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18/11/2022 | FRANCE | N°18/12295

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 18 novembre 2022, 18/12295


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3



ARRÊT AU FOND



DU 18 NOVEMBRE 2022



N°2022/ 187





RG 18/12295

N° Portalis DBVB-V-B7C-BC2KM







[L] [T] épouse [V]





C/



Fondation FONDATION [3] EXERCANT SOUS LA DENOMINA TION HOPITAL [4]



















Copie exécutoire délivrée

le 18 novembre 2022 à :



- Me Henry BOUCHARA, avocat au barreau de MARSEILLE



-

Me Fabien BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE







Décision déférée à la Cour :



Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 20 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01623.







APPELANTE



Madame ...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 18 NOVEMBRE 2022

N°2022/ 187

RG 18/12295

N° Portalis DBVB-V-B7C-BC2KM

[L] [T] épouse [V]

C/

Fondation FONDATION [3] EXERCANT SOUS LA DENOMINA TION HOPITAL [4]

Copie exécutoire délivrée

le 18 novembre 2022 à :

- Me Henry BOUCHARA, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Fabien BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARSEILLE en date du 20 Juin 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/01623.

APPELANTE

Madame [L] [T] épouse [V], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Henry BOUCHARA, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

Fondation FONDATION [3] exerçant sous la dénomination HOPITAL [4], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Fabien BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, et Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant, chargés du rapport.

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre, a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre

Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président

Madame Isabelle MARTI, Président de Chambre suppléant

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2022.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 18 Novembre 2022.

Signé par Madame Pascale MARTIN, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * *

FAITS- PROCEDURE-PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [L] [V] exerçait la profession d'aide soignante depuis 1983 au sein de l'hôpital [3], devenu depuis sa fusion avec l'hôpital [W] [J], la Fondation Hôpital [3] exerçant sous la dénomination Hôpital [4].

Par courrier du 27 juillet 2012, l'employeur a notifié à la salariée une mise à pied de trois jours à titre disciplinaire.

Saisi d'une contestation par Mme [V], le conseil de prud'hommes de Marseille, a par jugement du 19 février 2014, annulé la sanction et condamné l'employeur à payer la somme de 1 000 euros au titre du préjudice et 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 15 janvier 2016, la cour de céans a confirmé le jugement.

Mme [V] a saisi le 29 juin 2016 le conseil de prud'hommes de Marseille aux fins de voir dire son licenciement pour inaptitude notifié le 16 décembre 2014 sans cause réelle et sérieuse et obtenir des dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Selon jugement du 20 juin 2018 le conseil de prud'hommes a déclaré irrecevable la demande et condamné la salariée aux dépens.

Il a considéré qu'en application du principe de l'unicité de l'instance, la contestation du licenciement aurait dû être portée à la connaissance de la cour d'appel.

Le conseil de Mme [V] a interjeté appel par déclaration du 20 juillet 2018.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe par voie électronique le 22 octobre 2018, Mme [V] demande à la cour de :

«REFORMER le jugement rendu le 20 juin 2018 par le Conseil de prud'hommes de Marseille.

DECLARER recevables les demandes formulées par Mme [V]

DIRE ET JUGER que Mme [V] a été victime de comportements de son employeur qui relèvent du harcèlement moral.

CONSTATER que l'état de santé moral et physique de Mme [V] s'est dégradé en raison des agissements de harcèlement moral qu'elle a subis.

CONDAMNER la Fondation [3] au paiement d'une somme de 20 000 € en réparation du préjudice subi par le salarié du fait des actes de harcèlement moral.

CONSTATER que l'inaptitude de la salariée constatée par le Médecin du travail est la conséquence directe du harcèlement moral subi par le salariée.

PRONONCER la nullité du licenciement notifié le 16 décembre 2014 à Mme [V].

CONDAMNER la fondation [3] au paiement d'une somme de 80 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail.

CONDAMNER la fondation [3] au paiement d'une somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens distraits au profit de Maître Henry BOUCHARA avocat aux offres de droit.»

Dans ses dernières écritures transmises au greffe par voie électronique le 15 janvier 2019, la Fondation Hôpital [3] demande à la cour de :

«A Titre Principal :

DECLARER l'appel caduc.

A Titre Subsidiaire :

CONFIRMER la décision attaquée.

DIRE ET JUGER qu'en application du principe de l'unicité de l'instance, les demandes formulées par Mme [V] sont irrecevables.

A Titre Infiniment Subsidiaire :

DIRE ET JUGER que la Cour n'est saisie que d'une demande de réformation afférente à l'irrecevabilité des demandes.

DECLARER irrecevables toutes les autres demandes.

A défaut, sur le fond :

DEBOUTER Mme [V] de l'ensemble de ses prétentions.

DIRE ET JUGER que l'employeur n'a, à aucun moment, commis des actes de harcèlement moral à l'encontre de Mme [V].

DIRE ET JUGER que le licenciement pour inaptitude de Mme [V] est parfaitement régulier.

DEBOUTER Mme [V] de l'ensemble de ses demandes.

En tout état de cause :

CONDAMNER Mme [V] au paiement de la somme de 4 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.»

Pour l'exposé plus détaillé des prétentions et moyens des parties, il sera renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, aux conclusions des parties.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et que les «dire et juger» et les «constater» ainsi que les «donner acte» ne sont pas des prétentions en ce que ces demandes ne confèrent pas de droit à la partie qui les requiert hormis les cas prévus par la loi; en conséquence, la cour ne statuera pas sur celles-ci, qui ne sont en réalité que le rappel des moyens invoqués.

Sur la caducité de l'appel

La cour relève que cette demande a fait l'objet de conclusions d'incident du 15 janvier 2019 devant le conseiller de la mise en état, lequel a constaté dans sa décision ayant l'autorité de la chose jugée en raison de l'absence de déféré, que l'intimée s'était désistée de son incident.

Elle doit donc être déclarée irrecevable.

Sur la recevabilité des demandes

Mme [V] expose que :

- sur le fondement de l'article R.1452-6 du code du travail, lorsque le fondement des prétentions est apparu postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes, le principe de l'unicité d'instance n'est pas applicable,

- en saisissant directement la cour d'appel, elle se privait du bénéfice du double degré de juridiction,

- le fondement des prétentions concernant son licenciement s'est révélé après la première saisine du conseil de prud'hommes ainsi qu'après le premier jugement rendu.

L'intimée estime qu'en application du principe de l'unicité de l'instance, il appartenait à Mme [V] de contester son licenciement avant l'audience des débats devant la cour, soit avant le 15 décembre 2015.

Le principe de l'unicité de l'instance était posé par l'article R.1452-6 du code du travail: «Toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties doivent, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, faire l'objet d'une seule instance. Cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes.»

Elle tendait à imposer le regroupement de toutes les procédures concernant un même contrat de travail. Corrélativement les parties au procès prud'homal avaient la possibilité de présenter des demandes nouvelles même en appel puisque l'article R. 1452-7 prévoyait «Les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel. L'absence de tentative de conciliation ne peut être opposée. Même si elles sont formées en cause d'appel, les juridictions statuant en matière prud'homale connaissent les demandes reconventionnelles ou en compensation qui entrent dans leur compétence.»

Ainsi que l'a relevé le conseil de prud'hommes, les règles édictées par les articles sus-visés ont été supprimées par le décret N° 2016-660 du 20 mai 2016 soit à compter du 1er août 2016, mais la demande de Mme [V] en contestation de son licenciement a été introduite à une date antérieure, de sorte que ces anciennes dispositions s'appliquent au litige.

La Haute Cour juge de façon constante que la règle de l'unicité de l'instance s'applique lorsque les demandes concernent le même contrat de travail et que les causes du second litige étaient connues lors de la première instance, avant la clôture des débats devant la cour d'appel, de sorte que le salarié aurait eu la possibilité de former une demande nouvelle devant celle-ci, ce qui est le cas en l'espèce, puisque les débats devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ont eu lieu le 15 décembre 2015 et que le licenciement avait été notifié un an avant, soit le 16 décembre 2014.

Le principe de l'unicité de l'instance n'est pas contraire aux dispositions de l'article 6 § 1 de la convention EDH dès lors que les parties, qui disposent de la faculté de présenter de nouvelles demandes en appel, ne sont pas privées de leur droit d'accès au juge, étant précisé en outre que la sanction disciplinaire examinée par la cour était l'un des agissements dénoncés par la salariée au titre du harcèlement moral dont elle s'est prévalu plusieurs mois après dans le cadre de sa deuxième saisine du conseil de prud'hommes de Marseille.

Dès lors que les prétentions concernant tant les faits de harcèlement moral que la rupture du contrat de travail se sont révélés alors que l'instance initiale se poursuivait et était pendante devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, Mme [V] était tenue de porter sa contestation devant celle-ci, et ne pouvait introduire une deuxième instance pour ces faits devant le conseil de prud'hommes de Marseille.

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont déclaré irrecevables les demandes de Mme [V].

Sur les frais et dépens

L'appelante qui succombe au principal doit s'acquitter des dépens, être déboutée de sa demande faite sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à ce titre payer à l'intimée la somme de 600 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 du code de procédure civile, en matière prud'homale,

Déclare irrecevable la demande de la Fondation Hôpital [3] concernant la caducité de l'appel,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Mme [V] à payer à la Fondation Hôpital [3] la somme de 600 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Mme [V] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 4-3
Numéro d'arrêt : 18/12295
Date de la décision : 18/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-18;18.12295 ?
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