COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 27 OCTOBRE 2022
N° 2022/ 691
Rôle N° RG 21/14363 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BIGSL
[G] [F]
C/
S.A.S. RESIDENCE [3]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Cyril MARTELLO
Me Renaud PALACCI
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du TJ de MARSEILLE en date du 20 Septembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 21/03390.
APPELANT
Monsieur [G] [F]
né le 21 Mars 1940 à [Localité 2],
demeurant [Adresse 1]
représenté par sa tutrice, Madame [E] [Z]
représenté et assisté par Me Cyril MARTELLO, avocat au barreau de TOULON, plaidant
INTIMEE
S.A.S. RESIDENCE [3],
dont le siège social est [Adresse 1]
représentée par Me Renaud PALACCI de la SELARL AVOCATS JURIS CONSEIL, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Anne-Laure PITTALIS de la SELARL AVOCATS JURIS CONSEIL, avocat au barreau de MARSEILLE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Septembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sylvie PEREZ, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Sylvie PEREZ, Présidente
Mme Catherine OUVREL, Conseillère
Mme Angélique NETO, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Caroline BURON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Octobre 2022,
Signé par Mme Sylvie PEREZ, Présidente et Mme Caroline BURON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [F] est hébergé au sein de la Résidence [3] selon contrat de séjour à durée déterminé signé le 10 mars 2008, avec l'assistance de sa curatrice.
Suite à une mise en demeure restée infructueuse, la SAS Résidence [3] a, le 26 juillet 2021, fait assigner en référé M. [F] ainsi que sa curatrice en paiement de provisions.
Par ordonnance réputée contradictoire en date du 20 septembre 2021, le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille a :
- condamné M. [G] [F] à payer, à titre provisionnel, à la société Résidence [3] la somme de 10 622,82 euros à titre de provision sur les frais de séjour impayés avec intérêts au taux légal capitalisés à compter du 29 juin 2021 au titre des frais de séjour impayés compris entre janvier 2021 inclus et juin 2021 inclus ;
- condamné M. [G] [F] à payer à la société Résidence [3] la somme de 560 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné M. [G] [F] aux dépens.
Selon déclaration reçue au greffe le 11 octobre 2021, M. [F], représenté par sa tutrice, Mme [E] [Z], a interjeté appel de la décision, appel portant sur les chefs de l'ordonnance expressément critiqués.
Par conclusions déposées et signifiées le 2 septembre 2022, M. [F], représenté par sa tutrice, Mme [E] [Z], a conclu comme suit :
- ordonner l'annulation de l'ordonnance de référé rendue par le président du tribunal judiciaire de Marseille le 30/09/2021 pour violation du principe du contradictoire ;
A titre subsidiaire,
- infirmer l'ordonnance de référé rendue par le président du tribunal judiciaire de Marseille le 30/09/2021 compte tenu d'une créance sérieusement contestable ;
En tout état de cause,
- condamner la SAS Résidence [3] à payer à Mme [E] [Z], ès qualités de tutrice de M. [F] la somme de 3 000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SAS Résidence [3] aux entiers dépens de l'instance.
Mme [Z] invoque une violation du principe du contradictoire et la nullité de l'ordonnance, faisant grief au premier juge d'avoir refusé le renvoi de l'affaire sollicité par courrier et pour raison médicale, courrier dans lequel il était mentionné une contestation de la demande de provision formée à l'encontre de M. [F] en raison de sa prise en charge au titre de l'Aide Sociale à l'Hébergement.
Elle considère de plus qu'il existe une contestation sérieuse dans la mesure où une demande de prise en charge auprès du Conseil Départemental des Bouches du Rhône au titre de l'Aide Sociale à l'Hébergement a été déposée.
Par conclusions déposées et signifiées le 13 septembre 2022, la SAS Résidence [3] a conclu comme suit :
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions adverses et notamment la demande d'annulation de l'ordonnance de référé du 20 septembre 2021 et la demande d'infirmation de ladite ordonnance,
- confirmer l'ordonnance de référé du 20 septembre 2021 en ce qu'elle a condamné M. [F] représenté par son tuteur Mme [Z], à lui payer la somme provisionnelle de 10 622,82 euros à parfaire, en principal outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 29 juin 2021 ;
- infirmer l'ordonnance de référé du 20 septembre 2021 en ce qu'elle a condamné M. [F] représenté par son tuteur Mme [Z], à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
Statuant de nouveau
- condamner M. [F] représenté par son tuteur Mme [Z], à lui payer la somme provisionnelle de 12 809,80 euros correspondant à la dette apparue entre la signification de l'assignation et la notification des présentes, soit au total la somme provisionnelle de 23 432,62 euros,
- condamner M. [F] représenté par son tuteur Mme [Z], à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 de première instance ainsi que les entiers dépens,
- dire et juger que la somme en principal continuera de produire des intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement ;
- ordonner la capitalisation des intérêts ;
- ordonner la transmission de l'ordonnance au juge des tutelles ;
- condamner M. [F] représenté par son curateur renforcé Mme [Z] au paiement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens.
L'intimée expose avoir pris attache avec Mme [Z] à plusieurs reprises pour tenter de recouvrer sa créance mais en vain, expliquant que celle-ci n'a jamais pris contact avec le conseil de l'EHPAD, ni au stade de la mise en demeure ni à celui de l'assignation, n'ayant pas non plus été informée de la conversion de la mesure de curatelle en tutelle.
Elle fait valoir qu'elle a parfaitement respecté ses obligations contractuelles, alors que Mme [Z], ès qualités, s'est trouvée défaillante dans l'accomplissement des siennes et notamment dans son obligation de paiement.
La SAS Résidence [3] expose qu'il est constant que, tant que l'aide sociale n'a pas été accordée, au besoin avec effet rétroactif, l'hébergement est effectué à titre payant, que cet effet rétroactif n'est jamais acquis, de sorte qu'il est tout à fait envisageable que l'aide sociale ne soit accordée que pour l'avenir, de sorte que cette dette demeurera à la charge du requis. Elle rappelle qu'il incombe au tuteur de faire diligence pour obtenir l'aide sociale si le résident y est exigible, concluant au bien fondé de sa demande de provision.
Concernant la demande d'annulation de l'ordonnance, la SAS Résidence [3] expose qu'aucune obligation ne lui est faite de signifier ses pièces dans l'assignation, rappelant que l'article 56 du code de procédure civile invoque seulement que la liste des pièces figure sur un bordereau qui lui est annexé.
Par ordonnance du 14 septembre 2022, l'affaire a été clôturée.
Par note en délibéré du 5 octobre 2022, la cour a invité les parties à fournir leurs explications sur le moyen soulevé d'office de l'absence de dévolution à la cour d'une demande d'annulation de l'ordonnance de référé du 20 septembre 2021, et ce avant le 14 octobre 2022.
Par note en réponse du 10 octobre 2022, M. [F] représenté par sa tutrice Mme [Z] a indiqué, au visa des articles 901 et 562 du code de procédure civile, que la demande d'annulation dépend directement des chefs du jugement expressément critiqués dans la déclaration d'appel et que ce lien défère de fait à la cour a question de l'annulation. L'appelant indique que le premier de ces textes pose le principe dénoncer les chefs de jugement expressément critiqués dans a déclaration d'appel, et par exception, permet l'économie de cette énonciation dans l'hypothèse tend à une annulation du jugement.
Il expose que priver d'effet dévolutif un appel qui vise l'intégralité des chefs de jugement, en fractionnant cet effet dévolutif excluant l'annulation demandée dans des conclusions d'appel postérieures, la cour limiterait excessivement la portée de la déclaration d'appel par rapport à l'objet du litige qui se détermine dans les conclusions des parties.
Par note en réponse du 12 octobre 2022, la SAS Résidence [3], rappelant le libellé de la déclaration d'appel, a indiqué qu'il s'agissait d'un appel limité, que la demande de nullité de l'ordonnance de référé n'y était pas visée et qu'il n'avait pas été formé appel de ce chef de jugement, considérant la demande comme irrecevable car se situant au-delà des chefs de jugement critiqués.
L'intimée ajoute que les conclusions postérieures ne peuvent en rien régulariser cette irrégularité et que la demande d'annulation n'a aucun lien avec les chefs de jugement critiqués.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Effet dévolutif de la déclaration d'appel :
Aux termes de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend à faire réformer ou annuler par la cour d'appel un jugement rendu par une juridiction du premier degré.
Le contenu de la déclaration d'appel est fixé par l'article 901 du code de procédure civile qui renvoie à l'article 57 du même code, lequel renvoie à l'article 54 de ce code et qui prévoit qu'à peine de nullité, la demande initiale mentionne l'objet de la demande.
En l'espèce, la déclaration d'appel n'indique pas qu'elle a pour objet l'annulation de l'ordonnance, la cour ne pouvant statuer sur une demande qui quoique formulée dans les conclusions de l'appelant, ne figure pas dans la déclaration d'appel.
La cour constate par conséquent que la demande d'annulation de l'ordonnance ne lui est pas déférée.
La provision :
Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, il est prévu que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peut accorder une provision au créancier dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
Le montant de la provision allouée en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée, que le juge des référés fixe discrétionnairement à l'intérieur de cette limite la somme qu'il convient allouer au requérant.
Mme [Z] fait valoir que la demande de la SAS Résidence [3] au titre de frais de séjour de M. [F] en EPHAD est sérieusement contestable dès lors qu'il est justifié du dépôt d'une demande de prise en charge auprès du Conseil Départemental des Bouches du Rhône au titre de l'aide sociale et que celui-ci a bénéficié de l'aide sociale de l'année 2008 au 31 janvier 2021 sans incident.
L'appelant produit la copie d'un accusé de réception sans mention de date, à peine lisible et qui porte mention du Centre Communal d'Action Sociale et du nom de Mme [Z], sans indication ni du destinataire ni de l'expéditeur.
La SAS Résidence [3] fait valoir qu'à ce jour, il n'est pas justifié d'une prise en charge au titre de l'aide sociale, de sorte que M. [F] est hébergé à titre payant et doit reverser 90% de ses ressources.
Au regard de ces éléments, aucune contestation sérieuse ne s'oppose à la demande de l'intimée tendant à voir confirmer l'ordonnance déférée à la cour.
La SAS Résidence [3] produit un procès-verbal de saisie-attribution daté du 11 mars 2022 agissant en exécution de l'ordonnance de référé qui lui a permis d'appréhender le montant de la condamnation.
L'intimée expose que depuis l'ordonnance, dont les causes ont été réglées, est apparue une nouvelle dette d'un montant de 30 814,50 euros selon décompte arrêté au 5 septembre 2022, pour le paiement de laquelle elle sollicite la condamnation à titre provisionnel de M. [F].
Aucune contestation sérieuse ne s'oppose à cette demande à laquelle il est fait droit, y compris de celle au titre de la capitalisation des intérêts.
Enfin, il n'y a pas lieu d'infirmer la décision du chef des frais irrépétibles justement appréciés par le premier juge.
Les délais de grâce :
M. [F], représenté par sa tutrice, sollicite le report du paiement de la dette conformément aux dispositions de l'article 1343-5 du code civil, demande à laquelle s'oppose la SAS Résidence [3] rappelant que le report est subordonné à la notion de bonne foi et invoquant, eu égard à l'âge de M. [F], une incertitude quant à l'exécution de la décision.
Il est constant que M. [F], né en 1940, est retraité et a perçu au titre des revenus de l'année 2021, une pension de retraite d'un montant de 11 123 euros.
C'est dire que sa situation financière n'a pas vocation à s'améliorer dans le délai de deux ans sollicité.
Il n'y a pas lieu dans ces conditions de faire droit à la demande.
Il y a lieu de condamner M. [F], représenté par sa tutrice, au paiement de la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Constate que la demande d'annulation de l'ordonnance n'est pas déférée à la cour ;
Confirme l'ordonnance du 20 septembre 2021 prononcée par le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille ;
Y ajoutant :
Constate que les causes de l'ordonnance du 20 septembre 2021 ont été réglées ensuite de la saisie-attribution pratiquée le 11 mars 2022 par la SAS Résidence [3] sur les comptes de M. [F] ;
Condamne M. [F] représenté par sa tutrice Mme [Z], à payer à la SAS Résidence [3] la somme à titre provisionnel de 30 814,50 euros selon décompte arrêté au 5 septembre 2022, avec intérêts au taux légal jusqu'à parfait paiement ;
Ordonne la capitalisation des intérêts ;
Rejette la demande de report de paiement ;
Condamne M. [F], représenté par sa tutrice Mme [Z], à payer à la SAS Résidence [3] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Invite le greffe à communiquer le présent arrêt au greffe du juge des tutelles du tribunal judiciaire de Marseille ;
Condamne M. [F], représenté par sa tutrice Mme [Z], aux dépens d'appel.
La greffièreLa présidente