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10/11/2022 | FRANCE | N°21/14818

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-2, 10 novembre 2022, 21/14818


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2



ARRÊT

DU 10 NOVEMBRE 2022



N° 2022/ 738













Rôle N° RG 21/14818 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIIBN







[I] [S]





C/



[U] [E]



























Copie exécutoire délivrée

le :

à :



Me Laurent PARIS



Me Philippe CAMPS










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Décision déférée à la Cour :



Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Juge des contentieux de la protection de TOULON en date du 14 Septembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/00340.





APPELANT



Monsieur [I] [S]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/11780 du 22/10/2021 accord...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 10 NOVEMBRE 2022

N° 2022/ 738

Rôle N° RG 21/14818 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIIBN

[I] [S]

C/

[U] [E]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Laurent PARIS

Me Philippe CAMPS

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Juge des contentieux de la protection de TOULON en date du 14 Septembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/00340.

APPELANT

Monsieur [I] [S]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/11780 du 22/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE),

né le 27 Juin 1939 à [Localité 5]

demeurant [Adresse 3]

représenté et assisté par Me Laurent PARIS, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

Madame [U] [E]

née le 12 Août 1976 à [Localité 4]

demeurant [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Philippe CAMPS, avocat au barreau de TOULON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Catherine OUVREL, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine OUVREL, Présidente

Mme Sylvie PEREZ, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Caroline BURON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2022,

Signé par Mme Catherine OUVREL, Présidente et Mme Caroline BURON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon bail sous seing privé du 1er avril 2011, la SCI Le Gabon, aux droits de qui vient désormais madame [U] [E], a donné en location à monsieur [I] [S], un logement situé [Adresse 2], moyennant le paiement d'un loyer mensuel initial de 260,98 €, outre 15 € à titre de provision pour charges.

Madame [U] [E] a fait délivrer un commandement de payer daté du 20 mars 2020 visant la clause résolutoire du bail et a mis en demeure monsieur [I] [S] de lui régler la somme de 4 440,24 €.

Par ordonnance de référé en date du 14 septembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire, pôle de proximité, de Toulon a :

constaté qu'il n'existe pas de dette locative au mois de janvier 2021 inclus,

débouté madame [U] [E] de sa demande de condamnation de monsieur [I] [S] au titre de la dette locative,

constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail conclu entre les parties à la date du 20 mai 2020,

' ordonné, à défaut de départ volontaire, l'expulsion de monsieur [I] [S] et de tous occupants de son chef, avec le concours de la force publique, passé le délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, conformément aux dispositions des articles L 412-1 et suivants, R 411-1 et suivants, R 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

' condamné monsieur [I] [S] à payer à madame [U] [E] à titre provisionnel une indemnité d'occupation égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus, en cas de non résiliation du bail, soit 296,28 € à compter du 20 mai 2020 et jusqu'à libération complète et effective des lieux,

' dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus,

' condamné chaque partie à supporter la moitié des dépens de l'instance, comprenant le coût du commandement de payer et de l'assignation,

' dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration reçue au greffe le 19 octobre 2021, monsieur [I] [S] a interjeté appel de cette décision, l'appel portant sur toutes les dispositions de l'ordonnance déférée dûment reprises sauf celles relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

Par dernières conclusions transmises le 30 novembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, monsieur [I] [S] demande à la cour de :

réformer l'ordonnance entreprise,

rejeter l'ensemble des demandes de madame [U] [E],

prononcer la suspension de la clause résolutoire,

lui accorder les plus larges délais de paiement,

dire n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner madame [U] [E] au paiement des dépens.

Par dernières conclusions transmises le 10 décembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, madame [U] [E] sollicite de la cour qu'elle :

confirme l'ordonnance entreprise,

déboute monsieur [I] [S] de ses demandes,

condamne monsieur [I] [S] à lui verser la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

juge que chaque partie conserve à sa charge les dépens de l'instance.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance en date du 19 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences

En application des articles 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

En application des articles 1728, 1741 du code civil et 15 I de la loi du 6 juillet 1989, le locataire a pour obligation principale le paiement du loyer. Un manquement grave et répété à cette obligation justifie la résiliation du contrat ou la délivrance d'un congé pour ce motif à l'initiative du bailleur.

L'article 24 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version applicable à l'espèce, tendant à améliorer les rapports locatifs dispose : I.-Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.(...)

Le commandement de payer reproduit, à peine de nullité, les dispositions du présent article et des trois premiers alinéas de l'article 6 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant la mise en 'uvre du droit au logement, en mentionnant la faculté pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement, dont l'adresse de saisine est précisée.

III.-A peine d'irrecevabilité de la demande, l'assignation aux fins de constat de la résiliation est notifiée à la diligence de l'huissier de justice au représentant de l'Etat dans le département au moins deux mois avant l'audience, afin qu'il saisisse l'organisme compétent désigné par le plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l'offre globale de services d'accompagnement vers et dans le logement prévue à l'article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée. Cette notification s'effectue par voie électronique par l'intermédiaire du système d'information prévu au dernier alinéa de l'article 7-2 de la même loi. La saisine de l'organisme mentionné à la première phrase du présent III peut s'effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret. L'organisme saisi réalise un diagnostic social et financier au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en mesure de présenter leurs observations, et le transmet au juge avant l'audience, ainsi qu'à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ; le cas échéant, les observations écrites des intéressés sont jointes au diagnostic.

En l'occurrence, il résulte des pièces communiquées que les parties sont liées par un bail écrit en date du 1er avril 2011 dans lequel est insérée une clause résolutoire applicable de plein droit en cas de non-paiement des loyers et charges dans le délai de deux mois à compter de la délivrance d'un commandement de payer.

Par acte délivré le 20 mars 2020, madame [U] [E] a fait commandement à monsieur [I] [S] de payer la somme de 4 440,24 € et a manifesté son intention de se prévaloir de la clause résolutoire précitée.

En l'espèce, le commandement de payer est resté infructueux en ce que la somme commandée n'a pas été acquittée dans le délai de deux mois susvisé, cet élément n'étant pas contesté et résultant du dernier extrait de compte locatif produit, c'est-à-dire arrêté au 30 janvier 2021.

En conséquence, le contrat de bail se trouve résilié depuis le 20 mars 2020, ce que le premier juge a justement apprécié.

Sur la provision pour dette locative

En l'occurrence, aux termes du dernier décompte produit par l'intimée, il appert une dette de 249 € au 31 janvier 2021 eu égard à deux versements de la caisse d'allocations familiales pour juin et juillet 2020 dont monsieur [I] [S] apporte la preuve.

Monsieur [I] [S] pour sa part reconnaît, aux termes de ses écritures, devoir encore 50 € à son bailleur.

Pour autant, le premier juge n'a retenu, au jour où il a statué et au vu des éléments qui lui étaient présentés, aucune dette à la charge de l'appelant et a débouté madame [U] [E] de sa demande à ce titre. Si monsieur [I] [S] sollicite l'infirmation de l'ordonnance, il demande le rejet de toutes les demandes de l'intimée, cette dernière, aux termes de ses dernières conclusions, ne sollicitant que la confirmation de l'ordonnance.

Celle-ci s'impose donc et aucune condamnation ne peut être prononcée au titre d'une dette locative provisionnelle à la charge de monsieur [I] [S].

Sur les délais de paiement

En vertu des dispositions de l'article 24 (V) de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version applicable à l'espèce, le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l'article 1343-5 s'applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d'office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l'obligation prévue au premier alinéa de l'article 6 de la présente loi. Pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus ; ces délais et les modalités de paiement accordés ne peuvent affecter l'exécution du contrat de location et notamment suspendre le paiement du loyer et des charges. Si le locataire se libère dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ; dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.

Par application de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.

La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Toute stipulation contraire est réputée non écrite.

En l'occurrence, il convient d'observer que la seule dette locative qui puisse être déterminable, en dehors de toute prétention émise à ce titre par madame [U] [E], compte tenu du décompte produit par l'intimée à la date du 31 janvier 2021 faisant apparaître un solde débiteur de 249 €, et, compte tenu du justificatif de paiement fourni par monsieur [I] [S] à hauteur de 206 € le 3 février 2021, s'élève à 43 €. Monsieur [I] [S] lui-même admet être redevable de 50 € envers madame [U] [E].

Il est justifié d'une régularisation des paiements de l'allocation logement par la caisse d'allocations familiales, ayant grandement contribué à apurer la dette locative, ainsi que du paiement régulier, bien que parfois en retard, de son loyer par l'appelant depuis mai 2020, et ce jusqu'en février 2021, aucun décompte ultérieur n'étant versé aux dossiers par l'une ou l'autre des parties.

Monsieur [I] [S] perçoit 915 € mensuels de retraite, étant âgé de 82 ans.

Les revenus actuels de l'appelant lui permettent ainsi de faire face à son loyer courant, ainsi qu'à l'apurement de son reliquat de dette.

Au vu des efforts de paiement consentis, il convient de faire droit à la demande de délai de paiement présentée par monsieur [I] [S], et donc de suspendre la clause résolutoire. L'ordonnance entreprise sera donc infirmée en ce qu'elle a ordonné son expulsion immédiate et en ce qu'elle a rejeté l'octroi de tels délais.

Sur l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens

L'ordonnance entreprise sera confirmée sur la charge des dépens et l'absence d'indemnité au titre des frais irrépétibles.

En revanche, en appel, il convient de condamner madame [U] [E] au paiement des dépens.

L'équité et la situation économique des parties commandent de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a constaté l'acquisition de la clause résolutoire au 20 mars 2020, débouté madame [U] [E] de sa demande de condamnation de monsieur [I] [S] au paiement d'une dette locative, condamné chaque partie à supporter ses propres dépens et dit n'y avoir lieu au paiement d'une indemnité de 700 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Infirme l'ordonnance entreprise en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Suspend les effets de la clause résolutoire du bail et dit que cette clause sera réputée n'avoir jamais joué si l'échéancier accordé ci-après est respecté,

Autorise monsieur [I] [S] à se libérer du paiement de la dette admise à hauteur de 50 € en 10 mensualités de 5 € chacune, en sus du paiement du loyer courant, avec paiement du solde à l'échéance,

Dit qu'à défaut de paiement d'une seule échéance ou d'un terme de loyer courant à son échéance :

- la totalité de la dette redeviendra immédiatement exigible,

- la clause résolutoire reprendra ses effets,

- il pourra être procédé, à défaut de départ volontaire ou de meilleur accord entre les parties, à l'expulsion de monsieur [I] [S] et de tous occupants des lieux loués situés [Adresse 2], avec l'assistance de la force publique si besoin est,

- il sera procédé, conformément à l'article L 433-1 du code des procédures civiles d'exécution, à la remise des meubles se trouvant sur les lieux, aux frais de la personne expulsée, en un lieu désigné par celle-ci, et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier de justice chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer,

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile et déboute madame [U] [E] de sa demande à ce titre,

Condamne madame [U] [E] au paiement des dépens, qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-2
Numéro d'arrêt : 21/14818
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;21.14818 ?
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