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13/10/2022 | FRANCE | N°20/01564

France | France, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 3-4, 13 octobre 2022, 20/01564


COUR D'APPEL

D'AIX-EN-PROVENCE

[Adresse 3]

[Localité 1]









Chambre 3-4

N° RG 20/01564 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFRC2

Ordonnance n° 2022/M199





Mme [Y] [W] veuve [M]

Représentée par Me Myriam DUBURCQ de la SCP DONNET - DUBURCQ, avocat au barreau de GRASSE



Appelante





SARL GARAGE SAINT CHARLES

Représentée par Me Maurice DUMAS LAIROLLE de la SCP DUMAS LAIROLLE - ROUSSEL, avocat au barreau de GRASSE



Intimée





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ORDONNANCE D'INCIDENT

du 13 octobre 2022





Nous, Laure BOURREL, magistrat de la mise en état de la Chambre 3-4 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, assistée de Valérie VIOLET, Greffier,



Après débats ...

COUR D'APPEL

D'AIX-EN-PROVENCE

[Adresse 3]

[Localité 1]

Chambre 3-4

N° RG 20/01564 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFRC2

Ordonnance n° 2022/M199

Mme [Y] [W] veuve [M]

Représentée par Me Myriam DUBURCQ de la SCP DONNET - DUBURCQ, avocat au barreau de GRASSE

Appelante

SARL GARAGE SAINT CHARLES

Représentée par Me Maurice DUMAS LAIROLLE de la SCP DUMAS LAIROLLE - ROUSSEL, avocat au barreau de GRASSE

Intimée

ORDONNANCE D'INCIDENT

du 13 octobre 2022

Nous, Laure BOURREL, magistrat de la mise en état de la Chambre 3-4 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, assistée de Valérie VIOLET, Greffier,

Après débats à l'audience du 07 Septembre 2022, ayant indiqué à cette occasion aux parties que l'incident était mis en délibéré, avons rendu le 13 octobre 2022, l'ordonnance suivante :

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon convention du 25 janvier 2002, Monsieur [J] [M] et son épouse Madame [Y] [W] ont consenti à Monsieur [G] [C] un bail commercial sur des locaux situés sur la commune [Localité 4] au rez-de-chaussée d'un immeuble situé [Adresse 2], à destination de réparation automobile, pour une durée de 9 ans, avec effet du 1er décembre 2001 au 30 novembre 2010.

Monsieur [J] [M] est décédé (date non précisée) et Madame [Y] veuve [M] est devenue usufruitière du bien immeuble objet du bail commercial, et leur fille unique, Madame [T] [M] épouse [X] nue- propriétaire.

Selon un document intitulé « Information du bailleur » daté du 20 juillet 2007, à la demande de Monsieur [C], Madame [Y] [M] en sa qualité de propriétaire des locaux objet du bail a déclaré avoir été informée par Monsieur [G] [C] de son intention de procéder à la cession de son fonds de commerce de garage automobile à Monsieur [F] [U], avoir été appelée à la signature de l'acte de cession et consentir expressément ladite cession, faire immédiatement une opposition pour le montant de tous les loyers ou charges qui resteraient dues, et demander que ladite cession lui soit signifiée aux frais du cessionnaire conformément aux dispositions de l'article 1690 du Code civil.

Monsieur [G] [C] a cédé son fonds artisanal le 10 septembre 2017 à la SARL Garage Saint-Charles dont le gérant et unique associé est Monsieur [F] [U].

Plusieurs procédures ont opposé les parties à propos du paiement des loyers et des charges.

Le 20 décembre 2018, Madame [Y] [M] a fait délivrer à l'EURL Garage Saint-Charles un commandement de payer la somme en principal de 8920,52 € au titre des loyers et charges impayés, en visant la clause résolutoire contenue au contrat de bail.

Par exploit du 23 janvier 2019, la SARL Garage Saint-Charles a fait assigner Madame [Y] [M] devant le tribunal de grande instance de Grasse en contestation du commandement de payer. Madame [Y] [M] n'a pas été assignée à son adresse en Floride (USA) mais à l'adresse de l'huissier qu'elle avait mandaté pour délivrer le commandement de payer.

Par jugement du 27 mai 2019, réputé contradictoire en l'absence de l'intimée, le tribunal de grande instance de Grasse a :

-déclaré irrecevable la SARL Garage Saint-Charles en sa demande de condamnation de Madame [M] à lui délivrer les quittances des loyers payés depuis le 1er janvier 2014,

-dit que le décompte annexé au commandement de payer du 20 décembre 2018 est erroné et que ledit commandement ne peut en conséquence entraînée la résolution du bail,

-condamné Madame [Y] [W] épouse [M] à payer à la SARL Garage Saint-Charles la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-laissé les dépens à la charge de Madame [Y] [W] épouse [M].

Madame [Y] [W] épouse [M] a relevé appel de cette décision par déclaration du 31 janvier 2020.

Par conclusions d'incident du 21 avril 2020, Madame [Y] [W] épouse [M] a sollicité que soit prononcée la nullité de l'acte introductif d'instance et la nullité subséquente du jugement déféré, et subsidiairement l'irrecevabilité des demandes de la SARL Garage Saint Charles. Par ordonnance d'incident du 5 novembre 2020, le magistrat de la mise en état a déclaré irrecevables les demandes de Madame [Y] [W] épouse [M] au motif que le magistrat de la mise en état n'était pas compétent, a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et a dit que les dépens suivront ceux du fond.

Par conclusions d'incident du 28 septembre 2021, reprises dans ses ultimes écritures d'incident du 1er juillet 2022, auxquelles il convient de se référer, la SARL Garage Saint Charles demande au magistrat de la mise en état :

« Vu les article 122 et 910-4 du code de procédure civile,

Vu les conclusions signifiées les 21 avril 2020 et 4 février 2021,

Déclarer irrecevable la demande de Madame [M] en paiement de loyers et en résiliation judiciaire du bail pour défaut de qualité à agir, faute par elle de produire son titre de propriété.

Déclarer irrecevable la demande de Madame [M] de condamnation de la société Garage Saint Charles à constituer une caution bancaire qui n'était formulée ni dans sa déclaration d'appel ni dans ses conclusions d'appel.

Condamner Madame [M] au paiement des entiers dépens de l'incident.

Condamner Madame [M] à payer à la société Garage Saint Charles la somme de 3000 € au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre du présent incident par application de l'article 700 du code de procédure civile. »

Par conclusions d'incident du 21 mars 2022, qui sont tenues pour entièrement reprises, Madame [Y] [W] épouse [M] demande au magistrat de la mise en état :

« En vertu des dispositions des article 122, 910-4, 74 et 789 du code de procédure civile,

Débouter la SARL Garage Saint Charles de son incident malicieux tendant à voir Madame [M] déclarer irrecevable en sa demande en paiement de ses créances locatives et en résiliation judiciaire du bail.

Condamner la SARL Garage Saint Charles à verser à Madame [M] une provision de la somme de 15 600 € avec constitution d'une garantie d'exécution, l'existence de l'obligation n'étant pas sérieusement contestable.

Condamner la SARL Garage Saint Charles aux entiers dépens de l'incident. »

MOTIFS

L'article 907 du code de procédure civile renvoie à l'article 789 du même code lequel définit la compétence du juge de la mise en état. Cet article, ainsi applicable au conseiller de la mise en état, édicte à son alinéa 1, que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :

'

3° accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l'exécution de sa décision à la constitution d'une garantie dans les conditions prévues aux articles 514-5, 517 et 518 à 522,

'

6° statuer sur les fins de non-recevoir.

Cependant, par application de l'article 55-II modifié, les dispositions des 3° et 6° de l'article 789 dans sa rédaction issue du décret n° 2019- 1333 du 11 décembre 2019, sont applicables aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020.

En premier lieu, la SARL Garage Saint-Charles sollicite que soit prononcée l'irrecevabilité des demandes de Madame [M] pour défaut de qualité à agir pour ne pas avoir produit son titre de propriété.

Par application des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile, le moyen de défaut de qualité à agir opposé à l'autre partie est une fin de non-recevoir.

D'une part, l'instance ayant été introduite le 23 janvier 2019, les dispositions de l'article 789 du code de procédure civile issues du décret du 11 décembre 2019 ne sont pas applicables.

D'autre part, le conseiller de la mise en état ne peut connaître ni des fins de non-recevoir qui ont été tranchées par le juge de la mise en état, ou par le tribunal, ni de celles, bien que n'ayant pas été tranchées en première instance, auraient pour conséquence, si elles étaient accueillies, de remettre en cause ce qui a été jugé au fond par le premier juge.

La demande de la SARL Saint-Charles tendant à ce que soit prononcée l'irrecevabilité des demandes de Madame [M] pour défaut de qualité à agir est irrecevable devant le magistrat de la mise en état.

En second lieu, la SARL Garage Saint-Charles sollicite sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile, que la demande de Madame [M] sollicitant la condamnation de la concluante à constituer une caution bancaire soit déclarée irrecevable pour avoir été présentée pour la première fois dans ses écritures du 4 février 2021.

Cependant, la compétence du conseiller de la mise en état est définie par l'article 907 du code de procédure civile déjà évoqué, et par l'article 914 du même code.

Aucun de ces articles ne prévoit que le conseiller de la mise en état est compétent pour déclarer irrecevables les écritures qui ne respecteraient pas les dispositions de l'article 910-4 du même code. Dans la mesure où seule la Cour peut définir l'étendue de sa saisine, il est cohérent que le magistrat de la mise en état ne soit pas compétent pour apprécier la recevabilité des demandes d'une des parties.

La demande de la SARL Garage Saint-Charles tendant à ce que soit prononcée l'irrecevabilité de la demande de Madame [M] sollicitant la condamnation de l'intimé à constituer une caution bancaire est irrecevable devant le magistrat de la mise en état.

En troisième lieu, Madame [Y] [M] sollicite à l'occasion de cet incident que la SARL Garage Saint-Charles soit condamnée à lui verser une provision de 15 600 € avec constitution d'une garantie d'exécution, au motif que l'existence de l'obligation ne serait pas sérieusement contestable.

D'une part, les dispositions de l'article 789 3°du code de procédure civile issues du décret du 11 décembre 2019 ne sont pas applicables à l'espèce. S'applique l'article 771 du même code dans sa rédaction antérieure audit décret du 11 décembre 2019, qui énonce que lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état et, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour :

'

3. Accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Le juge de la mise en état peut subordonner l'exécution de sa décision à la constitution d'une garantie dans les conditions prévues aux articles 517 à 522.

Il suit de là que Madame [M] est recevable à solliciter une provision devant le magistrat de la mise en état.

Néanmoins, compte tenu de la décision déférée qui a déclaré que le décompte annexé au commandement de payer du 20 décembre 2018 était erroné, sa demande au titre de la dette locative ne peut être qualifiée de non sérieusement contestable.

Madame [M] est déboutée de sa demande de provision.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens de l'incident suivront les dépens du fond.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance contradictoire,

Déclarons irrecevable la demande de la SARL Garage Saint-Charles tendant à ce que soit prononcée l'irrecevabilité des demandes de Madame [M] pour défaut de qualité à agir,

Déclarons irrecevable la demande de la SARL Garage Saint-Charles tendant à ce que soit prononcée l'irrecevabilité de la demande de Madame [M] sollicitant la condamnation de l'intimé à constituer une caution bancaire,

Déboutons Madame [Y] [W] épouse [M] de sa demande de provision,

Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Disons que les dépens de l'incident suivront les dépens du fond.

Le greffier Le magistrat de la mise en état

Copie délivrée aux avocats des parties ce jour.

Le greffier


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Formation : Chambre 3-4
Numéro d'arrêt : 20/01564
Date de la décision : 13/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-13;20.01564 ?
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