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16/11/2022 | FRANCE | N°21/01143

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-8, 16 novembre 2022, 21/01143


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8



ARRÊT AU FOND

DU 16 NOVEMBRE 2022



N° 2022/ 490









N° RG 21/01143



N° Portalis DBVB-V-B7F-BG2ZK







[M] [K]





C/





S.A. LOGIREM































Copie exécutoire délivrée

le :



à :



Me Gilles GIGUET



Me Stéphane GALLO
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Décision déférée à la Cour :



Jugement du Juge des contentieux de la protection près du Tribunal Judiciaire de TARASCON en date du 29 Septembre 2020 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-19-0009.





APPELANT



Monsieur [M] [K]

demeurant [Adresse 2]



représenté par Me Gilles GIGUET, membre de l...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 16 NOVEMBRE 2022

N° 2022/ 490

N° RG 21/01143

N° Portalis DBVB-V-B7F-BG2ZK

[M] [K]

C/

S.A. LOGIREM

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Gilles GIGUET

Me Stéphane GALLO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge des contentieux de la protection près du Tribunal Judiciaire de TARASCON en date du 29 Septembre 2020 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-19-0009.

APPELANT

Monsieur [M] [K]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Gilles GIGUET, membre de la SELARL BURAVAN DESMETTRE GIGUET FAUPIN, avocat au barreau de TARASCON

INTIMEE

S.A. LOGIREM

dont le siège soical est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal en exercice

représentée par Me Stéphane GALLO, membre de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe COULANGE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Novembre 2022, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Par acte sous seing privé en date du 28 décembre 2018, la SA LOGIREM a donné à bail à Monsieur [K] un logement de type T2, situé [Adresse 3], moyennant un loyer mensuel de 428, 33 €, outre les charges.

Se plaignant de dégâts des eaux récurrents depuis son entrée dans les lieux, Monsieur [K] a, par acte en date du 30 octobre 2019, assigné la société bailleresse devant le Tribunal Judiciaire (Pôle Proximité) de TARASCON en vue de faire constater l'état d'insalubrité du logement loué, de se voir dispensé du paiement des loyers à compter du 8 juillet 2019 et d'obtenir la condamnation de la SA LOGIREM à lui verser la somme de 321 € par mois depuis son entrée dans les lieux jusqu'à son relogement effectif, soit la somme de 5 778 €. Il sollicitait également le prononcé de la résiliation du bail aux torts exclusifs de la SA LOGIREM, la condamnation de la société bailleresse à lui verser la somme de 5 000 € pour manquement à son obligation de délivrance ainsi que celle de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par jugement en date du 29 septembre 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de TARASCON a condamné la SA LOGIREM à verser à Monsieur [K] la somme de 3 500 € au titre du manquement à son obligation de délivrance, celle de 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance. Il a, en revanche, débouté la SA LOGIREM et Monsieur [K] du surplus de leurs demandes.

Par déclaration au greffe en date du 25 janvier 2021, Monsieur [K] a interjeté appel de cette décision. Il demande à la Cour de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a limité la condamnation de la SA LOGIREM, au titre du manquement à son obligation de délivrance, à la somme de 3 500 € et l'a débouté du surplus de ses demandes. Ainsi, il sollicite que soit constaté l'état d'insalubrité de l'appartement, une dispense du paiement de ses loyers à compter du 8 juillet 2019, la condamnation de la SA LOGIREM à lui verser une indemnité de 321 € par mois soit la somme de 8 667 € en réparation de son préjudice de jouissance, celle de 20 000 € à titre de dommages-intérêts pour manquement à son obligation de délivrance et celle de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre la condamnation de son adversaire aux entiers dépens.

Il soutient :

que le logement qui lui est loué par la SA LOGIREM est insalubre car de nombreux dégâts des eaux sont survenus et affirme que l'appartement présente des problèmes d'infiltrations et d'humidité, provoquant des coupures d'électricités, l'apparition de moisissures sur les murs et la prolifération de nuisibles.

que l'exception d'inexécution, en l'espèce le défaut de paiement des loyers, est parfaitement justifiée dans la mesure où la société bailleresse a manqué à son obligation de délivrance d'un logement décent.

que le fait pour la SA LOGIREM de ne pas avoir procédé aux travaux pour remédier aux désordres observés dans le logement constitue un manquement à son obligation de délivrance, lui causant un préjudice de jouissance et justifiant l'octroi d'une indemnité équivalente à 80 % du montant du loyer.

que ce même manquement de la SA LOGIREM à son obligation de délivrance conforme justifie de porter le montant de l'indemnité accordée à titre de dommages-intérêts à la somme de 20 000 €, en raison de l'importance des désagréments subis.

La SA LOGIREM conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [K] du surplus de ses demandes. En revanche, elle sollicite la réformation du jugement rendu le 29 septembre 2020 par le Tribunal Judiciaire (Pôle Proximité) de TARASCON en ce qu'il l'a condamnée à verser à la SA LOGIREM la somme de 3 500 € au titre du manquement à son obligation de délivrance. De plus, elle demande à la Cour de débouter Monsieur [K] du surplus de ses demandes et de le condamner à lui verser la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre la condamnation de son adversaire aux dépens d'appel.

A l'appui de son recours, elle fait valoir :

qu'elle n'a pas manqué à son obligation de délivrance et n'aurait donc pas dû être condamnée à indemniser Monsieur [K] à hauteur de 3 500 € car elle a entrepris de nombreuses démarches et travaux afin de résoudre les problèmes rencontrés par le locataire.

que les pièces versées aux débats par Monsieur [K] ne suffisent pas à démontrer l'état d'insalubrité du logement car il s'agit de constats dressés par des personnes dont la compétence technique peut être questionnée, une voisine certainement amie du demandeur ou n'attestant pas de l'état d'insalubrité du logement.

que les demandes de relogement et de résiliation du bail sont incompatibles et, en tout état de cause, infondées car Monsieur [K] ne démontre pas l'existence d'un comportement fautif de sa bailleresse.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que, par acte sous seing privé en date du 28 décembre 2018, la SA LOGIREM a donné à bail à Monsieur [K] un logement de type T2, situé [Adresse 3], moyennant un loyer mensuel de 428, 33 €, outre les charges ;

Qu'il s'est, régulièrement et dès son entrée dans les lieux, plaint de désordres affectant le logement loué, notamment de dégâts des eaux ;

Attendu qu'il résulte des dispositions des articles L.1331-22 et L.1331-23 du Code de la santé publique que l'insalubrité se définit comme l'état de dégradation d'un logement tel que la sécurité et la santé de l'occupant sont en danger réel et constant ;

Que le loyer cesse d'être dû à compter du premier jour du mois qui suit l'envoi de l'arrêté d'insalubrité ;

Attendu que les services techniques municipaux, dans leur courrier recommandé adressé à la SA LOGIREM en date du 8 juillet 2019, n'affirment pas que le logement est insalubre ;

Attendu que dans son rapport de visite du 10 février 2020, l'association SOLIHA ne constate pas davantage l'état d'insalubrité du logement loué ;

Attendu, en tout état de cause, qu'aucun arrêté préfectoral n'a été pris en vue de constater l'état d'insalubrité du logement loué par la SA LOGIREM à Monsieur [K] ;

Que dans ces conditions, ne peut être réalisé aucun constat de l'état d'insalubrité du logement litigieux ;

Attendu que l'article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 pose les critères du logement décent, celui-ci ne devant pas présenter de risques manifestes pour la sécurité physique ou la santé, devant répondre à un critère de performance énergétique minimale et être doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation ;

Que cette notion d'indécence du logement est distincte de celle d'insalubrité, préalablement évoquée ;

Que l'article 1719 du Code civil dispose que le bailleur est obligé de délivrer au preneur un logement décent, d'entretenir ce logement et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant toute la durée du bail ;

Qu'il résulte des dispositions de l'article 1720 du même code que le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toute espèce et doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les réparations locatives ;

Attendu que sur le fondement des dispositions de l'article 1219 du Code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave ;

Que l'article 1231-1 du Code civil dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommage et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure ;

Attendu que Monsieur [K] démontre qu'il a subi plusieurs dégâts des eaux dans le logement qui lui a été loué par la SA LOGIREM ;

Qu'il produit des photos attestant du fait que ces dégâts des eaux ont provoqué des cloques aux murs et aux plafonds ainsi que des chutes de peinture et l'apparition de nuisibles ;

Que ces désordres sont le résultat de l'humidité qui imprègne en permanence le logement ;

Que Monsieur [K] produit plusieurs certificats médicaux attestant de la dégradation de son état de santé du fait de cette humidité et de l'amélioration de celui-ci depuis son départ du logement ;

Attendu en outre, en ce qui concerne la performance énergétique minimale du logement, que l'appartement loué par la SA LOGIREM à Monsieur [K] ne respecte pas les critères d'étanchéité de l'air, de l'eau et d'existence d'une aération suffisante ;

Qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA LOGIREM a manqué à son obligation de délivrance d'un logement décent ;

Que dans ces conditions, il importe peu que la société bailleresse ait accompli de nombreuses démarches en vue de mettre un terme aux désordres affectant le logement dans la mesure où il s'agit d'une obligation de résultat ;

Qu'au vu de la gravité des désordres constatés dans le logement et des répercussions sur l'état de santé de Monsieur [K], ce manquement peut être considéré comme suffisamment grave ;

Qu'il justifie, dès lors, le refus de Monsieur [K] d'exécuter sa propre obligation, en l'espèce le fait de payer son loyer ;

Que Monsieur [K] a donc légitimement cessé de payer son loyer à compter du 8 juillet 2019, date du courrier adressé par les services techniques de la mairie de [Localité 4] attestant du caractère indécent du logement ;

Qu'outre l'exception d'inexécution, Monsieur [K] est fondé à demander réparation du préjudice subi en raison du dommage causé par le manquement de la SA LOGIREM à son obligation de délivrance d'un logement décent ;

Attendu cependant que Monsieur [K] ne verse aux débats aucun justificatif attestant de l'étendue de son préjudice et justifiant de porter le montant des dommages-intérêts, accordés en première instance, à la somme de 20 000 € ou d'y adjoindre une indemnité correspondant à 80 % du montant du loyer par mois d'occupation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de réformer le jugement rendu en date du 29 septembre 2020 par le Tribunal Judiciaire ( Pôle Proximité ) de TARASCON en ce qu'il a limité le montant des dommages-intérêts octroyés à Monsieur [K] à la somme de 3 500 € ;

Attendu qu'il sera alloué à Monsieur [K], qui a dû engager des frais irrépétibles pour défendre ses intérêts en justice, la somme de 1 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que la SA LOGIREM, qui succombe, supportera les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

REFORME le jugement rendu le 29 septembre 2020 par le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de TARASCON en ce qu'il a débouté Monsieur [K] de sa demande de dispense du paiement des loyers ;

LE CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT Monsieur [K] fondé à ne pas avoir exécuté son obligation de verser son loyer à la SA LOGIREM, à compter du 8 juillet 2019 ;

REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE la SA LOGIREM à verser à Monsieur [K] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

LA CONDAMNE aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-8
Numéro d'arrêt : 21/01143
Date de la décision : 16/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-16;21.01143 ?
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