COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 22 SEPTEMBRE 2022
N° 2022/ 228
Rôle N° RG 22/01112 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BIX2S
SCI G POMPIDOU
C/
[E] [T]
Société MAYOL
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me ERMMENEUX
Me BELLON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 19 Janvier 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 2019J217.
APPELANTE
SCI G POMPIDOU
Immatriculée au R.C.S. de TOULON sous le numéro 815 059 209,
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
Dont le siège social est sis, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [E] [T]
Demeurant [Adresse 3]
Agissant en sa qualité de Liquidateur Judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de TOULON sous le numéro B 822 371 159
Dont le siège social se trouve situé [Adresse 6]
[Adresse 5],
représenté par Me Jean-baptiste BELLON, avocat au barreau de TOULON
SNC MAYOL
Immatriculée au R.C.S. de TOULON sous le numéro 342 117 033,
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
Dont le siège social est [Adresse 7]
[Localité 4]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Juin 2022 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Laure BOURREL, Président
Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller
Madame Florence ALQUIE-VUILLOZ, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Rime GHORZI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Septembre 2022,
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Rime GHORZI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Faits, procédure, prétentions et moyens
La SCI G. POMPIDOU est propriétaire dans le Centre Commercial MAYOL à [Localité 8], d'un local commercial d'une superficie de 855 mètres carrés.
Ce local est mitoyen avec un local d'une superficie de 418m2, constituant le lot n°[Cadastre 1] de l'ensemble immobilier, appartenant à la SNC MAYOL, laquelle est à l'origine de la construction du Centre Mayol dans les années 1990, et qui est restée propriétaire d'un certain nombre de lots.
Par acte sous-seing privé en date du 5 août 2016, la SCI G POMPIDOU a donné à bail commercial à la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, son local commercial de 855m2 pour l'exploitation d'une salle de fitness, moyennant un loyer annuel de 112.860€ HT.
L'article 23 dudit bail indiquait l'existence d'une négociation en cours relative à l'acquisition du local adjacent de 418m2 appartenant à la SNC MAYOL.
Postérieurement à l'entrée dans les lieux, la locataire a percé le mur mitoyen entre les deux lots, et réalisé des travaux d'aménagement dans le lot appartenant à la SNC MAYOL pour y exploiter sa salle de fitness.
Dans le courant de l'année 2018 la SNC MAYOL a assigné la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT devant le Président du Tribunal de Grande Instance de Toulon en référé aux fins d'expulsion de celle-ci et de condamnation à paiement d'une indemnité d'occupation. Par ordonnance du 8 janvier 2019 le Président du Tribunal de Grande Instance de [Localité 8] a débouté la SNC MAYOL de sa demande d'expulsion, tout en condamnant la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle de 4.884 euros à compter du 1er septembre 2016.
Par acte d'huissier en date du 12 mars 2019 la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT a assigné son bailleur, la SCI G. POMPIDOU, ainsi que la SNC MAYOL, devant le Tribunal de Commerce de [Localité 8], aux fins notamment de voir dire et juger que l'article 23 du contrat de bail commercial s'analyse en une jouissance anticipée des locaux accordée à la société [Localité 8] CENTRE SPORT dans l'attente de la mutation parfaitement légale, de dire et juger qu'en application de la théorie de l'apparence et en raison de sa bonne foi la société [Localité 8] CENTRE SPORT n'est pas occupante sans droit ni titre pour la parcelle numéro [Cadastre 1], et de constater que l'exploitation de la salle de fitness par la société [Localité 8] CENTRE SPORT est publique, notoire et ne pouvait être ignoré parla SNC MAYOL qui possède encore des lots dans le centre commercial. Elle demandait donc de dire qu'elle n'est pas redevable d'une indemnité d'occupation à la SNC MAYOL et la condamnation de la SCI G. POMPIDOU et de la SNC MAYOL chacune au paiement d'une somme de 50.000€ en réparation du préjudice subi.
En cours d'instance, par jugement en date du 30 avril 2019, le Tribunal de Commerce de [Localité 8] a ouvert à l'encontre de la société [Localité 8] CENTRE SPORT une procédure de redressement judiciaire et a désigné Me [E] [T] en qualité de mandataire Judiciaire.
Puis par jugement en date du 28 juillet 2020, le Tribunal de Commerce a converti le redressement judiciaire en liquidation Judiciaire et a désigné Me [E] [T] en qualité de liquidateur judiciaire.
Par exploit d'huissier en date du 18 février 2021, la SNC MAYOL a dénoncé la procédure initiée par la société [Localité 8] CENTRE SPORT au liquidateur en application de l'article L641-9 I du Code de Commerce.
Par conclusions du 17 mars 2021 Me [E] [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT a soulevé une exception d'incompétence du Tribunal de Commerce au profit du Tribunal Judiciaire de [Localité 8] au motif que les différentes demandes formulées initialement par la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT à l'encontre de la SCI G. POMPIDOU et de la SNC MAYOL découlent de l'application du bail commercial consenti par la SCI G. POMPIDOU à la société en liquidation de telle sorte que le litige relève de la compétence exclusive du Tribunal Judiciaire en application de l'article R.211-4 I du code de l'organisation judiciaire.
Les défenderesses se sont opposées à cette demande.
Par jugement en date du 19 janvier 2022, le Tribunal de commerce de Toulon, a joint les instances en cours, dit qu'il n'est pas compétent pour juger cette affaire, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, et en conséquence, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal judiciaire de Toulon et a débouté les parties de leurs prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile. L'exécution provisoire a été ordonnée et les dépens laissés à la charge de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT.
Le Tribunal de Commerce a considéré que le litige était relatif à l'exécution du bail commercial liant la SCI G. POMPIDOU et la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT et que Maître [T] intervenant en cours d'instance en qualité de liquidateur judiciaire de cette SAS pouvait soulever cette exception d'incompétence, bien que ce soit son administrée qui ait engagé l'action initialement.
La SCI G. POMPIDOU a interjeté appel par déclaration en date du 25 janvier 2022.
Par ordonnance du 27 janvier 2022 le Président de la chambre 3-4 autorisé par le Premier Président, saisi par requête de l'appelante sur le fondement des articles 84 et 85 du code de procédure civile, a autorisé l'appelante à assigner les intimés à jour fixe pour l'audience du 21 juin 2022.
Cette ordonnance a été signifiée avec la déclaration d'appel et les conclusions d'appelant aux intimés par acte des 8 et 9 février 2022.
Par conclusions récapitulatives notifiées et déposées par RPVA le 13 mai 2022 et signifiées par acte d'huissier du 18 mai 2022 à la SNC MAYOL, la SCI G. POMPIDOU demande, au visa de l'article L641-9 I du Code de Commerce et les articles 75 et suivants et l'article 122 du code de procédure civile de :
- Recevoir la SCI G POMPIDOU en son appel et la déclarer bien fondée en ses prétentions ;
- Réformer en toutes ses dispositions le jugement querellé en ce qu'il a dit :
- joint les instances n° 2019 J217 et 2021J96;
- dit qu'il n'est pas compétent pour juger de cette affaire ;
- dit qu'il n'y a pas matière à application de l'article 700 du Code de procédure civile;
En conséquence,
- se déclare incompétent au profit du Tribunal judiciaire de [Localité 8] ;
- déboute les parties de leurs prétentions au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
- dit qu'en vertu des dispositions de l'article 80 et des articles suivants du Code de procédure civile, la présente instance est susceptible d'appel dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision ;
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement nonobstant appel et sans caution;
- passe les dépens ( ...) en frais de procédure de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT;
Et statuant à nouveau,
- débouter Me [E] [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT de sa demande d'exception d'incompétence car tant irrecevable qu'infondée;
- déclarer le Tribunal de Commerce de TOULON compétent
- renvoyer l'affaire devant le Tribunal de Commerce de [Localité 8] pour qu'il soit statué au fond ;
En tout état de cause,
- rejeter toutes fins moyens et conclusions contraires ;
- condamner Me [E] [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SAS [Localité 8] CENTRE SPORT à payer la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile tant de première instance que d'appel,
- Passer les entiers dépens de l'instance en frais privilégiés de la procédure collective.
A l'appui de ses demandes la SCI G. POMPIDOU soutient que Me [E] [T] intervient dans la présente instance ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, demanderesse à l'instance, que de ce fait même s'il a été attrait postérieurement à la délivrance de l'assignation il doit être considéré comme demandeur à la procédure engagée par son administrée, qu'une exception d'incompétence constitue une exception de procédure elle-même classée au rang des moyens de défense de telle sorte que le demandeur est irrecevable à contester la compétence de la juridiction qu'il a lui-même saisie.
Par ailleurs elle soutient que même si elle a bien été assignée en sa qualité de bailleresse par sa locataire, les prétentions de celle-ci ne sont pas relatives à l'application des dispositions spécifiques du statut des baux commerciaux contenus aux articles L.145-1 à L.145-60 du code de commerce, et que seules ces prétentions relèvent de la compétence exclusive du Tribunal Judiciaire au visa des dispositions de l'article R.211-4 I du code de l'organisation judiciaire. Elle prétend que la demanderesse invoquait à l'appui de ses prétentions l'article 1721 du code civil et la garantie du bailleur envers le locataire pour les vices affectant la chose louée, ce qui ressort du droit commun du contrat de louage et non du statut spécifique des baux commerciaux, et qu'en tout état de cause le bail a été résilié par le juge commissaire par ordonnance du 6 octobre 2020. Elle rappelle que le Tribunal de Commerce reste compétent pour tous les litiges qui ne relèvent pas de l'application stricte du statut des baux commerciaux et de ses règles d'ordre public, ce qui est le cas en l'espèce. Elle prétend donc que le Tribunal de Commerce est bien
compétent pour statuer sur le litige engagé par la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT.
Elle s'oppose également à la demande subsidiaire présentée par le liquidateur fondée sur la connexité entre la présente instance et une autre action engagée devant le Tribunal Judiciaire par la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT à son encontre ainsi qu'à l'encontre de la société AGERIS IMMOBILIER (Mandataire immobilier de la société G POMPIDOU) et de son gérant (pour une faute détachable des fonctions), ainsi qu'à l'encontre des associés de la SCI G POMPIDOU dans laquelle elle demande à titre principal la nullité du bail commercial pour dol, et à titre subsidiaire sa résiliation pour manquement par le bailleur à son obligation de délivrance, ainsi que l'octroi de diverses sommes, au motif que les demandes ne sont pas les mêmes, de même que les parties, et que le litige a été finalement déjà été tranché par le Tribunal Judiciaire.
Par conclusions signifiées et déposées le 25 avril 2022, Me [E] [T] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT demande de :
VU les articles R 211-4 I, 2° et R.211-3-26 du Code de l'Organisation judiciaire,
VU l'article 101 du Code de procédure civile,
A titre préliminaire
- déclarer Maître [E] [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, recevable et bien-fondé dans ses écritures d'appel, ainsi que dans ses différentes demandes,
A titre principal
- constater, dire et juger que les différentes demandes formulées initialement par la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT à l'encontre de la SCI G.POMPIDOU et la SNC MAYOL découlent de l'application du bail commercial consenti par la SCI G POMPIDOU à la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT par acte sous seing-privé en date du 5 août 2016,
- confirmer en conséquence le jugement entrepris du Tribunal de Commerce de [Localité 8] en date du 19 janvier 2022, en tous ses chefs de dispositifs querellés par la SCI G POMPIDOU, et notamment en ce qu'il a :
«JOINT les instances n°20191217 et 2021196,
DIT qu'il n'est pas compétent pour juger cette affaire :
DIT qu'il n'y a pas matière à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
En conséquence,
SE DECLARE incompétent au profit du tribunal judiciaire de [Localité 8] ;
DEBOUTE les parties de leurs prétentions au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
DIT qu'en vertu des dispositions de l'article 80 et des articles suivants du code de procédure civile, la présente instance est susceptible d'appel dans le délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision ;
PASSE les entiers dépens liquidés ( ...) en frais de procédure de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT '.
A titre subsidiaire, et pour le cas où par extraordinaire votre juridiction ne confirmerait pas le jugement entrepris,
- constater, dire et juger qu'il existe, en application des dispositions de l'article 101 du Code de procédure civile, entre les affaires enrôlées par devant le Tribunal de commerce de TOULON sous le numéro RG 2019100217, et par devant la Première Chambre du Tribunal judiciaire de TOULON, enrôlée sous le numéro RG 20/022461 (joint avec le numéro RG 20/03516), un lien tel qu'il est de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble,
- ordonner en conséquence le dessaisissement du Tribunal de commerce de [Localité 8] au bénéfice de la Première Chambre du Tribunal judiciaire de [Localité 8],
- renvoyer subséquemment l'examen de la présente affaire par devant le Tribunal judiciaire de TOULON en l'état de la connaissance de l'affaire enrôlée par devant cette juridiction sous le numéro RG 20/022461 (joint avec le numéro RG 20/03516).
EN toute hypothèse :
- condamner la SCI G POMPIDOU à payer à Maître [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, la somme de 10.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'à supporter les entiers dépens de l'instance, dont ceux d'appel distraits au profit de Maître Jean-Baptiste BELLON, Avocat à la Cour, sur son affirmation de droit.
Le liquidateur soutient que l'action initialement diligentée par la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, à l'encontre de la SCI G POMPIDOU et de la SNC MAYOL devant le Tribunal de Commerce, est une action découlant de l'application du bail commercial consenti par la SCI G POMPIDOU à la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, par acte sous-seing privé en date du 5 août 2016, que dès lors seul le Tribunal judiciaire de TOULON est compétent pour statuer sur toutes les demandes découlant de la conclusion et de l'exécution du bail commercial susvisé en application de l'article R.211-3-26 du code de l'organisation judiciaire.
A titre subsidiaire il soulève la connexité de cette affaire avec une autre pendante devant le Tribunal de Grande Instance dans laquelle il est demandé à titre principal de prononcer la nullité du bail commercial, et à titre subsidiaire sa résolution pour manquement du bailleur à son obligation de délivrance.
Assignée régulièrement à personne habitlitée à recevoir l'acte, la SNC MAYOL n'a pas constitué avocat.
L'affaire a été plaidée à l'audience du 21 juin 2022.
Motifs de la décision
Sur l'exception d'incompétence
L'article L.641-9 I du Code de Commerce relatif aux effets de la liquidation judiciaire dispose que:
" Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.
Toutefois, le débiteur peut se constituer partie civile dans le but d'établir la culpabilité de l'auteur d'un crime ou d'un délit dont il serait victime.
Le débiteur accomplit également les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ou de l'administrateur lorsqu'il en a été désigné."
Si cet article oblige le liquidateur à intervenir ou à être attrait dans toute procédure dans laquelle le débiteur objet de la liquidation est partie du fait du dessaisissement, l'exercice des droits et actions appartenant au débiteur se limite aux droits de ce dernier, sans que le liquidateur ne puisse avoir plus de droits que le débiteur pour lequel il exerce sa mission de liquidateur.
Dès lors Maître [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, assigné en intervention forcée du fait de la liquidation judiciaire de celle-ci, reprend pour le compte de son administrée la présente procédure engagée par celle-ci, et se retrouve donc en position de demandeur à l'instance.
Or ainsi que le soulève à juste titre l'appelante, les exceptions d'incompétence sont prévues au code de procédure civile aux articles 75 et suivants, dans le titre 5 intitulé ' Des moyens de défense'. Une telle exception constitue donc un moyen de défense relatif à une question de procédure.
Il est incontestable que le demandeur à l'instance est irrecevable à soulever une exception d'incompétence territoriale de la juridiction qu'il a lui-même saisie.
Même s'il est attrait en cours de procédure par intervention forcée suite au prononcé de la liquidation judiciaire, le liquidateur ne peut donc soulever une exception d'incompétence de la procédure qu'il reprend et dans laquelle il a la position de demandeur à l'instance.
Dès lors cette exception d'incompétence est irrecevable.
Le jugement est infirmé.
Sur l'exception de connexité
A titre subsidiaire Maître [T], ès qualités de liquidateur judiciaire soulève une exception de connexité avec une autre procédure engagée par la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT à l'encontre de la SCI G POMPIDOU sa bailleresse d'une part, du mandataire immobilier de la SCI, du gérant de la SCI et de ses associés d'autre part, aux fins de prononcer la nullité du bail commercial, à titre subsidiaire la résolution du bail, et en tout état de cause l'indemnisation de son préjudice. Cette procédure a été engagée par assignation du 19 juin 2020.
Cependant tout comme l'exception d'incompétence, l'exception de connexité prévue à l'article 101 du code de procédure civile est un moyen de défense, de telle sorte que le demandeur à l'instance est irrecevable à soulever cette exception pour demander que la juridiction qu'il a saisi se dessaisisse au profit d'une autre juridiction qu'il a également saisi postérieurement.
L'exception soulevée par Maître [T], ès qualités de liquidateur judiciaire est déclarée irrecevable.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les dépens afférents au jugement querellé et à l'instance d'appel seront passés en frais privilégiés de la procédure collective.
Il convient de dire n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à ce stade de la procédure.
Par ces motifs
La cour statuant publiquement, contradictoirement
Infirme le jugement du Tribunal de Commerce de [Localité 8] du 19 janvier 2022, sauf en ce qu'il a ordonné la jonction des instances n° 2019 J217 et 2021J96;
Déclare irrecevable l'exception de compétence soulevée par Maître [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, demandeur à l'instance;
Déclare irrecevable l'exception de connexité soulevée par Maître [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS [Localité 8] CENTRE SPORT, demandeur à l'instance;
Renvoie l'affaire devant le Tribunal de Commerce de Toulon pour qu'il soit statué au fond;
Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
Dit que les dépens afférents au jugement querellé et à l'instance d'appel seront passés en frais privilégiés de la procédure collective.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT