurait pas eu lieu et le prix n'aurait pas été versé à M. [P].

A titre liminaire il doit être rappelé à maître [W] que les arrêts de la Cour de Cassation ne constituent pas une loi et que le principe de non rétroactivité ne s'applique pas à la jurisprudence qu'elle établit ;

qu'en l'espèce, il est inopérant pour trancher le litige que la Cour de Cassation ait opéré ou non un revirement de jurisprudence en faveur de la position du mandataire ad hoc seulement quelques mois avant les faits.

Cela étant, comme le soutient la SCP BR & ASSOCIES, représentée par M. [F] ès qualités, il est admis depuis au moins l'année 2011 que le notaire est tenu de vérifier, par toutes investigations utiles, spécialement lorsqu'il existe une publicité légale aisément accessible, les déclarations faites par le vendeur et qui, par leur nature ou leur portée juridique, conditionnent la validité ou l'efficacité de l'acte qu'il dresse.

Dans le cas présent, maître [W] aurait dû procéder à de telles vérifications d'autant plus que :

-M. [P] se déclarait retraité de sorte qu'il convenait de vérifier son statut antérieur,

-il lui était aisé et parfaitement loisible, comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, de s'adresser au greffe de la juridiction compétente ou au BODACC, y compris par simple courrier, pour vérifier le statut et la capacité juridique de M. [P].

En effet, maître [W] ne peut sérieusement soutenir qu'en l'absence de toute possibilité de procéder à une consultation internet il était entravé dans ses moyens d'investigation. Le suivre dans son argumentaire reviendrait à admettre qu'aucune diligence n'a pu être possible avant l'avènement de cet outil qui, s'il peut effectivement faciliter certaines démarches et/ou recherches, n'a pas le monopole de la collecte et de la connaissance de l'état des personnes.

Dès lors, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur ses autres moyens qui sont inopérants, la cour estime que maître [W] a engagé sa responsabilité en régularisant l'acte objet du litige sans procéder à une quelconque diligence aux fins de vérifier le statut du vendeur.

Cette analyse s'impose d'autant que, contrairement à ce qu'il soutient, aucune négligence ne peut être reprochée au mandataire judiciaire dans la mesure où :

-il ne lui appartenait pas de le contacter pour l'informer de la situation,

-il n'avait pas à prendre contact avec le notaire avant d'être en mesure de régulariser l'acte de vente du bien objet du litige, soit avant le 2 avril 2015,

-il n'avait aucune obligation de publication de la procédure collective de M. [P] où que ce soit et particulièrement pas au fichier immobilier,

-considérant les contestations de créance et les décisions rendues, il n'existe pas d'argument susceptible de lui reprocher la durée de la procédure collective ouverte à l'égard de M. [P].

En conséquence, le jugement frappé d'appel sera confirmé en ce qu'il a déclaré la vente inopposable à la procédure collective de M. [P], en ce qu'il a retenu la responsabilité de maître [W] et en ce qu'il l'a condamné à payer à la SCP BR & ASSOCIES la somme de 50 316 euros et 1 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la demande de dommages et intérêts pour appel abusif

La mauvaise appréciation qu'une partie peut faire de ses droits n'est pas fautive en elle-même et l'action en justice, comprenant l'exercice d'une voie de recours, ne peut dégénérer en abus que si est rapportée la preuve d'une intention malicieuse de la part de l'appelant.

Dans le cas présent, la SCP BG & ASSOCIES ne soumet à la cour aucun élément pour caractériser l'abus d'appel dont elle se plaint.

Elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif formée contre maître [W].

S'agissant de l'appel formé par la SCP BG & ASSOCIES ès qualités

La SCP BG & ASSOCIES, représentée par M. [F], fait grief aux premiers juges d'avoir dénaturé les effets du dessaisissement du débiteur et de l'inopposabilité qui en est la conséquence.

Elle soutient à juste titre que le dessaisissement emporte de plein droit inopposabilité, laquelle se distingue de la responsabilité de sorte que le tribunal ne pouvait conditionner le succès de ses prétentions à l'existence d'une faute commise par l'acquéreur qui doit être condamné à lui restituer le prix de la vente même s'il est de bonne foi.

Il s'ensuit que le jugement frappé d'appel sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et en ce qu'il a débouté la SCP BR & ASSOCIES de ses demandes formées contre Mme [P] et en ce qu'il a condamné maître [W] à payer 1 500 euros à Mme [P] du chef de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans le cas présent, cette solution s'impose d'autant que :

-la vente objet du litige ne peut être opposable à la procédure collective puisqu'elle est intervenue le 25 mars 2014, soit avant que le juge commissaire ne l'autorise (le 2 juillet 2014),

-le liquidateur judiciaire de M. [P] n'était pas partie à l'acte du 25 mars 2014,

-le paiement du prix n'est pas non plus opposable à la procédure collective à défaut d'intervention ou de mandat du liquidateur judiciaire.

Sur les dépens

Les dépens de première instance et d'appel seront partagés à parts égales entre maître [W] et Mme [P].

Mme [P] est donc infondée en ses prétentions au titre des frais irrépétibles en première instance.

Maître [W] est infondé en ses prétentions au titre des frais irrépétibles tant en première instance qu'en appel et en sa demande tendant à ce que son conseil bénéficie de la distraction des dépens.

Il serait inéquitable de laisser la SCP BR & ASSOCIES ès qualités supporter l'intégralité des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.

Maître [W] et Mme [P] seront tous les deux condamnés à lui payer la somme de 2 000 euros du chef de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, après débats publics, dans les limites des appels et par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

Ordonne la jonction des procédures RG 21-03696 et RG 21-04280 sous le numéro de RG 21-03696 ;

Confirme le jugement rendu le 18 février 2021 par le tribunal judiciaire de TOULON en ce qu'il a :

-déclaré la vente inopposable à la procédure collective de M. [P],

-retenu la responsabilité de maître [W],

-condamné maître [W] à payer à la SCP BR & ASSOCIES, prise en la personne de M. [F], ès qualités la somme de 50 316 euros et 1 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile,

Infirme le jugement rendu le 18 février 2021 par le tribunal judiciaire de TOULON en ses dispositions relatives aux dépens et en ce qu'il a :

-débouté la SCP BR & ASSOCIES, ès qualités, de ses demandes formées contre Mme [P],

-condamné maître [W] à payer 1 500 euros à Mme [P] du chef de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau des chefs d'infirmation et y ajoutant :

Condamne Mme [J] [P] à payer à la SCP BR & ASSOCIES, prise en la personne de M. [F], en qualité de mandataire ad hoc de M. [P] la somme de 50 316 euros correspondant au prix de la vente opérée le 25 mars 2014 portant sur la parcelle de terre située [Localité 7], lieudit [Localité 8] cadastrée section [Cadastre 6] ;

Déboute la SCP BR & ASSOCIES, ès qualités, de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif ;

Déclare Mme [P] infondée en ses prétentions au titre des frais irrépétibles en première instance ;

Déclare maître [W] infondé en ses prétentions au titre des frais irrépétibles et en sa demande tendant à ce que son conseil bénéficie de la distraction des dépens ;

Condamne Mme [P] et maître [W] chacun à payer à la SCP BR & ASSOCIES ès qualités la somme de 2 000 euros du chef de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [P] et maître [W] à supporter chacun la moité des dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-2
Numéro d'arrêt : 21/03696
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;21.03696 ?
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