COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 22 SEPTEMBRE 2022
N° 2022/ 605
MATIÈRE GRACIEUSE
Rôle N° RG 22/02609 -N° Portalis DBVB-V-B7G-BI4ZD
Société CAISSE REGIONALE NORMANDE DE FINANCEMENT
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Virginie ROSENFELD
Notification à l'appelante
par LRAR le 22.09.22
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du Juge de l'exécution de NICE en date du 07 Février 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/00003.
APPELANTE
Société CAISSE RÉGIONALE NORMANDE DE FINANCEMENT, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]
représentée par Me Virginie ROSENFELD de la SCP CABINET ROSENFELD & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
MINISTÈRE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
Vu les dispositions du décret n° 2015-282 du 11 Mars 2015 permettant, en matière gracieuse de se prononcer sans débats préalables,
L'avocat de l'appelante a déposé son dossier et le Ministère Public a transmis ses observations,
L'avocat de l'appelante a été avisé le 23 juin 2022 que son appel ne ferait pas l'objet de débats à l'audience et que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 septembre 2022,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE:
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Madame Sophie TARIN-TESTOT, Conseiller
ARRÊT
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Mme Josiane BOMEA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits, procédure et prétentions des parties :
La Caisse Régionale Normande de Financement, ci après désignée la NORFI a consenti selon acte notarié du 22 août 2006 à monsieur et madame [V], un prêt de 304 900 € destiné à l'acquisition en VEFA de deux appartements à usage locatif, situés [Adresse 3] que les emprunteurs ont cessé de rembourser au cours de l'année 2009, provoquant la déchéance du terme.
S'affirmant créancière d'une somme de 476 807,68 € selon décompte établi le 5 février 2021, elle a sollicité sur le fondement de l'article L511-1 du code des procédures civiles d'exécution, l'autorisation de prendre une inscription d'hypothèque provisoire sur les biens des époux [V] situés :
- lieudit [Adresse 4],
[Adresse 1].
Le juge de l'exécution de Nice, le 7 février 2022, a rejeté la requête admettant le principe de créance mais écartant la réalité de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement au motif de l'ancienneté du financement qui date de 2006 et d'une procédure pendante devant le tribunal judiciaire de Marseille, suite à une assignation du 23 décembre 2009.
Il est ici précisé que cette assignation dirigée à l'encontre de la NORFI mais également d'autres établissements financiers et des notaires (RG 10-588) vise à l'annulation des déchéances du terme intervenues, la suspension des procédures de saisies et la condamnation des défendeurs ainsi cités par les époux [V], à prendre à charge une partie de leur endettement. Concernant la NORFI les époux [V] sollicitent dans l'acte introductif précité, condamnation à hauteur de 263 610 € correspondant à 87 % du montant des actes authentiques signés. Une ordonnance de sursis à statuer a été rendue par le juge de la mise en état de Marseille, le 4 novembre 2010, jusqu'à ce qu'une décision pénale définitive soit prononcée suite à l'information ouverte sur ce dossier devant le juge d'instruction de Marseille.
Par mention du 17 février 2022 à la suite de l'appel formé par la NORFI, le juge de l'exécution de Nice a refusé de rétracter sa décision et le dossier a donc été transmis à la cour d'appel.
L'appelant souligne que la situation de surendettement dans son importance, était ignorée de l'établissement financier et que la NORFI n'a jamais été mise en cause ni en examen de sorte qu'il ne peut être indiqué que la responsabilité des banques est engagée. Elle expose que les conditions de l'article L511-1 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies car aucun paiement n'est intervenu depuis la mise en demeure, la dette grossit régulièrement, les époux [V], ce qu'elle n'a découvert que par la suite, se sont considérablement endettés et leur situation n'est plus du tout celle décrite au moment du prêt, de sorte que le péril pour le recouvrement est caractérisé. Bien que disposant d'un titre exécutoire sur lequel la jurisprudence de la Cour de cassation a beaucoup évolué depuis 2012 en validant les actes notariés dépourvus d'annexe, afin d'éviter toute contestation sur la disqualification du titre, elle opte pour la procédure de l'article L511-1 du code des procédures civiles d'exécution.
Le Ministère public auquel le dossier a été communiqué a pris des conclusions le 3 juin 2022 pour soutenir la confirmation de la décision de première instance. Il retient que le contrat a été souscrit dans des conditions financières très discutables, dans le cadre d'un dossier plus vaste dénommé 'Apollonia' ayant un aspect pénal dans lequel la responsabilité des banques est mise en cause.
MOTIVATION DE LA DÉCISION :
L'article L511-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que toute personne dont la créance parait fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement.
La mise en oeuvre de ce texte exige donc une double démonstration probatoire, d'une part, un principe de créance, d'autre part, des circonstances établissant une menace de non recouvrement.
La société appelante aborde cependant dans ses écrits, le fait qu'elle dispose déjà d'un titre exécutoire à l'encontre du débiteur, préférant, afin d'éviter toute contestation de ce dernier, obtenir une autorisation préalable de prendre une garantie réelle. Ce faisant elle évoque implicitement, les dispositions de l'article L511-2 du code des procédures civiles d'exécution, qui énonce qu'une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre exécutoire ou d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire.
Il lui revient cependant de s'inscrire dans le cadre juridique qui est adapté. Le fait de fonder sa requête sur un article inapplicable à l'espèce, l'article L511-1 du code des procédures civiles d'exécution, puisqu'elle se prévaut d'un acte notarié, titre exécutoire, ne pouvant quoiqu'elle en pense, éviter si les époux [V] l'estiment opportun, une contestation ultérieure des conditions dans lesquelles l'inscription d'hypothèque aura été prise. La jurisprudence dont elle se prévaut et qu'elle communique, rendue au bénéfice de la Lyonnaise de Banque s'inscrit d'ailleurs dans la mise en oeuvre de l'article L511-2 du code des procédures civiles d'exécution.
En conséquence de quoi, l'autorisation judiciaire préalable étant inutile, la NORFI sera déboutée de sa demande et la décision de première instance confirmée mais sur d'autres motifs.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant par décision en matière gracieuse,
CONFIRME l'ordonnance déférée,
LAISSE les dépens d'appel à la charge de la Caisse Régionale Normande de Financement.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE