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03/11/2022 | FRANCE | N°18/19990

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-6, 03 novembre 2022, 18/19990


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6



ARRÊT AU FOND

DU 03 NOVEMBRE 2022



N° 2022/395



N° RG 18/19990



N° Portalis DBVB-V-B7C-BDQFA







[L] [J] épouse [O]





C/



SA AVIVA ASSURANCES

LA CPAM DES BOUCHES DU RHONE















Copie exécutoire délivrée

le :

à :



-SARL ATORI AVOCATS



-Me [K] [A]











Décision dÃ

©férée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 08 Novembre 2018 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 14/05500.





APPELANTE



Madame [L] [J] épouse [O]

née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 7]

de nationalité Française,

demeurant [Adress...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-6

ARRÊT AU FOND

DU 03 NOVEMBRE 2022

N° 2022/395

N° RG 18/19990

N° Portalis DBVB-V-B7C-BDQFA

[L] [J] épouse [O]

C/

SA AVIVA ASSURANCES

LA CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

-SARL ATORI AVOCATS

-Me [K] [A]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 08 Novembre 2018 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 14/05500.

APPELANTE

Madame [L] [J] épouse [O]

née le [Date naissance 2] 1973 à [Localité 7]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3]

représentée et assistée par Me Fabien BOUSQUET de la SARL ATORI AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Damien NOTO, avocat au barreau de MARSEILLE.

INTIMES

SA ABEILLE IARD,

Anciennement dénommée : SA AVIVA ASSURANCES,

demeurant [Adresse 1]

représentée et assistée par Me Henri LABI, avocat au barreau de MARSEILLE.

LA CPAM DES BOUCHES DU RHONE

Assignée le 30.01.2019,

demeurant [Adresse 4]

Défaillant.

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Septembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président

Madame Anne VELLA, Conseillère

Madame Fabienne ALLARD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Charlotte COMBARET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2022.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Novembre 2022,

Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [O] expose avoir été renversée le jour de son mariage sur un passage protégé le 14/02/2009 à [Localité 5] par un véhicule que conduisait M. [N], assuré auprès de la SA Aviva Assurances (devenue ultérieurement la SA Abeille IARD).

Le médecin traitant de Mme [O] a constaté le surlendemain des cervicalgies avec raideur du rachis, des algies coxo-fémorales à gauche avec hématome de la face externe de la cuisse gauche, des gonalgies gauches, des algies scapulo-humérales gauches, des algies costales gauches et des hématomes multiples. Une incapacité totale de travail de 15 jours a été délivrée, ultérieurement prolongée de 30 jours.

Par ordonnance du 06/05/2009, le juge des référés a condamné la SA Aviva Assurances à payer une provision de 1200,00 € à Mme [O] et a commis aux fins d'expertise médicale le docteur [U]. Ce dernier a déposé son rapport le 10/10/2011, assorti d'un avis sapiteur orthopédie du docteur [I] du 07/07/2011.

Les conclusions médico-légales du docteur [U] étaient les suivantes':

- ITT du 14/02 au 14/11/2009

- consolidation : 14/02/2010

- déficit fonctionnel permanent : 9 %

- souffrances endurées : 3/7

- préjudice esthétique : aucun

- incidence professionnelle': Mme [O] est apte à reprendre dans les conditions antérieures les activités professionnelles qu'elle exerçait avant son accident du 14/02/2009. Le professeur [I] note que «'Mme [O] ne parait pas actuellement à même de réaliser l'activité professionnelle qu'elle effectuait avant l'accident. Cependant, cette incapacité professionnelle ne me paraît pas pouvoir être rattachée de manière directe et certaine au fait accidentel'»

- préjudice d'agrément': les doléances de Mme [O] concernant le retentissement sur ses activités sportives sont corroborées par les lésions initiales. Le professeur [I] indique que « les lésions strictement imputables à l'accident correspondent à un traumatisme important du grand trochanter, susceptible de retentir sur les activités sportives déclarées de la patiente »

- aucuns frais médicaux, pharmaceutiques ou paramédicaux, d'hospitalisation et d'appareillage et de transport postérieur à la consolidation, directement imputables à l'accident ne sont actuellement prévisibles et certains

- l'état de santé de Mme [O] est susceptible d'aggravation

- préjudice sexuel': aucun

- contre-indication pour une grossesse': aucune.

Déclarée inapte à la reprise de son poste par la médecine du travail le 8 mars 2012, Mme [O] a été placée en invalidité catégorie 1. Elle a fait l'objet d'une mesure de licenciement le 06/04/2012.

Par assignation du 15/04/2014, Mme [O] a saisi le tribunal de grande instance de Marseille en réparation de son préjudice ainsi qu'aux fins de nouvelle expertise. Mme [O] contestait en effet la conclusion du docteur [U] selon laquelle la fracture du cotyle gauche n'était pas imputable à l'accident.

Par jugement mixte du 29/10/2015, le TGI de Marseille a constaté que la SA Aviva Assurances ne contestait pas le droit à indemnisation de Mme [O], et a commis aux fins d'expertise judiciaire le docteur [B]. Le rapport a été déposé le 03/10/2016.

Le docteur [B] a admis l'imputabilité à l'accident de la fracture parcellaire du mur postérieur du cotyle ' ce dont résulte une appréciation différente':

- du déficit fonctionnel temporaire,

- de la date de consolidation et

- du taux de déficit fonctionnel permanent.

Par jugement du 08/11/2018, le tribunal de grande instance de Marseille a retenu l'imputabilité de la fracture du cotyle à l'accident, et a':

- évalué le préjudice corporel de Mme [O] à la somme de 13.831,75 €, ventilée comme suit':

' frais divers': 1.350,00 €

' perte de gains professionnels actuels': 5.481,75 €

' incidence professionnelle': rejet

' souffrances endurées': 7.000,00 €

' déficit fonctionnel permanent': rejet

- condamné la SA Aviva Assurances à payer à Mme [O] les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter du jugement':

' 13.831,75 € en réparation de son préjudice corporel, en deniers ou en quittances,

' 1.300,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclaré le jugement commun et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône,

- fixé la créance de la caisse primaire d'assurance maladie à la somme de 109.235,84 €, franchises comprises,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné la SA Aviva Assurances aux entiers dépens, en ce compris les frais des deux expertises judiciaires, avec distraction au profit de Maître Fabien Bousquet, avocat, sur son affirmation de droit.

Pour statuer ainsi, le tribunal de grande instance de Marseille a considéré que':

- la fracture parcellaire déplacée du mur postérieur du cotyle doit être considérée comme imputable à l'accident survenu le 14/02/2009, conformément aux conclusions du second expert, le docteur [B] ;

- la date de consolidation est fixée au 16/02/2016';

- le déficit fonctionnel permanent est fixé à 14'% ;

- la période de déficit fonctionnel temporaire ne doit pas être indemnisée dans la mesure où la période d'indisponibilité de neuf mois du 14/02 au 14/11/2009 a été retenue pour chiffrer la perte de gains professionnels actuels.

Par déclaration du 18/12/2018, Mme [O] a interjeté appel du jugement du TGI de Marseille en ce qu'il a :

- déduit une créance de l'organisme social indue,

- rejeté le préjudice spécifique afférent à la cérémonie de mariage programmée le jour même de l'accident,

- rejeté l'indemnisation du préjudice d'agrément,

- insuffisamment indemnisé les préjudices suivants':

' tierce personne,

' perte de gains professionnels,

' souffrances endurées,

' préjudice d'agrément.

Par arrêt du 23/01/2020, la cour a décidé d'évaluer le préjudice de Mme [O] sur la base des conclusions expertales des docteurs [U] et [I], et a ordonné la réouverture des débats en invitant la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône :

1/ à actualiser ses débours définitifs, en tenant compte :

- de la date de consolidation fixée au 14 février 2010, et

- de la non-imputabilité à l'accident du 14 février 2009 de la fracture parcellaire du mur postérieur du cotyle,

2/ à produire une attestation d'imputabilité des prestations versées à l'accident du 14 février 2009, à l'exclusion de la fracture du cotyle.

- réservé les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelante n°4 notifiées par RPVA le 02/09/2022, Mme [O] demande à la cour de':

- juger l'organisme social déchu de ses droits et défaillant dans l'administration de la preuve,

- juger que la cour n'est saisie que de l'appel de certains postes de préjudices limités par conclusions d'appelant aux postes perte de gains professionnels actuels, assistance par tierce personne, déficit fonctionnel temporaire total, préjudice esthétique temporaire et permanente, préjudice d'agrément et préjudice moral spécifique,

- juger qu'il n'y a pas lieu de déduire la créance de l'organisme social du poste incidence professionnelle évalué par les premiers juges à 20 000 € dont il conviendra de confirmer l'évaluation,

- réformer le jugement dont appel pour les autres postes de préjudices et condamner l'assureur Aviva (Abeille IARD) au paiement des postes de préjudices ainsi évalués :

' perte de gains professionnels actuels : 5 449.50 €

' assistance par tierce personne : 5127.77 €

' déficit fonctionnel temporaire total : 10.800,00 €

' préjudice esthétique temporaire : 1500,00 €

- préjudice d'agrément : 20.000,00 €

- préjudice moral spécifique : 30 000,00 €

- condamner la SA Aviva à verser à la requérante la somme de 3.000,00 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Fabien Bousquet, avocat, sur son affirmation de droit conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, lesquels comprendront les frais d'expertise de MM. [U] et [B], outre ceux des procédures de référé.

Au soutien de ses demandes, Mme [O] fait valoir les arguments suivants':

- il est constant qu'en cas de carence de l'organisme social régulièrement invité à produire ses débours, les juridictions du fond peuvent valablement passer outre et valoriser régulièrement le préjudice subi par la victime (Crim., 15/12/1993, 93-82067)'; la caisse qui n'a pas répondu aux demandes de la cour est déchue de ses droits';

- dépenses de santé actuelles': ce poste ne sera donc pas pris en compte';

- perte de gains professionnels actuels': le docteur [U] retient un arrêt temporaire des activités professionnelles de neuf mois, du 14/02 au 14/11/2009'; le salaire de référence est de 1.573,00 € (moyenne du 4e trimestre 2009) x 9 mois = 14.157,00 € dont il convient de retrancher des indemnités journalières de 270 jours x 32,25 € = 8.707,50 €, soit une perte de gains professionnels actuels de 14.157,00 € - 8.707,50 € = 5.449,50 €';

- incidence professionnelle': le premier juge lui a accordé 20.000,00 € de ce chef mais a imputé le capital invalidité'; Mme [O] n'a pas interjeté appel de ce poste de préjudice, mais en tout état de cause il n'y a pas lieu de déduire le capital invalidité puisque Mme [O] ne perçoit plus de rente et que la caisse primaire est déchue de ses droits';

- assistance par tierce personne': quoique ce poste n'ait été retenu ni par le docteur [U] ni par le docteur [B], Mme [O] a du s'aider de cannes anglaises pour monter et descendre les escaliers'; elle a dû financer une aide à domicile pour un montant de 5.127,77 € dont elle justifie';

- déficit fonctionnel temporaire': le docteur [U] a retenu une période de déficit fonctionnel temporaire du 14/02 au 14/11/2009'; le premier juge a néanmoins rejeté ce poste au motif que la perte de gains professionnels actuels a été réparée au titre de cette période'; en réalité, le déficit fonctionnel temporaire et la perte de gains professionnels actuels n'indemnisent pas le même préjudice puisque le déficit fonctionnel temporaire correspond à la période pendant laquelle la victime ne peut pas pratiquer pleinement ses activités quotidiennes (se laver, faire ses courses, son ménage, etc'), que ces activités soient professionnelles ou personnelles';

- préjudice esthétique temporaire': ce poste n'a pas été retenu à tort par le docteur [U], car la mobilité réduite de Mme [O] pendant plusieurs mois a altéré son apparence à ses yeux et à l'égard des tiers';

- préjudice d'agrément': les époux [O] ont un bateau de plaisance et Mme [O] pratiquait le jet ski, ce préjudice est évalué à 20.000,00 €';

- la circonstance que l'accident advenu à Mme [O] ait eu lieu le jour de son mariage justifie l'admission d'un préjudice moral spécifique distinct des souffrances endurées, dans la mesure où le plus beau jour de sa vie restera à jamais associé à la douleur physique et morale consécutive à cet accident de la circulation.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 02/09/2022, la SA Abeille IARD (anciennement dénommée SA Aviva Assurances) demande à la cour de':

- surseoir à statuer dans l'attente de l'exécution de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 23/01/2020,

À titre subsidiaire,

- débouter Mme [O] de l'ensemble de ses réclamations,

À titre infiniment subsidiaire,

- déclarer satisfactoires les offres contenues dans les présentes écritures,

- condamner Mme [O] aux dépens de l'appel au profit de Maître [K] [A], sur son affirmation.

Au soutien de ses demandes, la SA Aviva Assurances invoque les arguments suivants':

' sur la créance de la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône': quoique la caisse se soit abtenue de produire une créance retraitée, c'est-à-dire sans référence aux conséquences de la fracture du cotyle, il n'y a pas lieu pour autant de rejeter la demande de déduction de la créance de ce tiers payeur des postes incidence professionnelle et déficit fonctionnel permanent';

' sur la liquidation du préjudice corporel de Mme [O]':

- par arrêt du 23/01/2020, la cour a indiqué que la liquidation du préjudice corporel de Mme [O] devait intervenir au vu du premier rapport d'expertise du docteur [U]';

- aucun des deux rapports d'expertise ne retient explicitement une perte de gains professionnels actuels, mais le rapport du docteur [U] admet une incapacité temporaire totale de neuf mois du 14/02 au 14/11/2009': la perte de gains professionnels actuels ne peut donc être calculée que sur ce délai': 1.573,00 € x 9 mois = 14.157,00 €, dont il convient de retrancher les indemnités journalières (32,25 € x 269 jours du 19 février au 14 novembre 2009 = 8.675,25 €), soit un montant de 5.481,75 € réduit à 5.449,50 € pour ne pas méconnaître l'objet du litige';

- assistance par tierce personne': ce poste doit être écarté, ni le docteur [U] ni le docteur [B] ne l'ayant retenu';

- incidence professionnelle': seul l'état séquellaire retenu par le docteur [U] est imputable à l'accident, de sorte que l'incidence professionnelle ne saurait être évaluée à plus de 5.000,00 €, dont à déduire éventuellement les arrérages de la pension d'invalidité reçus en vertu de l'état séquellaire prévu par les rapports [U] et [I] ;

- déficit fonctionnel temporaire': le principe de réparation intégrale, sans perte ni profit pour la victime, interdit une double indemnisation'; la période d'incapacité temporaire totale de travail a déjà été indemnisée au titre de la perte de gains professionnels actuels'et ne saurait l'être en plus au titre du déficit fonctionnel temporaire';

- déficit fonctionnel permanent': ce poste peut être évalué à la somme de 12.600,00 € sur la base du taux de 9'% retenu par le docteur [U]'; dont à déduire éventuellement les arrérages de la pension d'invalidité reçus en vertu de l'état séquellaire prévu par les rapports [U] et [I]';

- Mme [O] ne justifie pas de ce que le 14 février 2009 était le jour de son mariage et de ce que l'accident l'a empêchée d'avoir un second enfant, de sorte que le préjudice moral spécifique dont elle demande réparation est sans objet.

* * *

Citée à personne habilitée, la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône n'a pas constitué avocat. L'état actualisé des débours définitifs que la cour a demandé par arrêt du 23/01/2020 n'a pas été transmis, malgré relance du 06/04/2021 par le conseil de Mme [O]. La cour retiendra par conséquent le montant des débours communiqué par la caisse par courrier du 04/07/2013, soit la somme de 9.604,54 €, ventilée comme suit':

- frais d'admission aux urgences': 33,09 €,

- frais médicaux et pharmaceutiques': 436,10 €,

- massages': 334,31 €,

- frais de radiographie': 125,79 €,

- indemnités journalières': 8.675,25 €.

* * *

La clôture a été prononcée le 06/09/2022.

L'affaire a été plaidée le 21/09/2022 et mise en délibéré au 03/11/2022.

La caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône a produit en cours de délibéré une attestation d'imputabilité et un état actualisé de ses débours définitifs arrêté à la somme de 12.54478 €, ventilée comme suit':

- frais hospitaliers': 33,09 €

- frais médicaux': 742,30 €

- frais pharmaceutiques': 127,14 €

- indemnités journalières': 11.642,25 €.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nature de la décision rendue':

L'arrêt rendu sera réputé contradictoire, conformément à l'article 474 du code de procédure civile.

Sur le droit à indemnisation':

Le droit de Mme [O] à indemnisation intégrale de son préjudice sur le fondement de la loi du 05/07/1985 n'est pas contesté. Seule est discutée en cause d'appel l'étendue de cette indemnisation.

Sur l'indemnisation du préjudice corporel :

Aux termes de son arrêt du 23/01/2020, la cour a retenu comme base d'évaluation du préjudice subi par Mme [O] le rapport d'expertise médicale du docteur [U] du 10/10/2011 auquel est annexé un avis sapiteur orthopédie du docteur [I] du 07/07/2011.

Le docteur [U] indique que Mme [O] présentait le 14/02/2009 à l'admission une contusion avec dermabrasion du coude gauche, une contusion avec dermabrasion du genou gauche, une contusion avec hématome de la hanche gauche, des algies scapulo-humérales gauches et des algies costales gauches. L'expert écarte l'imputabilité à l'accident d'une fracture parcellaire déplacée du mur postérieur du cotyle, tout en admettant une contusion appuyée du trochanter avec des séquelles post-traumatiques.

I. PRÉJUDICES PATRIMONIAUX

a) préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

Dépenses de santé actuelles (DSA)': 0,00 €

Ce poste est constitué des frais médicaux et pharmaceutiques, frais de transport, massages, appareillage pris en charge par la caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône, soit un total de 902,53 € correspondant à 33,09 € au titre de l'admission aux urgences, 742,30 € de frais médicaux, 127,14 € de frais pharmaceutiques, la victime n'invoquant aucun frais de cette nature restés à sa charge.

Frais de médecin-conseil': 1.350,00 €

Ce poste de préjudice n'est contesté en appel par aucune des parties.

Perte de gains professionnels actuels (PGPA)': 2.482,50 €

Ce poste vise à compenser les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime et doit être évalué au regard de la preuve d'une perte effective de revenus. La durée et l'importance, généralement décroissante, de l'indisponibilité temporaire professionnelle sont à apprécier depuis la date du dommage jusqu'à la date de la consolidation.

Le docteur [U] retient une période d'arrêt temporaire des activités professionnelles de neuf mois courant du 14/02 au 14/11/2009. Les parties s'accordent sur un montant de 14.124,75 €, soit 2.482,50 € après imputation d'un montant d'indemnités journalières de 11.642,25 €.

Assistance par tierce personne temporaire'(ATPT) : rejet

Il s'agit de l'aide périodique nécessaire pour que la victime puisse accomplir les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité et sa dignité, suppléer sa perte d'autonomie. Ces dépenses trouvent leur cause dans l'accident et procèdent d'un besoin de sorte que, quelles que soient les modalités choisies par la victime, l'enveloppe allouée ne peut ni être réduite au regard du recours à l'aide familiale, ni conditionnée par la production des justificatifs des dépenses effectuées.

Mme [O] soutient qu'elle a dû recourir aux services d'une aide à domicile à la suite de son accident. Elle évalue ce poste à la somme de 5.127,77 € et produit en ce sens plusieurs factures. La SA Abeille IARD conteste ce poste de préjudice et observe que le docteur [U] ne l'a pas retenu.

Quoique l'expert judiciaire n'ait pas retenu expressément ce poste de préjudice, il fait état de la nécessité dans laquelle Mme [O] s'est trouvée de porter une ceinture lombaire de mars à août 2009, de s'aider de cannes anglaises pour monter et descendre les escaliers à compter du mois d'avril 2009, et de subir une infiltration de la hanche gauche le 20/07/2009 ' autant d'éléments qui caractérisent objectivement la gêne éprouvée dans la vie quotidienne du fait de la perte d'autonomie, et auraient pu être de nature à rendre admissible une demande de tierce personne au titre de la période d'un an séparant l'accident de la consolidation (14/02/2009 ' 14/02/2010). Cependant, la totalité des factures que Mme [O] a produites portent sur une période largement postérieure à la consolidation, en l'occurrence du 01/06/2010 au 05/03/2014. Par suite, aucune somme ne sera allouée à Mme [O].

b) préjudices patrimoniaux permanents après consolidation

Dépenses de santé futures (DSF)': 0,00 €

Ce poste vise les frais hospitaliers, médicaux, paramédicaux, pharmaceutiques et assimilés, même occasionnels mais médicalement prévisibles, rendus nécessaires par l'état pathologique de la victime après la consolidation et incluent les frais liés soit à l'installation de prothèses soit à la pose d'appareillages spécifiques nécessaires afin de suppléer le handicap physiologique.

Le docteur [U] écarte expressément ce poste. La caisse primaire d'assurance-maladie des Bouches-du-Rhône ne produit aucune créance.

Incidence professionnelle (IP)': 5.000,00 €

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle, de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou de l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap, de la perte des droits à retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap, ou de la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail.

Au moment de l'accident, Mme [O] travaillait pour la Ville de [Localité 8] en qualité de chargée des relations avec les entreprises, afin d'identifier les postes pouvant être proposés à des demandeurs d'emploi. Elle indique qu'elle devait effectuer de nombreux trajets à pied ou en voiture, et qu'elle a été placée en invalidité de catégorie 1 le 16/02/2012 puis licenciée pour inaptitude le 06/04/2012, après que la médecine du travail l'eût déclarée «'inapte à la reprise à son poste. Apte à un poste sans position debout et assise prolongée, sans port de charges ni déplacements et à temps partiel ». Elle précise avoir été recrutée le 01/02/2015 par une société Job'actions pour un salaire, certes supérieur, de 2.358,04 €, mais que son employabilité est limitée ainsi qu'en atteste l'avis d'inaptitude.

Le docteur [U] a cependant conclu que Mme [O] était apte à reprendre dans les conditions antérieures les activités professionnelles qu'elle exerçait avant son accident du 14/02/2009. Le professeur [I] notait quant à lui que «'Mme [O] ne paraît pas actuellement à même de réaliser l'activité professionnelle qu'elle effectuait avant l'accident. Cependant, cette incapacité professionnelle ne me paraît pas pouvoir être rattachée de manière directe et certaine au fait accidentel'».

Il sera néanmoins tenu compte de la proposition de la SA Abeille IARD en ce qu'elle propose d'admettre une incidence professionnelle à hauteur de 5.000,00 €. L'état des débours définitifs de la caisse primaire d'assurance-maladie retenu par la cour ne mentionne aucun capital invalidité venant s'imputer sur ce poste.

II. PRÉJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX

a) préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)

Déficit fonctionnel temporaire (DFT)': 6.000,00 €

Ce poste inclut la perte de la qualité de la vie et des joies usuelles de l'existence ainsi que le préjudice d'agrément et le préjudice sexuel pendant l'incapacité temporaire.

Le docteur [U] ne retient pas expressément de déficit fonctionnel temporaire. Pour autant, il n'est pas contestable que les contraintes médicales qu'elle a subies pendant toute l'année 2009, et qui ont déterminé la cour à admettre le principe d'une assistance par tierce personne temporaire, ont altéré sa qualité de vie jusqu'à la consolidation.

L'argument de la SA Abeille IARD selon lequel l'incapacité temporaire totale de travail a déjà été dédommagée au titre de la perte de gains professionnels actuels n'emporte pas la conviction. En effet, le déficit fonctionnel temporaire procède d'une approche qualitative des différentes facettes de la vie et ne se confond pas avec la perte de salaires consécutive au non-exercice de la profession.

Ce poste de préjudice sera réparé sur la base d'un taux de 500,00 € par mois, montant proposé par la SA Abeille IARD en première instance, soit une somme de 6.000,00 €. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Souffrances endurées (SE)': 15.000,00 €

Ce poste prend en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime. En l'occurrence, le docteur [U] a retenu une évaluation à 3/7. Mme [O] a subi des infiltrations de la hanche gauche, et a dû se soumettre à 75 séances de rééducation.

C'est de façon inexacte qu'elle indique que ce poste n'a pas été soumis à la cour d'appel. D'une part, en effet, elle a interjeté appel de ce poste. D'autre part, elle conclut à l'allocation d'une somme de 30.000,00 € au titre d'un préjudice moral spécifique tenant au fait que l'accident a eu lieu le jour même de son mariage et a assombri de façon irrémédiable le souvenir de ce qui aurait dû être le plus beau jour de sa vie.

En réalité, le préjudice moral est l'une des composantes du poste souffrances endurées de sorte que le dédoublement de l'indemnisation ne se justifie pas. La SA Abeille IARD soutient que Mme [O] ne rapporte pas la preuve du préjudice allégué. Mme [O] produit cependant copie de son acte de mariage qui atteste de ce que le mariage a été célébré le 14/02/2009 à [Localité 6], c'est-à-dire le jour de l'accident et à proximité du lieu de l'accident.

Elle produit également plusieurs attestations ([X] [Z], [P] [Z], [D] [O], [H] [E], [S] [Y]) qui établissent que l'accident a terni la cérémonie et les réjouissances du mariage, et que la séance de photos a été annulée.

Ce préjudice sera évalué à la somme de 15.000,00 €.

Préjudice esthétique temporaire (PET)': 1.200,00 €

Ce poste vise à réparer le préjudice né de l'obligation pour la victime de se présenter temporairement avant consolidation au regard des tiers dans une apparence physique altérée en raison de ses blessures.

Le docteur [U] a écarté ce poste en raison de l'absence de préjudice cicatriciel. Mme [O] a été néanmoins contrainte pendant plusieurs mois de se déplacer à l'aide de cannes anglaises, et le docteur [I] qualifie de très importante la claudication de Mme [O]. Ce poste sera évalué à la somme de 1.200,00 €.

b) préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)

Déficit fonctionnel permanent (DFP)': 12.600,00 €

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence personnelle, familiale et sociale.

Les séquelles conservées, le taux d'incapacité et l'âge de la victime déterminent le quantum de l'évaluation du poste déficit fonctionnel permanent. En l'occurrence, le docteur [U] retient, sur la base d'une limitation fonctionnelle algique cervicale et des phénomènes algiques lombaires sans limitation fonctionnelle vraie, un taux de déficit fonctionnel permanent de 9'% pour une femme âgée de 36 ans à la consolidation.

Ce poste de préjudice corporel sera évalué à la somme de 12.600,00 €, montant proposé par la SA Abeille IARD que Mme [O] ne conteste pas. L'état des débours définitifs de la caisse primaire d'assurance-maladie retenu par la cour ne mentionne aucun capital invalidité venant s'imputer sur ce poste.

Préjudice d'agrément (PA)': rejet

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir. Le préjudice d'agrément ne peut être indemnisé distinctement de la gêne dans les actes de la vie courante, déjà indemnisée au titre du déficit fonctionnel, que si la victime justifie de la pratique antérieure d'une activité sportive ou de loisir exercée régulièrement avant l'accident et dont elle a été privée des suites de celui-ci.

Il est constant que le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer une activité spécifique sportive ou de loisirs dans les mêmes conditions. Ce poste inclut en effet la limitation de la pratique antérieure.

Le docteur [U] retient un retentissement de l'état séquellaire sur les activités sportives déclarées par Mme [O], en l'occurrence des activités nautiques et de la gymnastique en club. Le docteur [I] précise que «'les lésions strictement imputables à l'accident correspondant à un traumatisme du grand trochanter sont susceptibles de retentir sur les activités sportives déclarées de la patiente'».

Les pièces justificatives produites par Mme [O] attestent de ce qu'elle possédait avec son conjoint, antérieurement à l'accident du 14/02/2009, un bateau Rescue V de 8,75 mètres de longueur. Il peut donc être admis qu'elle s'adonnait à la navigation de plaisance. En revanche, elle ne justifie pas avoir régulièrement le jet ski avant l'accident. Mme [O] était âgée de 36 ans à la consolidation. Ce poste sera évalué à la somme de 3.000,00 €. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

* * *

Le préjudice corporel global subi par Mme [O] s'établit ainsi à la somme de 59.177,28 €. Soit, après imputation des débours définitifs de la caisse primaire d'assurance-maladie, une somme de 46.632,50 € qui, par application de l'article 1231-7 du code civil, portera intérêts au taux légal.

Mme [O]CPAM 13

Dépenses de santé actuelles902,53 €

Frais divers restés à charge1.350,00 €

Perte de gains professionnels actuels 14.142,75 €11.642,25 €

- soit':2.482,50 €

Assistance temporaire de tierce personne 0,00 €

Dépenses de santé futures 0,00 €

Incidence professionnelle5.000,00 €

Déficit fonctionnel temporaire6.000,00 €

Souffrances endurées 15.000,00 €

Préjudice esthétique temporaire1.200,00 €

Déficit fonctionnel permanent12.600,00 €

Préjudice d'agrément3.000,00 €

Préjudice corporel global de la victime 59.177,28 €

Prestations servies par l'organisme payeur12.544,78 €

Montant d'indemnisation revenant à la victime 46.632,50 €

Sur les demandes annexes':

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles alloués à la victime doivent être confirmées.

La SA Abeille IARD qui succombe partiellement dans ses prétentions supportera la charge des entiers dépens d'appel et ne peut, de ce fait, bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à Mme [O] une indemnité de 1.700,00 € au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris,

- hormis au titre du déficit fonctionnel temporaire et du préjudice d'agrément,

- hormis sur le montant de l'indemnisation de la victime et les sommes lui revenant.

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

Condamne la SA Abeille IARD à payer à Mme [L] [J] épouse [O] en réparation de son préjudice corporel les sommes suivantes':

- frais divers': 1.350,00 €

- perte de gains professionnels actuels': 2.482,50 €

- incidence professionnelle':5.000,00 €

- déficit fonctionnel temporaire':6.000,00 €

- souffrances endurées': 15.000,00 €

- préjudice esthétique temporaire': 1.200,00 €

- déficit fonctionnel permanent':12.600,00 €

- préjudice d'agrément': 3.000,00 €

Condamne la SA Abeille IARD à payer à Mme [L] [J] épouse [O] la somme de 1.700,00 € au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en cause d'appel.

Condamne la SA Abeille IARD aux entiers dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-6
Numéro d'arrêt : 18/19990
Date de la décision : 03/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-03;18.19990 ?
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