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31/10/2022 | FRANCE | N°22/00380

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-11 référés, 31 octobre 2022, 22/00380


COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés





ORDONNANCE DE REFERE

du 31 Octobre 2022



N° 2022/ 491





Rôle N° RG 22/00380 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJU35







[A] [D]





C/



S.C.I. SCI CAPZEN

S.C.I. SCI [S]





























Copie exécutoire délivrée





le :





à :



- Me Paul GUEDJ
>

- Me Annie PROSPERI







Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 30 Juin 2022.





DEMANDERESSE



Madame [A] [D], demeurant [Adresse 4]



représentée par Me Jérôme LACROUTS de la SCP SCP D'AVOCATS BERLINER-DUTERTRE-LACROUTS, avocat au barreau de NICE substitué par Me Paul GUEDJ de la SCP COHE...

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 référés

ORDONNANCE DE REFERE

du 31 Octobre 2022

N° 2022/ 491

Rôle N° RG 22/00380 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJU35

[A] [D]

C/

S.C.I. SCI CAPZEN

S.C.I. SCI [S]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

- Me Paul GUEDJ

- Me Annie PROSPERI

Prononcée à la suite d'une assignation en référé en date du 30 Juin 2022.

DEMANDERESSE

Madame [A] [D], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Jérôme LACROUTS de la SCP SCP D'AVOCATS BERLINER-DUTERTRE-LACROUTS, avocat au barreau de NICE substitué par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

DEFENDERESSES

S.C.I. CAPZEN, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Pascal ALIAS de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Annie PROSPERI de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

S.C.I. SCI [S], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Pascal ALIAS de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Annie PROSPERI de la SELAS ALIAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE

* * * *

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 19 Septembre 2022 en audience publique devant

Véronique NOCLAIN, Président,

déléguée par ordonnance du premier président.

En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile

Greffier lors des débats : Manon BOURDARIAS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2022.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcée par mise à disposition au greffe le 31 Octobre 2022.

Signée par Véronique NOCLAIN, Président et Manon BOURDARIAS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Mme [A] [D] divorcée [G] a été autorisée par arrêté municipal en date du 18 mai 2005 à édifier un bien d'habitation à [Localité 5]. Deux permis modificatifs en date du 5 mars 2008 et du 16 décembre 2008 lui ont été délivrés. Le permis délivré par arrêté du 5 mars 2008 a été annulé par décision définitive du 26 mai 2016 de la cour administrative d'appel de MARSEILLE intervenue après un arrêt du Conseil d'Etat.

Par acte d'huissier en date du 25 mai 2018, la S.C.I. CAPZEN et la S.C.I. [S] ont assigné Mme [D] devant le tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN aux fins, notamment, de mise en conformité de sa construction avec le permis de construire délivré le 18 mai 2005 et condamnation aux démolitions réalisées en violation de cet arrêté.

Par ordonnance en date du 23 mai 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN a principalement statué ainsi :

- ordonnons une expertise et désignons M. [J] [C] pour y procéder, lequel aura pour mission, après avoir pris connaissance du dossier, de se faire communiquer tous les éléments utiles, d'entendre les parties ainsi que tout sachant,

- se rendre sur place,

- déterminer quelles ont été les constructions effectuées sur le terrain de Mme [D]-[G], en conformité avec le permis de construire initial du 18 mai 2005, puis les modifications apportées à ces dernières en vertu du permis de construire du 5 mars 2008,

- déterminer si les constructions présentes sur le terrain de la défenderesse sont conformes ou non au permis de construire initialement accordé, en date du 18 mai 2005, ainsi qu'au permis de construire modifié du 16 décembre 2008 et, plus généralement, déterminer si l'ensemble des constructions présentes sur le terrain ont fait l'objet des autorisations d'urbanisme nécessaires,

- déterminer les travaux de mise en conformité, notamment les travaux de démolition à effectuer, afin que les constructions soient conformes au permis de construire initial du 18 mai 2005 et au permis de construire modifié du 16 décembre 2008, suite à l'annulation du permis de construire modificatif du 5 mars 2008,

- en chiffrer le coût

- déterminer l'ensemble des préjudices subis par les demanderesses du fait de la méconnaissance des dispositions réglementaires et administratives applicables sur la commune de [Localité 5],

- rejetons la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- disons que les dépens suivront le cours de l'instance principale.

Par acte d'huissier du 22 juin 2022, Mme [A] [D] divorcée [G] a fait assigner la S.C.I. CAPZEN et la S.C.I. [S] devant le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence au visa de l'article 272 du code de procédure civile aux fins d' être autorisée à interjeter appel de l'ordonnance d'incident du 23 mai 2022 du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN en ce qu'elle a désigné un expert dans le cadre du litige qui l'oppose aux S.C.I. CAPZEN et [S]. Elle sollicite par ailleurs que le premier président fixe le jour où l'affaire sera examinée selon la procédure à jour fixe et que les S.C.I. CAPZEN et [S] soient condamnées au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'incident.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir l'existence de motifs graves et légitimes. Elle fait valoir la violation d'une liberté fondamentale, en l'espèce le droit de propriété, par refus d'application par le juge des articles 12 et 16 du code de procédure civile. Elle ajoute que l'article 238 du code de procédure civile a été bafoué et qu'en donnant à l'expert la mission de déterminer l'ensemble des préjudices subis par les demanderesses du fait de la méconnaissance du permis de construire du 5 mars 2008 et plus généralement du fait de la méconnaissance des dispositions réglementaires et administratives applicables sur la commune de ST RAPHAEL, le juge de la mise en état a délégué à l'expert judiciaire de façon non équivoque son pouvoir d'analyse et de qualification des faits.

Par écritures précédemment notifiées le 16 septembre 2022 et soutenues oralement lors des débats, la S.C.I. CAPZEN et la S.C.I. [S] demandent de débouter Mme [A] [D] divorcée [G] de sa demande et de la condamner au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Elles contestent l'existence de motifs graves et légitimes en ce que l'expertise ordonnée n'emporterait strictement aucune conséquence grave, le juge n'étant pas lié par les conclusions de l'expert et la demanderesse pouvant faire valoir ses observations devant l'expert, le juge chargé du contrôle des expertises et la juridiction de fond. Elles font valoir l'absence de motif légitime en ce que le droit de propriété ne peut constituer à lui seul un motif légitime à même d'enrayer le pouvoir d'injonction judiciaire dès lors que l'atteinte au droit de propriété est nécessaire à la protection des droits et libertés d'autrui et plus particulièrement, au droit de la preuve. Elles contestent toute violation de l'article 238 du code de procédure civile.

Les parties ont soutenu oralement leurs écritures, auxquelles il sera renvoyé pour un examen complet des moyens soutenus lors des débats en date du 19 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l'article 272 du code de procédure civile, l'expertise peut être frappée d'appel indépendamment du jugement sur le fond sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime. L'assignation qui saisit le premier président doit être délivrée dans le mois de la décision.

Sur la recevabilité de la demande

En l'espèce, la décision a été rendue le 23 mai 2022 et l'assignation a été délivrée par Mme [A] [D] divorcée [G] le 22 juin 2022.

La demande est par conséquent recevable.

Sur la demande d'autorisation d'interjeter appel de l'ordonnance du juge de la mise en état

Il est constant que le premier président apprécie souverainement la gravité et la légitimité des motifs invoqués par l'auteur de la demande d'autorisation d'interjeter appel et qu'il n'a pas compétence pour examiner le bien-fondé de la décision ni pour la confirmer ou la réformer.

La demanderesse fait valoir que la mission d'expertise ordonnée est assimilable à une véritable perquisition violant son droit de propriété, expertise qui ne serait pas justifiée et serait sans rapport avec l'objet de la demande initiale. Or, il résulte des articles 143 et 144 du code de procédure civile que les faits dont dépend la solution du litige peuvent, à la demande des parties ou d'office, être l'objet de toute mesure d'instruction légalement admissible et que les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause dès lors que le juge ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer. C'est ainsi que, suite à la demande d'expertise formée par les S.C.I. CAPZEN et [S], le juge a estimé que la demande d'expertise quant à la recherche de la conformité des constructions édifiées sur la parcelle BO [Cadastre 3] en application du permis modificatif délivré le 5 mars 2008, permis annulé par la juridiction administrative, et du PLU alors en vigueur, présentait un intérêt quant à la solution du litige dont l'objet concerne l'application de l'article L. 480-13 du code de l'urbanisme et les préjudices allégués par les S.C.I. CAPZEN et [S]. Au regard de l'intérêt probatoire légitime retenu par le juge, il apparaît que la mesure d'instruction ordonnée, légalement admissible, ne constitue pas une violation du droit de propriété de Mme [A] [D] divorcée [G]. Saisie d'une demande d'expertise par les S.C.I. CAPZEN et [S], il ne peut non plus être sérieusement allégué que le juge aurait violé l'article 12 du code de procédure civile en ce qu'il a prévu comme mission confiée à l'expert un travail de comparaison entre les constructions édifiées et les autorisations d'urbanisme nécessaires, étant rappelé que le litige porte sur des constructions effectuées en vertu d'un permis de construire modificatif annulé en raison de la violation du Plan Local d'Urbanisme alors en vigueur, ainsi que jugé par la cour administrative de MARSEILLE par arrêt en date du 26 mai 2016 en son considérant n°5.

Sans violer le principe du contradictoire, le juge a, par ailleurs, ordonné l'expertise au vu, notamment, du rapport de M. [U] ayant travaillé pour le compte de M. [I], rapport produit aux débats, et des aménagements réalisés par Mme [A] [D] divorcée [G] au vu du permis annulé en date du 5 mars 2008 et non contestés par cette dernière, étant rappelé que le juge de la mise en état n'est pas une juridiction de fond à laquelle il appartiendra ultérieurement de trancher le litige et ce dans le respect de la jurisprudence visée par la demanderesse relative à l'utilisation d'un rapport privé non contradictoire.

Ainsi que rappelé plus haut, le premier président n'a pas compétence pour examiner le bien-fondé de la décision et encore moins pour s'ingérer dans le débat de fond. Ainsi, il n'y a pas lieu en l'espèce de s'attacher à la discussion relative à la régularisation par le permis modificatif en date du 16 décembre 2008 des ouvrages et aménagements objets du permis annulé en date du 5 mai 2008, étant relevé néanmoins que, dans son arrêt en date du 26 mai 2016, la cour d'appel administrative de MARSEILLE a estimé, en son considérant n°6, que Mme [G] ne pouvait utilement soutenir que le second permis de construire modificatif et définitif en date du 16 décembre 2008 aurait régularisé la construction au regard du plan local d'urbanisme.

Enfin, en chargeant l'expert de déterminer les préjudices subis par les S.C.I. CAPZEN et [S] du fait de la méconnaissance par Mme [A] [D] divorcée [G] du permis de construire du 5 mars 2008 et des dispositions réglementaires et administratives applicables sur la commune de [Localité 5], le juge n'a en rien délégué à l'expert son pouvoir d'analyse et de qualification des faits, cette détermination des préjudices étant essentielle en ce qu'elle justifie de l'intérêt à agir des demanderesses à l'expertise, étant à nouveau rappelé que le permis de construire litigieux a été annulé en raison de la violation du plan local d'urbanisme de la commune de [Localité 5].

Ainsi, Mme [A] [D] divorcée [G] ne justifie d'aucun motif grave et légitime et sera déboutée de sa demande d'autorisation de faire appel de la décision en date du 23 mai 2022 du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN ainsi que de toutes ses demande subséquentes.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

En équité, Mme [A] [D] divorcée [G] sera tenue de payer la somme de 2 000 euros au

au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande formée de ce chef.

Sur les dépens

Mme [A] [D] divorcée [G] , partie perdante, sera également tenue aux dépens de l'instance en application de l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant en référés, après débats en audience publique, par décision contradictoire

- Déboutons Mme [A] [D] divorcée [G] de sa demande d'être autorisée à interjeter appel immédiat de l'ordonnance de mise en état du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 23 mai 2022 ;

- Condamnons Mme [A] [D] divorcée [G] à payer en tout la somme de 2 000 euros à la S.C.I. CAPZEN et à la S.C.I. [S] en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Déboutons Mme [A] [D] divorcée [G] du surplus de ses demandes ;

- Condamnons Mme [A] [D] divorcée [G] aux dépens de la présente instance.

Ainsi prononcé par la mise à disposition de la présente décision au greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 31 octobre 2022, date dont les parties comparantes ont été avisées à l'issue des débats.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 1-11 référés
Numéro d'arrêt : 22/00380
Date de la décision : 31/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-31;22.00380 ?
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