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08/12/2022 | FRANCE | N°18/06655

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-4, 08 décembre 2022, 18/06655


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4



ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022



N° 2022/













Rôle N° RG 18/06655 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCJQJ







SCI LES NOMADES





C/



[P] [I]

Compagnie d'assurances AVIVA ASSURANCES





















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Etienne DE VILLEPIN



Me Nathalie CENAC>








Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal d'Instance de BRIGNOLES en date du 06 Septembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 1116000196.





APPELANTE



SCI LES NOMADES prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [G] [L],

, demeurant [Adresse 5] / ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-4

ARRÊT AU FOND

DU 08 DECEMBRE 2022

N° 2022/

Rôle N° RG 18/06655 - N° Portalis DBVB-V-B7C-BCJQJ

SCI LES NOMADES

C/

[P] [I]

Compagnie d'assurances AVIVA ASSURANCES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Etienne DE VILLEPIN

Me Nathalie CENAC

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal d'Instance de BRIGNOLES en date du 06 Septembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 1116000196.

APPELANTE

SCI LES NOMADES prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [G] [L],

, demeurant [Adresse 5] / FRANCE

représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué à l'audience par Me Robin DOUCE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEES

Madame [P] [I]

née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2]

représentée à l'audience par Me Nathalie CENAC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Compagnie d'assurances AVIVA ASSURANCES

, demeurant [Adresse 3]

représentée à l'audience par Me Nathalie CENAC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 18 Octobre 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Madame Inès BONAFOS, Présidente

Mme Sophie LEYDIER, Conseillère

Monsieur Olivier ABRAM, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.

ARRÊT

EXPOSE DULITIGE

La SCI Les Nomades est propriétaire d'une maison d'habitation sise [Adresse 4]), située sur un fonds contigu à celui dont est propriétaire [P] [M] épouse [I], assurée auprès de la société AVIVA Assurances ;

Ces fonds sont séparés par un mur, qui s'est partiellement effondré dans la nuit du 19 au 20 janvier 2012;

Par exploit d'huissier en date du 19 juin 2014, la SCI Les Nomades a fait assigner [P] [M] épouse [I] et la société AVIVA Assurances devant le Tribunal d'Instance de BRIGNOLES, afin d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement d'une somme globale de 6 942,22 € au titre de la réparation de ses dommages, outre 1 500,00 € à titre de dommages et intérêts et 1 500,00 € en application de l'article 700 du CPC;

Par jugement avant dire-droit en date du 26 mars 2015, le Tribunal d'Instance de BRIGNOLES ordonnait une expertise dont le rapport était déposé le 13 novembre 2015;

Par jugement en date du 6 septembre 2016, le Tribunal d'Instance de BRIGNOLES, notamment, déboutait la SCI Les Nomades de ses demandes;

Par déclaration en date du 17 avril 2018, la SCI Les Nomades a relevé appel de ce jugement;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 14 septembre 2022, la SCI Les Nomades sollicite de :

Recevoir la SCI LES NOMADES en son appel et le dire bien-fondé,

Statuant à nouveau réformant le jugement querellé,

Vu les articles 1382 ancien et 1242 alinéa 1 nouveau du Code civil,

Vu l'article 546 du Code de procédure civile,

DIRE ET JUGER que l'effondrement du mur trouve sa cause dans la modification de destination du mur, celui-ci étant devenu un mur de soutènement au profit du fonds de Madame [I] ;

DIRE ET JUGER qu'en cette qualité seule Madame [I] est tenue de son entretien;

DIRE ET JUGER que le défaut d'entretien par Madame [I] et le refus de prise en charge par elle-même et son assureur sont fautifs ;

CONDAMNER Madame [I], sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à retirer, à ses frais, l'ensemble de l'enrochement et du remblai en appui sur le mur de la SCI LES NOMADES;

CONDAMNER Madame [I], sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir, à remettre à niveau son terrain;

INTERDIRE à Madame [I], et ce jusqu'à la construction, aux frais de cette dernière, d'une rampe d'accès sécurisée et désolidarisée du mur de la SCI LES NOMADES, de laisser le passage à tout véhicule par l'accès de l'[Adresse 7] compte tenu de la dangerosité de la situation actuelle;

DIRE ET JUGER que l'accès se fera par la [Adresse 8] de sorte qu'il n'en résultera aucun préjudice;

CONDAMMNER solidairement Madame [I] et son assureur à payer à la SCI LES NOMADES les sommes retenues par l'Expert judiciaire au titre des réparations et préjudices:

' Préjudice matériel : 7 801,92 € TTC (Réparations, déblaiements, réfection du crépi);

' Préjudice de jouissance chiffré au 31/07/2015 et actualisé : 7 m² x 5 x 111 mois = 3 885 €;

' 1 500 € à titre de dommages et intérêts ;

' 1 500 € sur le fondement de l'article 700 CPC ;

CONDAMNER Les mêmes aux dépens en ce compris les frais d'expertises judiciaire;

Elle souligne que [P] [I] est responsable de l'effondrement en cause sur le fondement de l'article 1240, celle-ci ayant fait procéder à des enrochements, ayant laissé les gravats résultant de l'effondrement sur sa propriété, et n'ayant jamais répondu aux sollicitations de la SCI Les Nomades, ou de l'article 1242 du Code civil, celle-ci devant garder ses terres de façon à éviter d'endommager la construction propriété de la SCI ;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 19 mars 2021, la société AVIVA Assurances et [P] [M] épouse [I] sollicitent de :

Vu les articles 1382 et 1384 alinéa 1 du Code Civil,

Vu le rapport d'expertise judiciaire,

Dire et juger qu'aucune faute de Madame [I] en lien de causalité direct avec l'effondrement du mur de la SCI LES NOMADES n'est établie,

Dire et juger que la preuve d'une intervention causale de l'enrochement et la terre de Madame [I] en appui partiel sur le mur de la SCI LES NOMADES dans l'effondrement n'est pas rapportée,

Dire et juger que l'ancienneté des aménagements et l'absence de dommage dans les autres zones du mur litigieux sont exclusifs de la caractérisation d'un comportement anormal des choses dont Madame [I] est gardienne,

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris et débouter l'appelante de l'intégralité de ses demandes,

Subsidiairement,

Dire et juger que le retrait de la totalité de l'enrochement, du remblai, la remise à niveau du terrain, l'interdiction d'emploi du chemin jusqu'à la reconstruction d'une autre rampe d'accès ne sont pas justifiés par un intérêt légitime et portent atteinte au droit de propriété de Madame [I],

Débouter la SCI LES NOMADES de ces demandes,

Donner acte aux concluantes de leur rapport à justice sur l'évaluation de l'indemnité réparant le préjudice matériel de la SCI LES NOMADES,

Débouter l'appelante de ses demandes de dommages intérêts complémentaires ou à défaut, les ramener à de plus justes proportions,

Condamner l'appelante au paiement d'une indemnité de 1 500,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

La condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître CENAC conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile;

Elle indique que rien n'établit sa faute personnelle dans la survenance des désordres, dès lors que tant l'enrochement que le tout-venant le recouvrant procédaient d'aménagements anciens, antérieurs à 1958;

Elle ajoute que sa responsabilité du fait des choses n'est pas plus caractérisée, l'expert s'étant prononcé de manière dubitative sur la cause de l'effondrement en se bornant à indiquer que l'effondrement d'une partie du mur séparatif des propriétés LES NOMADES/[I] résulte « en toute vraisemblance », de poussées qui se seraient exercées sur le mur litigieux, ce qui est insuffisant pour engager sa responsabilité, alors que la cause du sinistre est à rechercher dans les effets du temps, ou d'autres causes qui ne peuvent être écartées:

Elle conteste les postes de demandes, non motivés et sans rapport avec les faits de la cause, et les préjudices allégués;

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 septembre 2022;

SUR CE

Il ressort de l'article 1240 du Code civil que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer;

L'alinéa premier de l'article 1242 dispose pour sa part qu'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde;

C'est sur le fondement de ces deux dispositions que la SCI Les Nomades développe ses demandes;

Il doit être relevé à titre liminaire que le mur en cause est sa propriété;

Il apparaît en outre effectivement que rien ne permet d'imputer la responsabilité de l'effondrement du mur dont s'agit à [P] [M] épouse [I];

En effet, le rapport de l'expertise judiciaire se borne à indiquer que le mur était de construction très ancienne, ne comportait ni drain, ni fondations, qu'il était recouvert de végétation qui avait été enlevée par la SCI, et que son effondrement résultait « en toute vraisemblance » de la poussée « au fil des ans » des enrochements et remblais déposés côté [I];

Or, il est clair que l'ancienneté du mur ne peut être imputée à quiconque, ni la présence de végétation sur le mur s'agissant d'un ouvrage dont l'entretien n'incombe pas à [P] [M] épouse [I], alors par ailleurs que son enlèvement est le fait de la SCI;

D'autre part, rien n'établit que la présence d'enrochements et de remblais soit le fait de [P] [M] épouse [I], alors au contraire qu'il ressort du constat d'huissier du 23 septembre 2014 qu'un arbre de 15 mètres de hauteur est présent en pied de mur côté [I], signe de l'ancienneté de la présence de ces remblais et enrochements, et qu'il ne ressort pas de la facture en date du 15 avril 2014 relative à la pose de tout venant sur le chemin confrontant le mur côté [I], analysée à l'expertise, que celle-ci ait compris la pose des enrochements et remblais ;

Il y a lieu d'ajouter que l'ancienneté de ces remblais et enrochements ressort en outre du témoignage de [F] [K] indiquant que depuis 1958, date à laquelle il est devenu propriétaire d'un bien contigu à celui de la famille [M], il n'y a jamais eu d'apport de terre sur le terrain en cause;

Il apparaît en outre quant aux développements sur la responsabilité du fait des choses de [P] [M] épouse [I] que le rapport d'expertise ne permet pas d'affirmer clairement et de manière non contestable que l'effondrement du mur en cause soit le fait exclusif de la pose d'enrochements et de remblais, celui-ci se contentant, sans évoquer la prétendue transformation du mur de clôture en mur de soutènement, de relever que cet effondrement résulte en toute vraisemblance de la poussée des enrochements et remblais;

Or, l'utilisation de ce terme induit seulement que cette cause est peut-être celle qui est à l'origine de l'effondrement, pas qu'il s'agit de la cause unique, directe et certaine de celui-ci en présence d'un mur très ancien, sans fondation ni drain, qui n'est pas entretenu, et, singulièrement, qui n'est pas la propriété de l'intimé;

C'est en ce sens que le rapport d'expertise amiable contradictoire en date du 29 juin 2012, préalable au rapport d'expertise judiciaire, considérait à juste titre que le sinistre était le fait de facteurs multiples dont l'action du temps en serait le principal;

Par voie de conséquence, dès lors qu'il n'est pas établi que l'effondrement du mur en cause est la conséquence directe et certaine des fautes de [P] [M] épouse [I] ou des enrochements et remblais présents sur son fonds, il n'y a pas lieu de la condamner à payer le coût des réparations du mur, ni un quelconque préjudice de jouissance qui serait consécutif à la présence de ces remblais et enrochements sur le fonds de la SCI suite à l'effondrement ;

Il n'y a pas lieu en outre de la condamner à retirer tous les remblais et enrochements en appui sur le mur de la SCI, en l'absence de preuve de ce qu'il résulterait de leur présence un quelconque dommage pour la SCI, ni, par extension, de l'astreindre à mettre son fonds à niveau;

Sur la demande tendant à obtenir d'interdire à [P] [I] de passer sur le chemin présent sur son fonds et contigu au mur, il apparaît là-encore qu'il n'est produit aucune preuve de ce qu'il résulterait de l'utilisation de ce passage un désordre quelconque pour la SCI;

Cet ensemble justifie de confirmer le jugement entrepris, par substitution de motifs;

La SCI Les Nomades, qui succombe, supportera les dépens d'appel;

L'équité et la situation économique des parties justifient qu'elle soit condamnée à payer à [P] [M] épouse [I] et à la société AVIVA Assurances la somme de 1 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

ET, Y AJOUTANT,

CONDAMNE la SCI Les Nomades à payer à [P] [M] épouse [I] et à la société AVIVA Assurances la somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

CONDAMNE la SCI Les Nomades aux dépens d'appel, distraits au profit de Me CENAC;

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022,

Signé par Madame Inès BONAFOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-4
Numéro d'arrêt : 18/06655
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;18.06655 ?
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