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01/12/2022 | FRANCE | N°19/04012

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-3, 01 décembre 2022, 19/04012


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3



ARRÊT AU FOND

DU 01 DECEMBRE 2022



N° 2022/340













Rôle N° RG 19/04012 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD5TJ







[R] [H]

[S] [W]

Société DANAE

Société 3B DISTRIBUTION





C/



Société CONFECTION RAS JEBEL - CRJ



























Copie exécutoire délivrée

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à : <

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Me Philippe BRUZZO



Me Jean Paul ARMAND





















Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 07 Février 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 2017F01736.





APPELANTS



Maître [R] [H], ès qualités de mandataire judiciaire au redr...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 3-3

ARRÊT AU FOND

DU 01 DECEMBRE 2022

N° 2022/340

Rôle N° RG 19/04012 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BD5TJ

[R] [H]

[S] [W]

Société DANAE

Société 3B DISTRIBUTION

C/

Société CONFECTION RAS JEBEL - CRJ

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Philippe BRUZZO

Me Jean Paul ARMAND

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 07 Février 2019 enregistrée au répertoire général sous le n° 2017F01736.

APPELANTS

Maître [R] [H], ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la Société 3B DISTRIBUTION, selon jugement rendu le 30 mai 2018 par le Tribunal de Commerce de MARSEILLE,

demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté de Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO / DUBUCQ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

SARL DANAE, prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée et assistée de Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO / DUBUCQ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

SARL 3B DISTRIBUTION, prise en la personne de son représentant légal

dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée et assistée de Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO / DUBUCQ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

SA CONFECTION RAS JEBEL - CRJ, prise en la personne de son représentant légal,

dont le siège social est sis [Adresse 2]

représentée par Me Jean Paul ARMAND de la SCP BOLLET & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE,

assistée de Me Thomas HUGUES, avocat au barreau de MARSEILLE

PARTIE(S) INTERVENANTE(S)

Maître [S] [W] de la SAS LES MANDATAIRES, intervenant volontairement es-qualité de mandataire à la liquidation de la société DANAE

né le 09 Août 1975,

demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO / DUBUCQ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise PETEL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Valérie GERARD, Première Présidente de chambre

Madame Gwenael KEROMES, Présidente de chambre

Madame Françoise PETEL, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Décembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01 Décembre 2022

Signé par Madame Valérie GERARD, Première Présidente de chambre et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par arrêt avant dire droit du 18 novembre 2021, auquel il convient de se reporter pour l'exposé des faits, procédure, demandes et moyens des parties, la cour a :

- ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture en date du 7 septembre 2021 et la réouverture des débats,

- renvoyé l'affaire à la mise en état,

- invité la société Confection Ras Jebel à communiquer les déclarations de créances effectuées dans le cadre des procédures collectives ouvertes à l'égard des sociétés 3B Distribution et Danae,

- dit que les parties devront produire les extraits K bis et les décisions de justice rendues à l'égard des sociétés 3B Distribution et Danae et qu'elles devront conclure selon le calendrier suivant :

- conclusions de la société Confection Ras Jebel au plus tard le 14 janvier 2022,

- conclusions de la SARL 3B Distribution et Me [R] [H], ès-qualités de mandataire judiciaire et, le cas échéant, de commissaire à l'exécution du plan, conclusions de Me [S] [W], ès-qualités de liquidateur de la SARL Danae, au plus tard le 11 mars 2022,

- ultimes conclusions des parties au plus tard le 29 avril 2022.

Par conclusions notifiées et déposées le 9 mars 2022, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la SARL 3B Distribution, Me [R] [H] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SARL 3B Distribution, la SARL Danae et la SAS Les Mandataires, prise en la personne de Me [S] [W], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Danae, demandent à la cour de :

- déclarer recevable et fondé leur appel,

y faisant droit,

- infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau,

- constater la défaillance de la société CRJ dans la livraison des marchandises confectionnées,

- constater la défaillance de la société CRJ dans la confection des marchandises,

- constater que les défauts de qualité des marchandises confectionnées par la société CRJ ont été consacrés par contrat d'huissier,

- constater la bonne foi des sociétés 3B Distribution et Danae,

en conséquence :

- condamner la société CRJ au paiement d'une somme de 100.000 euros au titre de l'atteinte à l'image de la marque «'#Red'», soit la somme de 50.000 euros pour chacune des sociétés 3B Distribution et Danae,

- condamner la société CRJ au paiement d'une somme de 100.000 au titre de la perte de distributeurs et de clientèle, soit la somme de 50.000 euros pour chacune des sociétés 3B Distribution et Danae,

- condamner la société CRJ au paiement d'une somme de 55.592 euros au titre de la perte de marge sur les marchandises commandées mais non livrées du fait de la défaillance de CRJ, soit la somme de 27.796 euros pour chacune des sociétés 3B Distribution et Danae,

- condamner la société CRJ au paiement d'une somme de 80.000 euros au titre de la perte de liens avec ses agents commerciaux et de la détérioration de son réseau de distribution, soit la somme de 40.000 euros pour chacune des sociétés 3B Distribution et Danae,

- condamner la société CRJ au paiement d'une somme de 104.235 euros au titre du remboursement du prix d'achat des marchandises défectueuses et livrées en retard, soit la somme de 52.117,50 euros pour chacune des sociétés 3B Distribution et Danae,

- prononcer la compensation de créances entre les parties,

- condamner la société CRJ au paiement d'une somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, soit la somme de 5.000 euros pour chacune des sociétés 3B Distribution et Danae,

- condamner la société CRJ au paiement des entiers dépens.

Par conclusions récapitulatives notifiées et déposées le 13 avril 2022, auxquelles il est expressément référé en application de l'article 455 du code de procédure civile, la SA Confection Ras Jebel demande à la cour de :

- constater qu'elle a communiqué les documents sollicités par la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans le cadre de son arrêt avant dire droit n°2021/365 du 18 novembre 2021,

- rejeter toute autre pièce versée par les parties hormis celles sollicitées par la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans le cadre de son arrêt avant dire droit n°2021/365 du 18 novembre 2021,

- dire que la SARL Danae, Me [S] [W], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Danae, la SARL 3B Distribution et Me [R] [H], ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL 3B Distribution, sont défaillants dans la charge de la preuve de la non-conformité qu'il leur incombe de rapporter,

- débouter la SARL Danae, Me [S] [W], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Danae, la SARL 3B Distribution et Me [R] [H], ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL 3B Distribution, de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 7 février 2019 en ce qu'il :

- l'a condamnée à payer à la SARL Danae la somme de 20.492,14 € (vingt mille quatre cent quatre-vingt-douze euros et quatorze centimes) à titre de dommages-intérêts pour la livraison de marchandises défectueuses dans la collection automne/hiver 2016,

- a ordonné la compensation entre les deux condamnations ci-dessus prononcées, à due concurrence des sommes dues,

- l'a condamnée à payer à la SARL 3B Distribution la somme de 13.932,86 € (treize mille neuf cent trente-deux euros et quatre-vingt-six centimes) à titre de dommages-intérêts pour la livraison de marchandises défectueuses dans la collection automne/hiver 2016,

- a ordonné la compensation entre la somme fixée au passif de la SARL 3B Distribution et la condamnation prononcée à son encontre au profit de la SARL 3B Distribution, à due concurrence des sommes dues,

y faisant droit et statuant à nouveau,

- condamner Me [S] [W], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Danae, à lui payer la somme de cent vingt-sept mille cinq cent quatre-vingt-six euros et quatre-vingt-quinze centimes (127.586,95 €) au titre des factures impayées concernant la collection automne/hiver 2016, augmentée des intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage à compter de la mise en demeure en date du 21 avril 2017,

- condamner la SARL 3B Distribution et Me [R] [H], ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL 3B Distribution, à lui payer la somme de quatre-vingt-quatre mille six cent quarante-deux euros (84.642 €) au titre des factures impayées concernant la collection automne/hiver 2016, augmentée des intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage à compter de la mise en demeure en date du 20 avril 2017,

en conséquence,

- fixer sa créance au passif de la SARL Danae à la somme totale de cent vingt-sept mille cinq cent quatre-vingt-six euros et quatre-vingt-quinze centimes (127.586,95 €) augmentée des intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage à compter de la mise en demeure en date du 21 avril 2017,

- fixer sa créance au passif de la SARL 3B Distribution à la somme totale de quatre-vingt-quatre mille six cent quarante-deux euros (84.642 €) augmentée des intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage à compter de la mise en demeure en date du 20 avril 2017,

en tout état de cause,

- condamner solidairement Me [S] [W], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Danae, la SARL 3B Distribution et Me [R] [H], ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL 3B Distribution, à lui payer la somme de quinze mille euros (15.000 €) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement Me [S] [W], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Danae, la SARL 3B Distribution et Me [R] [H], ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SARL 3B Distribution, aux entiers dépens de l'instance,

en conséquence,

- fixer sa créance au passif de la SARL Danae à la somme de quinze mille euros (10.000 €) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer sa créance au passif de la SARL Danae au titre des dépens de l'instance,

- fixer sa créance au passif de la SARL 3B Distribution à la somme de quinze mille euros (10.000 €) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer sa créance au passif de la SARL 3B Distribution au titre des dépens de l'instance.

MOTIFS

Sur la communication de pièces :

Exposant qu'elle a, en exécution de l'arrêt avant dire droit du 18 novembre 2021, communiqué les documents sollicités par la cour, à savoir ses déclarations de créances dans le cadre des procédures collectives des SARL Danae et 3B Distribution, ainsi que les extraits K-bis de ces dernières, la SA Confection Ras Jebel fait valoir que, la cour n'ayant en aucun cas invité les parties à conclure à nouveau sur le fond de l'affaire et à faire état de nouveaux éléments tel le rapport d'expertise établi le 29 septembre 2020 par un certain M. [P] [G] jamais communiqué contradictoirement jusqu'à l'audience des plaidoiries du 7 septembre 2021, demande que tout autre document que ceux précisément sollicités par la cour soit écarté des débats.

Les appelants répliquent que, au regard des termes mêmes de l'arrêt du 18 novembre 2021, qui n'interdit nullement aux parties de conclure à nouveau sur le fond, les débats ayant été réouverts pour permettre à l'affaire d'être jugée et pour faire la lumière sur les divers points répertoriés dans la décision, ils sont en droit de produire de nouveaux éléments afin que ceux-ci puissent être débattus contradictoirement.

Sur ce, la cour, qui a estimé que l'affaire n'était pas en état d'être jugée, l'ayant, après avoir ordonné la révocation de l'ordonnance de clôture et la réouverture des débats, renvoyée à la mise en état, avec fixation d'un calendrier pour les écritures des parties, celles-ci étaient libres de fournir, dans le cadre de leurs nouvelles conclusions, toutes explications et de produire à l'appui, outre les pièces précisément visées par l'arrêt avant dire droit, tous documents leur paraissant utiles, lesquels ne sauraient être écartés dès lors que, régulièrement communiqués dans le cadre de la mise en état, ils ont pu, de manière contradictoire, faire l'objet d'un débat.

Sur les manquements reprochés à la SA Confection Ras Jebel :

Les appelants soutiennent que, dès le début de la relation commerciale entre les SARL Danae et 3B Distribution, d'une part, et la SA Confection Ras Jebel, d'autre part, diverses problématiques sont apparues en raison des défaillances et manquements avérés de cette dernière.

Ils exposent qu'ainsi, les premières difficultés sont apparues lors de la confection de la collection automne/hiver 2015 : marchandises mal référencées, livraisons partielles, erreurs dans le «'picking'», retards de production, d'échantillon, de têtes de séries, et surtout non-respect des couleurs demandées, que, cependant, l'intimée ayant admis ces difficultés et sollicité leur indulgence, les SARL Danae et 3B Distribution, malgré l'important préjudice commercial qui leur a été causé, ont intégralement réglé l'ensemble des facturations au titre de cette collection.

Ils indiquent que des problèmes sensiblement identiques ont affecté la collection printemps/été 2016, dont les sociétés ont toutefois décidé de payer intégralement les facturations au regard des engagements pris par la SA Confection Ras Jebel de mettre tout en 'uvre à l'avenir en ce qui concerne les délais de livraison et la qualité de ses produits.

S'agissant de la collection automne/hiver 2016, les appelants font valoir que les commandes passées ont toutes été livrées avec un à deux mois de retard, ce qui a une fois de plus entraîné une désorganisation totale de la distribution commerciale mise en place par les sociétés qui avaient prévu une date de présentation de la collection à leurs agents commerciaux le 27 juin 2016, que ces retards, qui, reconnus par l'intimée, ne sont en aucune manière contestables, sont à l'origine d'un préjudice commercial et financier considérable.

Ils ajoutent que, non seulement les marchandises ont été livrées avec d'importants retards, mais elles comportaient des défauts de fabrication les rendant non commercialisables, que ces défauts ont été constatés par huissier sur l'ensemble des marchandises de la SA Confection Ras Jebel entreposées dans leurs locaux, qu'il ressort du rapport de l'expert, qu'elle a au surplus sollicité, un double constat, d'abord celui des nombreux défauts ayant atteint les marchandises livrées, ensuite celui du préjudice économique subi par la SARL 3B Distribution postérieurement à la livraison.

L'intimée réplique qu'elle a en effet admis un certain nombre de difficultés concernant les collections de l'année 2015, qu'elle a alors mis en 'uvre tous les moyens à sa disposition pour rétablir une relation d'affaires stable et pérenne, que, plus particulièrement, elle a accepté des retours pour les pièces jugées défectueuses jusqu'à une date arrêtée initialement au 15 avril 2016, que cette volonté de consolidation des relations commerciales n'a pas été partagée par les sociétés appelantes qui n'ont cessé d'émettre un certain nombre de contestations.

Elle expose que les problèmes de qualité pour cette période, concernant l'année 2015 et la collection printemps/été 2016, ont donc été réparés, et le dossier relatif aux retours clients clôturé, que la prétendue défaillance alléguée quant à des marchandises mal référencées, des livraisons partielles, des erreurs dans le picking, des retards divers ou encore le non-respect des couleurs demandées, est donc délibérément infondée.

Elle fait valoir que les SARL Danae et 3B Distribution font, encore une fois, preuve de mauvaise foi en prétextant que la collection printemps/été 2016 était défaillante, sans rapporter la moindre preuve sur les manquements allégués.

Sur les marchandises livrées au titre de la collection automne/hiver 2016, la SA Confection Ras Jebel soutient que les échanges de courriels dont se prévalent les appelants ne représentent qu'un projet de commande qui a fait l'objet, de sa part, d'une proposition de délais qui restait assujettie à des conditions qui n'ont pas été réunies, que, compte tenu des modifications sollicitées par les sociétés appelantes, les coloris n'étaient, le 8 août 2016, toujours pas validés alors même que l'exportation était initialement prévue le 30 juillet 2016, qu'il est également nécessaire de rappeler que les SARL Danae et 3B Distribution n'avaient pas de cahier des charges, que cette situation l'a donc forcée à improviser l'ensemble de son travail avec elles, que, malgré cela, elle a effectué les livraisons, alors même que les dites sociétés étaient en défaut de paiement, et avaient dépassé les plafonds de crédit convenus.

Précisant que ces marchandises ont été réceptionnées par les appelantes sans aucune réserve, l'intimée ajoute que ces dernières ne sauraient sérieusement, pour se soustraire au paiement de factures d'un montant total de 212.229,27 euros, lui opposer des défauts de conformité de l'ensemble en se fondant sur les constatations faites, de manière non contradictoire, par un huissier de justice qui se base sur quelques pièces parmi les 13.866 livrées, que, insuffisamment précis, ce constat n'établit pas en outre l'origine des pièces soi-disant «'expertisées'», que leur mauvaise foi apparait également au travers de leur demande de retour du 17 mai 2016, qu'elle est encore démontrée par la production d'un prétendu rapport d'expertise réalisé par M. [P] [G], étant observé que ladite expertise a été effectuée plus de quatre années après les livraisons des marchandises, et non contradictoirement alors que les appelantes remettent en cause la fabrication de 13.866 pièces livrées.

Sur ce, il est tout d'abord rappelé, au vu notamment des courriels échangés entre les parties quant aux collections précédentes, que le litige ne concerne que la collection automne/hiver 2016.

A cet égard, il n'est pas contesté, ainsi que cela résulte en outre des documents et notamment des bons d'enlèvement/livraison versés aux débats par la SA Confection Ras Jebel, que les marchandises ont été par elle livrées, et réceptionnées par les SARL Danae et 3B Distribution.

Dès lors, il appartient à ces dernières de démontrer les défauts de conformité à la commande, en l'occurrence les retards et défectuosités allégués.

S'agissant des retards dont font état les appelants, il n'est, au vu des très nombreux courriels produits, nullement établi qu'ils soient imputables à la société intimée, quand il ressort des échanges intervenus, notamment les 18 et 20 avril, 9, 23, 28 et 30 juin, 4 et 29 juillet, 8 août 2016, outre qu'aucune date n'était précisément fixée pour la livraison des marchandises, que des modifications ont été sollicitées par les sociétés acheteuses, et des commandes mises en instance dans l'attente, notamment, de la validation par ces dernières du prix départ usine, des quantités ou des couleurs, puis de la visite aux fins d'inspection et de contrôle qualité avant expédition de leur contrôleur, ou encore du règlement par elles de factures échues précédemment, eu égard aux montants assurés à l'export.

En ce qui concerne la défectuosité des marchandises livrées, les appelants entendent en apporter la preuve par la production aux débats d'un constat d'huissier de justice du 3 octobre 2017, et d'un rapport établi le 29 septembre 2020 par M. [P] [G], «'expert judiciaire'».

Toutefois, s'agissant de ce dernier document, il doit tout d'abord être observé que ladite expertise, plus de quatre ans après les faits et alors même que la présente instance était en cours, a été réalisée de manière non contradictoire.

En tout état de cause, elle ne comporte pas d'éléments suffisamment précis quant aux constatations effectuées sur les marchandises, lesquelles ne sont pas même régulièrement identifiées, qui auraient ainsi été examinées de nature à permettre de déterminer les manquements invoqués, que «'l'expert'» se contente de qualifier, par une appréciation qui lui est personnelle, d'évidents.

Ainsi dépourvu en outre de toute analyse, un tel rapport, établi unilatéralement à la demande des SARL Danae et 3B Distribution, ne saurait être retenu comme élément de preuve des défaillances alléguées à l'encontre de l'intimée.

Le constat, également effectué en l'absence de cette dernière, dont se prévalent les appelants n'est pas davantage probant.

En effet, aux termes de ce document établi à la requête de la SARL 3B Distribution, l'huissier instrumentaire, qui expose : «'Nous avons réalisé nos constatations en procédant par sondage sur le stock livré par la société CRJ CONFECTION et sur certains modèles identifiés par notre requérante'», n'indique pas même les références précises des pièces examinées, les photographies jointes ne permettant pas cette identification, et l'inventaire annexé ne concernant manifestement pas, ainsi que l'a relevé le tribunal, la seule collection automne/hiver 2016, mais aussi des collections antérieures.

Dans ces conditions, il ne peut qu'être constaté que les appelants ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, des fautes dans l'exécution de ses obligations qu'ils imputent à la société intimée.

En conséquence, et sans qu'il soit autrement besoin de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, dont les développements s'agissant des appelants concernent essentiellement les divers préjudices que prétendent avoir subis les SARL Danae et 3B Distribution, les demandes en paiement de dommages et intérêts formulées à l'encontre de la SA Confection Ras Jebel sont rejetées et le jugement infirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour

Statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme, sauf en ce qu'il a fixé au passif de la SARL 3B Distribution la créance de la SA Confection Ras Jebel Société au titre de la livraison de la collection automne/hiver 2016 pour la somme de 84.624,30 euros avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage à compter du 20 avril 2017, le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Fixe la créance de la SA Confection Ras Jebel au passif de la procédure collective de la SARL Danae, à titre chirographaire, à la somme, au titre de la collection automne/hiver 2016, de 127.586,95 euros, avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points de pourcentage à compter du 21 avril 2017,

Déboute la SARL Danae et la SARL 3B Distribution de l'ensemble de leurs demandes, notamment en paiement de dommages et intérêts, à l'encontre de la SA Confection Ras Jebel,

Condamne in solidum la SARL 3B Distribution, Me [R] [H] en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la SARL 3B Distribution, la SARL Danae et la SAS Les Mandataires, prise en la personne de Me [S] [W], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL Danae, à payer à la SA Confection Ras Jebel la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Les condamne aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-3
Numéro d'arrêt : 19/04012
Date de la décision : 01/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-01;19.04012 ?
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