COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 2-4
ARRÊT AU FOND
DU 19 OCTOBRE 2022
N° 2022/ 207
Rôle N° RG 21/09104 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHU7L
[F], [T], [B] [P] DIVORCÉE [C]
C/
[W] [C]
S.A.R.L. NIÇOISE D'HOTELLERIE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Frédéric KIEFFER
Me Sophie MORREEL-WEBER Me Nicole SARRAZIN-
[K]
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN en date du 23 Avril 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 20/04372.
APPELANTE
Madame [F], [T], [B] [P] divorcée [C]
née le 24 Avril 1968 à [Localité 4]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]
représentée et assistée par Me Frédéric KIEFFER de la SELARL KIEFFER - MONASSE & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE
INTIMES
Monsieur [W] [X], [L] [C]
né le 22 Juillet 1965 à [Localité 6], demeurant [Adresse 3]
représenté et assisté par Me Sophie MORREEL-WEBER de la SELARL LEX & CO AVOCATS, avocat au barreau de NICE
S.A.R.L. NIÇOISE D'HOTELLERIE, demeurant [Adresse 1]
représentée et assistée par Me Nicole SARRAZIN-BEGHAIN, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
PARTIE(S) INTERVENANTE(S)
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 14 Septembre 2022 en audience publique. Conformément à l'article 804 du code de procédure civile, Mme BOUTARD, Conseillère a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Michèle JAILLET, Présidente
Madame Nathalie BOUTARD, Conseillère
Madame Myriam GINOUX, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 19 Octobre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 19 Octobre 2022,
Signé par Madame Michèle JAILLET, Présidente et Madame Céline LITTERI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOS'' DU LITIGE
Mme [F] [P] et M. [W] [C] se sont mariés le 13 avril 1996, après avoir adopté le régime matrimonial de la séparation de biens.
Par acte du 31 décembre 1997, ils ont acquis en indivision, à hauteur de 50% chacun, un bien immobilier situé à [Localité 5] constituant la résidence familiale.
Par jugement du 21 novembre 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Draguignan a prononcé le divorce des époux et notamment fixé la date des effets du divorce au 02 février 2012 et ordonné la liquidation du régime matrimonial.
Les ex-époux n'ont pu parvenir à un accord amiable.
Par acte d'huissier en date du 03 janvier 2017, M. [W] [C] a assigné Mme [F] [P] devant le tribunal de grande instance de Draguignan aux fins de partage judiciaire et, préalablement à ce partage, de licitation du bien indivis.
Par jugement contradictoire du 31 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Draguignan a notamment ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation partage de l'indivision et la vente sur licitation du bien indivis à la barre du tribunal de grande instance, avec une mise à prix de 210 000 euros.
Le 26 mars 2019, Mme [F] [P] a interjeté appel de la décision.
Par ordonnance rendue le 04 septembre 2019 par le magistrat de la mise en état de la cour d'appel de céans, la déclaration d'appel de Mme [F] [P] a été déclaré caduque, en l'absence de conclusions dans le délai imposé par les textes.
Le 25 septembre 2020, le bien indivis a été acquis par adjudication par la SARL Niçoise d'hôtellerie au prix de 194 000 euros.
Aucune surenchère n'est intervenue dans le délai légal expirant le 05 octobre 2020.
Par déclaration au greffe du 07 octobre 2020, Mme [F] [P] a déclaré se substituer à la SARL Niçoise d'hôtellerie, déclaration contestée par l'adjudicataire le 16 octobre suivant.
Par jugement contradictoire du 23 avril 2021, auquel il convient de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, le juge chargé des ventes sur licitation du tribunal judiciaire de Draguignan a :
DECLARÉ nulle et non avenue la déclaration de substitution en date du 7 octobre 2020 et dénoncée le 9 octobre 2020 de Madame [F] [P];
CONDAMNÉ Madame [F] [P] aux dépens de la présente instance ;
CONDAMNÉ Madame [F] [P] à payer à la SARL NICOISE D'HOTELLERlE la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNÉ Madame [F] [P] à payer à Monsieur [W] [C] la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETÉ toute autre demande plus ample ou contraire.
Ce jugement a été signifié le 20 mai 2021.
Par déclaration reçue le 18 juin 2021, Mme [F] [P] a interjeté appel de cette décision.
Dans le dernier état de ses conclusions récapitulatives déposées par voie électronique le 14 juin 2022, Mme [F] [P] demande à la cour de :
Vu les articles 815-15, 815-16 et 1104 du code civil,
Vu les articles 12 et 12-1 du règlement intérieur national,
Vu l'article 27 du cahier des charges et conditions de la vente en matière de licitation,
Vu la théorie de l'abus de droit,
Vu les pièces versées aux débats,
Débouter Monsieur [W] [C] et la SARL NICOISE D'HOTELLERIE de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN le 23 avril 2021,
Et, statuant à nouveau,
Déclarer la déclaration de substitution formée par Madame [F] [P] le 7 octobre 2020 recevable et fondée,
Condamner Monsieur [W] [C] et la SARL NICOISE D'HOTELLERIE à payer à Madame [P] une somme de 2.000 euros aux titres des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Dans le dernier état de ses écritures récapitulatives transmises par voie électronique le 1er décembre 2021, M. [W] [C] sollicite de la cour de :
Vu le cahier des conditions de vente,
Vu les jugements du 31 janvier 2019 et du 13 avril 2021,
Vu l'article 815-15 du code civil et suivants,
CONFIRMER le jugement en toutes ses dispositions en ce qu'il a :
- déclaré nulle et non avenue la déclaration de substitution de Madame [P]
- condamné Madame [P] à payer à Monsieur [C] la somme de 1.500,00 € au titre de l'article 700 et des frais irrépétibles
DEBOUTER Madame [P] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions
RECONVENTIONNELLEMENT :
CONDAMNER Madame [P] à payer la somme de 6.000,00 € au titre de l'amende civile
CONDAMNER Madame [P] à payer à Monsieur [C] la somme de 10.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi
CONDAMNER Madame [P] à payer à Monsieur [C] la somme de 5.000,00 € au titre des frais irrépétibles d'appel outre les dépens d'appel.
Dans le dernier état de ses écritures récapitulatives transmises par voie électronique le 23 mai 2022, la SARL Niçoise d'hôtellerie sollicite de la cour de :
Débouter Madame [F] [P] de son appel.
Accueillir la S.A.R.L. NIÇOISE D'HÔTELLERIE en son appel incident et y faisant droit.
Confirmer le jugement rendu le 23 avril 2021 par le Tribunal Judiciaire de DRAGUIGNAN, dont appel, en ce qu'il a :
- Déclaré nulle et non avenue la déclaration de substitution en date du 7 octobre 2020 et dénoncée le 9 octobre 2020 de Madame [F] [P].
- Condamné Madame [F] [P] aux dépens de l'instance
Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :
- Débouté la S.A.R.L. NIÇOISE D'HÔTELLERIE de sa demande de dommages et intérêts.
Et statuant à nouveau de ces chefs :
Condamner Madame [F] [P] à payer à la S.A.R.L. NIÇOISE D'HÔTELLERIE la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts pour préjudice moral et professionnel, et ce par application de l'article 1240 du Code Civil.
Y ajoutant :
Condamner Madame [F] [P] à payer à la S.A.R.L. NIÇOISE D'HÔTELLERIE la somme de 24 000 euros à titre d'indemnité de privation de jouissance, outre la somme de 5 000 euros de frais de remise en état de l'immeuble pour le vendre.
La condamner en outre à payer à la S.A.R.L. NIÇOISE D'HOTELLERIE la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner Madame [F] [P] aux dépens distraits au profit de Maître Nicole SARRAZIN-BÉGHAIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
La procédure a été clôturée le 29 juin 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux conclusions récapitulatives régulièrement déposées.
Sur l'étendue de la saisine de la cour
Il convient de rappeler que :
- en application de l'article 954 du code de procédure civile, la Cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif,
- l'article 9 du code de procédure civile dispose qu''il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention' et que l'article 954 du même code, dans son alinéa 1er, impose notamment aux parties de formuler expressément ses prétentions et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune des prétentions est fondée 'avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et leur numérotation,
- ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte', de sorte que la cour n'a pas à statuer.
Il n'y a pas lieu de reprendre ni d'écarter dans le dispositif du présent arrêt les demandes tendant à 'constater que' ou 'dire que ' telles que figurant dans le dispositif des conclusions des parties, lesquelles portent sur des moyens ou éléments de fait relevant des motifs et non des chefs de décision devant figurer dans la partie exécutoire de l'arrêt.
Les demandes de 'donner acte' sont dépourvues de tout enjeu juridique et ne constituent pas des prétentions au succès desquels les parties pourraient avoir un intérêt légitime à agir au sens de l'article 4 du code de procédure civile.
Par ailleurs l'effet dévolutif de l'appel implique que la Cour connaisse des faits survenus au cours de l'instance d'appel et depuis le jugement déféré et statue sur tous les éléments qui lui sont produits même s'ils ne se sont révélés à la connaissance des parties qu'en cours d'instance d'appel.
Toutes les dispositions du jugement entrepris qui ne sont pas contestées par les parties sont devenues définitives.
Le jugement est critiqué dans son intégralité.
Sur la déclaration de substitution de Mme [F] [P]
L'article 815-15 du code civil dispose que 's'il y a lieu à l'adjudication de tout ou partie des droits d'un indivisaire dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens, l'avocat ou le notaire doit en informer les indivisaires par notification un mois avant la date prévue pour la vente. Chaque indivisaire peut se substituer à l'acquéreur dans un délai d'un mois à compter de l'adjudication, par déclaration au greffe ou auprès du notaire.
Le cahier des conditions de vente établi en vue de la vente doit faire mention des droits de substitution'.
Dans le cahier des charges et conditions de vente applicable à une licitation rédigé par le conseil national des barreaux, une clause type figurant à l'article 27 sous la chapitre V 'clauses spécifiques' stipule qu' 'en cas de vente de droits indivis, comme en cas de licitation de biens indivis avec l'accord de tous les indivisaires ou à défaut de contestation de la présente clause, chaque indivisaire peut se substituer à l'acquéreur dans un délai d'un mois à compter de l'adjudication par déclaration au greffe du tribunal ayant constaté la vente'.
Pour déclarer nulle et non avenue la déclaration de substitution effectuée par Mme [F] [P], le premier juge a relevé que figurait expressément en page 6 du cahier des conditions de vente déposé le 21 juillet 2020 par l'avocat, après avoir rappelé que l'article 815-15 du code civil ne trouvait pas application, la mention 'il n'est donc pas prévu de droit de substitution au profit du co-indivisaire dans le cadre de la présente vente' et qu'en l'absence d'accord entre les ex-époux, la clause 27 des dispositions générales ne pouvait s'appliquer.
* sur les dispositions textuelles
Au soutien de l'infirmation du jugement, l'appelante fait valoir en substance que le tribunal a fait une mauvaise interprétation des articles 815-15 et 815-16 du code civil et de la validité de la clause d'exclusion, visant la réforme du règlement intérieur national de la profession d'avocat du 13 février 2019 ayant modifié les clauses types des cahiers relatifs à la licitation s'imposant aux avocats.
Selon elle, les dispositions du code civil ne s'appliquent qu'en cas d'adjudication d'une quote-part indivise et les clauses types s'imposent aux avocats ; en conséquence, la substitution était possible.
La cour relève d'ores et déjà que l'appelante ne vise aucune des 18 pièces figurant dans le dernier bordereau de pièces communiqué au soutien de son moyen, contrairement à l'obligation qui lui en est faite par les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile ci-dessus rappelées et qu'elle ne produit que deux pages du cahier des conditions de la vente (pages 6 et 7 sur 8), sans joindre le cahier des charges et conditions de vente rédigé par le conseil national des barreaux.
Subsidiairement, l'appelante vise la théorie de l'abus de droit pour faire constater la nullité de la clause particulière excluant les dispositions de l'article 27, aucune des conditions visées dans l'article 12-1 des clauses générales du cahier des conditions de vente national n'étant en l'espèce remplies.
M. [W] [C] soutient essentiellement que le droit de substitution de l'article 815-5 du code civil ne s'applique pas lorsque la licitation porte sur un bien indivis lui-même, mais uniquement lorsqu'elle porte sur des droits d'un co-indivisaire, que l' accord requis par l'article 27 n'est jamais intervenu entre les ex-époux et qu'il appartenait à l'appelante de contester l'insertion de la clause d'exclusion de la substitution.
La Sarl Niçoise d'hôtellerie, après avoir souligné que sa contestation de substitution a été validée par le jugement entrepris, indique que le tribunal a parfaitement appliqué les textes, que la demande de substitution n'est qu'une manoeuvre dilatoire et qu'ayant fait échec à tout accord amiable, l'appelante s'exposait à une vente judiciaire.
Le cahier des conditions applicable à la vente [C]/[P] applicable au seul lot du bien immobilier précise expressément en page 6, dans le paragraphe 'droits de substitution' que 'les articles 815-15 et 815-169 du code civil ne trouvent pas en l'espèce application dans la mesure où l'adjudication concerne exclusivement le seul bien immobilier de l'indivision existant entre Monsieur [W], [X], [L] [C] et Madame [F], [T], [B] [P] non, comme le vise les deux textes sus rappelés 'tout ou partie des droits d'un indivisaire dans les biens indivis ou dans plusieurs de ces biens'.
Il n'est donc pas prévu de droit de substitution au profit du co-indivisaire dans le cadre de la présente vente sur licitation et en l'absence d'accord des indivisaires, l'article 27 des 'dispositions générales' du cahier des charges et conditions de vente n'est donc pas applicable'.
Il n'est pas contestable que l'objet de la licitation tel que défini par l'autorisation judiciaire est un bien immobilier constituant un seul lot, et non des droits de l'un des ex-époux indivisaires dans ce bien.
La jurisprudence en vigueur de la Cour de Cassation rappelle le principe de la non-application de cet article en cas d'adjudication des biens indivis eux-mêmes, même si rien n'interdit de la prévoir, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.
Les dispositions figurant dans le cahier respectent donc les textes en vigueur, en ce compris le règlement intérieur national et l'article 27 sus-visé qui n'évoquent que 'la vente des droits indivis ou la licitation de biens indivis avec l'accord de tous les indivisaires ou à défaut de contestation de la présente clause, ...'.
L'article 27 visé par l'appelante est un principe général inclus dans le cahier des conditions de la vente par adjudication, vise bien la licitation d'un bien indivis avec l'accord entre les parties.
En l'espèce, aucun accord n'est intervenu entre les parties, et les nombreuses procédures judiciaires relatives à la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux caractérisent l'ancrage dans un environnement conflictuel depuis le prononcé du divorce.
Les éléments portés à la connaissance de la cour, notamment un message électronique en date du 09 janvier 2018, permettent d'établir que si les ex-époux étaient d'accord pour que l'appelante rachète les parts de l'intimé, en revanche aucun accord n'est jamais intervenu entre eux sur le prix. M. [W] [C], se basant sur une valeur du bien de 260 000 €, réclamait 130 000€, aucune réponse de Mme [F] [P] n'étant portée à la connaissance de la cour.
Il appartenait à Mme [F] [P], qui était parfaitement informée depuis le jugement rendu contradictoirement le 31 janvier 2019 de la licitation et de ses conditions, et qui a toujours été assistée d'un conseil, de se renseigner sur les documents afférents à cette vente judiciaire.
Le jugement entrepris a donc juste titre décidé que la substitution à laquelle elle a procédé le 07 octobre 2020 est nulle et non avenue.
En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé.
* Sur la théorie de l'abus de droit
A titre subsidiaire, l'appelante invoque aux fins de voir prononcer la nullité de la clause particulière excluant les dispositions de l'article 27 la théorie de l'abus de droit en l'absence de situation particulière et de motivation du choix d'exclure la faculté de substitution.
Mme [F] [P], qui souligne l'intention de nuire de M. [W] [C], assure que sa démarche s'inscrit dans une volonté de conserver le bien au sein de la famille afin de le transmettre ultérieurement aux trois enfants du couple.
M. [W] [C] fait valoir que le droit de substitution n'a pas à être motivé et la mauvaise foi de son ex-épouse ayant refusé de se voir attribuer le bien indivis mais souhaitant acquérir le bien à un prix inférieur à son estimation, soit 300 000 euros.
La SARL Niçoise d'hôtellerie souligne que l'appelante doit assumer les conséquences de ces actes, nul ne pouvant alléguer sa propre turpitude.
Mme [F] [P] ne prouve pas le caractère altruiste de son action, n'établissant pas la volonté des enfants de vivre dans ce bien. Au contraire, M. [L] [C], l'un des enfants du couplese déclare, dans une attestation rédigée le 03 octobre 2020, totalement désintéressé dudit bien et ne pas en vouloir.
De même, son moyen selon lequel elle reproche à son ex-époux d'avoir fait délivrer une citation d'assister à l'adjudication à une mauvaise adresse est inopérant en ce qu'elle était parfaitement informée de la vente judiciaire à venir, le jugement rendu le 09 janvier 2019 étant contradictoire, qu'elle a toujours été assistée par un conseil et que la sommation n'est pas un acte de procédure nécessaire à la validité de la procédure de licitation.
Enfin, l'appelante souhaitant récupérer le bien indivis au moindre prix, la substitution qu'elle opère revient à contourner le rachat des droits de son ex-époux à un prix nettement inférieur à celui estimé au cours des opérations de liquidation du régime matrimonial à une somme comprise entre 250 000 et 300 000 euros.
Reconnaissant dans ses écritures avoir eu connaissance de la date de l'audience d'adjudication 'fin août, début septembre', l'appelante ne justifie pas d'un empêchement d'y assister et d'enchérir afin de se porter acquéreur du bien.
L'appelante n'ayant pas démontré la théorie de l'abus de droit qu'elle invoque, elle sera déboutée de sa demande.
Sur l'amende civile
M. [W] [C] sollicite pour la première fois en cause d'appel la condamnation de l'appelante sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile.
Cet article dispose que 'celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés', l'article 559 du même code visant la procédure en appel.
La cour rappelle que les articles ci-dessus ne peuvent être mis en oeuvre que de la propre initiative de la juridiction saisie, les parties ne pouvant avoir aucun intérêt moral au prononcé d'une amende civile à l'encontre de l'adversaire.
En conséquence, M. [W] [C] doit être débouté de sa demande.
Sur la demande de dommages-intérêts
L'article 1240 du code civil dispose que 'tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.
* demande de M. [W] [C] :
Au soutien de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de 10 000 euros en réparation du préjudice moral invoqué formulée pour la première fois en cause d'appel, M. [W] [C] produit une attestation de son médecin traitant.
Le médecin indique que 'l'intéressée' a des douleurs multifocales (épaule droite, lombaires) et 'un état anxieux chronique réactionnel'.
La lecture de ce document ne permet pas d'établir un lien certain entre le comportement de l'appelante et l'état anxieux réactionnel.
En conséquence, M. [W] [C] doit être débouté de sa demande de dommages-intérêts.
* demande de la SARL Niçoise d'hôtellerie :
La société sollicite l'infirmation du jugement ayant rejeté sa demande d'indemnisation.
Elle fait valoir essentiellement que depuis l'adjudication, l'immeuble n'a pas été entretenu, qu'elle n' pu jouir de l'intégralité de ses droits sur le bien et qu'elle a perdu deux acheteurs potentiels de l'immeuble en octobre 2020.
Le jugement a débouté la société de sa demande en raison de la non-justification des préjudices allégués, 'la production d'attestations aux termes desquelles des acheteurs potentiels du bien confirment leur volonté d'acquérir étant insuffisante à ce titre'.
En cause d'appel, la société produit les mêmes attestations.
L'attestation de Mme [J], qui ne joint de surcroît aucun document bancaire certifiant le financement, et celle de M. [I] ne constituent en aucun cas des offres fermes d'achat du bien, à un prix déterminé, permettant de caractériser un préjudice.
C'est donc à juste titre que le premier juge a débouté la société de sa demande, non justifiée.
Le jugement entrepris doit être confirmé.
Sur la demande de la SARL Niçoise d'hôtellerie fondée sur la privation de la jouissance et la remise en état du bien
La société réclame une indemnité d'un montant total de 29 000 euros.
Les documents produits au soutien de cette demande sont liés à la propriété du bien (droits d'enregistrement du jugement d'adjudication, taxes foncières, courrier de la compagnie d'assurances sans indication du montant de la prime), et non à sa jouissance de sorte que le préjudice invoqué n'est pas établi.
La remise en état de l'immeuble n'est pas plus prouvée.
En conséquence, il convient de débouter la SARL Niçoise d'hôtellerie de ce chef de demande.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le jugement entrepris doit être confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Mme [F] [P] qui succombe doit être condamnée aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par le mandataire de la SARL Niçoise d'hôtellerie, de sorte qu'il n'y a pas lieu à statuer sur sa demande de recouvrement direct et qu'il sera débouté de sa demande de remboursement de frais irrépétibles.
M. [W] [C] a exposé des frais de défense complémentaires en cause d'appel ; il convient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile à son profit à hauteur de 5 000 euros.
La SARL Niçoise d'hôtellerie a exposé des frais de défense complémentaires en cause d'appel ; il convient de faire application de l'article 700 du code de procédure civile à son profit à hauteur de 5 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Déboute Mme [F] [P] de sa demande fondée sur la théorie de l'abus de droit,
Déboute M. [W] [C] de sa demande de condamnation de Mme [F] [P] à une amende civile,
Déboute M. [W] [C] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral,
Déboute la SARL Niçoise d'hôtellerie de sa demande d'indemnisation fondée sur la privation de jouissance et les frais de remise en état de l'immeuble,
Condamne Mme [F] [P] aux dépens d'appel, qui seront recouvrés par Me Nicole Sarrazin-Béghain, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Déboute Mme [F] [P] de sa demande de remboursement de ses frais irrépétibles,
Condamne Mme [F] [P] à verser à M. [W] [C] une indemnité complémentaire de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [F] [P] à verser à la SARL Niçoise d'hôtellerie une indemnité complémentaire de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
Signé par Madame Michèle JAILLET, présidente, et par Madame Céline LITTERI, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
la greffière la présidente