COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 06 OCTOBRE 2022
N° 2022/632
N° RG 21/09137 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BHVBT
[T], [Y] [V]
C/
[U] [I] épouse [H]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me PRATTICO
Me DE VILLEPIN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l'exécution de [Localité 3] en date du 26 Janvier 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 19/05771.
APPELANT
Monsieur [T], [Y] [V]
né le 13 Juillet 1976 à [Localité 3] ([Localité 3]), demeurant [Adresse 1]
comparant, assisté par Me Sabrina PRATTICO, avocat au barreau de TOULON, plaidant
INTIMEE
Madame [U] [I] épouse [H]
Signification DA + CCL le 23/09/2021
née le 30 Novembre 1946 à BOURGES (18), demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Etienne DE VILLEPIN, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, substituée par Me Laura PETITET, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Evelyne THOMASSIN, Président, qui a fait un rapport oral à l'audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller (rédactrice)
Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVALLEE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Octobre 2022
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Ingrid LAVALLEE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [U] [I] épouse [H] a présenté le 9 octobre 2018 une requête aux fins de saisie des rémunérations de M. [T] [V], en vertu d'un jugement réputé contradictoire rendu en dernier ressort le 6 janvier 2015 par la juridiction de proximité de Toulon qui a condamné M. [V] à lui payer la somme de 3600 euros au titre d'une reconnaissance de dette datée du 30 avril 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 10 avril 2014 ainsi qu'une indemnité de 450 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
Sur contestation élevée par M.[V], déniant être l'auteur de la reconnaissance de dette du 30 avril 2013, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Toulon par jugement du 26 janvier 2021 a :
' débouté Mme [H] de sa demande d'expertise graphologique ;
' débouté M.[V] de sa demande de vérification d'écritures ;
' débouté les parties de leur demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' les a condamnées aux dépens partagés par moitié entre eux.
M.[V] qui n'a pas retiré la lettre recommandée avec avis de réception, datée du 18 février 2021, portant notification par le greffe dudit jugement dont il n'est pas justifié qu'il lui a été signifié par Mme [H], en a interjeté appel par déclaration du 19 juin 2021.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 24 avril 2022 l'appelant demande à la cour :
- de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté M.[V] de sa demande d'expertise graphologique aux frais avancés de Mme [H] ;
- débouté M. [V] de sa demande de vérification d'écriture,
- débouté M. [V] de sa demande de condamnation de Mme [H] au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [V] à la moitié des dépens ;
A titre principal :
Vu l'article 144 du code de procédure civile ;
- ordonner une expertise graphologique aux frais avancés de Mme [H] ;
A titre subsidiaire :
Vu les articles 287 et 288 du code de procédure civile,
- procéder à la vérification d'écriture ;
En tout état de cause :
- déclarer Mme [H] irrecevable en application du principe de l'estoppel, en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
- l'en débouter en conséquence ;
- la condamner au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et à la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Sabrina Prattico, avocat au Barreau de Toulon sur son affirmation de droit.
A l'appui de ses demandes M. [V] fait valoir pour l'essentiel qu'il n'est pas le rédacteur de la reconnaissance de dette du 30 avril 2013 qui a motivé sa condamnation, et qu'il a déposé au mois de mai 2019 une plainte pour faux et usage de faux, en cours d'examen.
Il soutient qu'en vertu des articles 144 et 593 du code de procédure civile il a un intérêt légitime à solliciter une mesure d'expertise en écritures qui lui ouvrirait la voie d'un recours en révision et précise que la Cour de cassation par arrêt du 11 février 2010 a jugé, au visa de l'article 288 du code de procédure civile, qu'il appartient au juge de l'exécution, saisi d'une contestation de signature des actes de prêt par le débiteur, de vérifier les actes contestés, éventuellement en enjoignant au débiteur de produire tout document de comparaison lui paraissant nécessaire, documents qu'il produit au soutien de sa contestation.
Il souligne qu'en contradiction avec la position qu'elle avait exprimée auprès de la juridiction de premier degré, devant laquelle elle sollicitait une mesure d'expertise graphologique, Mme [H] à hauteur de cour requiert à titre principal, la confirmation du jugement alors même qu'il a écarté sa demande d'expertise à laquelle lui même avait acquiescé. Il soutient que cette violation de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui doit être sanctionnée par une fin de non-recevoir emportant irrecevabilité des demandes de Mme [H].
Par écritures notifiées le 21 octobre 2021 celle-ci demande à la cour de :
- confirmer purement et simplement le jugement querellé,
- débouter M. [V] de ses demandes fins et conclusions,
À titre subsidiaire,
Vu l'article 144 du code de procédure civile, et les pièces versées au débat,
- désigner, à charge de l'appelant, tel expert judiciaire pour vérification graphologique de la reconnaissance de dette querellée avec mission habituelle en pareille matière,
- condamner monsieur [T] [V] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu' aux entiers dépens.
A cet effet, s'appropriant les motifs du premier juge, elle indique que la mesure d'instruction ne relève pas des compétences du juge de l'exécution, en l'état d'un titre exécutoire définitif que ce magistrat ne peut remettre en cause.
Elle ajoute qu'il en est de même de la vérification d'écriture sollicitée, dont le résultat à supposer qu'elle soit ordonnée, n'aurait pas d'incidence sur la compétence du juge de l'exécution et la force exécutoire du titre définitif.
Ce n'est qu'à titre subsidiaire et se disant certaine de sa position et du fait que M. [V] est le rédacteur, qu'elle propose l'instauration d'une mesure d'instruction avant dire droit, afin que la juridiction puisse définitivement trancher le litige.
L'instruction de l'affaire a été clôturée par ordonnance du 26 avril 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Bien que l'acte de signification du jugement du 6 janvier 2015 ne soit pas communiqué devant la cour il résulte des termes, non contestés, du jugement entrepris que cette décision a été signifiée à M. [V] le 1er juillet 2015 et suivant les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, ainsi qu'il ressort également des mentions portées au commandement aux fins de saisie vente qui lui a été délivré le 7 décembre 2015 à la requête de Mme [H].
Les demandes de mesure d'instruction et de vérification d'écritures se heurtent à l'autorité de la chose jugée par jugement du 30 avril 2013 et aux dispositions de l'article R.121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution qui font interdiction au juge de l'exécution et à la cour statuant sur l'appel de sa décision, de modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites.
Et le moyen tiré de l'intérêt légitime de M. [V] à voir ordonner une mesure d'instruction judiciaire en vue d'un recours en révision du titre exécutoire est parfaitement inopérant devant le juge de l'exécution et la cour statuant avec ses pouvoirs.
Enfin l'arrêt rendu le 11 février 2010 par la Cour de cassation, dont se prévaut l'appelant n'est pas transposable à l'espèce, puisque concernant un acte de prêt sous seing privé dans le cadre d'une procédure de surendettement, et non une décision judiciaire de condamnation déjà acquise.
Il s'en suit la confirmation du jugement déféré.
D'autre part, l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui ne peut être sanctionnée par une fin de non recevoir qu'à condition que la contradiction soit constitutive d'une faute caractérisée pour manquement à la bonne foi ou abus de droit, non démontré en l'espèce, Mme [H] ayant, sans faute, fait siens les motifs du premier juge, adoptés par la cour, pour solliciter à titre principal la confirmation du jugement entrepris qui l'a déboutée de sa demande d'expertise, qu'elle sollicite par ailleurs à titre subsidiaire.
L'appelant sera en conséquence débouté de sa demande tendant à voir déclarer l'intimée irrecevable.
Le sort des dépens et des frais irrépétibles a été exactement réglé par le premier juge.
Succombant dans son appel M. [V] supportera les dépens d'appel et sera tenu d'indemniser l'intimée de ses frais irrépétibles d'appel à hauteur de la somme réclamée.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant après en voir délibéré conformément à la loi, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
CONDAMNE M. [T] [V] à payer à Mme [U] [I] épouse [H] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE les autres demandes ;
CONDAMNE M. [T] [V] aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE