COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 04 NOVEMBRE 2022
N° 2022/236
Rôle N° RG 19/02599 - N° Portalis DBVB-V-B7D-BDZGY
[V] [N]
C/
[B] [T]
Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4] EST
Copie exécutoire délivrée
le :04 novembre 2022
à :
Me Thibault PINATEL, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 149)
Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 51)
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARTIGUES en date du 28 Décembre 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 18/00206.
APPELANT
Monsieur [V] [N], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Christian SALORD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Maître [B] [T] pris en sa qualité de Mandataire Liquidateur de la SARL PAPALINO BOUIS, demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Thibault PINATEL, avocat au barreau de MARSEILLE
Association UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4] Représentée par sa directrice nationale Mme [K] [H], demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Frédéric LACROIX, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 04 Novembre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 04 Novembre 2022
Signé par Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Le 15 mai 2007 M [N] a été embauché en qualité de conducteur routier groupe 6 coefficient 138 M de l'annexe ouvriers de la convention collective nationale de transports routiers par la S.A.R.L. Transports Papalino Bouis en contrepartie d'un salaire mensuel de base de 1475,75 euros brut outre diverses primes pour 151h 67 de travail mensuel. Le contrat fixe une durée effective de travail de 169h par mois.
Le 14 mars 2016 la S.A.R.L. Transports Papalino Bouis a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Marseille, la SCP DOUHAIRE AZIERI a été désignée en qualité d'administrateur judiciaire et Maître [T] en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement du tribunal de commerce de Marseille en date du 25 avril 2015 le redressement judiciaire a été étendu à la société nouvelle de transports Papalino.
Par jugement en date du 19 juin 2017 le tribunal de commerce de Marseille a ordonné la cession d'une partie des actifs des sociétés S.A.R.L. transports Papalino Bouis et Société nouvelle de transports Papalino à la Société TRANSPORTS PREVOST qui a repris les contrats de travail de 205 des 209 salariés et les charges dues au titre des congés payés mais a expressément exclu de son offre de reprise tous autres charges ou droits acquis des salariés notamment au titre des heures supplémentaires.
Par jugement du 11 septembre 2017 en l'état de la cession intervenue, aucune solution de redressement n'étant possible, le Tribunal de commerce de Marseille a converti la procédure en liquidation judiciaire des sociétés S.A.R.L. transports Papalino Bouis et Société nouvelle de transports Papalino et nommé Maître [T] es qualité de liquidateur.
Le 24 avril 2018 M [N] a saisi le conseil de Prud'hommes de Martigues de demandes dirigées contre la société de transport Papalino Bouis représentée par son liquidateur en rappel de repos compensateurs , de primes, congés payés et dommages intérêts pour défaut de visites médicales obligatoires, non respect des temps de repos hebdomadaires et travail dissimulé outre les intérêts au taux légal . Il sollicite également la remise de bulletins de salaires rectifiés et une somme au titre de l'article 700 du CPC outre la condamnation de la société de transport Papalino Bouis représentée par son liquidateur aux dépens
L'Unedic AGS/CGEA de [Localité 4] a été mise en cause .
Par jugement en date du 28 décembre 2018 sont la lettre de notification est revenue ' non réclamée ' le 22 janvier 2019 le conseil de prud'hommes de Martigues a :
Vu la mise en cause des organes de la procédure collective
Vu la saisine du 24 avril 2018
Vu le rejet en raison de la production d'une pièce et d'une demande touchant à la cotisation des salariés aux caisses de retraite qui n'avait pas été soumise avant la fin des échanges entre les parties
Vu l'irrecevabilité relative à la prescription en début d'audience
Dit et jugé M [N] mal fondé en partie en son action
Dit et jugé prescrite une partie de certaines de ses demandes connues par le conseil sur I'année 2013/ 2014 jusqu 'au 24 avril 2015 en ce qui concerne le rappel de salaire et rémunération .
Vu l'absence de précision sur toutes les demandes.
vu l 'absence de pièces et de calculs précis correspondant aux sommes demandées
Débouté de l'intégralité des demandes
Rappellé qu 'en présence de la procédure collective intervenue en septembre 2017 les intérêts légaux ne peuvent se comptabiliser
Vu les articles 695 et 696 Code de Procédure Civile,
Mis les dépens à la charge de M [N]
Par déclaration en date du 14 février 2019 M [N] a interjeté appel de la décision dont il sollicite l'infirmation en ce qu'elle l'a débouté de chacune de ses demandes.
Par conclusions récapitulatives N°3 notifiées le 3 setpembre 2022 par RPVA auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposés de ses moyens et prétentions , il demande à la cour d'infirmer le jugement et de
' fixer la créance du salarié au passif de la liquidation judiciaire de l'employeur et du chef
des demandes ci-après précisées :
- Rappel de repos compensateurs '............ '.................................. 1449 €
- Dommages et intérêts pour le fait que l'employeur n'a pas fait effectuer les visites
médicales obligatoires .......................................................................... 3000 €
- Dommages et intérêts pour non respect de la réglementation Européenne sur le
non respect des repos hebdomadaires .......................................................... 40 000 €
- Rappel de congés fractionnés supplémentaires par an ................... 1 500 €
- Dommages et intérêts pour travail dissimulé (article L8221-1 et suivants du code
du travail)....................................................................................................10 000 €
- Rappel de congés payés 53 jours voir bulletin de mai 2017 non réglés par le
mandataire 7311 euros
' Ordonner la délivrance des bulletins de paie rectifiés et conformes, et ce, sous
astreinte de 100 € par jour de retard et par document
'Ordonner la fixation de la créance du salarié au passif de la société de l'employeur
aux intérêts au taux légal sur l'ensemble des condamnations à compter de la demande en
justice
'Fixer la créance du salarié au passif de la liquidation judiciaire l'employeur aux
entiers dépens ainsi que l'Article 700 du CPC, soit la somme de 1.500 €
Il fait valoir
'Qu'il effectuait plus de 108 heures par trimestre et peut donc prétendre à un repos compensateur de 2,5 jour par trimestre soit 17,5 jours d'octobre 2015 à juin 2017 ; qu'il justifie du temps de travail accompli par les relevés annexés aux bulletins de salaires, récapitulé en pièce 4 de son dossier.
'Que l'employeur ne lui a jamais fait passer les visites médicales obligatoires tous les 6 mois pour les travailleurs de nuit
'Que les décomptes du temps de travail produits aux débats démontrent qu'il ne bénéficiait pas de deux jours de repos hebdomadaire,
'Que 53 jours de congés payés non repris par le nouvel employeur ne lui ont pas été réglés ( bulletin de salaire de juin 2017)
'Qu'il peut réclamer une indemnité compensant 2,5 jours de congés fractionnés par an soit 10 jours à 150 euro par jour
'Qu'il est ainsi démontré que la s.A.R.L. Transport Papalino Bouis se livrait de manière intentionnelle au travail dissimulé
Par conclusions notifiées par RPVA le 15 juillet 2019 Maître [T] es qualité de liquidateur judiciaire de la société la s.A.R.L. Transports Papalino Bouis demande à la cour de :
Donner acte à Maître [B] [T] de son intervention en sa seule qualité de Mandataire Liquidateur selon jugement du Tribunal de commerce de Marseille en date du 11 septembre 2017,
Entendre la Cour dire et juger prescrites les demandes et actions relatives aux salaires et accessoires de salaire antérieurs au 22 janvier 2015,
Dire et juger prescrites les demandes indemnitaires relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail antérieures au 22 janvier 2016, en application des dispositions des articles L 3245-1 et L 1471-1 du Code du travail.
Entendre la Cour constater que l'appelant ne verse aux débats aucun élément de nature à démontrer la matérialité de ses prétentions.
Entendre la Cour dire et juger non fondé l'appel interjeté et confirmé en conséquence les dispositions du jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de MARTIGUES en date du 28 décembre 2018.
Entendre la Cour constater que durant la période d'observation et les poursuites d'activités autorisées, la mission de Maître [B] [T] excluait toute assistance ou remplacement dans la gestion des sociétés TRANSPORTS PAPALINO BOUIS et SOCIÉTÉ NOUVELLE TRANSPORTS PAPALINO
Entendre la Cour donner acte à Maître [B] [T], es qualité, de ce qu'il s'en rapporte
quant à la délivrance de bulletins de paie et documents sociaux, sous réserve que la décision
à intervenir en fixe précisément les périodes d'imputation et les montants dans le cadre de
la garantie légale du CGEA.
Entendre la Cour décharger Maître [B] [T] de toutes condamnations.
Le liquidateur fait valoir
'Que la demande au titre des repos compensateurs n'est pas justifiée en droit comme en fait en fait.
' Que la demande au titre des visites médicales est prescrite , que la déclaration d'embauche entraine la mise en ouvre automatique de l'examen médical et que la seule sanction encourue l'est au bénéfice de l'administration du travail.
'Que la demande au titre des repos hebdomadaire est prescrite et ne repose que sur les seuls décomptes du salarié.
'Que la demande au titre des congés dus et du fractionnement des congés est prescrite et n'est en tout état de cause pas établie matériellement
'Que l'élément intentionnel du travail dissimulé n'est pas établi en l'espèce
Par conclusions notifiées le 22 juillet 2019 l' Unedic AGS CGEA de [Localité 4] demande à la cour de
Vu la procédure collective ouverte contre SNT PAPALINO : redressement judiciaire du 25.04.2016 ;
Jugement de cession du 19/06/2017 et Liquidation judiciaire après cession le 11/09/2017 ;
Vu la mise en cause de l'UNEDIC-AGS CGEA DE [Localité 4] délégation, en application articles L. 625-1
et 641-14 (L.J) du code de commerce ;
Vu l'Article L3245-1 C.TRAV. Modifié par LOI n°2013-504 du 14 juin 2013 - art. 21
Vu l'Article L1471-1 C.TRAV. Créé par LOI n°2013-504 du 14 juin 2013 - art. 21
Vu la requête introductive d'instance de M. [G] [Y] en date du 22/01/2018.
Dire et juger que les demandes relatives aux salaires et accessoires de travail, antérieures au
24/04/2015 sont prescrites.
Dire et juger que les demandes relatives indemnitaires relatives à l'exécution et à la rupture des contrats antérieures au 24/04/2016 sont prescrites.
Vu les articles 6, 9 et 15 du code de procédure civile ;
Vu les articles 1231-1 et suivants du code civil ;
Vu l'article 1321-2 du code des transports ;
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;
Vu les articles L 3121-16 et suivants du code du travail ;
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail
Vu les articles R 4624-10 et suivants code du travail ;
Vu l'Article L8223-1 du code du travail.
Vu la CCN des transports routiers ;
'Débouter M. M. [Y] des fins de son appel et Confirmer le jugement du conseil des prud'hommes de MARTIGUES du 28/12/2018 ;
Subsidiairement,
Faute d'élément probants versés au débat de nature à justifier un préjudice à hauteur de 3000€ au titre du défaut de visites médicales, limiter l'indemnisation du salarié à la somme de 30 € soit une somme légèrement supérieure au montant de la consultation d'un médecin spécialiste conventionné ;
Vu les articles L. 3253-6 et suivants du code du travail ;
Dire et juger qu'en application de l'article L. 3253-17 du code du travail, la garantie AGS est limitée, toutes sommes et créances avancées confondues, à un ou des montants déterminés par décret (D 3253-5C.TRAV.), en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d'assurance chômage, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d'origine légale, ou d'origine conventionnelle imposées par la loi.
Dire et juger que l'obligation du CGEA DE [Localité 4] de faire l'avance du montant total des créancesgaranties aux articles L. 3253-6 et suivants du Code du travail, compte tenu du plafond applicable (articles L.3253-17 et D. 3253-5), ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder
à leur paiement en vertu de l'article L. 3253-19 du Code du travail ;
Dire et juger que le C.G.E.A. DE [Localité 4] ne doit pas sa garantie pour les demandes au titre des frais irrépétibles visés à l'article 700 du CPC, des dépens, de l'astreinte, des cotisations patronales ou résultant d'une action en responsabilité ;
Dire et juger que le jugement d'ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels (art. L. 622-28 C.COM) ;
Condamner M. M. [Y] aux entiers dépens d'instance.
Elle fait valoir
' Que la prescription est acquise pour les demandes de salaires et accessoires antérieurs au 2' avril 2015 ainsi que pour les demandes indemnitaires consécutives à l'exécution du contrat de travail antérieures au 24 avril 2016
' Que pour les entreprises de transports qui sont soumises à l'article 5 du décret du 26 janvier 1983 modifié par le décret du 4 janvier 2007 les droits à repos compensateurs sont calculés par trimestre civil au regard du nombre d'heures supplémentaires effectuées sur le trimestre selon les règles suivantes
- De 41 à 79 HS effectuées sur le trimestre : 1 jour de RC acquis pour le trimestre
- De 80 à 108 HS effectuées sur le trimestre : 1,5 jours de RC acquis pour le trimestre
- + de 108 HS effectuées sur le trimestre : 2,5 jours de RC acquis pour le trimestre.
Qu'en effet par application de l'article 5- 4° du décret du 26 janvier 1983 , est considéré comme constituant une heure supplémentaire, tout temps de service effectué au-delà :
- De 43 heures hebdomadaires pour un « Conducteur Longue Distance » (classification : groupe 6,coefficient 150M).
- De 39 heures hebdomadaires pour un « Conducteur courte distance » (classification :
Groupe 6, coefficient 138)
Que cette spécificité dans le seuil de déclenchement des heures supplémentaires s'explique par les 4 heures ou 8 heures d'équivalence qu'effectuent chaque semaine les Conducteurs routiers, selon qu'ils appartiennent à la catégorie « conducteur courte distance » (4 heures d'équivalence hebdomadaire) ou à la catégorie «conducteur longue distance » (8 heures) d'équivalence hebdomadaire).Ces heures d'équivalence sont certes majorées à 25% par application de l'article 2.2.1 de l'accord du 23avril 2002 annexé à la CCN des transports routiers, mais ne sont pas pour autant considérées comme étant des heures supplémentaires.
Que les jours de repos compensateurs acquis ne peuvent donner lieu au versement d'une indemnité compensatrice sauf en cas de départ du salarié de l'entreprise .Qu'en l'espèce la demande n'est pas justifiée en fait
'Qu'en toute hypothèse il résulte de l'application combinée des dispositions des articles 1147 devenu 1231-1 et 1153devenu 1231-16 du code civil que dans les obligations qui se bornent au paiement d'une somme d'argent,en l'espèce l'obligation du versement du salaire par l'employeur, les dommages et intérêts résultant du retard ne consistent jamais que dans les intérêts moratoires de la créance sauf à démontrer l'existence d'un préjudice distinct du retard dans le paiement
'Que le préjudice résultant du défaut de visites médicales obligatories n'est pas démontré.
'Que le préjudice résultant du défaut de respect des temps de repos n'est pas démontré
'Que le caractère intentionnel du travail dissimulé dont entend se prévaloir l'appelant n'est pas démontré .
L'ordonnance de clôture est en date du 5 septembre 2022 ;
Motifs de la décision
La cour rappeler que les demandes tendant à voir ' dire et juger que ' , 'entendre constater que' ne sont pas des prétentions sur lesquelles elle doit statuer mais des moyens qui ne la saisissent pas.
I sur les demandes en rappel de salaire
En l'espèce entrent dans cette catégorie la demande d'indemnisation des repos compensateurs, la demande au titre du paiement des jours de congés fractionnés ainsi que la demande d'indemnisation de congés payés.
L'article L. 3245-1 du code du travail (article 21 de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013) dispose désormais que : "l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour où lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture."
Ce texte issu de la loi du 14 juin 2013 comporte deux mentions relatives au temps :
- la première mention fixe un délai pour agir, c'est-à-dire pour saisir le tribunal ;
- la seconde mention temporelle n'est pas un délai de prescription mais une limite imposée par le législateur relativement à la période sur laquelle peut porter le demande des arriérés de salaires.
Autrement dit l'article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 instaure une déconnexion entre le délai pour agir en paiement du salaire et la période du chef de laquelle la somme est réclamée.
En application des dispositions transitoires de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 réduisant le délai de prescription des actions en paiement des salaires de 5 ans à 3 ans, le délai de prescription triennale s'applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de ladite loi (soit le 16 juin 2013) , l'action ayant en l'espèce été introduite le 24 avril 2018 la prescription triennale s'applique .
A- Demande au titre des repos compensateurs
En l'espèce la demande au titre de l'indemnisation des repos compensateurs vise expressément la période d'octobre 2015 à juin 2017 au vu du tableau récapitulatif inséré dans les conclusions de l'appelant
Les repos compensateurs étant calculés par trimestre civil en application de l'article 5 du décret du 26 janvier 1983 modifié par le décret du 4 janvier 2007 et aujourd'hui codifié à l'artcile 3312-45 dans le code des transports , relatif aux modalites d'application des dispositions du code du travail concernant la duree du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, la prescription commence à courir à la fin de chaque trimestre . Il en résulte que la prescription n'est pas acquise ;
Il ressort de l'article 5- 3° du decret susvisé que la durée du temps passé au service de l'employeur, ou temps de service, des personnels roulants marchandises est fixée dans les conditions suivantes :
- la durée du temps de service des personnels roulants "grands routiers" ou "longue distance" est fixée à 43 heures par semaine, soit 559 heures par trimestre dans les conditions prévues au paragraphe 3 de l'article 4 du présent décret ;
- la durée du temps de service des autres personnels roulants marchandises, à l'exception des conducteurs de messagerie et des convoyeurs de fonds, est fixée à 39 heures par semaine, soit 507 heures par trimestre;
Est considérée comme heure supplémentaire, pour les personnels roulants, toute heure de temps de service effectuée au-delà des durées mentionnées au 3° . Ces heures supplémentaires ouvrent droit à un repos compensateur dans les conditions définies au 5°de l'article 5 .
Le 5° dispose que les heures supplémentaires mentionnées au premier alinéa du 4° du présent article ouvrent droit pour les personnels roulants à un repos compensateur trimestriel obligatoire dont la durée est égale à :
a) Une journée à partir de la quarante et unième heure et jusqu'à la soixante-dix-neuvième heure supplémentaire effectuée par trimestre ;
b) Une journée et demie à partir de la quatre-vingtième heure et jusqu'à la cent huitième heure supplémentaire effectuée par trimestre ;
c) Deux journées et demie au-delà de la cent huitième heure supplémentaire effectuée par trimestre ;
La cour relève que la pièce 4 de l'appelant, visée dans ses écriture comme faisant justification des repos compensateur , est en l'espèce un courrier de l'employeur qui n'est pas relatif aux repos compsateur
Néanmoins l'analyse des décomptes conducteur de M [N] établis par l'employeur(pièce 2 de l'appelant), démontre que le son temps de service d'octobre 2015 à juin 2017 peut être trimestriellement fixé comme suit étant précisé que MHAMMADI ne conteste pas appartenir à la catégorie des personnels roulants autre que 'grand routier' ou 'longue distance'
1ER octobre 2015 au 31 décembre 2015 775,07 heures soit 268,07 heures supplémentaires
1er trimestre 2016 812,86 heures soit 305,86 heures supplémentaires
2ème trimestre 2016 767,9 heures soit 260,09 heures supplémentaires
3ème trimestre 2016 730,4 heures soit 223,40 heures supplémentaires
4ème trimestre 2016 571,41 heures soit 123,1 heures supplémentaires
1er trimestre 2017 713,52 heures soit 206,52 HS
2ème 2017 531,05 soit 24,05 heures supplémentaires
Il en résulte que l'appelant pouvait en conséquence prétendre sur la période à 15 jours de repos compensateurs;
Il sera alloué de ce chef à M [N] la somme demandées de 1449 euros compremant l'incidence congés payés.
B- demande au titre des congés .
Un solde 51 jours de congés apparait sur le bulletin de salaire de juin 2017, la pièce 5 démontre que ce solde correspond à des congés dus depuis avril 2015 , l'action n'est donc pas préscrite; Toutefois le jugement susvisé du 19 juin 2017 prévoit expressément que la cession au profit de La société Prevost transport est ordonnée avec reprise des contrats de travail et des congés dûs aux salariés de l'entreprise SARL Papalino Bouis ,représentés à la procédure , évalués globalement à la somme de 240 970,89 euros .
Dans ces conditions le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande de ce chef
II demandes portant sur l'éxécution du contrat de travail
En application de l'article L1471-1 du code du travail dans sa version applicableen l'espèce toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
Cette disposition n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7 et L. 1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5.
Ce texte s'applique aux demandes en réparation du préjudice causé par l'inexcution de ses obligations contractuelles par l'employeur telles la demande en dommages intérêts pour non respect des visites médicales obligatoires, la demande fondée sur le non respect des repos hebdomadaires , la demande au titre du travail dissimulé.
A- demande de dommages intérêts au titre du défaut de visite médicale obligatoires
Outre que M [N] ne justifie pas du défaut de visite organisée par l'employeur , il lui appartient en toute hytpothèse de rapporter la preuve d'un préjudice lié au défaut de visite médicale conformément au droit commun de la responsabilité civile, ce qu'il ne fait pas en l'espèce .
En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de ce chef.
B- demande au titre du non respect des repos hebdomadaires
Pour les personnels roulants effectuant des transports soumis au règlement CE n° 561/2006 le repos hebdomadaire normal est de 45 heures avec possibilité d'un repos réduit de 24 heures sur deux semaines consécutives avec obligation de compenser par une période de repos équivalente prise en bloc avant la fin de la troisième semaine.
En l'espèce il convient de souligner que l'appelant ne détaille pas dans ses conclusions les périodes pour lesquelles il considère que les temps de repos n'ont pas été respectés, se contentant de renvoyer à la lecture des décomptes du temps de conduite
Or en application de l'article L 1471-1 du code du travail susvisé les demandes relatives au non respect des repos hebdomaire antérieures au 24 avril 2016 sont prescrites.
Si l'analyse des décomptes conducteur à partir du 24 avril 2016 (pièce 5) démontre que l'employeur a parfois méconnu l'obligation de repos hebdomadaire, M [N] travaillant régulièrement 6 jours sur 7 du lundi au samedi inclus,il convient de souligner que ces jours de repos en réalité travaillés et mentionnés sur les décomptes conducteur ont été comptabilisés dans le calcul du temps de travail ouvrant droit au paiement d'heures supplémentaires et à repos compensateurs et ont donc d'ores et dejà été payés au titre du temps de travail
La Cour de Cassation admet que le non respect de la législation sur le repos porte nécéssairement atteinte à l'équilibre de la vie familiale, à la santé et la sécrurité du salarié.
Il sera alloué à M [N] une somme de 5000 euros de dommages intérêts de ce chef.
C- demande au titre du travail dissimulé
La dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 2°du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué. Le caractère intentionnel ne peut pas se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.
Or en l'espèce la cour relève que si les bulletins de salaires ne mentionnent pas systématiquement les droits à repos compensateurs traduisant les heures supplémentaires accomplies ceux ci figurent néanmoins sur les bulletins de salaire de janvier , février, mars,avril, mai et juin 2017 .Par ailleurs les relevés conducteur et récapitulatifs édités par l'employeur et produits au débats par l'appelant retracent avec exactitude la réalité de l'activité professionnelle de M [N] de sorte que la volonté de frauder n'est pas établie.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M [N] de sa demande à ce titre.
En application des dispositions des artciles L. 622-28 et L 641-3 du code de commerce selon lesquelles le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que de tous intérêts de retard et majorations le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande au titre des intérêts au taux légal sur les sommes dues.
Il n'y a pas lieu en l'espèce de faire droit à la demande tendant à la délivrance de bulletins de salaires rectifiés par le liquidateur.
Le présent arrêt sera déclaré opposable à l'Association pour la Gestion du Régime de Garantie des Créances des Salariés intervenant par l'UNEDIC - AGS CGEA de [Localité 4], laquelle ne sera tenue à garantir les sommes allouées à [N] que dans les limites et plafonds définis aux articles L. 3253-8 à L. 3253-17, D. 3253-2 et D. 3253-5 du code du travai.
Il convient d'allouer à l'appelant une somme de 500 euros au titre de l'article 700 à fixer au passif de la SARL Transports Papalino Bouis et de dire que les dépens d'appel seront inscrit en frais de liquidation judiciaire.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement et contradictoirement
Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté M [N] de ses demandes sauf au titre de l'indemnisation des repos compensateurs et du non respect du repos hebdomadaire et l'a condamné aux dépens.
L'infirme de ces chefs et statuant à nouveau :
- Fixe la créance de M [N] au passif de la liquidation judicaire de la SARL Transport Papalino Bouis à la somme de 1449 euros brut au titre de l'indemnisation des repos compensateurs dûs du 24 avril 2015 au 19 juin 2017
- Fixe la créance de M [N] au passif de la liquidation judicaire de la SARL Transport Papalino Bouis à la somme de 5000 euros de dommages intérêts pour non respect des repos hebdomadaires.
-Fixe la créance de M [N] au passif de la liquidation judicaire de la SARL Transport Papalino Bouis à la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du CPC
Déclare le présent arrêt opposable à UNEDIC-AGS CGEA de [Localité 4] ;
Dit que l'AGS devra garantir, par application des dispositions de l'article L 3253-8 du code du travail, le paiement de la totalité des sommes fixées, à l'exception de celle fixée au titre de l'article 700 du CPC, dans la limite du plafond applicable aux faits de la cause prévu aux articles L 3253-17 et D 3253-5 du même code sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles pour procéder au paiement.
Dit que les dépens de première instance et d'appel seront inscrits en frais de liquidation judiciaire.
Le greffier Le président