COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 2-4
ARRÊT AU FOND
DU 26 OCTOBRE 2022
N° 2022/ 214
Rôle N° RG 22/09735 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BJWMB
[Y] [D] épouse [N]
C/
[W] [D]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Flora QUEMENER
Me Agnès ERMENEUX
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire de NICE en date du 25 Novembre 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 21/01383.
APPELANTE
Madame [Y] [D] épouse [N]
née le 24 Septembre 1945 à [Localité 9]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Flora QUEMENER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Jane AMOURIC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me jessica DUDOGNON, avocat au barreau de NICE
INTIME
Monsieur [W] [D],
né le 13 Octobre 1936 à [Localité 9]
demeurant [Adresse 5]
représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Sacha SANCHEZ, de L'AARPI OMILITIS AVOCATS, avocat au barreau de NICE
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Septembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme GINOUX, conseillère, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Michèle JAILLET, Présidente
Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère
Madame Myriam GINOUX, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Octobre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Octobre 2022,
Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOS'' DU LITIGE
Madame [L] [V] épouse [D] est décédée le 10 février 1999 à [Localité 7] en laissant pour lui succéder :
-son conjoint survivant, Monsieur [T] [D] avec lequel elle était mariée sous le régime de la séparation de biens.
- ses deux enfants nés de cette union:
-[W] , né le 13 Octobre 1936
-[Y], née le 24 Septembre 1945.
Madame [V] épouse [D] avait établi un testament olographe le 5 Mai 1990 , instituant sa fille, Madame [Y] [D] épouse [N], légataire particulière d'un appartement et de ses dépendances sis à [Adresse 4].
Monsieur [T] [D] est décédé à [Localité 11] le 22 janvier 2000.
L'actif de la succession de feue [L] [V] se compose de:
- un entier immeuble de 5 étages sur rez-de -chaussée , sis à [Adresse 4], comprenant 24 lots ( 14 appartements, 4 garages, 4 caves, un jardin, et un water -closet)
- la moitié d'une maison de 110,83 m2 , sise à [Localité 9] ( 62) et un jardin de plus de 1000m2 l'autre moitié dépendant de la succession de [T] [D],
-des meubles inventoriés par un commissaire priseur,
-un compte bancaire à La Poste,
-le prorata de loyers
Par jugement mixte en date du 9 septembre 2003 le tribunal de grande instance de Nice a notamment :
- ordonné la cessation de l'indivision existant entre [Y] et [W] [D] et l'ouverture des opérations d'évaluation, comptes, liquidation et partage des successions d'[L] [V] épouse [D], décédée à [Localité 7] (06) le 10 février 1999, et de [T] [D], décédé à [Localité 11](59) le 22 janvier 2000,
- dit que [Y] [D] épouse [N] était bénéficiaire d'un legs préciputaire, en vertu d'un testament olographe d'[L] [V] épouse [D] en date du 5 mai 1990,
- désigné pour procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage Mr le président de la chambre des notaires des Alpes-Maritimes, avec faculté de délégation, et Madame Guémas, ou tout autre assesseur de la chambre, en qualité de juge commissaire,
- ordonné une mesure de consultation, en application des articles 232,256 et 771 du NCPC et désigné pour y procéder Maître [Z] à [Localité 6] avec pour mission de donner un avis sur la valeur du bien immobilier sis à [Adresse 10], cadastré section AH n[Cadastre 1].
- invité Monsieur [W] [D] à verser à Me [Z] une provision de 450 € à valoir sur sa rémunération avant le 15 Octobre 2003
-rejeté les demandes d'expertise,
-rejeté les demandes d'attribution préférentielle,
-dit que Madame [Y] [D] ne démontre pas que Monsieur [W] [D] a commis un recel successoral,
-débouté Madame [Y] [D] épouse [N] de sa demande d'indemnités pour soins prodigués à sa mère
-réservé les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt en date du 28 juin 2005, la cour d'appel d' Aix en Provence a :
- confirmé le jugement entrepris à l'exception des dispositions concernant la succession de [T] [D] et les dépens,
- Le réformant de ces chefs,
- dit que le TGI de Nice était incompétent pour statuer sur les demandes concernant la succession de [T] [D] et renvoyé cette partie du litige devant la cour d'appel de Douai.
-Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du cpc.
-Déclare les dépens de première instance et d'appel frais privilégiés de partage et dit qu'ils seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du cpc.
Par arrêt du 25 septembre 2006, la Cour d'appel de Douai a pris acte de sa compétence, ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation, partage de la succession de feu [T] [D] et commis pour y procéder M. le Président de la Chambre des Notaires avec mission habituelle.
Les opérations de partage afférentes à cette procédure sont toujours en cours.
Par jugement mixte en date du 8 décembre 2009, le tribunal de grande instance de Nice a notamment, en substance:
- dit que la liquidation de la succession d'[L] [V] épouse [D] n'est pas soumise à la loi du 23 juin 2006 mais au régime légal antérieur, l'instance ayant été introduite avant I'entrée en vigueur de la réforme du 23 juin 2006,
- Constaté l'accord des parties sur le partage en nature des meubles meublants se trouvant dans l'immeuble du [Adresse 4],
- préalablement à la réalisation du partage de la succession d'[L] [V] épouse [D],décédée à [Localité 7], le 10 février 1999,
ordonné une expertise confiée à Maître [U] [X], Notaire [Adresse 2], laquelle après avoir prêté serment par écrit d' accomplir sa mission, de faire son rapport et de donner son avis en son honneur, aura pour mission de notamment, procéder à l'évaluation distincte de chacun des lots de copropriété de l'entier immeuble indivis du [Adresse 4], donner son avis sur une possibilité de partage en nature , la composition des lots et une éventuelle soulte à évaluer s'il y a lieu, vérifier les comptes de gestion de l'indivision tenus par [Y] [D] épouse [N], et fournir au tribunal tous éléments permettant de faire les comptes entre les parties quant aux revenus, fruits et charges de l'indivision successorale.
Par ordonnance en date du 28 mars 2013, Maître [X] a été remplacée par Maître [P].
En l' absence de dépôt du rapport d'expertise, l' instance a été radiée par ordonnance rendue le 13 février 2018 puis à nouveau enrôlée en février 2019.
Par ordonnance du 14 Juin 2021 , rendue sur pied de requête en désignation d'huissier , la présidente de la 3ème chambre civile du Tribunal Judiciaire de NICE a désigné Me [A] [H], huissier de justice afin de procéder à toutes constatations utiles quant à l'occupation réelle d le'immeuble sis [Adresse 4] , dépendant d ela succession.
Ce procès-verbal de constat d'huissier a été dressé le 17 juin 2021.
Par ordonnance du 2 Août 2021, Madame [B] [E] , expert auprès de la Cour d'Appel d'Aix en Provence a été désignée aux lieu et place de Me [P] , sa mission étant identique à celle précisée dans la décision du 8 décembre 2009 et le délai pour déposer le rapport étant prorogé au 3 Mars 2022.
Soutenant que cette succession était ancienne et particulièrement conflictuelle, Monsieur [W] [D] a fait assigner par acte d'huissier en date du 21 juillet 2021, selon la procédure accélérée au fond, sa soeur, Madame [Y] [D] épouse [N] afin d'obtenir la désignation d'un mandataire successoral à la succession de Madame [L] [V] épouse [D], avec mission habituelle en pareille matière. Il sollicite également l'allocation d'une somme de 8000 euros en application des dispositions de I'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens en ce compris le coût du constat d'huissier de Maître [A] dressé le 17 juin 2021.
Par acte d'huissier du 26 août 2021, il a de nouveau fait assigner, selon la procédure accélérée au fond, sa soeur, aux mêmes fins , cette deuxième assignation portant la mention 'annule et remplace celle signifiée le 21 juillet 2021.'
Madame [Y] [D] épouse [N] a constitué avocat mais n'a pas conclu dans cette instance.
Par jugement contradictoire , selon la procédure accélérée au fond, en date du 25 novembre 2021, le juge a statué ainsi :
'Vu les dispositions des articles 813-1 et suivants du code civil, 492-1 , 1355 à 1357, 1380 du code de procédure civile,
ORDONNE la jonction des instances enrôlées sous les numéros RG 21/1383et RG 21/1554,
DESIGNE la selarl [R] [C] et Associés , prise en la personne de [R] [C], situé à [Adresse 8] , en qualité de mandataire successoral, à l' effet d'administrer provisoirement la succession de Madame [L] [V] épouse [D],
CONFÈRE à cet administrateur judiciaire en sa qualité de mandataire successoral, l' autorisation d'effectuer l'ensemble des actes d'administration de la succession,
DIT que le mandataire successoral aura pour mission d' administrer provisoirement la succession, conformément aux pouvoirs et aux obligations mentionnées aux articles 1873-6 à 1873-9 du code civil,
DIT qu'il aura notamment pouvoir de représenter les héritiers de Madame [L] [V] épouse [D] dans les actes de la vie civile ou en justice, tant en demande qu'en défense et de procéder aux travaux d'urgence,
RAPPELLE cependant qu'en application de l'article R 13-4 du code civil, tant qu'aucun héritiernn'a accepté la succession, le mandataire successoral ne peut accomplir que les actes purement,conservatoires ou de surveillance et les actes d'administration provisoire mentionnés à l' article 784 du code civil à l'exception de ceux prévus à son deuxième alinéa;
DIT que, dans ce dernier cas, le mandataire successoral pourra solliciter du président du tribunal judiciaire ou de son délégué, statuant sur requête en application de l'article 1379 du code de procédure civile, l'autorisation de passer tout autre acte que requiert l'intérêt de la succession, et ce, sur production de tous éléments justificatifs utiles,
CONFÈRE à cet administrateur judiciaire en sa qualité de mandataire successoral, l' autorisation d'effectuer l'ensemble des actes d'administration de la succession,
DIT que la mission de l'administrateur est d'une durée de un an,
DIT que les parties ou le mandataire successoral nous saisiront selon la procédure accélérée au fond de toute difficulté relative à l'accomplissement de la mission, à l'exclusion toutefois de l'hypothèse visée à l'article 813~4 du code civil ci-avant,
DIT que l'administrateur provisoire pourra solliciter le renouvellement de sa mission sur simple requête,
FIXE à la somme de 3000 euros la provision que Monsieur [W] [D] devra verser à l'administrateur judiciaire, à valoir sur ses frais et honoraires et disons qu'à défaut du versement de cette provision dans le délai d'un mois, la nomination de l'administrateur sera caduque et privée de tout effet,
DIT que, conformément aux dispositions de l'article 813-3 du Code civil et de l'article 1355 du code de procédure civile, la décision de nomination sera enregistrée au greffe du tribunal judiciaire dans le mois suivant la nomination, sur le registre mentionné à l'article 1334 du Code civil et que la décision sera publiée à la requête du mandataire par voie electronique au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, selon les modalités définies par arrêté du Garde des Sceaux du 9 Novembre 2009,
DIT que le mandataire successoral devra rendre compte de sa mission au président du tribunal judiciaire ou son délégataire à l'expiration de celle-ci et qu'il devra également présenter sa demande de fixation de ses honoraires, émoluments et remboursement de frais auprès du président de la juridiction ou de son délégataire, .
DIT que conformément à l'alinéa 3 de l'article 492-1 du code. de procédure civile, la présente décision est exécutoire par provision.
CONDAMNE Madame [Y] [D] épouse [N] à payer à Monsieur [W] [D] la somme de 1500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
CONDAMNE Madame [Y] [D] épouse [N] aux entiers dépens en ce compris le coût du procès verbal d'huissier en date du 17 juin 2021. '
Ce jugement a été signifié le 8 décembre 2021 par Monsieur [W] [D] à Madame [Y] [D] épouse [N] .
Par déclaration reçue le 16 décembre 2021, Madame [Y] [D] épouse [N] a interjeté appel de cette décision en toutes ses dispositions.
Par ordonnance rendue le 24 décembre 2021 ,Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel d'Aix en Provence rejetait la requête aux fins d'appel à jour fixe présentée le 22 décembre 2021par Madame [Y] [D] épouse [N].
En application des dispositions des articles 905 et suivants du code de procédure civile, par ordonnance du 23 février 2022 , cette affaire a été fixée à bref délai à l'audience du 29 juin 2022 la clôture étant prévue au 1er juin 2022.
Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives déposées par voie électronique le 11 Mai 2022, Madame [Y] [D] épouse [N] demande à la cour de :
'DIRE ET JUGER recevable et bien fondé l'appel interjeté par Madame [N]
In limine litis
Vu l'article 16 du CPC
Vu l'article 649 et 117 du CPC
Vu les articles 377 et 378 du CPC
DIRE ET JUGER que le contradictoire n'a été respecté
DIRE ET JUGER nulle l'assignation du 21 juillet 2021 et partant le jugement du 25 novembre 2021
SURSOIR ( sic) à statuer dans l'attente de la décision définitive relative à la rétractation de l'ordonnance sur requête ayant autorisé le PV de constat du 21 juin 2021 enrôlé devant le Tribunal Judiciaire de Nice sous le numéro RG 21/02997
A titre principal,
REFORMER le jugement en date du 25 novembre 2021 en ce qu'il a :
- Ordonné la jonction des instances enrôlées sous les RG 21/1383 et 21/1554
- Désigné la SELARL [R] [C] en qualité de mandataire successoral à l'effet d'administrer provisoirement la succession de Madame [L] [V] épouse [D] et lui a conféré I ' autorisation d'effectuer l'ensemble des actes d'administration de la succession
- Dit que sa mission sera d'administrer provisoirement ladite succession et rappelé les dispositions des articles 813-4 du Code civil et leurs conséquences
- Dit que sa mission est d'une durée d'un an
- Dit que toute partie ou le mandataire peut saisir la juridiction selon la PAF en cas de difficulté
- Fixé à 3000 euros le montant de la provision à la charge de Monsieur [W] [D]
- Rappelé les dispositions des articles 815-3 et 1355 du Code Civil
- Dit que le mandataire devra rendre compte de sa mission et qu' il pourra solliciter le renouvellement de celle-ci sur simple requête
- Dit que la décision dont appel est exécutoire par provision
- Condamné Madame [D] épouse [N] à payer à Monsieur [W] [D] la somme de 1500 euros au Titre de I 'article 700 du CPC ainsi que CONDAMNE Madame [D] épouse [N] aux entiers dépens en ce compris le coût du Procès verbal d'huissier en date du 17.06.21
Et statuant à nouveau,
REFORMER la décision entreprise en ce qu'elle a condamné Madame [N] à payer le coût du PV de constat du 21 juin 2021
Vu l'article 813-1 du code civil
DIRE ET JUGER n'y avoir lieu à désignation d'un mandataire successoral
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse ou un mandataire successoral serait désigné
DESIGNER Me [E] , Notaire en charge des opérations de partage.
Dans tous les cas,
DEBOUTER Monsieur [D] de sa demande à voir mis à la charge de Madame [N] les frais de constat du 21 juin 2021
DEBOUTER Monsieur [D] de sa demande d'article 700 du CPC
CONDAMNER Monsieur [D] à payer à Madame [N] la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du CPC outre les entiers dépens. '
Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives déposées par voie électronique le 28 janvier 2022, Monsieur [W] [D] demande à la cour de :
'Vu le jugement rendu le 25 novembre 2021 par ie Tribunal Judiciaire de Nice
Vu les articles 813-1 du Code civil et 1380 du Code de procédure civile,
Vu la carence de Madame [N] à fournir les justificatifs de sa gestion et des dépenses engagées,
Vu la complexité à gérer l'immeuble du [Adresse 4],
Vu la mésentente des héritiers et l 'opposition d'intéréts,
Vu le constat d'huissier de Me [A] [H] dressé ie 17juin 2021,
Vu l' article 1241 du code civil,
CONFIRMER EN TOUTES SES DISPOSITIONS le Jugement rendu par le Tribunal
Judiciaire de Nice le 25 novembre 2021 en ce qu'il a notarnment :
- Désigné un mandataire successoral, avec la mission habituelle en pareil cas, et notamment à l'effet d'administrer provisoirement la succession de Mme [L] [V] épouse [D], décédée le 10 fevrier 1999 a [Localité 7]
-Condamné Madame [N] au paiement de la somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du CPC
-Condamné Madame [N] aux entiers depens de l'instance en ce compris le coût du Proces-verbal de constat dressé le 17 juin 2021 par Me [A] [H]
EN CAUSE D'APPEL,
DEBOUTER Madame [D] épouse [N] de sa demande tendant à voir designer Maitre [E] en qualite de mandataire successoral et de toutes ses autres demandes
CONDAMNER Madame [D] épouse [N] à payer à Monsieur [D] la somme de 15.000 € à titre de dommage et intérêts au visa de l'article 1241 du code civil pour procédure d'appel abusive
CONDAMNER Madame [D] épouse [N] à payer à Monsieur [D] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
CONDAMNER Madame [D] épouse [N] aux entiers dépens d'instance en cause d'appel.
La procédure a été clôturée le 1er juin 2022.
A l'audience du 29 juin 2022, cette procédure a fait l'objet d'un arrêt de radiation en application des dispositions des articles 912 et 381 du code de procédure civile.
Par placet de réenrôlement du 30 juin 2022, les parties ont demandé la réinscription au rôle de cette procédure.
Par avis du 19 août 2022 cette affaire a été fixée à nouveau à l'audience du 21 septembre 2022 à 14 H .
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'étendue de la saisine de la cour
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.
Il convient de rappeler qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, la Cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif.
Ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte', de sorte que la cour n'a pas à y répondre.
Par ailleurs l'effet dévolutif de l'appel implique que la Cour connaisse des faits survenus au cours de l'instance d'appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s'ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu'en cours d'instance d'appel.
Le jugement est critiqué dans son intégralité .
Sur le non respect du contradictoire invoqué par l'appelante:
Madame [Y] [D] épouse [N] soutient que le rejet de la demande de renvoi qu'elle a articulé via son conseil à l'audience du 21 Octobre 2021 s'analyse comme un non respect du principe du contradictoire , empêchant cette dernière de faire valoir ses arguments en défense.
Madame [Y] [D] épouse [N] se prévaut également de ce qu'elle n'était pas constituée sur la seconde assignation et qu'elle l'aurait découverte lors de l'audience.
Monsieur [W] [D] a signifié à Madame [Y] [D] épouse [N] une première assignation le 21 juillet 2021 ; cette assignation ne portant pas sur sa page de garde la mention de la date précise de sa signification même si le dernier feuillet était parfaitement clair sur la date de délivrance , il a donc fait délivrer, un mois plus tard , le 26 août 2021 , à sa soeur une seconde assignation strictement identique.
Il résulte des pièces versées au dossier que ces assignations strictement identiques et aux mêmes fins toutes les deux enrôlées pour le même jour d'audience , à savoir le 21 Octobre 2021 ont été signifiées à l'adresse de Madame [Y] [D] épouse [N] , [Adresse 3], la première ayant été remise à la personne de cette dernière et la seconde ayant fait l'objet d'une remise en l'étude de l'huissier.
Madame [Y] [D] épouse [N] était ainsi directement avisée de cette procédure, des demandes de son frère et de la date d'audience.
Monsieur [W] [D] justifie avoir adressé, par le truchement de son avocat, à son confrère adverse, par courriers officiels du 6 septembre 2021, l'ensemble des 60 pièces visées à son assignation , et par courrier du 21 septembre 2021 , rappelant l'état des procédures en cours et sollicitant une constitution officielle .
Madame [Y] [D] épouse [N] s'est constituée le 13 Octobre 2021 par RPVA .
Le conseil de Monsieur [W] [D] a procédé à la communication officielle de ses 60 pièces par RPVA le 14 Octobre 2021.
Par courriel du 19 Octobre 2021 , le conseil de Madame [Y] [D] épouse [N] indiquait au conseil de Monsieur [W] [D] solliciter un renvoi 'en l'état de la connexité des différentes procédures en cours.'
Par retour , Me PINEAU indiquait s'opposer à ce renvoi et précisait sa présence à l'audience afin de soutenir son opposition.
Il ressort de l'ensemble des pièces versées au dossier que l'appelante était parfaitement informée de l'existence de cette procédure et des demandes de son frère dès le 21 juillet 2021, date de la signification de l'assignation remise à sa personne, soit 3 mois avant l'audience.
La deuxième assignation était strictement identique à la première et signifiée en l'étude de l'huissier, ce que, au plus tard , Madame [Y] [D] épouse [N] a appris de son avocat constitué dans l'ensemble des procédures la concernant en l'état des courriers officiels des 6 et 21 Septembre.
Son même conseil a été destinataire de l'ensemble des pièces visées dans les deux assignations le 6 septembre 2021, soit un mois et demi avant l'audience.
Madame [Y] [D] épouse [N] s'est effectivement constituée dans le dossier RG n° 21/01383 correspondant à la première assignation du 21 juillet 2021 mais indique dans le corps même de sa constitution qu'elle se constitue sur l'assignation à elle signifiée le 26 août 2021, soit la seconde assignation , ce qui démontre bien qu'elle était parfaitement au courant des deux assignations à elles délivrées, strictement identiques dans leurs fins.
Dès lors, le premier juge a parfaitement respecté le principe du contradictoire en l'état de l'information totale par Madame [Y] [D] épouse [N] des demandes et pièces de son contradicteur et a souverainement décidé que la constitution tardive de Madame [Y] [D] épouse [N], une semaine avant l'audience n'était pas de nature à justifier un renvoi, vu les éléments dont cette dernière disposait et auxquels elle n'a pas cru bon de répondre dans les délais de la procédure en cours.
Par ailleurs, il convient de relever que la jonction des deux procédures appartient souverainement au juge en vertu des dispositions de l'article 367 du code de procédure civile et est une simple mesure d'administration judiciaire, non susceptible d'appel.
L'exception de nullité soulevée sera donc rejetée.
Sur la nullité de la procédure tirée de l'article 117 du code de procédure civile:
Madame [Y] [D] épouse [N] soutient que l'huissier de justice ayant procédé à la signification de l'assignation du 21 juillet 2021 , à savoir Me [A] [H] n'était plus huissier de justice à cette date, en vertu d'un arrêté du 30 juin 2021.
Aux termes de l'article 117 du code de procédure civile, constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l'acte ,... 'le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice. '
L'assignation délivrée le 21 juillet 2021 à Madame [Y] [D] épouse [N] l'a été par le truchement de Me [A] [H] , et a bien été délivrée au [Adresse 3] , contrairement à ce qu'affirme l'appelante dans ses conclusions.
En vertu des dispositions de l'article 2 du décret n° 88-814 du 12 juillet 1988, l'arrêté par lequel le garde des Sceaux , ministre de la justice , accepte la démission d'un officier public ou ministériel ne prend effet qu'à la date de la prestation de serment de son successeur ou à la date d'entrée en fonction du suppléant dans les conditions définies à l'article 3 du 29 février 1956 sus visé.
En l'espèce, Madame [Y] [D] épouse [N] ne produit aucune pièce , susceptible de justifier que Me [A] [H] n'était plus huissier de justice le 21 juillet 2021, se contentant d'évoquer un arrêté du 30 juin 2021, non versé.
La date de prestation de serment de son successeur Me [I] n'est pas plus justifiée aux débats.
Est produit le registre national du commerce et des sociétés faisant apparaître que la SELARL [J] [I] , exerçant la profession d'huissier de justice à Drap (06) a été immatriculée le 12 juillet 2021.
En tout état de cause , l'assignation délivrée le 26 Août par Me [I] annulait et remplaçait la précédente délivrée le 21 juillet 2021 de sorte que la nullité invoquée est sans objet quand bien même , les deux assignations ont été jointes par le Tribunal , rappelant en outre que le RG n'a valeur que de numéro d'enregistrement.
Il convient dès lors également de rejeter cette exception de nullité.
Sur la demande de SURSIS à STATUER :
Par requête en date du 14 juin 2021 , Monsieur [W] [D] sollicitait auprès du président du Tribunal Judiciaire de NICE la désignation d'un huissier de justice afin en substance de faire procéder à toutes constatations utiles quant à l'occupation réelle de l'immeuble du [Adresse 4] .
Par ordonnance sur pied de requête du même jour, Me [A] [H] était désignée en qualité d'huissier à cette fin.
Elle procédait à sa mission et établissait un constat en date du 17 juin 2021.
Par assignation en référé délivrée le 5 août 2021 à Monsieur [W] [D] , Madame [Y] [D] épouse [N] sollicitait la retractation de l'ordonnance rendue le 14 juin.
Par ordonnance de référé rendue le 13 janvier 2022, Madame [Y] [D] épouse [N] était déboutée de sa demande de rétractation, de sa demande tendant à l'interdiction de production et de citation du p-v de constat sus visé, et était condamnée à payer à Monsieur [W] [D] la somme de 4000 € à titre de dommages intérêts et celle de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens en ce compris les frais du constat d'huissier concerné.
Madame [Y] [D] épouse [N] a interjeté appel de cette décision, précisant que cet appel est enregistré sous le n° RG 22/01177 et a été fixé à l'audience du 14 février 2023.
Elle sollicite de voir ordonner le sursis à statuer dans cette affaire , dans l'attente qu'une décision définitive soit rendue quant à cette procédure de rétractation , estimant que l'argumentaire ayant abouti à la décision dont appel reposait sur le dit p-v de constat.
Aux termes de l'article 377 du code de procédure civile, en dehors des cas où la loi le prévoit, l'instance est suspendue par la décision qui sursoit à statuer, radie l'affaire ou odonne son retrait du rôle.
L'article 378 du même code dispose que la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine.
En l'espèce, contrairement à ce qu'affirme l'appelante dans ses conclusions, le premier juge ne s'est pas uniquement fondé, pour prendre sa décision sur le constat d'huissier du 17 juin 2021.
Après avoir rappelé les dispositions de l'article 813-1 du code civil , il a recherche dans l'intégralité des pièces du dossier versé si les conditions de cet article étaient réunies à savoir:'le juge peut désigner toute personne qualifiée physique ou morale , en qualité de mandataire successoral , à l'effet d'administrer provisoirement la succession en raison de l'inertie, de la carence, ou de la faiite d'un ou de plusieurs héritiers dans cette administration , de leur mésentente, d'une opposition d'intérêts entre eux , ou d ela complexité de la situation successorale. '
Il a à juste titre relevé les nombreuses procédures qui opposent les parties depuis plus de 20ans; les très nombreux documents et en particulier les grands livres de 2014 à 2019 qui portent mention de dépenses qui seraient à tort imputées à l'indivision et constitueraient en réalité des dépenses propres de Madame [Y] [D] épouse [N] .
Ainsi , et outre le procès verbal de constat d'huissier contesté , de nombreux pièces établissent à tout le moins la mésentente, l'opposition d'intérêts entre les parties et la complexite de la situation succesorale.
Le sursis à statuer sollicité et fondé sur la validité ou non de cette unique pièce qui n'a pas été la seule déterminante dans la décision dont appel ne se justifie donc pas.
Madame [Y] [D] épouse [N] doit être déboutée de cette demande.
Sur le fond et la désignation d'un mandataire successoral:
En application des dispositions de l'article 813-1alinéa 1 du code civil, 'le juge peut désigner toute personne qualifiée , physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l'effet d'administrer provisoirement la succession en raison de l'inertie, de la carence, ou d ela faute d'un ou d eplusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d'une opposition d'intérêts entre eux ou d ela complexité de la situation successorale.'
Il est incontestable au regard de ce qui vient d'être explicité que règne depuis de très nombreuses années une véritable mésentente entre les héritiers, une opposition d'intérêts entre eux et que la situation successorale est complexe en l'état d'un immeuble comprenant de nombreux lots lesquels, 22 ans après l'ouverture de la succession n'ont pu encore être évalués.
Dans ses motifs , l'ordonnance de référé du 13 janvier 2022 énonce que les constatations de l'huissier de justice confirment l'accaparement par [Y] [D] épouse [N] de la jouissance de quatre garages, et de deux appartements au profit de ses deux filles.
L'huissier a également constaté l'opposition très vive des membres de la famillle de [Y] [D] , opposition ayant nécessité l'intervention des forces de police.
Sans préjudicier de ce que pourra décider la Cour d'appel saisie de l'ordonnance de référé du 13 Janvier 2022 ayant débouté l'appelante de sa demande de rétractation de l'ordonnance du 14 juin 2021, les conditions de l'article 813-1 , rappelées par le premier jugement dont appel étaient bien réunies et c'est à juste titre qu'il a procédé à la désignation d'un mandataire successoral.
Le jugement doit être confirmé de ce chef.
Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande subsidaire de l'appelante de désigner Me [E] , Notaire au lieu et place de la Selarl [C].
Me [E] a été désignée selon une mission strictement définie dans le cadre du jugement du 8 décembre 2009 et relative aux opérations de liquidation -partage judiciaire de la succession. Il ne peut agir sans l'assentiment de tous les indivisaires.
Le mandataire successoral a une mission totalement différente, représentant la succession et la gérant. Il peut agir seul, en cas de carence d'un indivisaire.
La complexité de la situation successorale et l'inertie depuis plus de 20 ans quant aux opérations de partage conduit de maintenir chacun dans des missions bien spécifiées .
En conséquence, Madame [Y] [D] épouse [N] sera déboutée de sa demande et le jugement confirmé de ce chef.
En ce qui concerne le coût du constat d'huissier du 17 juin 2021, en application des dispositions de l'article 695 du code de procédure civile, s'agissant d'un huissier de justice désigné par décision de justice, c'est à juste titre que le premier juge l'a inclus dans les dépens.
Le jugement sera également confirmé de ce chef.
Sur la demande de dommages-intérêts :
L'article 1240 du code civil dispose que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.
L'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action ne peut constituer un abus de droit susceptible de donner lieu à dommages-intérêts que dans des circonstances particulières le rendant fautif , et notamment lorsqu'est caractérisée une intention malveillante ou une volonté de nuire de la part de celui qui l'exerce.
En l'espèce , alors même que Madame [Y] [D] épouse [N] reproche à son frère une véritable inertie dans la gestion de leur indivision, qu'elle articule à son encontre un grand nombre de reproches y compris financiers , qu'elle est à l'ordigine de nombre de procédures contre ce dernier ; qu'ainsi elle ne peut contester leur mésentente notoire ,la complexité de la situation , leurs contradictions d'intérêts , et donc la nécessité afin de parvenir à finaliser les opérations de partage, de la désignation d'un mandataire successoral, la présente procédure témoigne d'une résistance de nature abusive manifeste .
Il en résulte un préjudice distinct des frais de procédure qui justifie l'allocation de dommages intérêts à hauteur de 5000 € .
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement entrepris doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Madame [Y] [D] épouse [N] qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par le mandataire de l'intimé.
Monsieur [W] [D] a exposé des frais de défense complémentaires en cause d'appel ; il convient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile à son profit à hauteur de 5000 euros.
Sur l'amende civile:
L'article 32-1 du code civil énonce: ' celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 € sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.'
La cour relève que la procédure de succession dure depuis 22 ans et est toujours loin dêtre réglée et que son caractère conflictuel ne peut être contesté.
Nonobstant les instances pénales qui ont également opposé les parties et notamment l'arrêt de la Cour d'Appel d'Aix en Provence ayant confirmé la condamnation de [Y] [D] à 5000 € d'amende pour violences volontaires sur son père [T] [D] , faits commis le 19 Avril 1999, plus d'une dizaine de décisions ont été rendues par les instances civiles saisies de cette succession.
En l'espèce, [Y] [D] qui avait constitué avocat devant le premier juge mais s'est abstenu de conclure a interjeté appel dans le but manifeste de faire obstacle à des constatations objectives et nécessaires concernant un immeuble en indivision, alors que les conditions de l'article 813-1 qu'elle reconnaît elle même dans ses écritures, faisant état de 'l'inertie' de son frère sont avérées.
Ce comportement est abusif et justifie la condamnation de madame [Y] [D] épouse [N] à payer une amende civile d'un montant de 5000 €, sur le fondement des dispositions sus-citées.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Ecarte les exceptions de nullité soulevées,
Dit n'y avoir lieu à sursis à statuer,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Madame [Y] [D] épouse [N] à payer à Monsieur [W] [D] la somme de 5000 € à titre de dommages intérêts,
Condamne Madame [Y] [D] épouse [N] aux dépens d'appel ,
Condamne Madame [Y] [D] épouse [N] à verser à Monsieur [W] [D] une indemnité complémentaire de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame [Y] [D] épouse [N] à payer une amende civile d'un montant de 5000 €.
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame Michèle JAILLET, présidente, et par Madame Céline LITTERI, greffière, auxquelles la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
la greffière la présidente